21.

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Le quartier de Yoff était l’un des endroits les plus actifs dans Dakar. En effet même durant la nuit celle-ci ne désemplissait pas du fait de ses différents commerces fermant à des heures tardives. La musique provenant des différentes boutiques mettait de l’ambiance à travers ces rues bondées et ces trottoirs débordant d’animation. C’était aussi un endroit parfait pour masquer les cris d’un homme qui se faisait battre à l’abri des regards.

Ibrahima Mané ne comprenait pas ce qu’il lui était arrivé. Tout ce dont il se rappelait c’était qu’après sa journée de travail en tant qu’expert-comptable pour la maison de disque Golden Jam il se dirigeait comme à chaque fois vers sa voiture qu’il garait dans un terrain vague non loin de là où il travaillait. Au moment d’ouvrir la portière de sa voiture il sentit un poids immense s’abattre sur sa nuque, puis plus rien. Maintenant il était ligotait sur une chaise dans ce qui ressemblait à une maison en construction, le visage en sang, incapable d’appeler à l’aide, au bord de l’évanouissement. Tout son corps était en feu, il avait des côtes brisées. Ses sens étaient confus. Il arrivait à distinguer au loin les conversations des hommes qui le persécutaient. Des gémissements sortirent de sa bouche comme s’il essayait de manifester son existence. Quelques minutes plus tard un homme vint vers lui avec un petit pot rempli d’eau qu’il versa sur sa tête pour le maintenir éveillé.

- Hey … hey, réveilles toi

L’homme releva la tête de son invité pour l‘examiner à l’aide d’une lampe de poche.

- C’est bon, il peut encore parler

- Arr… arrêtez je vous en prie, bégaya-t-il

Un autre homme de la même carrure que l’expert-comptable s’était rapproché en tirant une chaise en plastique dans son sillage. Il la faisait trainait et celle-ci faisait un bruit atroce. Après l’avoir posé devant Ibrahima il se mit à parler

- Il se fait tard Mané, je suis sûr que tu veux rentrer chez toi et nous aussi.

- Lai … ssez moi partir, dit-il péniblement

- Ce ne sera pas possible, en tout cas pas tant que tu seras disposé à faire ce qu’on te demande

- Je peux … vous donner… de… l’argent, proposa-t-il

L’homme en face de lui se redressa sur sa chaise en lâchant un soupir. Sous leur pied il y avait une bâche installée préalablement sur laquelle coulé de la sueur et du sang.

- Nous avons déjà été payés pour faire ce que nous faisons

Ibrahima arrivait à distinguait en arrière-plan trois autres silhouettes

- Je peux vous … payer plus, réussit-il à articuler

Un rire sarcastique s’échappa.

- Arrêtes de rêver nous savons tous les deux que c’est impossible. Si seulement tu savais ce qu’on a encaissé chacun …

- Mais … qu’est-ce que vous voulez ?

- Je vais te rafraichir la mémoire, je sais que c’est un peu dur de se rappeler pourquoi tu es ici vu tout ce qu’on t’a fait mais c’est de ta faute

Il s’était levé de sa chaise et avait posé sa main son épaule

- Notre employeur n’aime pas la tournure qu’a prise l’enquête sur la mort d’Abdou Karim Niang. Ce qu’il n’aime pas c’est surtout ton témoignage.

- Je n’ai … fait que suivre … des instructions

- On t’a demandé de mentir ? tout ce que tu as à faire c’est de retourné voir les gendarmes et leur dire que tu t’es trompé.

Ibrahima écarquilla des yeux, il le lui disait comme si c’était simple. Il se rappelait maintenant de tout ce qu’on lui avait dit. Il avait refusé la première fois, au tout début, c’est pour cela qu’ils l’avaient roué de coups.

- Ce n’est … pas aussi … simple. Je … ne peux pas. C’est juste impossible. On parle de … plusieurs millions de francs. Je ne suis pas … le seul impliqué

- Ce n’est pas très intelligent, tu risques beaucoup pour des gens qui ne sont même pas assis ici, avec toi. Tu veux les protéger parce qu’ils le feraient s’ils étaient à ta place. Je comprends totalement

- C’est vrai … alors vous allez me relâcher.

- … mais mon employeur, lui n’est pas très compréhensif, avait-il dit sur un ton grave

Ibrahima savait, lorsqu’il falsifiait les comptes de la maison de disque, qu’il pouvait se faire beaucoup d’argent mais risquait d’aller en prison si on venait à le savoir mais il n’aurait jamais imaginé se retrouver ligotait sur une chaise au beau milieu de nulle part en quasi danger de mort.

- Qui … est-ce ? demanda-t-il curieux

Il n’eut aucune réponse

- Cette personne n’a … aucune idée dans quoi je me suis … fourré et avec qui. Et elle veut me forcer à me dénoncer, elle n’a … aucune idée des enjeux, je vais finir en prison !

Un des hommes qui était resté dans l’ombre s’était avancé. Dans le peu de lumière qui existait dans cet endroit Ibrahima réussit à distinguer le tranchant de la lame d’une machette. Il paniqua et gaspilla les dernières forces qui lui restaient pour faire basculer la chaise.

- Qu’est-ce que vous allez faire avec ça ? demanda-t-il affolé

Son interlocuteur le releva, avec l'aide de ces camarades.

- Notre employeur, dit-il sur un ton encore plus sombre, est décidé à avoir ce qu’il veut de toi et tu ne pourras rien n’y faire. Je te conseille, mon ami, de changer d’avis.

il se saisit de la machette et le dos de la lame sur le coup de ce dernier, lentement, lui faisant réaliser le sort qui lui était réservé.

- Il nous a demandé, au cas où tu persisterais, de te couper les doigts un par un jusqu’à ce que tu te décides à faire le bon choix.

Très vite ils vinrent tous sur lui pour défaire ces liens et le jetèrent au sol. Ils se saisirent de ces mains pour le maintenir contre le sol. Ibrahima se débattait comme il le pouvait en suppliant et en pleurant mais ces hommes étaient sérieux et avait l’intention d’aller jusqu’au bout, il n’avait que faire de ses lamentations. La personne qui était derrière tout ça, qui que cela puisse être, était sadique. Il ne pouvait pas gagner contre elle, il aurait dû refuser depuis le début. Au moment où la lame allait s’abattre sur ces doigts et qu’il sentit que son cœur était sur le point de le lâcher il usa de ces dernières forces pour crier

- Je vais le faire !!! C’est bon, je vais le faire

Les quatre hommes le lâchèrent progressivement. Sur son visage se côtoyait le sang et les larmes, il n’en pouvait plus.

- Nous n’en serions pas arrivés là si tu avais accepté depuis le début, dit-il d’une voix plaine de dédain

On lui lança un sachet. Il fut surpris de son contenue. A l’intérieur s’y trouvait tout un tas de feuilles et d’enveloppes.

- Tu sais ce que tu dois faire avec ça, dit-il tout simplement, puis se retournant vers ses camarades, aidez le à se relever et nettoyait le.

Au même moment son téléphone sonna, il le porta à son oreille

- Allô … le travail est fait … bien sûr … ce n’est rien, nous avons fait pire pour beaucoup moins … ne vous inquiétez pas, il ne posera aucun problème

Il avait dit ces mots en croisant le regard avec l’expert-comptable. Un frisson le parcourue. Celui-ci comprit qu’il n’avait aucune échappatoire et quoi qu’il arrive, s’il ne faisait pas ce que l’on attendait de lui, il perdrait bien plus que quelques doigts.

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