Chapitre 3 : le dîner (première partie)

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- J’en ai marre ! Où est-il ? m’écriai-je.

- Phoebe, de quoi est-ce que tu parles ? Me demande Kyra.

- Excuse-moi. Je cherche un pendentif que je me suis acheté il y a deux semaines et pas moyen de mettre la main dessus !

- Regarde dans ta valise bleue.

Je m’exécute et oui, le voilà ! Les pouvoirs de mon amie sont vraiment pratiques, parfois. J’utilise ces termes parce qu’il arrive que très souvent, elle s’en serve pour tout et n’importe quoi. Comme pour titiller quelqu’un sur un sujet délicat, par exemple.

- Tu es géniale ! Oh et puis non, il ne me va pas. J’en ai assez. Désespérai-je, en m’asseyant sur mon lit.

- Dis-moi plutôt ce qui te tracasse, Phoebe.

- Rien de particulier, juste un dîner chez JJ et son époux.

- Ah oui, ce n’est pas la blonde qui avait des problèmes de relations intimes avec son mari ?

- Stop, Kyra ! Ce n’est pas un sujet à aborder devant mes neveux. M’énervé-je.

- Ils sont petits, ils ne comprennent pas. Me répond-elle, s’en fichant royalement.

- Chris, peut-être. Mais Wyatt, c’est une autre histoire.

- De toute façon, ça fait partie de la vie. Ils finiront bien par apprendre ce que c’est.

- Laisse-leur l’innocence que procure l’enfance. Il y a déjà eu assez de démons qui s’en sont pris à eux. Ils ont le droit à une vie normale. C’est ce que Piper voulait pour eux et je mets un point d’honneur à respecter sa volonté. Donc, interdiction formelle d’évoquer ce point devant eux. Fin de la discussion.

- Très bien, j’ai compris. Acquiesce mon amie.

- Merci.

- Que vas-tu porter ? Me demande-t-elle, afin d’aborder le sujet qui lui brûle les lèvres.

- Qu’importe, je n’ai aucune envie d’y aller. Répliqué-je, avec une voix laissant entendre que je suis d’une humeur massacrante.

- Je croyais pourtant que cette fille était une très bonne amie à toi.

- Ce n’est pas elle, c’est… Wyatt ! S’il se sert sa magie, tu imagines ?

- Ils sont au courant de ton secret. Qu'est-ce que tu risques ? me répond-elle, le plus simplement du monde.

J’avais complètement oublié que Kyra connaît toute l’histoire. Elle avait même fait leur connaissance. C’est avec son aide que j’ai pu utiliser mes dons pour faire revivre à JJ et Will les instants les plus magnifiques de leur histoire. De leur première rencontre à la naissance de leur premier fils, Henry. Quelque chose en eux s'était réanimé. Je m’étais employée à leur rappeler l’importance de ce qui avait créé l’étincelle entre eux. Le pourquoi du comment ils étaient tombés amoureux… Par exemple, lorsque JJ avait demandé à une certaine Pénélope Garcia de faire une recherche sur mon dénommé ami Will parce qu’il lui avait vraiment tapé dans l’oeil.

- Phoebe ? Phoebe ! Tu es là ?

- Excuse-moi, j’étais dans mes pensées.

- J’ai peur que Wyatt se serve de ses dons. Leur fils n’est pas au courant qu’il possède des pouvoirs magiques.

- Cesse d’utiliser ton neveu comme prétexte ! Il n’est qu’une partie de ton inquiétude.

- Non. C’est la seule que j’ai.

- Phoebe, mes dons de voyance sont bien plus développés que les tiens. Ton vrai problème porte un nom : il s’appelle Aaron Hotchner.

- Arrête !

- Tu vois, j’ai touché juste. Me dit-elle, fièrement.

- Ce que tu peux m’énerver, parfois !

- C’est toi qui es à fleur de peau parce que tu as un coup de cœur pour cet homme. Veux-tu que nous reparlions de ce matin où ton empathie a pris le dessus ?

- Non, certainement pas ! C’était beaucoup trop gênant. Je pensais pouvoir le contrôler, mais…

- Tu as le droit de lâcher-prise de temps en temps.

- Et puis je suis censée l’aider à trouver quelqu’un, à vaincre sa peur d’aimer et lui montrer qu’il n’a pas à culpabiliser de refaire sa vie.

- Tu viens d’avouer toi-même que tu avais éprouvé quelque chose. Tu es célibataire, tu connais l’amour par cœur, alors profites-en ! Moi si je pouvais ressentir des émotions, je serais heureuse !

- Pas maintenant, ce n’est pas le moment. Chris et Wyatt sont ma priorité.

- En tout cas, je comprends pourquoi ton corps et ton cœur ont frissonné en le regardant ! Il est bel homme d’après ce que je peux entrevoir.

- Pourrait-on parler d’un autre sujet ?

- Oui, j’en ai un.

- Je t’écoute.

- Deux même. Dont un qui devrait te faire sourire jusqu’aux lèvres.

- Cesse de faire des mystères et dis-moi !

- Chris a utilisé ses pouvoirs pour la première fois aujourd’hui.

- Sérieusement ?

- Oui et il adore s’amuser à s’éclipser partout dans dans l’appartement de ton papa !

- Oh quel petit prodige ! m’exclamai-je, aux anges.

- C’est là que j’en arrive au second sujet : quand vais-je pouvoir venir te rejoindre ? Autant je peux supporter ton petit-neveu, mais cohabiter avec ton père, non.

- Quel est le problème ?

- Je n’ai aucune intimité. Et puis je veux m’amuser, rencontrer de nouvelles personnes, comme des êtres humains. En somme, avoir une vie sociale !Nous avons un accord toutes les deux, ne l’oublie pas. Me dit-elle sur un ton ferme.

- Je te promets de remédier au problème rapidement. Dès demain matin, je me mets à la recherche d’un logement pour nous quatre. Tu n’as pas à t’en faire, je tiendrai ma parole, Kyra.

- D’accord, mais fais vite s’il te plaît.

- Je te le jure.

- Ah oui, dernière chose : mets ce que tu veux, de toute façon, tu vas lui taper dans l’œil.

- Arrête avec ça !

Kyra raccroche aussi sec, histoire d’avoir le dernier mot. Je regarde l’heure : j’ai au moins une bonne demi-heure de retard. Je pars chercher mon bout de chou qui joue tranquillement dans sa chambre avec ses voitures, déjà prêt à partir. Depuis la disparition de Piper et Léo, Wyatt clame un peu plus son indépendance par des petits gestes dans le quotidien. Il prépare seul ses affaires d’école, choisit ce qu’il veut mettre, range sa chambre sans que j’aie à le lui demander.

Je regarde à travers l’entrebâillement de la porte de son antre. C’est fou, il grandit si vite et pourtant, c’est encore un enfant. Un être jeune qui a déjà dû affronter la perte d’une grande partie de sa famille, dont ses parents. Il a été attaqué par d’innombrables créatures alors qu’il n’était encore qu’un bébé. Lorsque je me remémore ces souvenirs, je prends vraiment conscience que le temps a passé à une vitesse extrême. Ils n’ont plus que moi et grand-père. Si l’un de nous deux venait à disparaître que se passera-t-il ? Il reste bien… Non,je ne l'inclurai pas et je refuse de penser à lui. Il n’est pas digne de faire partie de la lignée des Halliwell, quoique… c’est un sujet délicat et ça n’est clairement pas le moment de l’aborder. J’ai dit que je me le sortais de la tête en plus ! Je regarde Wyatt jouer encore quelques instants, puis me dirige vers lui.

- On y va mon chéri. Nous sommes en retard. Je vais demander à ce qu’on nous appelle un taxi dès que nous serons à la réception.

- Je peux nous emmener si tu veux. Me propose-t-il avec un petit sourire.

- Bon d’accord. Mais c’est uniquement parce que nous sommes pressés ! Ce soir, je ne veux pas que tu utilises tes pouvoirs devant les invités.

- Et si je souhaite faire un tour de magie ?

- Tu désires impressionner tes nouveaux amis, c’est bien ça ?

- Oui, j’aimerais beaucoup ! me répond-il fièrement.

- Nous verrons. Mais pas d’éclipse, de télékinésie et compagnie.

- Ne t’inquiète pas, tante Phoebe.

- Allons-y.

Mon neveu nous téléporte alors non loin de chez Jennifer et Will, dans un petit parc où il n’y a personne. J’aperçois leur maison, qui est située à quelques centaines de mètres. Tandis que nous prenons le chemin vers leur domicile, je distingue ce que je pense être le véhicule d’Aaron Hotchner, une berline noire garée dans l’allée. Tu vas te faire remarquer une fois de plus, Phoebe. Je respire un bon coup puis frappe à la porte et c’est le père de Henry qui nous ouvre.

- Bonsoir, Will. Je suis désolée d’arriver aussi à la bourre. Je n’ai pas encore ma voiture, alors...

- Ne t’en fais pas, ce n’est pas grave. Chérie, Phoebe et Wyatt sont là ! annonce-t-il joyeusement à sa femme.

Mon amie Jennifer vient nous rejoindre, accompagnée par son fils, qui lui tient la main. Je ne peux pas m’empêcher de sourire. Ils sont tellement craquants. Une vraie petite famille. J’aimerais beaucoup en avoir une, un jour… Dans un certain sens, avec mes neveux nous en sommes une. Je veux tout de même avoir mes propres enfants, vivre avec un homme qui m’acceptera comme je suis. Tu peux rêver, Phoebe. Tu sais comment ça se finit… c’est toujours la même chose à chaque fois. À moins que tu ne te décides de te marier avec un être magique...

- Laisse-moi te regarder, tu es magnifique. Que dis-je ? Resplendissante !

- Je suis tellement heureuse que tu sois venue. Si tu savais à quel point tu m’as manqué. Me dit-elle, en me serrant dans ses bras.

- Moi aussi.

- Et moi ? questionne Wyatt, se sentant probablement délaisser.

- Je suis enchantée de te voir. Qu’est-ce que tu as grandi depuis la dernière fois ! Je suis éblouie. Clame JJ.

- Est-ce que je peux aller jouer avec Henry et Jack ? demande-t-il, pressé d’aller les retrouver.

- Vas-y, ils sont dans le jardin avec les autres convives. Ils sont impatients de te rencontrer. Lui répond-elle.

Wyatt s’élance vers Jack, suivi de près par son copain Henry. JJ m’invite à la rejoindre dans le salon. Lorsque j’arrive, je constate la présence d’Aaron Hotchner. Mais aussi celle d’un collègue auteur, dont j'ai fait la connaissance au cours d’une séance de dédicace : le célèbre profiler, David Rossi. Il est accompagné par une jolie femme blonde, qui à peine quelques secondes après avoir remarqué que je suis là, se dirige sans retenue vers moi.

- C’est elle ! Je n’en reviens pas, la célèbre Phoebe Halliwell ! Je suis votre fan numéro une !s’exclame-t-elle, me serrant dans ses bras.

Je tombe des nues. C’est la même chose à chaque fois que je croise un ou une admiratrice, qui, folle de joie par ma présence, ne se contrôle plus et me saute littéralement dessus. C’est l’un des inconvénients du métier et il faut faire avec.

- Krystall, laisse-là respirer. Lui dit David.

- Je suis confuse, pardonnez-moi. Répond-elle, reprenant ses esprits.

- Ce n’est rien, j’ai l’habitude.

- Non, vraiment… C’est que j’aime tellement vos chroniques. Je les lis chaque matin, je vous regarde à la télévision et vous voir en vrai, c’est juste incroyable !

- Chérie, Phoebe a peut-être envie de profiter de ses amis. La coupe son compagnon.

- Je vous assure, il n’y a pas de quoi en faire toute une histoire. Et puis, je suis toujours heureuse de pouvoir rencontrer et discuter avec mes lectrices.

- Tu vois, chéri. Et puis, si tu m’avais prévenue de sa présence, je n’aurais pas été aussi démonstrative.

- J’ai compris, je vous laisse bavarder entre femmes. Je vais retrouver Aaron et Will.

- Il n’a vraiment pas changé. Déclarai-je à moi-même.

- Que dites-vous ?

- Sans vouloir vous offenser, votre compagnon a toujours son caractère de cochon.

- C’est vrai que vous devez vous connaître. Vous aviez dédicacé vos livres au sein d’un même salon, il me semble ? C’était à Dallas, je crois. L’année dernière !

- Vous êtes très bien renseignée. C’est là-bas que j’ai fait sa rencontre.

- Je vous l’ai dit, je suis votre première fan.

Je souris, gênée. Par-dessus l’épaule de Krystall, j’aperçois David Rossi qui me fait les gros yeux. Je le comprends, c’est sa façon à lui de me dire de me taire à propos de notre rendez-vous secret du mois dernier. Le célèbre écrivain m’a contacté pour me demander conseil au sujet de sa relation. Il se pose énormément de questions et a sollicité mon aide pour y voir plus clair dans ses sentiments. C’est avec plaisir que je l’avais reçu dans les locaux du « Bay Mirror ».

Élise, ma patronne, en a profité pour lui demander de faire la couverture d’une de nos éditions spéciales. Par souci de confidentialité, David a juste accepté de donner une interview en échange de la mention « réalisée à distance ». Il ne faut pas que sa fiancée se doute de quelque chose. Et vu comment elle suit ma carrière, je comprends que les craintes de mon ami écrivain sont justifiées. Je lui réponds par un signe de la tête. Sa femme a de la chance, elle n’a aucune idée de ce qui l’attend. Bientôt, elle sera Madame David Rossi, pour la seconde fois. Rien de comparable avec leur mariage à Las Vegas, qui a duré quarante-huit heures.

Je sais former des couples, les aider à se réconcilier, mais je suis incapable de trouver un homme et de le garder. Je dois me rendre à l’évidence : je suis inefficace lorsqu'il s'agit de m’occuper de ma vie amoureuse. Quand je dis que je peux rêver...

Tandis que JJ propose à tous d’ouvrir le champagne, mon corps est à nouveau parcouru par les mêmes frissons que ce matin. Mon don d’empathie prend encore une fois le dessus et cette fois, je ne peux pas fuir. Il faut pourtant que je trouve une parade pour me sortir de ce guêpier. Je n’ai pas envie de passer pour une folle. J’aimerais que Kyra soit à mes côtés, elle, elle saurait m’aider. Avec ces tours de passe-passe et ses maladresses, elle aurait amusé la galerie pour que je puisse m’éclipser le temps de retrouver le contrôle de moi-même.

- Tu as besoin d’un coup de main pour les boissons, JJ ?

- Ce soir, ce sont les hommes qui sont aux fourneaux. Déclare-t-elle, fièrement.

- Et vous allez voir combien nous sommes doués. S’enthousiasme Rossi, qui sort le nécessaire préparer les coupes de champagne, tandis que Hotch s’occupe de servir du jus d’orange à sa collègue enceinte et aux petits garçons.

Il passe à quelques mètres de moi et je m’écarte, puis rejoins les enfants qui s'amusent dans le jardin. Il a très bien compris que je l’évite. En soi, je n’ai rien contre lui, mais ce don incontrôlable me pousse à faire des choses parfois complètement loufoques. Je centre alors toute mon attention sur Wyatt, qui prend un réel plaisir à jouer avec Henry et Jack. Il sourit et je suis moins anxieuse. J’ai l’impression que depuis son arrivée à Quantico, il se sent apaisé. Je ne peux pas en être totalement certaine. J’ai bridé mon pouvoir d’empathie sur les membres de ma famille. Devrai-je inverser le sort dans le but d’aider Wyatt ? La question mérite débat.

- Tu joues avec nous ? Me propose Jack.

- Avec plaisir ! Alors, dites-moi les garçons, à quoi est-ce que vous jouez ?

Tandis que le fils Hotchner m’explique les règles de leur jeu, mon don fait à nouveau des siennes. Je sens le regard d’Aaron sur moi et je peux attester qu’il est surpris de la proximité que j’ai avec sa progéniture. Je n’y peux rien, c’est incontrôlable. Je ressens les émotions de chaque personne présente dans la maison. Et depuis la disparition des membres de ma famille, je suis dix fois plus sensible.

- C’est l’heure de trinquer ! Nous appelle Jennifer.

- Nous arrivons ! Vous venez, les enfants ?

- Oui. Répondent-ils tous en chœur.

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