Trouble (2)

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Je regarde les flocons tomber au sol en disant :

–C'est tellement beau.

–Tu aimes ça la neige ? Me demande Taïba.

Je lui réponds émerveillée :

–J'adore ça ! Une fois que la neige a recouvert suffisamment le sol, elles laissent place à un tout nouveau tableau que l’on peut transformer à notre volonté.

J'entends Max dire tout bas :

–C'est tellement humain.

–Tu dis quelque chose Max.

–On va geler sur place si ça continue.

Claire approuve :

–Oui et en plus, je vais me faire enguirlander par mes parents si j'arrive trop en retard.

–Je vous suis !

Claire et Taïba se tiennent la main, elle profite de ce moment tant qu'il n'y a personne dehors, nous gardons nos distances avec Max histoire de leur laisser un peu d'intimité, je lui demande :

–Apparemment, vous parliez sérieusement tous les deux, j'aurais bien aimé voir ça.

Il me regarde, hébétée :

–Pourquoi ?

–Depuis que je vous connais, les seules fois où vous étiez sérieux c'était en rapport avec le Somnium ou sur des fausses informations.

–Que veux-tu ? Pour nous, la vie n'est qu'une gigantesque blague.

–Tu trouves.

–Quand on respire, quand on vit, pour nous tout ça n'est rien d'autre qu'une danse, une danse sans chorégraphie, ni logique, une danse qu'on est obligé d'exécuter jusqu'à notre dernier souffle.

–Triste point de vue.

–Et pourtant, c'est la réalité, si notre vie est aussi triste, autant la prendre comme une blague.

–Comment en es-tu arrivé à penser comme ça ?

–La première fois que j'ai fait un choix.

Je lui demande, amusée par sa phrase :

–Toi ? Monsieur, je crée mon propre choix ?

–J’ai fait des erreurs, j'en fais encore et j'en ferai, je ne suis pas invincible, un jour viendra où je tomberai.

–Tu comptes arrêter un jour ?

–Pas avant d'avoir tué toute la violence.

Cette phrase me dit vaguement quelque chose, mais je n'arrive pas à m'en souvenir :

–Tu veux tuer toute la violence ?!

–Une vieille comptine que je chantai en primaire, c’est juste une excuse t’inquiète pas.

–On est arrivé !

Claire et Taïba sont devant une enseigne de restaurant, le “Panier de la mer”, elles ne se tiennent plus la main et se sont séparées de quelques centimètres, je les regarde toutes les deux :

–Je suppose que je ne dis rien sur vous deux ?

Elles hochent la tête ensemble, Claire rentre la première dans le restaurant bondé, on la suit jusqu'au bar :

–J'ai amené des amis !

Une voix masculine répond à Claire :

–T'as vu le monde qu'on a ?!

–Ça va, trois de plus, trois de moins, ça change pas grand-chose.

Une femme apparaît derrière le bar :

–Ils restent les trois chaises vides devant toi, tu pourras t'occuper de tes amis ?

–T'inquiète pas maman.

La mère de Claire a les traits tirés par la fatigue due certainement au travail, les cheveux grisonnants attachés en chignon, elle a les mêmes yeux que Claire et des petites lunettes posées sur son nez lui donnent un petit air autoritaire. Elle nous regarde tous et son regard s'arrête sur Taïba :

–Taïba ! Ça fait longtemps que tu n'es pas venue !

Elle pointe du doigt Claire :

–C'est de sa faute, elle ne m'invite jamais à manger ici.

–Claire, tu oses ne pas ramener de formidables pigeo… euh clients.

Claire se frappe le front :

–Maman…

Sa mère l'ignore :

–Tiens Max, ça fait longtemps toi aussi ! Comment vont les affaires ?

Max a les mains dans les poches, il n'est pas trop à l'aise, il n'arrête pas de regarder dans la direction du bar, j'essaye de suivre son regard et j'arrive à distinguer le père de James de dos, Max finit par lui répondre :

–Je me suis rangé depuis un petit moment, les Démons font bien leur boulot ?

–Oui et ils ont encore baissé les prix, je t'avoue que la triade me fait un peu peur.

–Ah…

Max jette un œil à Taïba qui s'est déjà installée et est en train de regarder la carte des menus, il continue :

–Tant mieux pour vous alors.

–Et toi, je ne t'ai jamais vue !

La mère de Claire me regarde méfiante, elle me fait un peu peur, je lui dis :

–Euh ! Euh... en fait je viens d'emménager dans le même immeuble que Taïba et Max.

–Maman, arrête de faire peur à Rose s'il te plaît ! Lui dit Claire qui est derrière le comptoir.

Elle s'est attaché les cheveux et a mis un tablier, ce qui je trouve lui va à ravir :

–Joli prénom ! Eh bien assis toi, Claire va s'occuper de vous.

Je m'assieds sur le dernier tabouret de libre, la mère de Claire disparaît du côté des cuisines, je suis assise à côté de Taïba et du père de James. Surtout ne le regarde pas :

–Salut Rose, ça fait longtemps !

Et merde ! Je ne peux plus l’ignorer, je tourne la tête vers lui, il tient un verre d’alcool, je dirais que c’est du whisky, je lui dis étonnée :

–Je ne m’attendais pas à vous rencontrer ici.

–Moi non plus, tu as arrêté de boire ?

–J’aimerais oublier cette histoire pour toujours.

–Ahahahah ! Si tu veux continuer à éviter les ennuis, je te conseille de ne pas trop traîner avec Max.

–Je vous entends vous savez, monsieur le préfet.

Max qui est à droite de Taïba ; donc carrément de l’autre côté, se met à lui parler sèchement :

–Ça fait combien de temps que je ne t’ai pas mis au trou, rappelle-moi ?

–La mémoire commence déjà à défaillir ? À votre âge ? Je commencerai à consulter à votre place.

Ils ont tous les deux un léger rictus :

–P’tit con.

–Vieux con.

–Tu vois ce que tu risques de devenir en le côtoyant.

Max prend un air sérieux :

–Et si on passait aux choses sérieuses ?

–Pourquoi avoir impliqué Rose dans tout ça ?

–Hein ?

De quoi ils parlent ? Qu’est-ce qui se passe, Max lui répond :

–Non, on lui a juste proposé de manger un bout, nous n’avons pas besoin d’elle, tu n’as pas remarqué les clients du restaurant en arrivant ?

Je tourne la tête, tous les clients regardent le père de James, lui par contre n’a pas bougé d'un pouce et fini par répondre :

–Je me disais qu’il y avait beaucoup trop de jeunes dans ce resto.

–Ah ! Et tu pourrais dire à ton fils que ça ne se fait pas d’espionner la conversation des gens.

Il sort un téléphone de son manteau et dit :

–Tu peux arrêter et venir, ça ne sert plus à rien.

Il raccroche et quelques secondes après James rentre dans le restaurant, je demande :

–Bordel de merde, est-ce qu'on peut m’expliquer ce qui se passe ?!

–Rose, tu n’as rien à voir avec cette histoire donc reste en dehors de ça, me répond James.

Taïba lui dit, irritée :

–Elle fait ce qu’elle veut, elle n’a pas à t’obéir.

James se rapproche d’elle en disant :

–Je ne t’ai pas parlé ! Rose ne le sait pas, mais moi, je sais que vous êtes dangereux !

Nous entendons plusieurs chaises grincer sur le sol, Max prévient James :

–N’oublie pas que tu es en plein territoire ennemi ici, ne fais pas ta tête brûlée.

–Tu me menaces ?

–C'est juste une petite prévention amicale, après si tu as envie de jouer au cow-boy qui a deux de QI.

–Je…

–James ! Lui coupe son père, tu ne m'as pas fait venir ici uniquement pour me narguer Max, qu'est-ce-que tu veux ?

–En fait, c'est moi qui vous ai fait venir.

Taïba sort une enveloppe cartonnée de son manteau et l'a fait glisser jusqu'à lui :

–Hum ? Qu'est-ce-que c'est ?

–Des infos sur la triade chinoise qui sévit en ce moment, je suis sûre que vous en avez déjà entendu parler.

–Ils n'ont rien fait d'illégal pour l'instant, officiellement, en tout cas, te ferait-il peur Max ?

Max ne bronche même pas, Taïba recentre la conversation :

–C'est à moi qu'il faut demander ça, monsieur le préfet.

–Et pourquoi ça ? Lui demande James.

Max a un grand sourire :

–Tu ne le sais pas Einstein ? Votre surveillance laisse à désirer alors.

–Quoi ? Qu'est-ce qu'on a loupé monsieur le chef de gang ?

Claire arrive avec deux canettes de bière et les sert à Max et Taïba, Taïba boit une grande gorgée et se retourne vers James :

–C'est très simple, vous ne savez même pas qui est le chef du gang des Démons.

–Oh et tu veux peut-être m'indiquer qui est le nouveau chef ?

Max lui dit sèchement :

–Fais attention à ce que tu vas dire, car le chef est devant toi !

James pointe du doigt Taïba :

–Elle ? Ne me fais pas rire !

Taïba lui prend le doigt et par, je ne sais quelle magie, il se retrouve à manger le sol, Max lui répond, moqueur :

–Je t'avais prévenu !

Le père de James essaye de calmer le jeu :

–Très bien, nous t'écoutons.

Taïba lâche le doigt de James et se remet dans sa position initiale :

–Dedans, vous avez les différentes adresses qu'ils utilisent comme planques pour leurs trafics illégaux, demain matin la plupart des membres seront dedans, cela serait vraiment dommage qu'un raid de la police se fasse au même moment, non ?

–Pourquoi aussi rapidement ?

–Ils comptent s’emparer par la force de notre territoire.

James leur dit en se tenant le doigt et en se relevant :

–Vos petites guerres de gang ne nous intéressent pas.

Taïba lui répond entre deux gorgées de bière :

–J’en doute pas, après tout c’est votre boulot d'empêcher ça.

Le père de James prend l’enveloppe et la met dans son manteau, il laisse un billet sur la table :

–Vous êtes très douée, en ce moment aucune patrouille n’est occupée, vous aviez tout prévu ?

–Juste un simple coup de chance.

Il commence à partir, James le suit en lui disant :

–Ahahahah ! Très drôle !

Taïba retient le préfet avant qu’il n’ouvre la porte en lui disant :

–Au fait ! Si jamais certains vous échappent, sachez juste qu’on ne sera pas les premiers à attaquer !

–C’est noté.

James me regarde :

–Tu viens Rose ? Ils ne sont clairement pas fréquentables.

Je ne sais pas ce que je dois faire, je regarde Taïba et Max qui n'ont pas bougé d'un pouce, c'est Taïba qui me répond :

–Fait ce qu'il te plaît.

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