Chapitre 1.1 : Astrid

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Astrid et Yume se remirent en route dès les premières lueurs du jour. Les premiers rayons de soleil de l'aurore avaient eu à peine le temps de les taquiner un peu que les deux jeunes gens s'étaient immédiatement réveillés. Ils devaient faire vite. L’Élite, elle, ne se reposait jamais. Sans doute que des Miliciens avaient traversé les plaines toute la nuit dans l'espoir de retrouver le fugitif et ses compagnons.

Yume s'empressa d'éparpiller un peu partout autour du camp les restes de leur feu de bois pour ne laisser aucune trace de leur passage. Il prit soin également de jeter les peaux des Quiròucats à deux endroits totalement opposés, pour brouiller les pistes. Puis les deux amis s'étaient mis en route sans perdre une seconde de plus. Ils en avaient déjà trop perdu.

Astrid avait eu du mal à trouver le sommeil cette nuit. Malgré la présence rassurante de Yume à ses côtés, la jeune fille n'avait pu s'empêcher d'éprouver un profond malaise. Chaque petit bruit de la nature – le vent dans les feuilles, le crépitement des flammes, et même les hurlements des chouettes au lointain – lui avait procuré une peur immense. A chaque fois, le brune s'inquiétait de voir débarquer un Milicien, et que ce dernier cherche à les arrêter. Oh, bien sûr, elle ne se faisait aucun soucis pour Yume si cela leur avait été arrivé : le jeune homme savait courir vite et se battre. Mais elle, elle ne pouvait pas en dire autant. Si elle s'était faite capturer, cette nuit, après s'être vaillamment défendue bien entendu, est-ce que son ami serait-il venu à son secours, sachant les risques qu'il aurait pu encourir ?

Astrid balaya ses pensées d'un vif hochement de tête. Même le pire des scénarios ne s'était pas produit cette nuit, alors à quoi bon se poser toutes sortes de questions maintenant ?

« Dit, on va où au fait ? » questionna soudainement la brune pour se changer les idées.

Après quelques secondes de silence, Yume se décida enfin à lui donner la réponse tant espérée :

« On continue vers l'Est, en direction du désert. »

Astrid leva les yeux au ciel, agacée. Ca, elle avait compris.

« OK, mais on fera quoi une fois là-bas ? reprit la jeune fille en trottinant pour se mettre à hauteur du blond qui avait pris un léger temps d'avance.

‑ Il y a un bazar un peu avant l'entrée du désert, expliqua Yume en fixant droit devant lui, l'air sérieux. On prendra de quoi survivre la traversée jusqu'à Aristofée. Il y a un village qui fait frontière dans le désert. Une fois qu'on l'aura atteint, on sera en sécurité. »

Yume se tourna enfin en direction de son amie, non sans continuer d'avancer cependant. Il commença à la dévisager de haut en bas, ce qui fit légèrement rougir cette dernière. Elle n'aimait pas lorsqu'on la fixait avec un peu trop d'insistance comme il était actuellement en train de le faire.

Comme pour montrer son agacement, la jeune fille croisa ses bras sur sa poitrine, tout en arquant un sourcil moqueur.

« Quoi ? » fit-elle un peu sèchement, alors qu'elle aurait voulu lui cacher un minimum son agacement.

C'était raté, visiblement. Yume se contenta de hausser les épaules, tandis que son regard bleu lagon se focalisa à nouveau sur le lointain.

« Rien. Je me disais juste qu'on devrait changer de vêtements. »

Astrid fixa un instant sa robe en lambeaux, et se dit que l'ancien Épéiste n'avait pas tord. Ah, depuis le temps qu'elle rêvait de quitter cette robe !

« Je te préviens d'avance : c'est moi qui choisis ma tenue ! Je veux dire adieu aux robes une bonne fois pour toute ! »

Yume s'arrêta un instant de marcher, puis se tourna une nouvelle fois vers la brune, un sourire amusé sur les lèvres. Puis il la dévisagea encore une fois de bas en haut, semblant l'analyser d'une certain manière qui ne plaisait clairement pas à Astrid.

« C'est dommage, lâcha-t-il en plaisant, je trouvai que ça t'allait bien. »

A ces mots, Yume reprit sa route, comme si de rien n'était. Complètement coi devant cette révélation, la jeune fille resta quelques instants interdite, avant de se mettre à rougir violemment. Une seconde ! Yume venait-il réellement de dire qu'il la trouvait… jolie ?! Quelque chose, au fond d'elle-même, lui laissait à penser qu'il n'y avait pas eu seulement de l'amusement de le ton de sa voix, mais une petite pointe de sincérité.

Un petit sourire satisfait s'étirant sur ses lèvres, Astrid rejoignit au trot le blondinet déjà bien avancé, qui semblait ne même pas prendre garde à son retard.

« Tu veux bien arrêter de courir partout ? la réprimanda-t-il en plaisantant à moitié une fois que la brune fut à nouveau tout près de lui.

‑ J'ai des petites jambes, argumenta la jeune fille. Dis, pourquoi on appelle les Plaines Séréna comme ça ?

‑ Pourquoi tu t'appelles Astrid ? répliqua du tac au tac Yume en riant légèrement.

‑ Très drôle. Parce que mes parents l'ont décidé. Mais tu ne réponds pas à ma question. »

Yume soupira bruyamment, sans doute de lassitude. Puis, se passant une main dans les cheveux, il finit par répondre :

« C'est drôle, mais je me souviens avoir posé la même question à Fileya il y a quelques années, lorsque je suis venu en mission ici pour la toute première fois… »

Astrid vit avec une pointe de tristesse le sourire de son ami s'effacer brusquement à la simple mention du prénom de l'Invoqueur. La jeune fille savait que Yume se faisait extrêmement de mauvais sang pour Fileya, elle aussi n'était pas sereine à l'idée de la savoir seule, ou pas vraiment, puisqu'elle avait ses Hybrides avec elle, en route pour Buxih.

« Eh, ça va aller » tenta de rassurer Astrid en prenant sa voix la plus douce.

Elle n'avait pas fait exprès, mais elle s'était doucement approché du jeune homme.

« Fileya est forte, elle s'en sortira.

‑ Les plaines s'appellent Séréna parce qu'elles sont censées être paisibles, conta Yume en prenant une mine plus renfrognée que d'habitude, mettant de côté son caractère jovial. Seulement, depuis quelques jours, peut-être même des mois, je ne sais plus, elles ne le sont plus vraiment. A cause des monstres. »

Sans ajouter un mot de plus, Yume se mit à accélérer soudainement le pas, au plus grand damne d'Astrid qui dû redoubler d'efforts pour parvenir à suivre la cadence.

Il devait être aux alentours de midi. Le soleil était déjà bien haut dans le ciel, et il renvoyait péniblement ses lourds rayons lumineux sur les deux voyageurs de fortune, qui ne bronchaient pas cependant du poids écrasant provoqué par la chaleur.

Cependant, Astrid demanda tout de même à Yume de s'arrêter à l'ombre d'un arbre au bout d'un certain temps, prétextant un mal de pieds. N'attendant même pas l'approbation de son ami – surtout car elle savait que celui-ci serrait contre l'idée de faire une micro pause – la jeune fille prit place sur un rocher abrité par un haut sapin. Profitant de ce léger moment de détente, la brune en profita pour enlever juste l'une de ses bottes pour constater l'ampleur des dégâts… et elle grimaça à la fois de dégoût et de douleur. Sur le haut de son pied, entre deux orteils, s'était formée une sorte de couche de peau qui avait prit une dangereuse couleur rougeâtre. Astrid passa à peine le bout de l'ongle sur la chose étrange qu'un horrible picotement lui lança dans tout le pied, semblable à de nombreuses petites aiguilles.

Yume, qui avait les yeux rivés lui aussi sur l'étrange blessure, ne put s'empêcher de lâcher un soupir de consternation. Il finit cependant par s'agenouiller aux côtés de la jeune demoiselle et examina avec plus d'attention la blessure.

« Est-ce que c'est grave ? » lui demanda Astrid au bout d'un moment, et dégageant par la même occasion son pied car elle était gêné de cette nouvelle proximité.

Mais aussi parce qu'elle n'avait pas quitté ses chaussures depuis leur départ de Buxih, et qu'ils devaient par conséquent dégager une odeur nauséabonde. Même si Yume n'avait fait aucune remarque, la jeune fille savait pertinemment ce qu'il devait en penser.

« Non, ça devrait partir au bout de quelques jours » lui répondit-il au bout d'un moment.

Le blond commença à fouiller dans l'une de ses poches, comme à la recherche de quelque chose. Intriguée, Astrid tenta de lever légèrement la tête pour tâcher de savoir ce qu'il faisait, mais elle ne parvint pas à voir quoi que cela soit.

« Et…, poursuivit-elle avec une petite voix, car elle n'aimait pas être un fardeau, est-ce que tu pourras me soigner ce truc ? »

Yume sortit de l'une de ses poches un rouleau d'adhésif ainsi qu'un spray anesthésiant. Astrid ne pouvait s'empêcher de croire que son sac, à l'instar du sac sans fond offert par les Falkies, était imprégné de magie. Yume arrivait à sortir n'importe quoi de ses poches ! Après tout, pourquoi pas ! Tout était sans dessus dessous dans ce monde !

« De quoi atténuer la douleur » lui affirma-t-il en la regardant droit dans les yeux.

Le jeune homme lui tendit ensuite la main. La brune la regarda quelques instants, interdite, et se demandant ce qu'il attendait d'elle. Puis, se sentant légèrement idiote, la jeune fille finit par comprendre, au bout de quelques secondes tout de même, que Yume lui réclamait tout simplement son pied pour le soigner. Astrid l'y déposa tout d'abord sans faire d'histoires, tout doucement. Puis, lorsque son ami s'approcha avec le spray, elle s'empressa de le retirer, tandis que ses yeux s'éclairèrent d'une panique soudaine.

« Ca ne va pas me faire mal, j'espère ! s'écria-t-elle en sentant son cœur battre follement dans sa poitrine.

‑ Mais quelle chochotte ! se moqua Yume en soupirant bruyamment. Dépêches-toi de me donner ton pied, les Miliciens doivent être tout près, on doit se remettre en route le plus rapidement possible ! »

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