Alors, commençons par vous souhaiter la bienvenue.

Ce n'est pas parce que c'est la fin du monde ou, en tout cas, du monde que j'ai connu moi et les autres comme moi (on nous appelle les humains) que l'on ne va pas s'amuser une dernière fois. Humain. C'est étrange comme nom, vous ne trouvez pas ? D'ailleurs, je vous mets au défi de trouver un nom qui sonne aussi bien pour votre peuple. Où en étais-je ? Oui, voilà, je voulais vous offrir (c'est une façon de parler sachant que je ne peux rien vous donner d'autre qu'une Terre qui se meurt) non pas un remède, ni même une potion magique et encore moins de l'engrais pour faire pousser vos plantes après la grande extinction. Non, rien de tout cela. On va dire que je vous offre un entretien privilégié avec Monsieur tout le monde. Alors, accrochez votre ceinture (C'est un mécanisme permettant de protéger l'être humain lorsqu'il conduit une grosse boîte recouverte de tôle de laquelle s'échappe du monoxyde de carbone et, parfois, en cas de bouchon qui s'éternise, le mécanisme délivrant un florilège d'insultes s'enclenche. C'est aussi une expression assez usuelle) et en avant toute vers une histoire renversante qui va agiter vos zygomatiques (Non, je n'explique plus. Si vous vouliez obtenir de plus amples informations sur la façon dont les humains fonctionnent et le langage qu'ils utilisent, vous auriez dû vous inviter un peu plus tôt à la fête). Je vais me présenter, si vous le voulez bien. De toute façon, vous n'avez pas d'autre choix que de me lire. Peut-être que dans ce texte se cache un message codé qui, une fois que votre intelligence supérieure l'aura déchiffré, vous donnera les directives à suivre pour construire un environnement sain assurant ainsi la survie de votre peuple. Ou peut-être que ce code vous délivrera votre horoscope accompagné d'un coupon de réduction sur une boite de gâteaux fourrés à la fraise.

J'ai du mal à rester sérieux, veuillez m'excuser. Pourtant, j'en ai vu des horreurs au cours de ma vie qui auraient pu geler mon cœur à jamais et me retirer le sourire qui persiste pourtant à se dessiner sur mes lèvres alors que je vous écris ces mots. J'ai aperçu des massacres de population par le biais du petit écran de télévision dans ma chambre étudiante qui m'ont donné envie de fermer les yeux sur ce monde. J'ai vu des personnes qui s'entretuent sans aucune autre raison que celle de se faire du mal. Pendant des années et des années, depuis l'aube de ce monde jusqu'à son dernier jour, nous nous sommes blessés, tués jusqu'à ce qu'il ne reste plus aucun espoir sur Terre. C'est désespérant, n'est-ce pas ? Mais tout n'est pas si sombre, ne vous inquiétez pas. Malgré notre orgueil, nous tolérions parfois d'avoir l'estomac dans les talons, le souffle coupé et le cœur soumis à une tempête émotionnelle pour aimer et être aimé en retour. L'amour… Je crois que notre monde n'a jamais porté une chose aussi complexe que le sentiment amoureux. Imaginez un instant ce que cela donnerait si après avoir rencontré le regard d'un homme, d'une femme, votre organe vital se mette à voltiger dans votre poitrine (c'est une image) pour obtenir de nouveau ce sursaut électrique provoqué par ces prunelles liées aux vôtres. Je n'ai jamais eu cette chance, celle de tomber amoureux. Je me demande si c'est aussi dévastateur et passionné que l'on raconte. Au fait, moi, c'est Maxon (au cas où vous auriez envie de nommer un monument, un arbre ou peu importe, à mon nom). J'ai l'impression que je parle tout seul… Je me demande si ce message arrivera à destination et sera lu par… vous. En réalité, j'ai peur de ce que vous allez découvrir (Je ne parle évidemment pas du dossier "exposé scolaire" situé sur mon disque dur et qui comporte des clichés très éloignés du terme "scolaire"). Pour être honnête, j'ai honte de m'adresser à vous. Je me dis que je ne mérite pas le temps que vous allez consacrer à me lire. J'ai tout foutu en l'air. Nous avons tout foutu en l'air, nous autres, les humains. Nous avons trop pris pour acquis des choses qui ne l'étaient pas, faisant passer les biens avant les hommes. Le fait d'avoir évoqué l'amour avec vous m'a fait réaliser quelque chose. En réalité, j'étais amoureux de Fred. Il est mort avant que je n'aie eu le temps de lui dire. Mes copains de fac, puissent-ils reposer en paix, n'ont cessés de m'inciter à aller le voir pour lui dire. Je ne savais pas que je l'aimais jusqu'à aujourd'hui, mais j'aurais su trouver les mots pour lui. Mes amis. Mes véritables amis : ceux qui me connaissent parfaitement, ont deviné que la flamboyante Hermione ou l'irrésistible Draco ne pouvaient venir à bout du cadenas qui scellait mon cœur. Seul Fred a réussi le fabuleux exploit de me rendre niais. Et, pour mettre fin à cette interrogation que je sens grandir en vous sur l'identité de mon grand amour de jeunesse, sachez que Fred est un personnage fictif d'une saga littéraire connue dans le monde entier. Que voulez-vous, à défaut d'avoir connu un amour passionné dans ma vie, je me console en écrivant une histoire d'amour entre un personnage et moi. Je suis certain que je n'étais pas le seul d'ailleurs à me contenter d'un univers fictif pour éprouver des émotions qui n'ont jusque-là jamais été ressenties pour quelqu'un.

Les mots perdurent. Ne laissez pas l'écriture disparaître. Imaginaires ou réels, les textes qui vous suivront seront la dernière trace de votre existence. Faites-en bon usage.

J'entends un bruit. Je crois qu'ils arrivent. Malheureusement, je vais devoir écourter cette entrevue. C'est dommage que je ne puisse arrêter le cours du temps, peut-être que j'aurais pu me dévoiler davantage. Je crois qu'est venue l'heure de vous dire comment trouver ce fameux code qui… n'existe pas. Je suis désolé, mais l'homme est égoïste alors bonne chance à vous et n'abandonnez pas.

Maxon.