Cadavre Exquis

2 minutes de lecture

Phrase d'intro : Arpagon s’extasie littéralement avec le sang des impies.

Mot imposé : une lorette.

Contrainte : faire en sorte que le texte soit joyeux et que les lecteurs en ressortent le cœur léger.

Temps de rédaction : 30 minutes max.

*

Arpagon s’extasie littéralement avec le sang des impies. Cette odeur, cette texture, cette couleur… Quel bonheur ! Il lève ses mains souillées devant son visage, qui se fend d’un sourire radieux, et un soupir satisfait franchit la fine ligne de ses lèvres.

— Arpagon, qu’est-ce que tu fiches encore, bon dieu d’merde ?

Aaah le commandant Lorynthe ! Chic type, quoiqu’un peu vulgaire. Arpagon l’appelle secrètement lorette, d’ailleurs. Rien à voir, mais il trouve ça drôle d’imaginer ce grand gaillard et sa moustache impeccablement taillée, vêtu de coquets vêtements n’ayant d’égal que la légèreté de ses mœurs. Pour s’exprimer plus clairement, Arpagon dirait que le commandant est un homme qui sait vivre. Un fieffé modèle, en somme.

— Regardez comme c’est beau, commandant ! Toutes ces gerbes, ces effusions ! Une pure merveille !

— Mais qui m’a foutu un abruti pareil… soupire Lorynthe d’un ton excédé tandis qu’il relève la visière de son casque d’où s’échappent presque des rigoles de sueur. Magne ton cul si tu n’veux pas que je le fasse résonner avec ma putain de botte !

Arpagon s’empresse d’obéir. Il s’agirait de ne pas s’attirer les foudres de son supérieur alors que jusqu’ici, c’est un sans-faute pour l’adjudant de semaine.

Se munissant donc du matériel adéquat, Arpagon trottine, piétine et virevolte dans un bien joli tableau de pétales de fleurs écarlates mouchetant parfois sa tenue réglementaire lorsque ses pieds bondissent dans une marelle encore chaude. Parfois, lorsque l’odeur délicieusement cuivrée taquine ses narines, Arpagon, fin connaisseur, s’accroupit et recueille le précieux liquide qui s’épanche encore des abreuvoirs à mouches d’impies trépassés. Il poursuit sa besogne en chantonnant un air de chez lui, lui rappelant les champs de lavande, la douceur d’une mère au visage poupin, la méridienne éclaboussée de soleil en plein après-midi…

Son esprit s’apprête à dériver vers cette rivière d’eau troublée par le passage de bans d’écrevisses lorsque sa botte bute contre une motte.

Alors, la réalité reprend ses droits et il coule son regard sur la chose la plus merveilleuse qu’il n’a jamais vue de toute son existence – et Dieu sait qu’elle est longue !

Ses lèvres s’arrondissent de surprise et son cœur se met à battre à côte fendre.

— Par le sang nourricier des impies trucidés ! s’exclame-t-il, saisi par la stupeur.

À ses pieds, la beauté au teint pâle, aux viscères saillants et à la constitution charnelle et architecturée semble lui sourire. Le soldat porte une main émue à son cœur, rencontrant déjà un certain durcissement de son être.

— Commandant, je crois que j’ai trouvé l’amour !

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