Il est une heure du matin. Les rues pavées de Paris sont quasiment désertes ; il n’y a que quelques passants désœuvrés à la recherche d’un instant perdu.

Une pluie fine s’est abattue quelques heures plus tôt sur la grande ville. L’air sent l’humidité et le parfum des jeunes filles. Nicola, les mains dans les poches de son blouson noir, marche sans but. Silencieux et solitaire, on pourrait croire que le charismatique fantôme de l’opéra a décidé de visiter la capitale française.

D’une main blanche, il repousse la longue mèche ébène qui cache son regard empreint d’une grave mélancolie.

Les concerts sont terminés et il se languit. Indochine fait une pause et il s’ennuie. Ses pas l’ont conduit sur les bords du quai. À ses pieds s’étend la Seine grisâtre. Nicola reste là, debout, le regard fixe, mais ne voyant rien. Il ne se sent vivant qu’avec le groupe et pourtant malgré cela, ces derniers temps quelque chose a changé. Le chanteur ne saurait dire quoi, c’est dans l’air, il est parfois triste sans raison, ne trouvant goût à rien. Dans sa tête le mot libre résonne avec force. Sa solitude est soudain teintée de rire. Il se retourne. Un couple d’adolescents débraillé surgit des petits escaliers. Les amoureux le croise sans lui prêter attention, concentrés sur leur bonheur. Nicola sourit à leur approche puis se détourne d’eux.

Il s’agenouille vers l’eau, un air frais passe lui faisant serrer sa veste contre lui, sa main se noie dans la masse bleue. Elle est froide, presque glacée… il se sent mieux. Il délace ses grosses chaussures, les dernières à la mode, celle que tous les jeunes ont. Il reste ainsi quelques instants, bien, le vent caressant son visage. Il ferme les yeux et offre son profil à l’obscurité. Nicola se sent glisser, la nuit paraît se poser sur lui. Indochine est libre.

Fin