Beau - Etonnement - Nécessité

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  Beau - Etonnement - Nécessité

   En effet cette composition est belle parce qu’elle nous place dans le domaine hors-sol d’une contemplation. Temps et espace y sont abolis pour l’Observateur qui, hors le cadre de l’image, ne perçoit rien du monde, sauf cette pointe qui s’élève vers le ciel.

   Cette composition convoque l’étonnement parce que le questionnement philosophique s’empare de nous à la manière de la belle formule de Leibniz : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? ». Ceci n’est jamais le cas d’une image qui pêcherait par excès de bavardage, imprécision, motif futile.

   Cette composition appelle le concept de « Nécessité » pour la simple raison que rien ne peut lui être retiré ou ajouté sans que l’ensemble ne s’en trouve gravement affecté.

    Seul un Voyeur distrait pourrait en définir l’aspect agréable, le caractère de bon goût, la dimension de simple impression. On voit combien tous ces prédicats sont insuffisants à traduire la poétique du lieu, son traitement rigoureux, la perfection de ses formes.

   Dire la montagne

   On est là, sur le versant caillouteux de la montagne. Le silence est grand, presque assourdissant. On pourrait y deviner le bruit de carton froissé des rémiges du grand aigle royal flottant entre les volutes d’air. A l’angle de l’image des feuillées de schiste en suspension comme si, ici, les choses étaient arrêtées pour l’éternité. On devinerait presque le gel ancien de leurs lignes de clivage, le frottement immémorial des roches venant au jour du paraître. Ici et là, pareilles à des éclats solaires, quelques plaques de névé rythment la touche sévère du noir, ce deuil qui convient si bien à l’étrange, au retrait, à la crypte où le saint de pierre médite le temps dans le bel ambigu d’un clair-obscur. L’obscur est travaillé en sa profondeur par un levain qui fait encore gonfler la pâte de la roche, longue mémoire qui, jamais, ne s’éteint. Et cette si exacte géométrie qui déplie ses arêtes comme dans le miroir d’une eau cristalline. Là est le prodige du Deus absconditus, du démiurge façonnant les éléments premiers qui seront les paroles fondatrices de l’être-du-monde, la voix minérale au travers de laquelle faire entendre le chant ininterrompu de la Terre.

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