la modulation d’un violoncelle

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Sa voix avait la modulation d’un violoncelle qui aurait vibré au chœur d’une crypte. Vous vous êtes aimés, là sur le canapé. Le feu jetait sur vous de brèves lueurs que vos corps reprenaient au rythme souple d’une danse. C’était pur bonheur. Ravissement. Extase. Mais combien les mots sont vains pour traduire l’intraduisible. Trop rutilants, trop pleins, trop esthètes. Voyez-vous, il faudrait les faire réduire à petit feu, en faire un concentré, une essence et les humer comme on le fait d’un parfum rare. Ou bien les dessiner en corolles. Ou bien les faire se lever selon une chorégraphie.

   Cette valse sous les lambris de l’isba vous la portez encore en vous tel un nectar des plus précieux. Non, vous n’avez rien oublié. Si vos têtes sont absentes, vos corps, eux, n’ont pas renoncé à se souvenir. Quelque part ils dansent et, jamais, ne s’arrêteront. Même la mort n’interrompt ce somptueux ballet. C’est de l’ordre d’une idée. Dès que c’est lancé, cela poursuit le long voyage de la signification, ça brille quelque part au firmament ou dans le ventre fécond de la terre. Cela s’étoile. Cela fait de longs rhizomes qui tapissent le sol de leur vibrante énergie. Vos mains si humblement réunies, vos attitudes si hiératiques ne traduisent que ceci, cet amour qui vous a traversés un jour, qui continue son sabbat, peut-être en dehors de vous puisque la faiblesse vous a gagnés, mais nullement l’amnésie. Toujours un bourgeonnement d’une rumeur ancienne qui fait son poème alentour de vos consciences. Refusez donc que votre attitude commune ne puisse recevoir que le qualificatif « d’affliction », de « perte », de « désolation ». Vous méritez mieux que ceci. Votre vie ancienne témoigne pour celle qui vous visite aujourd’hui. Peut-être n’aurez-vous « l’insolence » de proférer ce salutaire « Merde à Vauban » du saltimbanque aux cheveux fous, à l’âme généreuse, cette révolte libératrice (tautologie, évidemment !), cependant, sentez en vous cette résurgence actuelle de ce passé qui vous appartient en propre, dont nul ne peut vous dérober la présence, soyez « tout amour, rien qu’amour » dans cette chair qui flétrit mais ne renonce nullement.

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