VI

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  Bruine entra dans un grand hall. Elle fit signe à ses hommes de sécuriser le rez-de-chaussé et s’avança directement vers l’escalier. Anaximandre la suivit. Il y avait un grand couloir dans lequel elle s’avança, bouclier en avant. Un éclat rouge brilla au fond, suivit quelques secondes plus tard d’un immense jet de feu. Bruine fit un geste vers le garde qui les suivait avec son tonneau. L’eau s’éleva et vint étouffer les flammes dans une profusion de vapeur. Le garde, son tonneau désormais vide, recula. La protectrice avança.

  — À la mort !

  Les Crânes déferlèrent sur Bruine. Elle maintint son bouclier devant elle, jouant de l’épée pour blesser et repousser ses assaillants. Des gardes ne tardèrent pas à la rejoindre. Ils formèrent un mur de bouclier qui occupa facilement la largeur du couloir et avancèrent. Leurs ennemis reculèrent. Le mage, quant à lui, repoussait les sorts visant Bruine. La petite troupe avançait, enjambant les corps gémissant de Crânes blessés. Au seuil de la pièce d’où ils étaient sortis, Anaximandre les arrêta.

  — Je m’occupe de leur mage, dit-il.

  Il s’avança, son bâton pointé devant lui. C’était un grand salon, éclairé par de larges fenêtres. Des tapis colorés habillaient le parquet. Un bureau trônait au fond de la pièce, devant une bibliothèque pleine d’ouvrages anciens. Là se tenait un homme qu’Anaximandre reconnu aussitôt.

  — Tu me déçois, Dregan, dit-il.

  — Je vous retourne le compliment, maître.

  Bruine et ses gardes entrèrent. L’un s’avança, une paire de menottes à la main.

  Dregan sourit. D’un claquement de doigts, il créa un champ de force qui sépara la pièce en deux. La troupe d’un côté, lui et le garde aux menottes de l’autre. Il prit un livre posé sur son bureau et l’ouvrit. Anaximandre reconnu, même sans pouvoir les lire, les runes démoniaques sur la couverture de cuir beige. Il tenta de briser la barrière, en vain. Le garde isolé dégaina son épée, il s’élança vers son ennemi. Celui-ci tendit le bras.

  — ẖůƙɳoꞧꞧ !

  Le garde s’effondra, un trou béant au centre du torse.

  — C’est à votre tour d’observer, maître. D’observer et d’apprendre.

  D’une voix gutturale, il lu une incantation de son livre :


  O oƙÿᶎ ḓåɳäg ȶoƙƙoḓᶎɳoꞧꞧ ẖȫƙä ḓůḓ

  O Lucifer, ɠꞧåƙäɠ ḓåɳäg ɠꞧåȶƙäɠɳoꞧꞧ

  O Lucifer ḓäᶎ tokůƙƙäɠ ȶoƙȫɠr ẖȫƙä ḓůḓ


  Chaque mot de cette langue impie heurtait l’esprit comme un coup de poing. Bien qu’ils ne puissent en comprendre la signification, tous étaient terrifiés par celle-ci.

  Le corps du garde lévitait, son sang s’écoulait vers le haut, formant ce qui prenaient peu à peu la forme d’un anneau carmin en lévitation. Anaximandre échouait à briser le champ de force. En désespoir de cause, il posa sa main dessus. La surface semblait étonnamment solide, froide comme le serait une plaque de métal, et tout aussi impénétrable. Il reconnu ce sort, une simple amélioration de celui qu’apprenaient les étudiants de la Tour Errante, en réalité. Aucun contre-sort ne pourrait en venir à bout, mais il savait comment le briser. Posant ses lèvres contre la surface, il murmura :

  — Je suis un vieux bouc ; lève le bouclier.

  Et dans un tintement de cristal, la barrière disparu. Bruine se jeta aussitôt sur Dregan. Surpris, celui-ci amortit le coup d’épée circulaire qu’elle lui destinait à l’aide de son livre. Le corps du garde retomba au sol, le sang éclaboussa jusqu’aux murs. Les pages arrachées retombèrent mollement sur le sol. Dregan les regarda, abasourdi. Bruine posa la pointe de son épée contre la gorge de celui-ci.

  — Essaie de me tuer. Lance encore un sort, un seul, et ta tête roulera dans le sang que tu as répandu.

  Le mage la fusilla du regard. Puis, d’un coup, il sembla s’adoucir.

  — Bruine de Rivetendre, je sais que je ne vous tuerais pas. Cet honneur reviendra à l’un de mes maîtres. J’espère tellement être là, lorsque cela arrivera.

  Anaximandre leva d’un coup la main. Celle de Dregan fusa vers l’arrière, laissant s’échapper une dague.

  — Assez ! dit-il. Dregan de Yew, tu es une honte pour moi qui t’ai enseigné la magie.

  — Vous décevoir est un honneur.

  Le mage leva son bâton sur le visage de son ancien élève. Il psalmodia quelques mots. Dregan se débattit, mais les gardes s’étaient approchés et le maintenaient contre sa bibliothèque.

  — Vous ne les aurez pas, grogna-t-il. Ḥůƙ ꞧƙÿɠƙäɠ ȶoƙɠaᶍȶ !

  Il s’écroula en avant. Les gardes l’allongèrent. Il respirait toujours, mais semblait endormit. Anaximandre essaya de le réveiller, en vain.

  — Il s’est détruit l’esprit, pesta-t-il. Il a préféré cela plutôt que je ne lui vole ses souvenirs. Je suis désolé.

  — Fouillez le bâtiment ! ordonna Bruine.

  Laissant là le corps inerte de Dregan, les gardes sortirent de la pièce.

  — Vous avez fait votre possible, poursuivit-elle. Je vous en remercie. De toute façon, nous n’aurions probablement rien pu tirer de lui en l’interrogeant. Pourrez-vous nous apprendre des choses sur lui ? Qu’est-ce que ce livre ?

  — Je ne suis pas un expert en démonologie, mais j’en connais une. Je vais l’appeler dès ce soir, elle saura quoi faire. Je connais également celui qui a inventé le champ de force de tout à l’heure. Je vais devoir avoir une conversation avec lui.

  — Bien, je vous fais confiance.

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