Chapitre 14

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Le cauchemar ne s’arrêtera donc jamais. Je suis prisonnière d’un fou. Un fou qui m’enferme chez moi. Qui peut oser faire une chose pareille ? Me pousser dans mes retranchements à ce point. Quelle horreur d’être dans l’incapacité de sortir de son propre chez soi. Je ne peux rien contrôler, rien faire. Mais je garde espoir. Tant qu’il ne me fait pas de mal, je ne m’inquiète pas trop. J’espère juste que ça ne changera pas.

Un flash surgit dans ma tête. Il m’inspire la crainte. Forge un questionnement perpétuel dont je n’ai pas encore reçu la réponse. Mes poings se serrent.

Si mon agresseur est ici, qu’a-t-il fait de…

Maman !

Dans un excès de colère, je décide de foncer, épaule en avant, à toute vitesse contre la porte. Une douleur abominable élance l’intégralité de mon bras gauche. Je souffre pour avancer. Les larmes continuent d’affluer.

— Pourquoi ? crié-je dans le vide. Qu’as-tu fait de ma mère !

Le silence est mon meilleur confident. Une fois de plus, mon agresseur ignore mes questions. Mais il va payer.

Dehors, le temps est aussi maussade que ces derniers jours. Le pommier du jardin tangue, bercé par les rafales du vent. Sa tignasse orange ne cesse de bouger dans tous les sens. En une fraction de seconde, une idée émerge.

Je peux peut-être sortir par la fenêtre ? Je pose une main humide sur la poignée et respire un coup avant de l’actionner. Je tire. Fort. Réessaie. Un hurlement jaillit de ma bouche. Je m’écroule à genoux. Elle est collée.

— Sortez-moi de là !

Soudain, toute ma vie défile. Je revois Marie, ma meilleure amie, chez moi. Bastien, mon premier et dernier petit copain, et tout ce que je n’ai pas encore vécu. Ma mère ne sera pas déçue si je casse la vitre. Je vais essayer avec ce qui se trouve dans ma chambre.

Mes yeux balaient la pièce. Je m’en veux de ne pas avoir plus d’objets lourds en ma possession.

Pendant un instant, je fixe mon ordinateur et me dis que je pourrais essayer d’envoyer un mail ou un message à des amis pour qu’ils préviennent la police. Ils croiraient certainement à une mauvaise blague et ce serait de toute façon trop incertain. Je m’approche tout de même pour vérifier. Le câble d’alimentation manque. Lorsque j’appuie sur le bouton de marche, il ne s’allume pas. La batterie est vide. Mon Mac est inutilisable.

Je parviens à trouver mon sèche-cheveux dans le tiroir de mon meuble de télévision. Il peut me servir d’arme au cas où j’en serais contrainte. Je vais l’utiliser pour exploser cette satanée vitre. Avec l’adrénaline, peut-être que ma force sera supérieure ? Je n’ai plus le choix.

Je m’approche de la fenêtre fixée, les bras tremblants, et tire d’abord dessus à plusieurs reprises. Elle est indémontable.

Qui me veut du mal au point de me séquestrer dans ma propre chambre ?

Ce n’est pas le moment de se poser la question Alice. Tu dois éclater ces couches de verre.

Avec force, j’abats le sèche-cheveux contre le carreau. Je rebondis légèrement, mais cause un petit impact. Je réitère la même manœuvre. Ça va me prendre une éternité ! Je dois y aller franchement.

Courage Alice.

J’ai l’impression d’être un truand à casser une vitre de cette manière. Le sentiment est bizarre. Il s’accentue lorsque j’entends des pas se rapprocher de la porte.

Oh non ! Il a entendu ma tentative d’évasion !

J’accélère mes coups. Ce n’est pas suffisant. Mes lames roulent le long de mes joues et embuent mes yeux. Mon cœur se rompt à chaque battement. Un stress imprévu cogne dans mes tempes. Je me sens une nouvelle fois partir. La crise est de retour. Tout tourne autour de moi. Je capte les pas de mon agresseur. Ils sont très proches. Les sons sont plus nets. Je parviens à atteindre mon lit. M’écroule à moitié dessus. Le sèche-cheveux glisse entre mes doigts.

Ma vue se floute au rythme de ma respiration qui est de plus en plus forte. J’ai des difficultés à trouver de l’oxygène. Mes sens sont chamboulés. Ils ne comprennent rien. Tout comme moi.

Cette fois-ci, je suis pile devant la porte. Ma vision n’est pas terrible, mais je me concentre pour l’améliorer, malgré mes poumons qui ne fonctionnent plus convenablement. Mon mal de tête est atroce.

Je distingue une forme franchir la chatière et déposer deux objets ; l’un est rectangulaire et ressemble à une barre chocolatée, puis l’autre est un post-it simple.

Je rampe jusqu’au message. Mes membres sont horriblement écrasants. Je tétanise, bloquée ente ces quatre murs.

Une minute plus tard, un verre d’eau avec une paille traverse la porte par le petit rectangle découpé. Je réussis à soulever ma tête et à aspirer. Une lampée d’eau s’écoule dans ma gorge. Elle caresse mon œsophage.

En reprenant mes esprits, je réalise que la fin n’est pas arrivée. Ce qui signifie également que le cauchemar n’est pas encore terminé. Je suis anéantie.

Après avoir repris contrôle de la presque totalité de mes facultés, le message, maintenant complètement lisible, se tient à mes pieds. Les mots s’impriment sur mes yeux. Un choc. Je me relève de stupeur et m’assieds sur mon lit, les mains dans mon visage.

Je viens de recevoir un énième coup de poignard. Un autre mystère à élucider. Je dois contrôler ma respiration pour ne pas sombrer de nouveau dans une nouvelle crise. Je regarde autour de moi. L’incompréhension doit noyer mon regard.

Je m’agenouille, attrape le bout de papier et relis le message.

Reste ici, je t’en prie. C’est pour ta sécurité.

Tout ceci n’a aucun sens.

Soit, un détail m’échappe…

Prise de peur, je suis incapable de penser à la suite de la phrase. Plutôt, je ne souhaite pas y croire. Mais je dois le faire. Pour mon courage personnel. C’est mon combat. Mon ennemi. Ma vie qui est en jeu.

Soit un détail m’échappe, soit un fou tente de m’amadouer pour mieux me maîtriser par la suite.

Ma lèvre inférieure tremble intensément. Je ne cesse de me toucher le nez en scrutant l’entièreté de ma chambre. Je dévisage le pommier branlant à l’extérieur.

Une seule question est maîtresse de mes réflexions : que dois-je faire à présent ?

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