19 janvier 2021 (Crustacés et coquillages)

3 minutes de lecture

Cela fait trois jours que le couvre-feu a été avancé de 20 à 18 heures

Elle : « ″Insupportable embouteillage. Inégalités selon les zones. Coups de colère, mais peu d’accidents à relever. De nouveaux ralentissements à prévoir après un démarrage poussif et une brusque accélération. Il faut faire face aux afflux. Des bouchons encore prévus pour de nombreuses semaines, les Français devront faire preuve de patience.″

Moi : - Tu me fais un résumé du bulletin d’infos de la radio ?

Elle : - En quelque sorte. Je suis un peu étonnée : je n’avais pas compris qu’on était en période de grands départs. C’est déjà les vacances ?

Moi : - Non, les médias parlent de la campagne de vaccination.

Elle : - Ah ouais… Je me disais aussi que l’été était bien précoce et bien pluvieux cette année ! Y a même eu de la neige, alors je trouvais tout ça vraiment bizarre !

Moi : - Ce n’est pas maintenant que les gens vont partir… du moins ça n’en prend pas le chemin.

Elle : - Tu me parlais de voyages virtuels la semaine dernière, non ?

Moi : - En effet.

Elle : - Maintenant que nous sommes à l’arrêt, tu pourrais m’en dire plus. Moi, toute cette histoire d’embouteillages, ça m’a donné envie de causer vacances.

Moi : - Mmm, oui, attends, je vais retrouver le site de cette agence de voyages un peu spéciale… (Tapotant sur mon smartphone) Ah, voilà. "Notre but, vous redonner le smile."

Elle : - Le quoi ?

Moi : - Le sourire.

Elle : - Ils peuvent pas le dire simplement ?

Moi : - "Ce qui se conçoit mal s’énonce obscurément, et les mots pour le dire arrivent difficilement", disait-on déjà au XVIIe siècle… Tiens, la preuve (lisant) : "Aujourd’hui, si la crise sanitaire nous a fait perdre de précieux mois sur notre roadmap initiale, elle a aussi donné encore plus de sens à tout projet de voyage, surtout en période de confinement. Grâce à nous, vous allez vous retrouver dans la peau d’un frequent flyer et profiter des joies de l’outdoor depuis le confort de votre home sweet home. Plus de besoin de woofing ni de couchsurfing pour bouger à petit prix."

Elle : - Pfiou ! Quand on a réussi à décrypter ça, on a largement démontré qu’on peut s’adapter à tout, non ? Décris-moi plutôt une de leurs destinations de voyage, pour voir si c’est assez puissant pour qu’on y croit depuis l’endroit où on se trouve.

Moi : - "Imaginez-vous quelque part sur le littoral du Guerrero et ses plages de sable infinies, bordées d’eaux turquoise et de paysages sauvages…"

Elle : - Aaaaah, les eaux turquoise… Très bon choix, le turquoise.

Moi : - Oui, ça va, on sait que tu es de couleur turquoise !

Elle : - Ben, tu vois, c’est le symbole des vacances, de la plage, de l’exotisme… Le bonheur, quoi.

Moi : - Arrête d’en faire des caisses, veux-tu… Je reprends leur descriptif… "Grâce à nos programmes d’une qualité sans précédent, vous voilà dans une treehouse cylindrique au bord de l’eau…"

Elle : - Treehouse ?

Moi : - Hum… Attends, il y a des explications… C’est "comme une longue-vue braquée sur l’océan avec, au-dessus de soi, les houppiers des palmiers et, au-dessous, les cladodes des cactus. Époustouflant."

Elle : - Non mais c’est la description d’un voyage de rêve ou un traité de botanique que tu me chantes là ? Houppiers, glapodes. Ça bride un peu l’imagination.

Moi : - Clatodes… non, cladodes.

Elle : - Et c’est quoi un… une cladode ?

Moi : - J’en sais rien du tout. C’est marrant, ça me fait penser au poème Jabberwocky de Lewis Carroll, un célèbre auteur britannique. Cladode ne jurerait pas dans "Tout flivoreux étaient les borogoves / Les vergons fourgus bourniflaient"…

Elle : - Jabber… On était censées voyager un peu, et ce langage de tordus rend tout à peu près pénible !

Moi : - Ben de toutes façons, ils t’annoncent en première page de leur site web que ″le véritable voyage que l’on fait se déroule tout d’abord en soi″.

Elle : - Nous voilà frais avec tout ça ! Au fait, c’est où, Guerrero ?

Moi : - Au Mexique. Un pays où on a longtemps pratiqué les sacrifices humains.

Elle : - Sympa.

Moi : - Ils se sont arrêtés le jour où ils se sont aperçus que ça faisait fuir les touristes.

Elle : - Faut dire que tuer les gens, c’est pas très vendeur.

Moi : - Assez peu en général. En tout cas, au Mexique, cela fait longtemps que les catcheurs ont compris qu’il fallait porter un masque pour se protéger… C’est également le pays de Zorro, qui était masqué lui aussi…

Elle : - Des précurseurs, en somme ! »

Annotations

Vous aimez lire Grande Marguerite ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0