De jolis ciseaux bleus

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Depuis ce jour, mon quotidien est devenu un enfer ! Bien que c'était très douloureux, je parvenais à supporter les mauvais traitements que m'infligaient Alex, mais depuis qu'il m'a intimidée devant les autres élèves, je subis des moqueries de la part de dizaines d'autres adolescents tous les jours. Je n'entends pas leurs propos, mais mon coeur se serre à chaque fois que je les vois éclater de rire en me pointant du doigt. Je suis bousculée dans les couloirs entre chaque cours et certains profitent même de la récréation pour m'atteindre physiquement ou s'amuser à voler et abîmer mes affaires.

C'est lui qui a engendré cet enfer, mais étonnamment, je ne lui veux pas. J'espère juste que les choses s'amélioreront avec le temps.

Plusieurs jours s'écoulent ainsi. Aujourd'hui, je me rends à l'école comme à mon habitude. J'arrive devant le grillage pile à l'heure où la sonnerie est sensée retentir. Avant, je venais toujours un peu en avance pour profiter des quelques minutes qui me restent avant le début des cours pour m'asseoir sur un banc et lire tranquillement un livre, mais depuis que l'enfer a commencé, je m'arrange toujours pour venir pile à l'heure et éviter ainsi de me faire intimider par les autres élèves dès mon arrivée.

Je traverse donc la cour en trottant pour ne pas arriver en retard en classe. J'intègre le rang au moment où il commence à avancer pour se rendre en cours.

Nous commençons la journée par une leçon d'histoire. Je m'aide de ce qui est écrit dans mon manuel et de ce que le professeur rédige au tableau pour comprendre l'essentiel du cours.

Au bout de deux heures, la leçon prend fin et nous sortons tous dans les couloirs pour nous rendre en cours de récréation. Je décide de passer les dix minutes de pause qu'on nous accorde dans une cabine de toilettes. Ainsi, je ne risque pas de me faire encore embêter.

Je m'enferme donc et m'adosse à la porte de la cabine, attendant patiemment que la récréation prenne fin, mais au bout d'un court instant, je sens cette dernière trembler, m'indiquant que quelqu'un tambourine dessus. La première pensée qui me vient à l'esprit est qu'une fille a besoin de passer aux toilettes en urgence. Je me dépêche donc de lui ouvrir la porte pour lui céder la place, mais je tombe alors sur trois adolescentes. Je reste un moment immobile, perplexe et ne réalisant pas tout de suite ce qu'il se passe.

L'une d'elles profite de ce moment d'inactivité de ma part pour me bousculer, me faisant tomber en arrière. Lors de ma chute, mon crâne cogne la cuvette qui se trouve juste derrière moi. Je porte aussitôt ma main à ma tête et suis soulagée de n'y sentir aucune ouverture, mais je devine à la douleur que j'aurai une grosse bosse . . .

Mon sac, quant à lui, est tombé aux pieds des trois filles. L'une d'elles se penche pour l'attraper et se met à y fouiller, mais n'y trouvant que du matériel scolaire et le livre dont je me sers pour communiquer avec les autres, elle le laisse tomber, visiblement déçue. L'une de ses camarades s'en empare à son tour et je la vois dire quelque chose aux deux autres avec un sourire peu rassurant, avant qu'elles n'éclatent toutes les trois de rire.

Elles s'emparent alors un à un de mes cahiers, dont elles arrachent les pages, avant de les jeter dans les toilettes ! Scandalisée par ce qu'elles font, je tente de sauver ce qui reste de mes affaires, mais elles me repoussent brutalement et l'une d'elles m'assène même quelques coups de pied.

Elles ne s'arrêtent que lorsque tous mes objets, y compris mon sac se retrouvent dans la cuvette. Elles tournent alors les talons et s'éloignent tranquillement, comme si de rien n'était.

Je passe le reste de la récréation à ramasser mes affaires, désormais trempées. Heureusement, mon sac étant au sommet de la pile, il n'a pas été touché par l'eau et je peux donc y cacher toutes mes fournitures abîmées.

Je retourne ensuite en classe avec mes camarades. Seulement, je ne peux plus montrer aux professeurs les devoirs que je devais leur présenter. Et lorsqu'ils me demandent de les sortir, je me lève et me dirige jusqu'au tableau pour écrire :

"Je suis désolée, je ne les ai pas."

Certains se contentent de me montrer leur mécontentement, tandis que d'autres me donnent des devoirs supplémentaires pour me punir. J'affronte leurs courroux en silence.

À la fin de la journée, je rentre à la maison. Comme d'habitude, l'appartement est vide. Je me dirige donc calmement vers ma chambre et sors mes affaires mouillées et abîmées de mon sac. Je vais devoir racheter des cahiers et recopier toutes mes leçons, avant de faire les devoirs supplémentaires qui m'ont été donnés aujourd'hui. Le pire, c'est que certaines feuilles sont si trempées que l'encre s'est étalé et ce que j'y ai noté est désormais illisible. Or, je sais que personne dans mon lycée ne voudra me prêter ses cahiers pour que je puisse recopier les leçons. Je serai donc dans l'incapacité de réviser pour les évaluations à venir. Comment est-ce que je vais faire ?

Le désespoir commence à m'envahir. Mon menton se met à trembler, tandis qu'une larme coule sur ma joue. Ma gorge se noue et mon nez me picote.

J'ouvre le tiroir de mon bureau pour en sortir une copie-double sur laquelle rédiger mon devoir, en attendant d'obtenir des cahiers neufs. Je m'empare ensuite de ma trousse et l'ouvre pour prendre un stylo, mais le premier instrument sur lequel je tombe est ma paire de ciseaux. Ces derniers sont bleux et décorés de fausses perles blanches, je les trouve très jolis.

Je les prends entre mes doigts et les contemple longuement. J'entends alors comme une petite voix résonner en moi :

"Sers-t'en ! Tu n'as aucune hésitation à avoir ! Tu es seule, comme tu l'as toujours été, sans personne à tes côtés. Personne ne t'aime, personne ne veut de toi ! Ta disparition sera un grand soulagement pour tous. Alors vas-y ! Sers-t-en ! Un simple geste, habile et précis, et tous sera fini . . . Tu n'auras plus jamais à souffrir . . ."

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