Chapitre quatre - Le Roi

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"Celui de Virginia, précisa Charles, dans des vêtements traditionnels hongrois. Du moins, j'imagine qu'ils sont hongrois, mais je ne connais pas les styles vestimentaires d'Europe de l'Est assez bien pour donner un avis éclairé.

-Ce doit juste être une femme qui lui ressemble, suggéra Arthur. Virginia n'a jamais quitté l'Angleterre, sauf pour aller en Ecosse, et Edimbourg n'est pas exactement Budapest.

-Oh, oui, le comte se balade avec un immense portrait du sosie de Virginia, s'invite à son anniversaire et danse avec elle, mais ce n'est pas Virginia elle-même sur le portrait, alors tout va bien, s'exclama Charles.

-Tu as raison, s'excusa Arthur. Ce n'est pas la question. Qu'allons-nous faire ?

-Eh bien, dans mon expérience, dit Angus, même les gars les plus bizarres ont le crâne qui explose quand on y loge une balle de gros calibre. Par une heureuse coïncidence, mon père a amené ses fusils de chasse au sanglier avec lui à Londres au lieu de les laisser dans notre résidence secondaire écossaise, et je sais où il les a mis en attendant la prochaine saison.

-D'accord, dit Arthur en lui lançant un regard oblique. Gardons le meurtre comme deuxième option. Une autre idée ? Charles ?

-Il faut éloigner Virginia, faire des recherches sur le comte, le distraire le temps de le mettre en échec, le vaincre.

-Bonne idée. Et comment proposes-tu de faire ça ?

-Angus peut s'occuper de distraire le comte, répondit Charles. Il est distrayant. Et il n'hésiterait pas à faire s'effondrer les égoûts et tout Londres avec si cela s'avérait nécessaire. Je peux me charger des recherches, je suis celui, ici, qui lit le plus rapidement, et la bibliothèque du Brightwell's m'est ouverte. Ce qui te laisse pour garder un oeil sur Virginia."

Arthur hocha la tête. Avec cet ennemi commun, il n'était plus l'heure de se mettre des bâtons dans les roues.

"Je veux aider, mais j'ai un rendez-vous demain matin, dit Angus. Vous savez, la fille du sénateur qui est morte au théâtre ? Je dois m'occuper de l'Après. Mais je serai là dès l'après-midi et j'apporterai mes instruments de travail.

-Alors je m'occuperai de Cellehm demain matin, promit Arthur. La soirée se termine, prenons congé, nous devons être sur le pied de guerre tôt demain."

Les garçons se séparèrent, mais ne quittèrent pas la soirée sans vérifier que Virginia rentrait chez elle avec ses parents.

Aux premières lueurs de l'aube, Arthur faisait le pied de grue devant le Brightwell, le col de son manteau relevé pour le protéger du froid, quand un coche s'arrêta devant lui, tous ses rideaux fermés, et qu'une main énergique le souleva du pavé pour le tirer à l'intérieur.

Il se retrouva face à un certain Hongrois qu'il aurait espéré ne jamais revoir, toujours en habit de voyage, comme s'il n'était pas remonté se changer depuis son arrivée.

"Ah, Monsieur Richards, dit le comte d'un ton un peu trop gourmand pour être rassurant. Le chevalier servant de Virginia Ratchett. Nous devons parler.

-Ce n'était pas dans mes projets, mais soit, riposta Arthur.

-Très bien, dit Sëlèm. Vous vous croyez mignon avec votre béguin d'enfant pour Virginia, mais je n'ai pas de temps à perdre, je dois retourner en Hongrie avant la fin du mois. Combien voulez-vous pour la laisser en paix ? Je double la somme.

-Je crois que vous n'avez pas bien saisi mais j'aime Virginia, et je n'ai pas l'intention de vous laisser la séduire et l'emmener en Hongrie.

-Ne soyez pas stupide, je ne vais pas l'emmener.

-Oh, vous voulez juste une distraction pour un mois avant de repartir ? Encore pire ! Virginia n'est pas ce genre de fille et je ne vous laisserai pas l'insulter ainsi."

Le comte soupira et répéta :

"Combien ?"

Arthur le fusilla du regard et dit :

"Avant que j'accepte votre argent, il coulera de l'eau sous les ponts.

-Dans ce cas, la guerre est déclarée, dit le Hongrois avec un air aussi serein que s'il évoquait l'état du ciel. Bonne journée, Monsieur Richards."

Et, sans plus de cérémonie, il se rua hors du fiacre pourtant en marche. Arthur se précipita à la fenêtre pour vérifier qu'il allait bien, mais celui-ci reprenait simplement sa marche sur le trottoir, avec de grands mouvements de canne, pour se donner une contenance sans doute, comme si de rien n'était.

Le fou ! songea Arthur. Il bondit d'un fiacre en marche ! Il est complètement dingue !

Arthur était dans les environs du théâtre - il lui semblait avoir aperçu son frère Percival, qui était acteur -à ce moment-là et voulut descendre pour le rejoindre mais il fut projeté contre le plancher du fiacre quand les chevaux s'emballèrent. Il rampa jusqu'à la portière, l'ouvrit et sauta en marche, lui aussi, pour se retrouver à moitié sonné, les paumes et les genoux en sang, sur le pavé londonien. Un homme l'aida à se relever et dit :

"Votre cocher est fou ! Il a fouetté les chevaux et sauté en marche ! Je serai vous je le renverrai."

Sur ce conseil plein de bon sens, Arthur songea que les Hongrois, cochers comme maîtres, devaient être habitués à sauter en marche, parce qu'il n'allait pas bien et qu'eux étaient déjà loin.

*

* * *

*

Dans le hall du Brightwell's, alors que les douze coups de midi sonnaient, Angus demanda à l'un des valets si le comte était là. Comme il n'était pas membre, il ne pouvait, théoriquement, pas aller plus loin, aussi le valet dût-il aller s'enquérir du comte pour lui. On lui dit que le comte dormait encore et ne voulait pas être dérangé avant le soir.

Angus fit un petit signe amical à Charles, plongé jusqu'aux épaules dans un vieux livre poussiéreux, et s'assit sur un sofa. Il avait tout le temps du monde. Il attendrait le soir. Son paquet reposait près de lui.

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