Chapitre 10

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Mon sommeil n’avait été que trop court après avoir piégé le réseau de Conglomérat Energies. Et la journée suivante avait été longue et pénible. J’avais renversé mon simili-café, mon écran holographique n’avait pas arrêté de clignoter, un type de la maintenance avait essayé de le réparer pendant une heure avant qu’il ne me dise qu’il fallait entièrement le changer. Pox était dans le même état que moi. Complètement à la ramasse. A midi, j’avais surpris deux femmes nous fixer à la cafétéria avant de se chuchoter quelque chose. Une fois revenus dans notre bureau, je lui en fis part.

  • Pfff, des vieilles peaux qui jacassent tout le temps. soupira t-il. Fais pas attention.
  • Je crois...avoir entendu… commençai-je.
  • Quoi ?
  • Elles pensent qu’on couche ensemble. débitai-je d’un trait.

Il y eut un silence dans la pièce après ça, c’était assez malaisant. Je n’aimais pas que les gens s’imaginent des choses fausses sur mon compte. Surtout sur ma vie sexuelle, c’était mes affaires ! Enfin, Pox éclata de rire. Je le regardai sans comprendre. Il lui avait fallu autant de temps pour réagir ou quoi ? Le manque du sommeil le rendait vraiment lent.

  • Allez quoi, c’est marrant. se justifia t-il. On ne peut pas leur dire ce qu’on faisait vraiment. Si elles veulent faire marcher leur imagination comme ça…
  • Rhaaaa ! Je devrais peut-être leur raconter ta fascination étrange pour les robots, ça ferait marcher leur imagination ! m’exclamai-je.
  • Ah les femmes… Toujours dans l’excès…

On se remit au travail. Je fis semblant de pester un peu avant d’abandonner. C’était trop d’énergie dépensée pour des choses futiles. J’avais rencontré Pox quand j’avais commencé ce boulot après mes études. On était assez semblables alors on s’était entendus tout de suite. A un tel point qu’il était devenu mon meilleur ami mais ça n’allait pas plus loin entre nous. Qu’est ce que les gens pouvaient bien imaginer…?

Je décidai qu’il valait mieux éviter de m’intéresser aux événements de la Castle Bank et des entrepôts de stockage de Conglomérat Énergies à mon travail. On ne pouvait pas risquer de se faire contrôler nos activités et que quelqu’un tombe sur ça. Je paramétrai pour toutes les nouvelles notifications du système soient envoyées sur mon ArmScreen sous la dénomination “Exercices avancés de cryptographie”, comme si j’étais inscrite à un cours en ligne. Cela justifierait que ces messages soient codés. Si tout ceci remontait aux dirigeants du Conglomérat comme je le soupçonnais, ils pouvaient très bien avoir accès à mes communications personnelles, autant ne pas leur faciliter la tâche. Il ne me restait donc plus qu’à attendre que le hackeur aille refaire un tour sur le réseau de Conglomérat Énergies pour que je puisse en apprendre davantage.

  • On va boire un coup ? me proposa Pox à la fin de la journée.
  • T’es pas fatigué pour ça ? rétorquai-je.
  • Allez quoi, juste une heure ou deux, je connais un bar pas trop loin.

Effectivement ce n’était pas trop loin, juste à quelques arrêts de métro aérien. De la station, il nous a fallu grimper quelques étages pour rejoindre le bon niveau de la tour. C’était la fin d’après-midi et ces niveaux commençaient légèrement à se remplir. Cette partie de la ville était très prisée par les gens qui sortaient le soir. On y trouvait de nombreux restaurants, bars, boîtes de nuit et autres lieux d’activités nocturnes. Pox m’emmena dans un bar nommé La Parenthèse. C’était un lieu assez animé déjà à cette heure-ci. La musique était sympa et pas trop forte, les gens ne devaient pas crier pour s’entendre. Des impressions 3D de fruits d’époque étaient accrochées un peu partout pour qu’on puisse associer le nom des fruits sur la carte des cocktails à leur apparence. Je n’avais jamais goûté de vraie orange, pomme ou ananas alors il m’était impossible de savoir si le goût de synthèse était bien fait ou non. Personne dans ma génération ne saurait répondre à cette question d’ailleurs.. Une fois j’avais vu une publicité du début du millénaire, ça disait “mangez 5 fruits et légumes par jour”, je suis restée choquée. Cinq fruits ou légumes ! Par jour ! Par personne ! J’avais du mal à imaginer quelles quantités de nourriture organique ils étaient capables de produire à l’époque mais ça me semblait tellement énorme.

  • Héoh ! fit Pox en me secouant. Tu t’endors ou quoi ?
  • Désolée, j’étais en train de me demander si le goût de synthèse des fruits était vraiment le bon ou pas. Tu disais ? dis-je en me tournant vers lui.
  • Alors ça, je n’en sais rien. Je te disais que j’allais t’offrir un truc mais vu que tu m’écoutais pas, je suis pas sûr finalement ! ricana mon ami.
  • Oh ça va ! Je vais prendre...euh… un cocktail des tropiques ! demandai-je après un coup d’oeil rapide à la carte.
  • Okay.

Je m’assis à une table pas trop loin du bar en attendant qu’il revienne avec nos verres. Je jetai un regard sur la salle, c’était surtout des couples et des bandes d’amis. Dans un coin, il y avait un homme seul, vu qu’il pianotai sur son ArmScreen, je me dis qu’il devait attendre quelqu’un. Pox posa nos cocktails sur la table. Le mien avait plusieurs teintes orangées, dû à la mangue et l’ananas. Le sien avait une touche de rouge à cause de jus de cerises. On trinqua et je bus une grosse gorgée de mon verre. Le goût était plaisant, sucré avec une pointe d’acidité en fin de bouche, et ça couvrait agréablement l’alcool.

  • Et comment ça se passe avec … Cassie ? demandai-je.
  • Pfff, c’est fini.
  • Quoi ? Déjà ?
  • Ouais ça avait bien commencé mais… je sais pas, elle est devenue...bizarre. Possessive surtout ! Elle n’a pas apprécié quand je lui ai dit que je travaille 8 heures par jour avec une femme. Je l’ai surprise à essayer d’installer un de ces trackers d’ArmScreen une fois.
  • Aie aie. Une folle possessive en somme. Elle avait plutôt l’air sympa au premier abord. soupirai-je. Comme quoi, les apparences sont trompeuses.
  • Et toi alors ? me renvoya t-il en buvant une gorgée de son verre.

Je me contentai de hausser les épaules. Il rigola. Je n’avais personne dans ma vie et je ne cherchais pas à aller au devant des rencontres pour le moment. Je n’en avais aucune envie au vu de comment ma dernière relation amoureuse s’était finie.

  • Je crois que le rendez-vous de ce gars l’a laissé en plan. Il est là depuis aussi longtemps que nous, et il t’a regardée en coin à plusieurs reprises. chuchota t-il en désignant le type seul que j’avais déjà repéré.
  • Et alors ? Je te l’ai dit, je ne cherche pas de mec. dis-je un peu plus fort.

Il me fit signe qu’il avait compris et alla nous reprendre un verre au bar. Je jetai un coup d’oeil furieux vers le type en question. Il ne me regardai pas à ce moment là. Tant pis.

On resta encore environ une heure avant que la fatigue ne nous rappelle sa présence et nous force à rentrer vers nos foyers.

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