Chapitre XVI.1

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Résumé de l’Histoire du Réseau et de la Société, telle qu’elle fut établie par Io, Féhna, Imalbo, et Sacahar Tyrus grâce aux documents étudiés dans la bibliothèque des elfes :

Tout a commencé vers le passage du vingtième au vingt-et-unième siècle. Jusque-là, les humains vivaient avec des machines, mais ils les commandaient entièrement, et elles n’avaient aucune autonomie : leurs actions n’étaient que des automatismes définis par l’homme.

A cette époque, le monde était divisé : il y avait environ deux cents nations, c’est-à-dire des territoires qui avaient chacun leur propre gouvernement, leurs propres coutumes, leur propre langue. Bien sûr, des systèmes d’alliances se créaient souvent entre les nations : car le but de chacune était d’affirmer sa supériorité, et de faire valoir ses manières de vivre. En outre, l’argent était très mal géré dans ces années-là : pour pouvoir vivre à leur aise, beaucoup de nations opprimaient leurs voisins, militairement ou économiquement, et les alliances n’avaient pour but d’assurer cette suprématie que quand des nations ne pouvaient y parvenir seules. Mais ce mauvais esprit régnant entre pays différents n’était que le reflet du désordre qui opérait à l’intérieur.

Car tout n’était pas rose alors. Certes, les hommes étaient beaucoup plus libres, et quand ils ne l’étaient pas, pour peu qu’ils aient suffisamment d’esprit, il leur était facile de s’en rendre compte. Cependant, ils étaient toujours en conflit les uns avec les autres. En effet, l’argent avait une valeur énorme, et il était souvent difficile de s’en procurer sans opprimer son prochain ; de ce fait, des divisions très fortes existaient entre les membres des sociétés humaines. Selon la quantité d’argent qu’ils possédaient ils appartenaient à des groupes différents : il s’agissait des « classes sociales » et, de génération en génération, les classes sociales élevées tenaient les plus démunies sous leur coupe.

Les gouvernements étaient entièrement humains. Dans certains cas, ils étaient plus ou moins désignés par la population, même si celle-ci était soit si désintéressée, soit si mal informée, qu’elle était incapable de constituer un gouvernement qui la respecte. Dans la quasi-totalité des cas, les membres des gouvernements appartenaient aux classes sociales élevées, bien que ces dernières soient minoritaires en effectifs.

Les gouvernements étaient chargés d’assurer la puissance de leur nation. La plupart du temps, cela revenait à organiser le pays de façon à ce que le plus d’argent possible soit amassé, tout en satisfaisant le peuple un minimum, pour qu’il ne se plaigne pas trop ; des systèmes éducatifs, constitués par les gouvernements, donnaient généralement à ce peuple l’impression que la bassesse de sa condition était dans l’ordre des choses : seule une élite, constituée d’un nombre restreint d’individus appartenant ici encore trop souvent aux classes aisées, était à même de distinguer comment les choses pourraient être, si les bons impératifs étaient retenus. Ce n’était tout de même pas catastrophique partout ; néanmoins, l’équité des pouvoirs en place restait précaire.

L’organisation du travail était alors en cours de modification, et peu à peu on pouvait voir se dessiner les futures entreprises de la Société. Cependant, il n’y avait encore aucune mise en commun générale, même à l’intérieur d’un Etat : pour produire un même produit ou service, il y avait quelquefois une dizaine d’entreprises différentes. Cela permettait certes au consommateur de faire des choix, mais cela entraînait aussi une compétition sans relâche entre les concurrents ; de ce fait, mais aussi parce qu’ils étaient attirés par l’argent, les chefs d’entreprises imposaient des règles très strictes à leurs salariés. Ces derniers, contrairement à ceux de la Société, connaissaient ainsi la personne pour laquelle ils travaillaient, celle qui leur donnait leurs ordres, mais souvent ils accomplissaient leurs tâches à contrecœur.

En fait, la vie dans les anciennes sociétés était tout simplement mal organisée, et admettait des injustices pourtant visibles aux yeux de tous, à cause de certaines choses telles que l’ambition, l’attrait des possessions matérielles pour les dirigeants, et beaucoup de résignation pour les autres.

Néanmoins, en dépit de cette mauvaise organisation, ces civilisations avaient aussi des valeurs très positives qu’on ne retrouve nullement au sein de la Société. Elles n’étaient souvent pas partagées par tous, mais au moins elles étaient bien présentes. Par exemple, tout le monde connaissait l’amour, et le chérissait. Les rares personnes qui y étaient étrangères étaient méprisées et détestées. Et si une même personne n’aimait pas forcément tous ses semblables, en revanche les relations qu’elle entretenait avec ses proches étaient bien plus poussées : alors que dans la Société un individu ne parle qu’avec ses collègues de bureau de banalités assourdissantes, et avec son conjoint de sujets guère plus intéressants, à cette époque les gens avaient des amis : d’autres personnes qui leur étaient très chères, pour lesquelles ils consentaient sans réfléchir à d’importants sacrifices, et avec lesquelles ils parlaient en toute sincérité de tout, même de leurs sentiments. L’amitié était une autre valeur très forte.

Le courage aussi était prôné, ainsi que la lutte pour la vérité. Les individus qui se battaient pour faire respecter des valeurs justes, qui n’hésitaient pas à combattre le mal au péril de leur vie, ceux-là étaient qualifiés de héros, et adulés par tous. Tandis que dans la Société, le moindre individu qui s’écarte du chemin imposé est haï, qu’il ait raison ou non.

La générosité était considérée comme un grand bien. Dans la Société aussi, sauf qu’elle y est forcée.

Enfin, et c’est ce qui est visible à travers tous les romans écrits avant que la Société ne s’instaure, l’imagination était très recherchée. De nos jours il en faut aussi un peu, pour les publicistes et quelques artistes corrompus, mais elle est purement mécanique. Tandis qu’à l’époque, certaines personnes étaient capables d’imaginer des merveilles, des univers différents, elles pouvaient véritablement créer des choses que personne ne connaissait déjà ; et, mieux encore, elles étaient capables de transmettre leurs créations, à travers toutes sortes d’arts, de la littérature à la peinture en passant par le cinéma. Et plus l’œuvre était réalisée pour sa seule beauté, et non pour en tirer profit, plus les gens chérissaient son créateur.

Pour résumer, les valeurs de ces civilisations étaient hautement supérieures aux valeurs actuelles ; en revanche, la vie y était plus dure, en raison d’une très mauvaise organisation. Pour certains, même, elle était atroce, tant ils étaient pauvres et exclus ; mais la façon dont la Société s’est mise en place montre que l’aisance qu’elle a apportée n’allait absolument pas de pair avec la disparition de toutes les anciennes valeurs : le monde aurait pu s’améliorer en conservant ses qualités, et il était même à l’époque plutôt sur la bonne voie.

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