11 mars l'an 39

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Le 11 mars de l'an 39 et les cris providentiels d'une Azeroth sauvée de la corruption. Le berceau de l'Hiver, accompagné d'un vent glacial et d'un voile neigeux, plongeant l'immensité d'un paradis blanc à plus de cinq mètres par delà les ténèbres. Le déchaînement frigorifiant déferlant contre les quatre murs de la demeure Dunerêve, la tempête ne semblait pas pour autant effrayer le coeur d'Irrÿs, bien que trop noyé d'inquiétude. Celesna, où es-tu... es-tu seulement encore en vie. J'aimerai le croire... j'ai envie d'y croire, avoir confiance... au delà de toute nos promesses, tu te devais de revenir auprès de moi. Son front contre le carreau, transformant un souffle chaud en condensation, la demi-elfe ne pouvait qu'espérer.

Une silhouette. Les branches des arbres dansant comme les feuilles au gré du vent. Dans la poitrine d'une bâtarde condamnée, naissait un fracas dément. Les paupières closes, l'obscurité la gagnait peu à peu. Bien pire que les souffrances que pouvais faire endurer les dieux très anciens, sont cœur était pris d'une ronce immortelle où chaque battement trop violent effleurait les épines empoisonnées de ce sentiment qu'on appelait ; aimer. Aimer, succomber sans jamais pouvoir se redresser. Pourquoi m'étais-je mise à t'aimer. Tu es ma faiblesse, ma seule faiblesse. Et bien que je n'eus jamais craint la mort, à tes côtés... Elle est devenue ma pire terreur. Les pas étaient lents mais lourds, comme peinant à avancer. C'était le frottement de vieilles chaussures sur les graviers du sentier, elles pouvaient se faire entendre au travers du fracas du vent.

_Celesna...

Une détonation pulmonaire, comme le fracas d'un tambour brutalisé depuis des années. Qui sait comment ses membres l'avaient menés jusqu'au froid de l'extérieur, Irrÿs en avait été capturé et frigorifié. De ses larmes glacées déferlant le long de ses pommettes marquées par le passé, la demi-elfe s'était ravisée. Un mirage, avait-elle pensé. Toutefois, à travers la tempête enneigée, son allure survint. Le visage pâle et dévêtu d'envie. Son pas frêle nuançant difficilement avec sa stature habituelle. Mais, c'est les yeux à peine ouverts qu'elle avançait d'une force venant sans doute d'un autre monde. Elle continuait, s'accrochait, jusqu'à s'abattre contre le tronc d'un arbre de pins. Comme un prédateur fondant sur sa proie, la demi-elfe avait rejoint ses côtés, elle était bel et bien là.

_Laissez-moi ! avait-elle protesté d'une main balayant violament l'air, empêchant la demi-elfe de l'approcher. Les yeux froncés, l'elfe sénile s'était pourtant laissée couler contre l'arbre, bien que trop frêle pour réellement contester... En proie à ses tourments, qui sait à quoi elle pensait. Je n'en peu plus... De ses courtes oreilles abbaissées, Irrÿs ne comptait cependant pas abbandonner... pas maintenant et jamais face à celle qu'elle aimait.

_Ce' ... c'est moi... Prononça la demi-elfe d'une voix tremblante, à la fois rassurée et apeurée. Elle ne pouvait voir Celesna dans un tel état, si frêle et en proie à on ne sait quoi, de pourtant puissant. C'est moi... C'était elle, une jeune elfe prise de mille et un tourments, retrouvant la seule étoile brillant dans son ciel obscurci par la perversité d'une tutrice insensée. Mon amour... je t'ai enfin retrouvée...

_Ils me disent tous ça ... Tous ... Souffla la vieille elfe, ses paupières s'abattant doucement sous la faiblesse de son esprit. La tête reposant bientôt sur la surface âpre du pin, Celesna s'abandonnait, réalité ou encore prise dans le piège de sa santé mentale, elle abandonnait. Abandonner... Ça ne te ressemble pas...

_C'est terminé C'est dans ce moment de tendresse que la demi-elfe s'approcha enfin, se laissant tomber à genoux face à l'Arcaniste fanée. De ses bras la capturant avec dévotion, Irrÿs espérait être pluie et beau-temps... Elle ne pouvait croire que cette vieille fleur ternisse maintenant. Ton combat est terminé, je suis là maintenant... Là, de ses yeux bientôt noyés, s'écoulant comme le temps qu'elle aurait voulu arrêter. L'avoir retrouver, l'aimer... La demi-elfe aura dès lors glissé une main dans le dos de son aimée, une autre s'imposant sur sa joue glacée. Je suis heureuse de te voir... tellement... D'un lourd soupir de soulagement, et comme pour se rassurer que cet instant n'était pas une illusion, la demi-elfe imposa son front contre celui de Celesna, soufflant une dernière fois Rentrons...

De ses dernières paroles, la demi-elfe l'avait aidée, guidée jusqu'à la couche qui lui appartenait. L'effluve de son parfum ravivant son esprit... Une certaine lumière s'était dégagée de l'Arcaniste, balayant toutes ténèbres coexistant encore dans le cœur pourtant aimant de la bâtarde.

Désormais alitée, la vieille elfe pouvait se reposer, mais, d'une main redressée, la demi-elfe s'était abaissée. De l'éclat de ses yeux violacés en partie évaporé, Celesna l'avisait. Tu ... vas ... bien ... La main de la demi-elfe capturant celle de la vielle elfe, elle pouvait prouver qu'elle existait et qu'à jamais, elle serait à ses côtés. Je vais bien... maintenant que tu es là. Souffla t-elle avec tendresse, ses paroles suivies de ses gestes, une main reposant d'une douce caresse sur la joue de cette elfe qu'elle ne pouvait voir s'éclipser. Je vais m'occuper de toi.

De ses mains glissant sur un corps humidifié, c'est sans un râle que la faiblesse et la fatigue de l'elfe avait permis à Irrÿs de la déshabiller. Égoïste, elle l'avait été à cet instant. Profitant du repos d'un être aimé, elle l'avait observé... Se révélant la beauté qu'elle n'avait jamais touché. Celesna... Comment puis-je t'aimer... si seulement... tu pouvais m'aimer de cette manière, sans doute, serais-je libérée... Le cœur arraché, toujours lui avait-on susurré : « les sentiments sont une faiblesse... » Pourquoi n'avait t-elle tout simplement pas écouté celle qui l'avait pourtant abandonnée ? Expirant difficilement, le regard balayant sur le corps dénudé de la vieille elfe, Irrÿs pouvais désormais s'imaginer... Bien plus qu'à ses côtés. Mais cet instant ne pouvait durer, elle en était consciente et... qu'importait ce bonheur qu'elle pouvait ressentir, elle avait fait une promesse à Celesna .

« Faire de tes derniers instants, tes derniers souvenirs, un bonheur sans pareil... »

Un sourire naissant sur ses lèvres, la demi-elfe l'avait finalement recouvert d'une couverture et la nuit durante, elle avait veillé sur les tourments de Celesna, une main reposant à jamais dans la sienne, une compresse sur son front, elle continuait de répéter : Tu n'as plus rien à craindre... car je t'aime.

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