Pas trop vite...

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Mia
Ce contact visuel me fait oublier toute ma tristesse. Je le fixe, il me fixe. Ses magnifiques yeux ressortent sur son teint bronzé. Il est si beau que j'en viens à me demander si il est trop beau pour être vrai. Je me demande ce qu'un être comme celui-là pourrait avoir de si important à cacher. Puis, tout en le regardant, je me rend compte qu'il est si... torse nu. Lorsque je remarque l'ambiguïté de la situation, la gène m'envahie. Je me retourne en me cachant derrière le mur de ma chambre en fermant les yeux, comme si ça pouvait y changer quelque chose.
J'essaie de faire comme si rien ne s'était passé. Je reste assise, en dessous de ma fenêtre, n'osant plus bouger d'un poil de peur d'être vue. Ce qui est ridicule vu que je suis quand même chez moi. Je me lève refermant les rideaux de ma chambre le plus rapidement possible. Ouf, je regagne enfin mon intimité.
Après m'être assurée que ceux-ci soient bien fermés, je m'étale de tout mon long sur mon grand lit. Cette journée a été forte en émotion, il faut que je me détende. Je pense que je pourrais rester là une éternité. Je reprends mon carnet de dessin et admire ceux que j'ai fait ces derniers jours. C'est comme si je les redécouvrais un à un. Après en avoir contemplé quelques uns, je remarque qu'il y a un point commun entre eux. Et ce point commun c'est lui. En petit ou en grand, en partie ou en entier, il est présent sur toutes mes oeuvres. Il faut se rendre à l'évidence que ses traits sont tellement fins qu'ils sont agréables à dessiner. Je me surprends même à en continuer un.
Tout d'un coup, un bruit sourd retentit. Je ne prends pas la peine de me lever. Chaque année, un couple de merles élus domicile devant ma fenêtre. Le bruit de leur bec contre le toit est insupportable, il y a des soir ou ça m'empêcherait de dormir.
Je me contente donc de continuer mon dessin.
Le même bruit se fait entendre dans la pièce une deuxième fois. Ils n'arrêteront donc jamais? Ils ne peuvent pas le savoir mais ce soir je suis à bout, je n'ai plus aucune patience, même avec un adorable couple d'oiseaux inocents. J'ai juste besoin d'un peu de tranquillité pour remettre mes idées en place.
Après le deuxième coup, je décide d'y mettre un terme. J'attrape ma pantoufle et, sans regarder, je la lance de toutes mes forces en direction de ma fenêtre. J'espérais leurs faire peur pour pouvoir continuer mon dessin en paix. A la place du bruit des ailes qui s'éloignent, j'entends une voix grave derrière moi.
- Eh! C'est sympa l'accueil ici, dit l'intrus d'un air ironique mais amusé.
Je reconnaitrais cette voix entre milles. Mon cher nouveau voisin se trouve ici, dans ma chambre. Je sursaute, m'éfforçant de refermer mon carnet le plus vite possible. Je prie pour qu'il n'ait pas remarqué les portraits le représentant sur mes feuilles. Ce serait beaucoup trop bizarre. Je décide de me retourner le plus délicatement possible pour ne pas lui laisser voir mes émotions. Je vois son ombre musclée ressortant devant ma fenêtre grâce à la lumière de la nuit étoilée. Ca me fait des frissons. Je dois garder à l'esprit que ce garçon est rentré par effraction dans le bureau du directeur, y a laissé des traces de sang et a eut trop honte de moi pour dire à nos parents qu'on se connaissait. Et maintenant, le même homme fait intrusion dans ma chambre sans prévenir? J'essaye de lui montrer la colère que je suis censée ressentir après tout ce qui s'est passé, mais curieusement, au plus profond de moi je suis contente qu'il soit venu me voir.
- Qu'est-ce que tu fais là? dis-je d'un ton de reproche.
- Je tricote, ça se voit pas? me dit-il sur le ton de la rigolade.
Il veut visiblement détendre l'atmosphère et ça aurait marché si je n'avais pas autant envie de réponses. Je reprends la parole, ignorant sa blague.
- C'est quand même bizarre que mon nouveau voisin que j'ai visiblement rencontré il y a quelques minutes se pointe sans prévenir dans ma chambre par la fenêtre. Tu ne trouves pas?
Son beau sourire s'évanouit et ça me fait de la peine de plus le voir néanmoins il est trop tard pour faire marche arrière. Son regard me fixe plus intensément désormais, il arrive presque à me mettre mal à l'aise. On dirait qu'il y a un débat intérieur pour savoir ce qu'il va me répondre. Je ne peux pas m'empêcher de me demander si il cherche un autre mensonge plus crédible que les précédents à me fournir.
Lorsqu'il semble avoir fait le tour de la question, il commence à marcher dans ma chambre, touchant et regardant chaque détails avec attention. Il s'arrête devant mon tableau d'affichage. J'y ai accroché quelques photos comme celles avec des amies, mes parents ou mon chat mais il y a surtout beaucoup de dessins en tout genre. Je suis soulagée de ne pas encore avoir affiché les dessins le représentant.
- Elle est sympa ta chambre, me dit-il innocemment.
Je rêve!? Il est vraiment en train de vouloir changer de sujet? Je ne vais pas le laisser s'en tirer aussi facilement cette fois-ci, je suis plus décidée que jamais.
- Tu n'as pas répondu à ma question. J'ai besoin de savoir pourquoi tu as caché à nos parents qu'on s'était déjà rencontrés.
Un soupir montre son impatience. Il se retourne, c'est la première fois que je le vois si tendu.
- Ca n'a aucunes importance qu'il pense qu'on s'est rencontré maintenant ou il y a deux jours!
Il n'a pas tord, ça ne change pas grand chose dit comme ça mais je veux quand même savoir.
- Pour toi, peut-être pas mais, pour moi, ça a de l'importance.
Il ne sait pas quoi répondre alors je décide de lui poser la question qui me brule au lèvre depuis le début.
- Matt, est-ce que tu as honte de moi? dis-je en un chuchotement.
Ses sourcils se lèvent, montrant son étonnement. Il a l'air embêté que j'aies pu penser ça. Il s'avance avec assurance vers mon lit. Il s'arrête à son niveau comme si il demandait la permission pour pouvoir s'y installer. Après mon signe de tête, il s'assieds à mes cotés. Mes yeux sont mouillés de larmes, j'essaye de les retenir, je ne veux pas paraitre faible devant lui. Il a un air si désolé que je ne soupçonnais pas pouvoir lire sur son visage un jour. Il attrape ma main avec une douceur impressionnante avant de me regarder droit dans les yeux.
- Je n'aurais jamais honte de toi, Mia, je te le promet.
Mon coeur se réchauffe grâce à ses mots.
- Alors, pourquoi? l'interroge-je.
- Mia, c'est compliqué... mon père, enfin, ma famille n'est pas comme toute les autres, tu sais. J'ai vraiment envie de t'en dire plus mais... je ne peux pas, me déclare-t-il en pesant chancuns de ses mots.
Il est si triste en finissant sa phrase que ça me fend le coeur. J'ai envie de le prendre dans mes bras et de le consoler pour qu'il ne soit plus jamais triste. Nous nous rapprochons de plus en plus l'un de l'autre jusqu'à ce que nos visages se trouvent à quelques centimètres. Je ne peux pas m'empêcher de me rapprocher de lui. Ma main est toujours dans la sienne et je la serre de plus en plus fort. Je ne réfléchi plus, j'agis. Mon enquête à son sujet peut attendre pour l'instant, je me contente de profiter de l'instant présent. Mon coeur me dit de me laisser aller mais mon cerveau me dit que ça va trop vite. Nous nous connaissons depuis seulement quelques jours. Je décide de suivre mon coeur, pour une fois dans ma vie. Lorsque mes yeux se ferment et que nos bouches manquent de se toucher, une sonnerie nous ramène tout deux à la réalité. La déception se lit autant sur mon visage que sur le sien. Il s'écarte de moi, j'ai envie de lui crier de rester tout près mais je n'ai plus de voix.
- Excuse-moi, dit-il en décrochant son portable.
- Hallo! Oui... Ok, j'arrive tout de suite.
L'appel dure quelques minutes seulement.
- Désolé Mia, j'ai pas envie mais... je dois partir, c'est une urgence.
Il a l'air si sincère, alors je tente de lui faire suivre son envie.
- Alors, si tu en a envie reste! dis-je en me redressant.
Je vois qu'il est tiraillé entre son envie et son devoir. Puis, tout en se dirigeant vers la fenêtre il me dit:
- Crois-moi, si j'avais le choix je resterais sans hésiter.
Il enjambe ma fenêtre avant de continuer.
- Et, en fait, j'aime beaucoup les dessins de ton carnet, ce sont mes préférés! A demain!
Après m'avoir fait un de ses magnifiques sourires dont lui seul à le secret, il sote de la fenêtre. Voilà un mystère de plus autour de Matt, ça m'aurait manqué. Je ne sais pas si je suis contente ou gênée qu'il ait vu mes dessins. Peut-être un peu des deux. Il les aime bien et ça me fait vraiment plaisir. En même temps, je voulais pas qu'il les voient, j'ai pas envie qu'il me voit comme ça. Je me rapproche de ma fenêtre j'ai envie de le voir le plus longtemps possible. Je le vois traverser la rue. Il fait attention de ne pas être repéré, passant par sa fenêtre pour rentrer dans sa propre maison.
Quand il ne m'est plus possible de le voir, je me retourne, me redirigeant vers mon lit. Le temps est passé si vite, il est tard. En secouant mes draps pour m'y installer, je découvre quelques choses qui me laisse sans voit. Il y a une énorme tache de sang frais là où il s'est assis. Ça me rappelle celle qu'il y avait dans le bureau du directeur...

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