81. Alice

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Le vendredi soir, je me barre. Je prends le train pour retrouver Chris dans son studio, au rez-de-chaussée d’un vieil immeuble du centre de Poitiers. Le weekend, c’est notre oxygène. On a deux jours pour se voir et je repars le dimanche soir. Chaque dimanche, c’est la même souffrance, la même tristesse avant le départ… Son goût amer me poursuit jusqu’au weekend suivant que j’attends avec impatience.

Je nous retrouve un de ces dimanches soir, allongés sur le canapé-lit qui occupe les trois-quarts de son studio. Il est l’heure de partir à la gare. Mon sac est prêt, il faut y aller. Je me lève à contrecœur, quand Chris me retient :

— Je veux pas que tu partes.

— Moi non plus, j’ai pas envie de te quitter… Ça passe trop vite, c’est horrible.

— Ouais, à chaque fois je vois pas le weekend passer. C’est vraiment trop court deux jours… Et puis, j’ai pas envie que tu te galères à prendre le train… Tu vas encore arriver super tard ce soir.

— Ouais, j’ai bien la flemme mais bon… Ça va aller t’inquiète. Y a pas le choix de toute façon.

— T’es vraiment obligée d’aller en cours demain ?

— Ouais, je peux pas sécher, ils sont trop relou avec ça… En plus j’ai une interro d’allemand, faut que je révise dans le train d’ailleurs.

— Sinon je peux t’emmener.

— Où ?

— Bah à Nantes. C’est qu’à deux heures et demie de route en voiture.

— Non mais tu vas pas faire l’aller-retour dans la nuit quand même ?

— Bah si, comme ça on sera plus longtemps ensemble.

— Mais ça va te faire cinq heures de route au lieu des trois heures que je vais mettre en train ! Ça vaut pas le coup… Et puis j’ai déjà pris mon billet, je peux pas me faire rembourser.

— On s’en fout du billet ! Franchement j’ai pas envie de rester seul ici. Je préfère te conduire là-bas, ce sera plus sympa pour toi et on sera plus longtemps ensemble.

— Bah c’est tentant mais je sais pas… t’es sûr ? Tu vas être crevé en rentrant.

— Mais non, t’inquiète. Au pire si je suis vraiment trop fatigué, je dors dans la voiture et je pars demain matin… Si je pars à six heures je peux être à l’heure en cours.

— Non mais tu vas pas dormir dans la voiture ! Je devrais pouvoir te faire passer à l’internat, le gardien fait pas trop gaffe. On pourra essayer de dormir à deux dans mon lit mais on va vraiment être serrés, il est minuscule…

— Oh mais t’inquiète, c’est pas grave ça !

— Bon ok alors, faut juste que je demande à ma coloc si ça la dérange pas… T’es sûr hein ?

— Oui ! Sauf si tu préfères prendre le train bien sûr… Par contre faut vraiment qu’on y aille maintenant si tu veux pas le louper.

— Il faut partir dans combien de temps si on y va en voiture ?

— Bah on peut y aller quand on veut.

— Faut quand même qu’on arrive avant minuit parce qu’il y a l’internat qui ferme.

— Si on part dans deux heures ça nous ferait arriver vers onze heures et demi.

— Deux heures de plus ! C’est trop cool ça ! T’es sûr hein ?

— Mais oui je suis sûr !

— … Je t’aime tellement.

Ce sont les seuls mots qui me viennent. C’est tellement à l’opposé du mode de pensée auquel j’ai été habituée que j’ai l’impression de rêver. Je n’aurais jamais osé imaginer que quelqu’un aie l’idée de faire quelque chose d’aussi irrationnel pour passer du temps avec moi, mais voilà que je me retrouve bel et bien embarquée dans un scénario de science-fiction-romantique, et ma foi, j’adore ça.

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