Chapitre 2

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— Je m’appelle James Brixton. Je viens pour vider mon compte et le clôturer.

Il répétait sa tirade devant son miroir, tentant de poser sa voix sur le ton le plus convaincant possible. Il était confiant, mais une erreur pouvait bien vite arriver. Un coup d’œil à sa montre l’informa qu’il lui restait cinq minutes. Il sortit de la salle d’eau, puis traversa la grande pièce pleine d’écrans, qu’il verrouilla de l’intérieur à l’aide de sa carte magnétique. Il emprunta une autre porte qui débouchait sur un salon à la mode anglaise. Il la ferma également, avant de la masquer grâce à une bibliothèque. Il défroissa son uniforme d’un rapide coup de main, bomba le torse, puis sortit. Au volant de sa Mercedes, un sourire en biais collé à son visage, il savourait sa toute-puissance. Son plan était désormais en marche.

ooo

Non loin de là, le commissaire Lawrence s’abîmait les yeux devant son écran. Ses hommes lui avaient rapporté les éléments qu’il avait demandés. Pourtant, il peinait à trouver une suite logique entre les différentes affaires.

— Tout cela n’a ni queue ni tête ! râla-t-il. On pourrait tout aussi bien tirer au sort son prochain lieu d’attaque. Les statistiques et probabilités ne feront pas mieux.

— Chef, on a un nouvel élément.

Lawrence se précipita sur le pauvre policier avec la délicatesse d’un taureau en rut.

— Montrez-moi ça !

L’agent s’exécuta. Il étala des photos sur la table, et prit les devants pour les explications.

— Nous avions reçu une directive provenant de là-haut, déclara-t-il en sachant pertinemment que Lawrence était déjà au courant de cette partie de l’histoire. Nous devions camper devant les lieux de niveau un et vérifier toute activité suspecte. Des hommes ont réussi à photographier un businessman renommé : James Brixton. On dit qu’il a fait sa fortune grâce à un dur labeur, agrémenté d’une dose d’intelligence et aidé par de hautes études dans l’économie.

— Et ce n’est pas le cas ? demanda Lawrence.

— Une telle fortune ne peut pas être amassée de façon légale, et en si peu de temps. Il y a forcément une tricherie derrière son monde d’or et d’argent. Nous le soupçonnons d’être le Fantôme.

— Avez-vous au moins des preuves de ce que vous avancez ? Cette accusation est très grave.

— Vous voyez ces deux hommes sur les photos ? reprit le policier. Ils baignent dans la mafia depuis leur plus tendre enfance. Ce ne sont pas des enfants de cœur, croyez-moi. Brixton les a sans doute embauchés pour son coup. Avant qu’on ne perde la voiture de vue, on les voit sortir, une mallette à la main

Il prit d’autres documents de la pochette, l’adrénaline rendait ses mouvements tremblotants.

— Vous voyez ici ? continua-t-il. Ce matin-même, Brixton s’est rendu à sa banque pour y faire fermer son compte. Ce ne peut être une coïncidence.

Lawrence était dubitatif devant le peu de preuves avancé par son collègue. Ce dernier sentit qu’il était temps d’abattre la dernière carte.

— Ce n’est pas tout. Nous avons vérifié ses alibis durant les derniers braquages du Fantôme. Comme par hasard, nous n’en avons trouvé aucun. Il n’était nulle part !

— Nous ? questionna le commissaire.

— En fait, ce sont les renseignements qui ont réalisé ce travail. Ils nous ont simplement demandé de suivre Brixton durant ces quelques jours.

Lawrence faisait les cent pas dans son bureau, pesant les différents éléments. Devait-il se fier aux preuves avancées par les renseignements ? Après tout, il n’en savait pas plus sur le Fantôme que Scotland Yard.

— Débrouillez-vous pour savoir où Monsieur Brixton se trouve à chaque instant, ordonna-t-il. Il ne doit se douter de rien !

Il sortit de la pièce avec empressement, une mauvaise impression s’emparant de lui. Et s’il était déjà trop tard ?

ooo

Au Café d’en face, une dame élégamment vêtue fit une entrée remarquée. Elle avait l’habitude d’attirer les regards, aussi bien masculins que féminins. C’est pourquoi, la plupart du temps, elle ne faisait aucun effort vestimentaire. Amber Clinford était d’ailleurs connue, à Scotland Yard, pour son allure d’adolescente. Pourtant, aujourd’hui, son charme serait son atout majeur. Elle avait reçu l’ordre de poser un traceur sur James Brixton. Ce dernier avait un goût prononcé pour les femmes, mais les traitait plus bas que terre. Aussi, fut-elle visiblement surprise, lorsque l’homme d’affaire lui proposa, de la plus distinguée des manières, de lui offrir quelque chose à boire.

— Volontiers, acquiesça-t-elle tout en s’approchant de lui.

Elle ne pouvait détacher son regard de ses yeux bleus si singuliers. Il était installé sur l’un des hauts tabourets près du bar, le dos bien droit.

— Que désirez-vous, Mademoiselle … ?

— Ana, s’empressa-t-elle de répondre. Ana Aberline. La même chose que vous.

Elle tentait de conserver un air naturel, mais elle était troublée par la présence d’un pareil gentleman. En réalité, elle s’attendait à tomber sur une âme rustre, comme Lawrence l’avait décrit.

L’homme commanda deux cafés, et elle profita de son inattention pour lui glisser le traceur dans la poche de sa veste. Son cœur battait la chamade, alors qu’il entreprit de lui faire la conversation, versant un sachet de sucre dans sa tasse. La tension retombait ; il ne semblait pas avoir perçu son trouble.

Une demi-heure plus tard, il prétexta une réunion importante pour pouvoir s’en aller. Il fit un baise-main à celle qui se faisait passer pour Ana Aberline, puis sortit du café. Passant une main dans sa poche, il se dit que ce petit gadget lui serait bien utile pour la suite de son plan.

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