Chapitre 2

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Mon nid était en fait une pièce minuscule dans le sous-sol d’une maisonnette de banlieue. Ce qui était ma chambre, mon lieu de vie, mon abri et peut-être un jour mon cercueil devait être une cave à vin du temps où la civilisation s’épanouissait encore. Il y avait tout juste la place pour un matelas et une étagère de bazar. Mes provisions s’entassaient là, ainsi que mes réserves d’eau. Une gouttière courait près de la seule et unique lucarne de la pièce. J’avais réussi à la relier à des bidons et installé de quoi filtrer l’eau de pluie.

Cette cachette n’était pas sûre, j’en étais consciente. Disons simplement que c’était la moins dangereuse que j’avais trouvée. Cette banlieue était vide depuis des lustres, elle avait été pillée jusqu’à l’os et même les rats l’avaient désertée. Il existait de plus en plus d’endroits comme celui-ci. Les survivants s’étaient rassemblés pour former des communautés et rares étaient les gens qui risquaient encore de rester seuls. Quand j’avais commencé à survivre par mes propres moyens, je m’étais juré de changer de planque toutes les semaines, pour que personne ne me trouve jamais. Je m’y étais tenue au début. J’effaçais le plus de traces possibles et je décollais vers un autre endroit. Petit à petit, ça n’a plus été un déménagement toutes les semaines mais toutes les deux semaines, toutes les trois semaines. Aujourd’hui, ça faisait deux mois que je n’avais pas bougé. C’était imprudent et je le savais.

Je le savais, mais j’en pris vraiment conscience lorsque je me rendis compte que j’avais été visitée. La prise de conscience comme ça, c’est hyper brutal et c’est mille fois plus frappant que n’importe quel coup de poing dans la tronche – et je sais de quoi je parle.

Je ne pouvais pas dire que la porte avait été forcée, puisqu’elle n’a jamais été fermée, mais son entrebâillement était inhabituel. De plus, je laissais toujours un objet discret derrière qui serait repoussé si quelqu’un ouvrait la porte, et la petite figurine d’éléphant qui me servait de repère avait clairement échoué jusqu’au mur. La personne qui était entrée n’avait pris aucune précaution.

Je dégainai le couteau à cran d’arrêt que je gardais serré contre ma cuisse droite. La lame me précédant, je visitai une à une les pièces de la maisonnette. Aucun signe de vie au rez-de-de-chaussée, ni à l’étage. La poussière ne semblait pas avoir été déplacée. Cependant, lorsque j’ouvris le placard qui cachait la trappe vers mon nid, mon sang ne fit qu’un tour. La trappe était grande ouverte. En me penchant au-dessus de l’ouverture, je vis clairement une personne allongée sur mon matelas. Mon cœur battait comme un tambour mais j’étais calme. Je savais gérer des situations bien pires.

Je me glissai silencieusement dans la pièce et atterris sur le sol sans avoir provoqué le moindre son. Ça aussi, je savais y faire. Les déplacements discrets, c’était une des clés de la survie. Je détaillai un peu plus clairement l’individu qui avait élu domicile dans ma planque. C’était un homme. Il avait des vêtements troués et tachés, entre autres par du sang. Aucun doute là-dessus. Mais il ne semblait pas perdre son liquide vital puisqu’il n’y en avait aucune trace ailleurs. Il était tourné vers le mur, recroquevillé sur lui-même. Il dormait. Un rapide coup d’œil panoramique me mit en rage : ce salaud avait mangé la quasi-totalité de mes provisions ! Je ne le remarquai que maintenant : des boîtes de conserves vides jonchaient le sol. Sur mon étagère il ne restait qu’un bocal de cornichons infect. Ben voyons ! C’est sûr qu’avec tout ce qu’il y avait, il avait eu le luxe de pouvoir manger ce qui était à son goût.

Un dédain et une haine monstrueuse m’envahissaient. Ce gars avait trouvé ma planque, vidé mes rations de survie et dormait tranquillement sur mon matelas. C’était presque un viol.

Je me jetai sur lui en prenant soin de bloquer toute tentative de résistance. Mes genoux prêts à l’écraser, je lui tirai la tête en arrière en plaquant mon couteau sur sa gorge. Il se réveilla en hurlant et en se débattant. Je l’écrasai de tout mon poids tout en serrant la garde de mon arme.

— Pas un geste, ou je te bute.

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