Chapitre 1

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Il était une fois, dans une forêt reculée, d'une région de montagne, un ermite. Un pauvre gars un peu rustre, bas de front et lent d'esprit. Enfin, c'est ce que disaient les dames entre elles, lorsqu'elles buvaient un thé en compagnie ou mangeaient un gâteau en buvant leur verveine; mais parfois, dans leurs cuisines, seules, elles soupiraient après lui. Déjà à l'école primaire il était différent, les garçons le traitaient de gogol, il avait été la bête de foire de la récréation, le bouc émissaire du collège et... C'est tout, car il n'avait pas continué les études.

Mais ça, c'était les garçons, les filles auraient bien-aimées jouer, elles, à la poupée avec lui ou au docteur plus tard. Mais elles avaient bien dû se faire une raison, c'était un gogol, il ne comprenait rien à rien.

Il paraissait que la Julie avait réussi à lui faire des trucs, mais on le saura jamais. La Julie avait fini par épouser un gars de la ville et avait quitté le patelin. Sans doute en avait-elle eu assez de son petit homme des bois qui préférait les nids de fauvettes aux galipettes.

La factrice, parait-il, avait roulé dans les fougères avec Étienne l'ermite, mais la postière n'était pas du coin. Elle ne connaissait pas la réputation de l'artiste et s'était laissée tenter par son sourire ravageur.

L'épicière, la boulangère avaient roulés dans la farine et les boites de conserve de l'arrière-boutique, mais ces deux commerçantes avaient l'une la jambe leste, l'autre le four, toujours allumé.

Des touristes de passages avaient roulé dans la paille, dans l'eau froide du torrent et dans les neiges éternelles du haut pays. Toutes étaient arrivées avec homme et enfants, toutes étaient reparties, toujours, parfois seules, parfois avec juste enfant, parfois avec juste des Kleenex, parfois, mais plus rarement avec encore le mari .

Donc, Étienne Le Cric, dit l'ermite était encore, à quarante ans, sinon un corps, du moins un coeur à prendre, bien maligne serait celle qui parviendrait à lui passer bague au doigt, corde au cou.

Quel gogol cet Étienne pensait petit Jean ! qui se croyait le roi du pétrole avec sa Caroline . La plus jolie de la classe autrefois, mais elle avait triplé de volume après la quatrième grossesse !C'est moi qui l'ai eue la plus jolie pensait-il !

Quel Gogol cet Étienne pensait gros Louis le boulanger, il aurait pu avoir la Martine, qui était si jolie , si amoureuse de cet imbécile autrefois, si travailleuse maintenant, toujours pleine de joie de bonne humeur et de farine. Elle était parfois fatiguée le soir, mais il ne lui en voulait pas Le Louis si elle était moins portée sur la bagatelle que pendant la première année de mariage, fallait dire qu'elle était dure à la tâche, toujours souriante avec la clientèle, elle devait être fatiguée sa colombe des blés dorés. Ah quel con cet Étienne, il ne savait pas ce que c'était le bonheur de s'endormir auprès d'une jolie et gentille petite femme serviable et honnête !

Quel gogol ce pauvre fou qui gambade dans la montagne du soir au matin sans une bonne femme pour repriser ses chaussettes trouées, ses chemises effilochées... pensait les touristes de passage.

Quels gogols, tous ces crétins se disaient Étienne, ils ne connaitront jamais le plaisir d'un petit matin silencieux. Ils ne connaitront jamais la saveur d'une vie sans contrainte, sans agios à la fin du mois, sans soucis de traites impayées. Ils ne sauront jamais ce que c'est qu'une nuit de dix heures sans pollution sonore, d'un, lève toi, ton fils pleure, ou d'un c'est toujours moi qui me lève la nuit pour une couche merdeuse odorante et...on a compris la suite !

Il n'avait pas tous les soirs une paire de seins chauds et de cuisses rondes, mais il avait pour lui tout seul de merveilleux morceaux de forêt à portée de main, des coins à champignon, des falaises rougies de soleils couchants et des nuits étoilées saturées de chants de grillons .

Ce que personne, personne savait, et qu'il n'avouerait jamais, c'était, quand son entrejambe devenait dure et raide trop longtemps, comme une béquille de vélo, il allait voir Stéphanie en bas dans la vallée, Simone au bled d'à côté ou la gironde factrice, qui n'était pas d'ici, et à qui il avait promis monts et merveilles...

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