Une maladie terrible frappait l'humanité.

Tous les êtres humains perdaient la mémoire. Ils ne savaient plus qui ils étaient, comment lire, écrire, ne connaissaient plus les gestes du métier qu'ils pratiquaient depuis vingt ans.

Tous les êtres humains perdaient la mémoire, sauf, justement, ceux atteints de troubles de la mémoire. Les têtes en l'air, les amnésiques, les patients atteints d'Alzheimer devenaient les nouveaux garants des savoirs du monde.

Nous prenions par la main cette foule hébétée, triste, perdue, et nous la réconfortions. Après tout, nous avions déjà vécu tout ça. Pas à ce point, non, mais un peu quand même. Nous qui avions été pris en pitié, nous devenions le roc sur lequel les autres s'appuyaient.

Nous qui avions été guidés, nous devenions des guides.