35.2

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2e épisode du jour !

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– Non, Auroq… murmura Picta. Arrête, c’est si laid dessous…

Et l'enlever ne changera rien, lus-je dans ses yeux. Je suis ainsi, à présent.

Sa jambe apparut dans toute sa souffrance, marbrée de cercles bleuis, la cheville brisée et le pied sans force. Sa peau abîmée était tendre sous mes mains ; je la caressai doucement avant d’y poser les lèvres. Baiser après baiser, je remontai le long de sa jambe. Picta frémit quand je poursuivis mes cajôleries sur sa cuisse, puis son ventre. Puis ses seins. Ces seins lourds et ronds qui lui avaient attiré tant de moqueries, ils tenaient parfaitement dans mes paumes… Les paupières de Picta papillonnèrent. Un désir violent me faisait trembler comme un adolescent, malgré mon âge et toutes les étreintes que j’avais pu vivre avec des Ours. Mes mains glissèrent sur sa taille, pressantes, irrésistiblement attirées par le galbe de ses fesses. Quand je les agrippai, Picta se cambra contre moi. Je lui mordis le cou et un soupir ténu lui échappa ; ses hanches se mirent à bouger contre les miennes, dans une danse charnelle qui m’envoûta.

« Voilà ce que c’est de le faire avec une Dame » pensai-je avec fièvre en humant son odeur. Je la sentais changer. Plus piquante, plus salée. Comme la mienne.

Je caressai son ventre et fis glisser ma main vers son entrecuisse, là où elle était femelle, avide de découvrir cet endroit que je ne connaissais pas, que je devinais seulement. Ses halètements devinrent de petits couinements ; nos souffles accélérèrent à l'unisson. Ses mains à elle, sur mon torse, commencèrent à descendre aussi. Je me tendis sous la caresse.

– Tu n’as pas peur ? dis-je dans un grognement presque inarticulé.

Elle ouvrit les yeux, sourit. Son expression éperdue me donna envie de lui mordiller les lèvres.

– Je n’ai pas peur des Ours... et certainement pas de toi.

Et sa main descendit pour de bon.

Elle sursauta un peu en me touchant, puis rit doucement. Je me sentis vexé.

– Qu’est-ce qu’il y a de drôle ?

– C’est… étrange, chuchota-t-elle. Vous êtes si différents de nous… Tu es si différent d’elle.

Sans véritable raison, la jalousie fit surface en moi, puis le sentiment d’infériorité que j’avais toujours eu face aux Renardes, qui ne me quitterait jamais tout à fait. Pouvais-je vraiment satisfaire Picta ? Je n’avais pas l’élégance, la délicatesse, l’expérience de cette maudite Agapi. Je ne connaissais que la mine, où plus un amant mordait fort, plus il était considéré viril. Je craignis soudain de la blesser, de me montrer maladroit… De me montrer stupide comme un Ours.

Picta se pencha vers moi et, timidement, me mordilla le cou à son tour. C’était ridicule de douceur et de gentillesse, on aurait dit une petite souris. Je ne pus m’empêcher de sourire.

– Qu’est-ce qu'il y a de drôle ? dit-elle en prenant le même ton vexé que le mien. Je ne mords pas aussi fort que les Ours, c’est cela ?

Beau joueur, je couchai les oreilles un bref instant pour montrer que j’avais bien reçu sa pique. Elle se lova contre mon torse, puis guida mes mains sur elle.

– N’arrête pas, murmura-t-elle, les yeux brillants.

Je lui obéis presque sans le vouloir. Son corps m’appelait, le mouvement de ses hanches m’hypnotisait. Quand elle se mit à geindre tout doucement, je mordillai le bout de son oreille pointue. Elle s'abandonna tout à fait. Je fermai les yeux et l’attirai dans mes bras, la collait contre moi, le plus près possible. J'avais l’affreuse impression qu’il s’agissait d’un de mes rêves et que si je rouvrais les paupières, elle allait s’évaporer à jamais.

– Ne pars pas, haletai-je. Ne t’en vas plus, plus jamais…

Elle me caressa doucement les joues, la mâchoire, redessina les lignes de mon visage du bout de ses doigts.

– C’est toi qui vas partir, c’est moi qui devrais te supplier de rester ! N’inverse pas les rôles…

– Alors supplie-moi, chuchotai-je en mordillant la moindre parcelle de peau que je pouvais atteindre. Supplie-moi de rester, fais-moi rester. Je t’habillerai chaque jour, je te protégerai. Je ne partirai plus.

Fidèle comme un Ours, disaient les Dames… Elles avaient raison. J’étais prêt à dire n’importe quoi. Je n’avais plus aucune conscience de la réalité, du jardin autour de nous, de la mine et de la révolte ; il n’y avait plus que son corps contre le mien, et la fièvre de cet acte dont j’avais rêvé si longtemps.

– Je ne te supplierai pas, gémit-elle alors que je la renversais dans l’herbe. Il faut que tu repartes.

– Pourquoi ? chuchotai-je à son oreille.

Elle aurait pu répondre que je délirais, qu’à son âge, aucune Dame n’avait plus de domestique personnel, que mon retour m’aurait exposé à de graves ennuis, que revenir dans la Maison n’avait pas de sens… Elle ne dit rien de tout cela.

– Parce que tu n’es pas esclave, expira-t-elle dans mon cou. Tu es né pour être libre. Je ne veux pas que la Maison te piétine encore, que tu en souffres encore… Je veux que tu vives dehors, quelque part. Peu importe où.

Ma Picta… Elle qui avait tant payé pour mon absence, elle parvenait encore à se montrer si douce… Je sculptai son corps du bout de mes doigts, de ma langue, puis me penchai sur elle pour lui murmurer des dizaines de mots – des mots très doux, d’autres très crus qui la firent haleter et se tortiller contre moi.

Elle disait vrai. J’étais né pour être libre, je m’étais battu pour le devenir ; et pourtant, si longtemps après, j’étais revenu faire mon devoir d’esclave. J’étais revenu m’accoupler avec ma Dame. La Maison avait gagné.

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