Ordinateur

Une minute de lecture

Mon ordinateur a rendu l'âme sans prévenir. Rien ne m'y avait préparé. La perte, irréversible, est terrible, affreuse ; mes neurones en flétrissent d'horreur comme des villageoises devant un bébé mort, mes villageoises en mélangent leurs synapses. Et j'en maudis mon village.

Écrivant beaucoup, j'avais de nombreuses ébauches de romans, plusieurs chapitres honorables et quantité de notes pour quantité de projets d'écriture. Dessinant énormément, j'accumulais des tonnes de pages de bande dessinée, certaines seulement crayonnées, la plupart encrées, d'autres colorisées et finalisées, ainsi qu'une belle masse d'animations – ô joie des mouvements décédés – qui m'animaient le cœur. Surtout, puisque je fais de la programmation de jeux vidéo, je possédais une importante réserve de scripts et de ressources graphiques que j'avais longtemps travaillées dans un méticuleux soucis de bonheur vidéoludique. Je n'excelle dans aucun de ces domaines, mais je me considère au moins crédible dans chacun d'eux, comme le gentil bricoleur d'un village dont les habitantes seraient de tendres idiotes aimant les bébés vivants. Il est tellement délicieux de passer du temps à programmer des systèmes de sauvegarde et de checkpoints pour épargner à un guerrier lézard les affres d'un roguelike quand on omet dangereusement soi-même de sécuriser l'ensemble de son travail !

Ô grand Tim, seigneur de ces terres, comme je crains les vers et effluves des couches que tu me laisses ! Comme je blémis de métamorte blancheur devant ta redoutable inefficacité ! Et ta façon de te parler à toi-même, comme elle me sidère ! j'en deviendrais une purée de fontanelle si je me connaissais le pouvoir de devenir quelque chose. Pendant que tu te tutoies à la santé d'un troisième paragraphe obligatoire, je m'en vais boire un verre de coca en compagnie d'un verre vide, un verre beau comme ta transparence, ô semeur de corps en mal de naître. Et tandis que je boirai, je me ferai une joie de nous fermer la gueule, pour avaler ce qu'il nous faut bien avaler, ô majestueux placenta désert, poche de coca déçu. Si je m'amusais moins fort, je crois que je ne t'aimerais plus.

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