Le Festin

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Ce soir-là, le festin allait être somptueux.

La dinde cuisait au coeur d'un four plus brûlant que jamais, au milieu d'un plat en inox reluisant entre les pommes au four et les tomates farcies. Les légumes sur la table n'étaient pas encore tout à fait en place. La plupart étaient néanmoins prêt : la laitue, les fines tranches de tomates, les oignons, les haricots. Ne manquait plus que les fines herbes à découper de la manière la plus fine et la plus parfaite qui soit. Cela, la mère s'en chargeait. Sous la douce musique d'un vinyle entonnant une douce balade au piano à la manière d'un Chopin. Chaque année elle prenait en charge plus ou moins tout : les diverses recettes, les idées, puis elle en dessinait généralement la vision, ce qu'elle voyait dans son esprit, jusqu'à la préparation, des entrées, légumes, sauces vinaigrettes diverses, à la fameuse dinde, la bonne dose de viande avec les tranches de cerfs qui avaient été chassés le matin même, la volaille sacrifiée toujours pour la bonne cause une heure avant, le daim chassé de même le matin même. Il y avait même du mouton ainsi que de la biche. Ces mets difficiles à cuisiner n'était en rien un soucis pour la tendre mère Snow. Des cuisses aux côtes, des meilleurs morceaux jusqu'aux plus mauvais et les moins nobles, cette bonne femme savait tout simplement tout cuisiner. Il n'en restait rien à part les os. Elle gardait d'ailleurs toujours ces derniers car elle en connaissait l'importance... En fait, tout ici avait son importance. Car cette année, ça serai peut-être eux, qui sait..?

La porte grinça.

"Ah tu es enfin là, je commençais à m'inquiéter.

- J'ai pas pu trouver ce que tu m'as demandé, je suis même allé demandé aux Jones s'ils avaient ce qu'il fallait mais pas moyen de...

- Tu n'es pas sérieux ?

- Si, je te dit que...

- Et comment on fait là ?"

L'ambiance était en contraste avec la discussion. La balade de piano poursuivait son morceau de chemin note après note tandis que la mère cherchait des explications sur un ton houleux.

"Écoute j'ai fait de mon mieux, je n'ai rien trouvé, les deux boutiques de monsieur et madame Lorre sont déjà fermées et la boucherie des Gregor a été vidé !

- Je t'avais dit de t'y prendre en avance pour la chasse ! Comment je vais me dégôter du lièvre maintenant hein ?! A cette heure-ci ! C'est ta faute bon sang, je peux pas tout gérer non plus et tu le sais !

- C'est rien ça va ! Bordel c'est pas la fin du monde !

- Ne jure pas, surtout pas ce soir Henry !

- C'EST BON !"

Ils se turent pendant un moment, comme si la mélodie de Chopin apaisait peu à peu le conflit. La mère se frotta le front, par consternation. Elle était belle. Brune, les cheveux très longs, bouclés, attachée en un chignon parfait au-dessus du crâne. Ses vêtements d'un blanc immaculé recouverts d'un tablier un tantinet moins propre mais suffisamment pour la féliciter de cuisiner aussi proprement. Une robe blanche, légère, laissait paraître ses formes sensuelles. La frustration affichée sur son visage n'enlaidissait en rien sa nature merveilleuse.

"Bon, va dire aux enfants que tout est prêt. Je n'ai que la dinde à sortir. On leur annoncera la nouvelle."

Le mari ne dit pas un mot et s'exécuta.

La mère eut juste le temps de sortir la dinde et de transvaser le plat entier sur un plat en argent taillé à la perfection pour l'occasion. Elle plaça le plat au centre de la table qui était fin prête, juste après avoir coupé les herbes.

"Whoa !! Maman c'est...

- ...Magnifique !"

Les deux enfants, un garçon, une fille, pas plus grand que huit ans, étaient émerveillés. La splendeur de la table dressée n'avait d'égal que leur étonnement. La mère en était fière.

"Chaque année les enfants, c'est toujours pareil vous savez ?

- Non, vraiment c'est encore plus beau que l'an passé ! Hein Gwen ?

- Oui Marc a raison !

- Merci les enfants c'est vraiment gentil. N'oubliez pas non plus votre père qui s'est procuré les viandes en allant les chasser dès la première heure à l'aube !"

La voix quelque peu tremblante...

"Mais...

- Quoi, une mauvaise nouvelle maman ?"

Les gamins somptueusement habillés commençèrent à douter de la magnificience de la scène. La petite était accoutrée de la même manière que sa mère et le garçon, comme son père, vêtu d'un costume noir, à la chemise blanche, un pantalon à pince à sa taille, aussi blanc que la chemise. Des chaussures cirées à la perfection scintillait à ses pieds.

"Votre père a quelque chose à vous annoncer...

- Quoi ?

- Mais qu'est-ce que vous nous cachez vous deux ?"

Le père prit son courage à deux mains.

"Eh bien nous...je n'ai pas pu trouver de lièvre..."

Les gamins étaient consternés.

"Quoi ?

- Mais...tu sais qu'Il adore ça...il faut qu'on aille en trouver !

- Vite !"

La mère se mit à leur niveau.

"Pas d'inquiétude les enfants. Rien de grave, vogtre père n'a pas penser à cela. Vous savez, c'est beaucoup de pression pour nous. Nous devons tout organiser, nous devons faire attention à ce que tout soit parfait et ça ne l'est pas toujours.

- Mais, ça veut dire qu'Il ne...

- Chhht. On fera en sorte qu'Il le fasse. Vous savez, l'histoire n'a pas changé mes amours.

- Oui mais...

- Les enfants. Je vous monte au lit, venez."

La mère emmena ses petits à la chambre, à l'étage, laissant derrière un festin grandiose.

"Tu crois qu'il nous...

- Tout est possible ma petite Gwen, rassura la mère en les plaçant au lit, encore tout habillés.

- Raconte-nous encore l'histoire de Sa venue.

- Oh oui raconte-nous !

- Bon, laissez-moi allumer la veilleuse. Voilà. Alors, que voulez-voius savoir ?

- Comme d'habitude, sa venue.

- La nuit d'hiver, celle où la neige recouvre le vert. La nuit venue, lorsque Lui seul l'aura voulu. Une fois le repas préparé, en son honneur tous auront chassé. Toc-Toc. Une première fois Il frappera. Les enfants sont au lit. Toc-Toc. Une seconde fois il cognera. Les parents sont au lit. Toc-Toc. Une troisième et dernière fois Il osera. Et une fois la porte ouverte, ce qu'Il désire Il prendra."

Les enfants, captivé par l'histoire, n'était pas prêt de dormir. Et s'Il venait chez eux ce soir ? Et s'il prenait ce qu'Il désirait, comme le disait la fable ?

"A quoi ressemble-t-il maman ?"

Un sourire étrange éclaira le visage de la mère. Puis, elle déposa une bise sur le front de ses enfants.

"Nous verrons bien s'Il vient..."

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