Chapitre 2-3

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Du chaos ambiant aurait pu surgir une nouvelle société, mais les miliciens verts n’entendaient pas laisser une once de leur pouvoir. Ils devaient donc justifier leur existence par une répression toujours plus féroce.

Avec le temps, elle concernait donc des actes ou des idées toujours de moins en moins graves ou importants, comme s’il fallait constamment trouver de nouveaux délits pour occuper les gardes verts. Il est vrai que ceux-ci formaient désormais la plus grosse partie des employés d’un état à la dérive.

La loi est intemporelle et universelle : un régime totalitaire qui n’a plus d’ennemis doit s’en inventer, pour pouvoir continuer à justifier sa raison d’être. La République fédérale n’y échappait pas.

Fédérale n’avait d’ailleurs plus de raison d’être, elle avait cessé de l’être depuis longtemps, et les dirigeants disaient souvent simplement « la république », en faisant semblant d’être des philosophes platoniciens. Ils n’étaient bien sûr ni philosophes ni platoniciens, et ne l’avaient jamais lu, mais peu devaient se douter que leur état totalitaire n’aurait pas déplu au vieux barbu grec.

Laissant de côté ces réflexions mille fois ressassées et inutiles, quand l’unique mot d’ordre de la vie quotidienne est « survivre », Karl Ludwig prit par une ruelle qui descendait vers le bas quartier, le long du Neckar.

Il pénétrait pour la première fois de sa vie dans la zone interdite.

Sombre et sans électricité, ici la jungle végétale se mêlait à la jungle humaine. Même les miliciens ne s’y aventuraient plus, sous peine, en cas de capture, de risquer d’en ressortir émasculés avec un poireau enfoncé dans le fondement.

Hans Mader avait échappé une fois de peu à la castration, mais pas au poireau, ce jour-là en fait une courgette, légume de saison oblige, de belle taille. Il avait, sur le coup, assez peu apprécié l’expérience, nouvelle pour lui, qui l’empêcha pendant trois mois de marcher droit, et promit de se venger un jour.

Il n’avait jamais osé y remettre les pieds, pour ne pas parler des fesses, mais traquait ceux qui s’en approchaient.

Avec le temps. Cependant, des sensations étranges commencèrent à le démanger et il s’affilia au syndicat LGBT, largement majoritaire chez les gardes verts, par conviction ou par opportunisme. La motivation nouvelle d’Hans Mader pour la cause lui permit d’obtenir sa première promotion. L’expression « promotion canapé » avait depuis longtemps été remplacée par « promotion brouette », mais le principe restait le même.

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