Interlude 1

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— Par Mythrécen et toute la clique, j’en avais besoin, jubila le vieillard en s’adossant contre l’unique armoire de la roulotte. Merci. Merci mon garçon.

Le bois verni, peint, décoré et ornementé donnait à l’étroit wagon des allures de fêtes foraines. À tout moment un clown aurait pu jaillir de derrière le tableau abstrait rouge et bleu, ou un diable bondir de sous le tapis bariolé. Le pérégrin s’étalait à même le sol, ses longues jambes étendues jusque sous le grand lit défait aux parures chatoyantes. Il dégusta une nouvelle gorgée d’eau trouble avec une satisfaction non feinte.

Le jeune enfant, lui, ne disait mot. Debout, il dardait son regard sur le papy avec des yeux brillants. Ses petites mains serraient un pichet en grès (peint, lui aussi, de mille couleurs) comme si sa vie en dépendait.

Sa vie en dépendait probablement, du reste ; car derrière le hublot arrière du chariot, défilait le paysage abrutissant du reg. Invariable, inépuisable.

D’une paire de lunes aussi rondes que celle qui appelle les loups, les yeux du garçon se firent amande. Ses traits se tirèrent légèrement et finalement, les commissures de ses lèvres se soulevèrent. Il souriait :

— Il vous en reste un petit peu dans la moustache, monsieur.

Le vagabond lui rendit son sourire, dévoilant un air presque aussi juvénile. D’un coup de langue il récupéra les quelques gouttes qui perlaient sous son nez.

— Oh, merci !

— Vous venez d’où ?

La question s’était finalement envolée. Jetée comme ça, sans préambule ni présentation au courroux du désert et du vacarme causé par les cahots des roues sur les roches. Cette question, ils l’attendaient plus que tout. L’un comme l’autre.

— C’est une très bonne question, mon garçon. Une question qui vaut bien plus qu’un torrent au milieu du désert. D’où je viens. Car vois-tu, si j’ignore où je vais, je sais avec exactitude d’où je viens. Même mieux ! Je sais comment je suis parvenu jusqu’ici. Je pense même savoir pourquoi. Aide-moi à me lever, veux-tu ?

Le garçon n’hésita pas. Bientôt, le vieillard se trouvait assis sur le lit aux côtés de son hôte et tous deux partagèrent un regard pétillant.

— Ça sera donc ma première histoire : d’où je viens.

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