Chapitre 14

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Chapitre 14


    Il m'empoigne le bras avec force et ténacité. Mon membre est tellement fin que ses doigts font le tour de mon biceps sans aucune difficulté, malgré l'épaisseur du gilet et de la chemise.

    " Cette fois, je n'y survivrai pas... "

    Il sort rapidement de la pièce. Je n'ai rien le temps de comprendre. Tout se passe si vite.

    Il me tire, me traine, il va vite, si vite que je n'arrive pas à le suivre. Je trébuche.

    Contre toute attente, il me tire par le bras pour me relever. Personne n'est là pour voir ça. Et avec un regard rempli de colère, d’empathie et d'inquiétude, il me dit :

    - Si tu veux vivre, tu devras m'obéir. Si tu me désobéis, je ne serais pas responsable de ton sort.

    " Hein ? "

    Et naturellement, je lui réponds sans réfléchir .

    - Pourquoi vous me dites ça ?

    - Tais-toi ! Ne me parle pas. Aucun prisonnier n'a le droit à la parole. Contente-toi d'obéir.

    Je me contente d'obéir. Mais mon cerveau est en ébullition. Il cherche à comprendre la situation. Un Allemand, qui plus est un nazi sous les ordres d'un Führer pathétique et lâche, essaie de me sauver. Je ne comprends rien. 

    Je le suis.

    Il m'emmène à l'autre bout du camp, dans un endroit encore en construction où femmes et hommes sont mélangés.

    Il y a beaucoup de gens. La première scène que je vois en arrivant, c'est celle d'un homme se faisant attaquer par des chiens. Les nazis rigolent devant le spectacle, tandis que les autres prisonniers font mine de rien.

    - C'est ce qu'ils te feront si tu ne m'obéis pas, me dit-il. Maintenant baisse les yeux et tiens-toi tranquille.

J'obéis.

    - Commandant Klein, je vous apporte la prisonnière.

    Le commandant me regarde. Même si je ne le vois pas, je sens son regard me transpercer comme des coups de poignards en plein cœur.

    - Elle est encore vivante ? Coriace ! Vu son état. On verra si elle supportera le travail forcé. Allez, mets-moi ça là-bas.

    - Bien commandant.

    Il m'emmène à l'endroit même où l'homme venait de se faire bouffer par les chiens quelques instants plus tôt.

    " Mon Dieu, il y a du sang partout. "

    Il me lâche le bras.

    - Tu regardes les autres et tu fais la même chose.

    Puis il chuchote.

    - Tâche de rester en vie jusqu'à ce soir.

    Puis il s'en va.

    J'ai une pioche dans les mains, de la terre et des pierres partout autour de moi. Les prisonniers creusent dans le sol congelé et transportent les grosses pierres jusque dans des brouettes.

    Chose que je n'avais jamais remarqué avant, ce sont les fumées qui partent de derrière cet endroit. Probablement des fours crématoires, mais je ne vois pas de bâtiments.

" Bizarre ."


    Durant des heures interminables, je creuse, je creuse et creuse encore. Ici, c'est pire que le tri. Le rythme est soutenu et le moindre faux pas vous fait exécuter sur le champ.

    Soudain, un homme arrive, accompagné de plusieurs officiers SS et de commandants. Il est vraiment bien entouré. Je continue toujours de travailler en jetant quelques coups d’œils par-ci, par là.

    Sous les ordres du commandant Klein, nous arrêtons tous de travailler. Nous restons debout, sans bouger, tête basse.

    - Monsieur le Ministre, ravis de vous voir.

    - Merci mon brave. Comment avancent les travaux ?

    - Comme vous pouvez le constater par vous même, ils avancent M. Himmler.

    - Et la Solution Finale ?

    - Nous avons été obligés de creuser de nombreuses fausses. Nous avons un rendement tellement élevé qu'ils nous étaient plus possible de tous les brûler.

    - Je vois. Emmenez-moi au bâtiment, j'aimerais voir la contenance des fours.

    - Bien Monsieur le Ministre. Je vais vous y faire conduire.

    - Et tant que vous êtes, ce chien de juif là-bas, il a osé me regarder.

    " Boum ! "

    - Problème résolu Monsieur Himmler.

    " Himmler... un des nombreux Ministres d'Hitler je présume. "

    La sonnerie retentit. C'est l'heure de la pause.

    À peine avons nous eu le temps de commencer à boire notre bouillon de pisse que nous revoilà déjà au travail. Comme à mon habitude, j'ai gardé un petit morceau de pain pour le soir.

    Revoilà Himmler et sa troupe de petits toutous à ses pieds. Cette fois, Fixateur est de la partie. Le Ministre s'arrête de nouveau vers nous.

    - Et bien, ça n'a pas beaucoup avancé depuis tout à l'heure. Vous devriez revoir votre main-d’œuvre si vous voyez ce que je veux dire.

    " Mais quel monstre ! "

    - Je vais remédier au problème M. Himmler, annonça le commandant Klein. METTEZ-VOUS EN RANG DE QUATRE BANDE DE CHIENS !  nous hurle-t-il dessus.

    " Il me fait peur. "

    Je suis à la troisième rangée, colonne deux.

    - Commandant, permettez-moi de vous alléger de cette tâche. Restez près du Ministre.
    - Très bien Franz, va-y.

    " c'est Fixateur ! "

    Il sort son arme, et la pointe dans notre direction.

    - Demandez leur de lever la tête cette fois-ci, je veux voir leur peur et leur supplice, demande Himmler.

    - OBEISSEZ !

    Nous obéissons.

    Puis, il tire.

    Une deuxième fois.

    Une troisième.

    J'ai les larmes qui coulent et j'entends ces sales connards rires aux éclats.

    Un quatrième.

    Et le pire de tous, le cinquième. Le tire vient exploser le crâne de la femme juste en face de moi. La balle ressort et frôle ma joue droite. Heureusement, j'étais décalée sinon...

    - Arrêtez jeune homme, vous avez fait de l'excellent travail, s'exprime Himmler. Remplacez les morts commandant. Et si jamais ça ne va pas assez vite, vous connaissez le protocole.

    - Très bien Monsieur le Ministre. Je vous raccompagne. Franz, surveille-les.

    - Bien commandant.

    Mon Dieu, je suis couverte de sang. J'en ai sur les mains, le visage, les vêtements... Partout ! Je ne peux m'empêcher de pleurer.

    - Au travail bande de chiens, allez !

    Je reprends ma pioche et recommence à creuser, la boule au ventre, l'estomac en vrac, le cerveau en friche.


    Au retour à mon baraquement, je suis toujours couverte de sang. Je me couche sans perdre une minute et je pleure, dans ma crasse.

    Sophie, une des nouvelles prisonnières, vient à mes côtés pour tenter de me réconforter. Mais rien n'y fait. Je suis inconsolable.

    La porte s'ouvre. Franz est là. Toutes celles déjà couchées se lèvent.

    Il vient vers moi et dit.

    - Ce soir, je vais m'amuser avec toi.

    Puis il m'empoigne comme à son habitude et nous voilà partis.


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