Chapitre 58 : Loren

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Les semaines passèrent. Au fil du temps, nous remontâmes vers le nord. Après Mull, nous nous rendîmes sur les petites îles de Coll et Tiree. Puis ce fut le retour à Tobermory pour reprendre le ferry qui nous mena sur l'île de Barra. De là, nous remontâmes tout le chapelet des Hébrides extérieures, jusqu'à l'île de Lewis. Ce fut sur Harris, face à la baie de Luskentyre, que je pris ma décision : à notre retour, je quitterais Edimbourg pour nous installer à Glasgow, tous les trois. Nous suivrions Snoog en tournée, l'accompagnerions à chacune des étapes de sa vie d'artiste et de rock star. Il serait là, aussi. Pour vivre avec nous. Accompagner April à l'école, m'encourager dans mes projets, me soulager de tout souci quotidien quand j'en arriverais aux étapes cruciales de la présentation, de la validation. Oui, nous allions vivre ensemble. Parce que nous nous aimions.

Ce jour-là, nous étions partis pour une belle randonnée qui nous mena à un promontoire offrant une vue à couper le souffle sur l'une des plus belles plages du monde. Je n'avais pas beaucoup voyagé, mais Snoog si, et je me fiais à ses appréciations en la matière. Nous restâmes un moment immobiles, à contempler le paysage. Le vent balayait nos cheveux, les envoyant en arrière. Mon regard se perdait dans les couleurs changeantes de la mer et du ciel, avec le sentiment de faire le même voyage quand je fixais Snoog droit dans les yeux.

Même April demeura songeuse face à cette beauté.

Elle était debout entre nous deux. Elle avait lâché nos mains, et s'appuyait d'un côté sur la jambe droite de son père et de l'autre, sur ma jambe gauche. Je sentais sa petite main encore potelée à travers l'étoffe de mon pantalon.

Etait-ce parce que nous étions face à cette immensité ? Que nous étions seuls ? Comme seuls au monde car on ne voyait aucune silhouette alentours ? Ce fut vraiment à cet instant que j'éprouvai le sentiment que nous formions une famille. Et pas parce que Jenna qui passait relever le courrier régulièrement nous avait fait savoir, quelques jours plus tôt alors que nous nous apprêtions à rejoindre l'île d'Harris, que le courrier stipulant que Snoog était reconnu officiellement comme le père d'April était arrivé. Ce n'était qu'un document administratif. De valeur certes, et très important surtout après les démarches que nous avions effectuées et notamment le jugement qui nous avait mis en présence de Jim. Mais ce n'était pas ce papier qui, en mon cœur, me faisait me sentir liée à ces deux êtres qui étaient désormais toute ma vie. Cet homme qui avait bouleversé la mienne en m'entraînant, un soir d'anniversaire, pour une nuit de folie. Et cette enfant, qu'il m'avait donnée sans l'imaginer un seul instant.

Mais j'avais bouleversé la sienne aussi. En acceptant de franchir cette barrière et de le suivre jusqu'à sa chambre d'hôtel. Puis en acceptant chacun de ses cadeaux. Une chanson. Un concert. Un voyage. Des rendez-vous.

Et en lui donnant une enfant.

FIN

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