La dévoreuse

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La diablesse courait à travers les champs, les jupes relevées jusqu’aux genoux et le visage chiffonné de bêtises. Ses parents l’avaient pourtant bien avertie des dangers de toutes ces maisons dorées, emplies de velours carmin plus doux que les fesses d’un petiot, mais la vilaine n’avait cure de leurs mises en garde. Bien heureuse d’avoir enfin échappé à la surveillance de son frère aîné, elle volait tel un papillon vers les lumières de la ville.

Elle arriva bien vite à destination, essoufflée, rougeaude d’avoir couru ainsi. Des épis de blés s’étaient pris dans sa chevelure blonde, et des larmes d’excitation éclairaient son regard bleu. Le Seigneur, dans Sa clémence, la rendit encore plus appétissante face aux vautours qui guettaient déjà leur nouvelle proie. C’est que, comme dit le proverbe, le diable était beau quand il est absent ! Et l’effrontée ne se doutait pas de l’effet qu’elle produisait déjà autour d’elle.

Elle poussa la lourde porte en bois et pénétra dans un univers à l’opposé de tout ce qu’elle connaissait. Ses parents, des gens bons et simples, ne l’avaient guère préparée à une telle richesse. Des éclairages dorés en passant par des tapis plus épais que ce que le bon dieu pouvait permettre, tout respirait le luxe et la luxure. Une femme précédée d’une poitrine plus que généreuse l’attira bien vite dans les coulisses de la demeure. C’était une sacrée aubaine de mettre la main sur une si jolie fille ! Il fallait faire en sorte de la garder, de la contraindre sans l’effrayer, de lui faire peur sans l’abîmer.

Mais notre diablesse n’était pas farouche et la tenancière s’en aperçut bien vite. La voulant laver dans un petit cabinet, elle n’eut aucune difficulté à mettre à nue l’écervelée. Cette dernière, dans un dernier accès de pudeur, voulut cacher ses attributs aux yeux experts de la patronne, mais cette dernière la rassura bien vite : « Ici, on ne fait pas de bonnet, ne craint pas la chandelle ! ». Rassurée par ce vieil adage, la jeune fille se laissa bien vite admirer puis toucher afin de satisfaire à la curiosité de la macrelle.

Cette dernière, satisfaite de son inspection, et s’étant assurée que sa nouvelle recrue était propre et vêtue correctement (du moins selon les principes en vigueur dans l’établissement), proposa les services de la jeune fille à un habitué des lieux.

Cet heureux homme, frétillant de désir pour cette nouvelle fleur à la peau de velours et aux yeux curieux, se fit un plaisir de lui apprendre les joies de l’amour. L’effrontée goûta à ce plaisir sans retenue, explorant le corps de l’homme qui n’en attendait pas tant, le touchant, le goûtant et le pénétrant malgré quelques objections de son partenaire. Mais les baisers goulus de la diablesse eurent tôt fait de plier son amant à tous ses désirs. Elle se révéla insatiable, bestiale, et sans aucune retenue.

Le pauvre homme, perdu entre un désir incontrôlable pour cette diablesse de l’amour et un étonnement sans bornes face à son appétit, fit de son mieux pour la satisfaire mais finit par la repousser.

Que n’eut-il pas mieux fait que de s’enfuir ! La dévoreuse le bâillonna et l’attacha en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire puis, le léchant, pinçant, fessant tout en lui offrant des positions plus sensuelles les unes que les autres, elle réussit à faire de nouveau s’ériger le membre convoité.

Entre horreur et délice, l’amant crut qu’il ne parviendrait jamais à atteindre son propre plaisir, tout en redoutant de devoir produire de nouveau un tel exploit une fois la sauvageonne satisfaite…

Comprenant sans doute que son amant frôlait l’apoplexie, la dévoreuse se retira et laissa s’échapper sa proie. Pour mieux se glisser dans la chambre attenante où l’une de ses collègues, épuisée par des nuits de labeur, ne se fit pas prier pour lui céder sa place.

Il en alla ainsi durant toute la nuit. Et la journée suivante. Jusqu’à ce que tous les hommes présents dans ce lieu impur eussent déguerpis sans demander leur reste, sous les yeux ébahis de la matrone qui n’y comprenait rien.

Le dernier client parti, la diablesse apparut dans le hall, le visage toujours aussi rouge et les yeux toujours aussi brillants. Elle ne portait plus aucun vêtement et la macrelle se demanda comment une aussi magnifique jeune femme avait pu faire fuir autant de clients tout en les faisant crier de plaisir durant des heures…

Sa question ne trouva jamais de réponse. La diablesse se drapa dans une couverture qui recouvrait un canapé et repartit chez elle avec un petit soupir. La macrelle comprit qu’il ne lui restait plus qu’à mettre la clef sous la porte car « chien échaudé ne revient pas ».

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