Partie 2

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Il n’y avait pas de nuit, il n’y avait pas de jour. Seulement ces bancs de nuages qui traversaient le ciel sans jamais dévier, délimitant des journées identiques. Pas un souffle de vent pour casser cette constante infinie.

Elle partait au passage du premier nuage et revenait au passage du dernier. Elle marchait inlassablement, comme tous les autres, jusqu’au champ de neige. Elle effectuait toujours le même nombre de pas et laissait toujours dans son sillage le même nombre de flocons. La beauté des montagnes n’était plus qu’accessoire alors qu’ils empruntaient tous le même chemin.

Une fois leur destination atteinte, ils commençaient leur cueillette. Ramasser une à une ces petites fleurs de glace, comme toujours et pour toujours. Chaque être avait besoin de cet amas de neige fraîche afin d’assurer sa propre survie. Le nombre de flocons ne variait jamais. Rien ne changeait jamais, dans cet infini blanchâtre sans but et sans saveur. Elle ne comprenait pas. Et pourtant, elle suivait le mouvement, mue par un étrange sentiment qui la poussait à cueillir ses flocons.

Un nuage cotonneux passait alors, lent et seul. Délaissant lentement leurs paniers couverts de poudre immaculée, les êtres s’ébranlaient dans une synchronisation parfaitement naturelle et prenaient une courte pause. Ils attendaient, immobiles et vides, les yeux rivés sur un paysage aussi brillant que leurs pupilles. Il attendaient, muets et sourds à l’appel d’une liberté qu’ils ne sauraient prendre.

Elle ne restait pas avec eux. Elle voulait voir toujours plus loin, aller toujours plus haut. Posant ses mains d’un blanc pâle sur les rochers tranchants, elle gravissait la montagne et se glissait entre les buissons épineux. Les fleurs d’un blanc uniforme se balançaient lentement à la lueur de l’étoiles, tandis que quelques insectes déployaient leurs ailes translucides en un vrombissement sourd. C’était de là, d’en de ce mont, qu’elle dominait son monde uniforme et bien rangé.

Pourtant, ses yeux curieux ne pouvaient saisir de différence entre le champ de neige et le sommet sur lequel elle se trouvait. Tout était identique, éclairé de la même manière par la même lumière, de la même « couleur ».

Était-elle montée ou descendue ? Rien, dans ce paysage monotone, ne pouvait le lui indiquer. Tout semblait plat, et seule sa conscience endormie lui faisait savoir qu’elle venait de gravir une montagne.

L’être rejoignait ensuite ses semblables et ils reprenaient tous ensemble leur inlassable activité. Le froid semblait n’avoir aucune emprise sur leurs corps élancés. Pouvaient-ils seulement ressentir la douleur ?

Un nuage traversait de nouveau le ciel et tous se redressaient, se dirigeant machinalement vers le village où ils s’engouffraient silencieusement. Chacun retrouvait son habitation exigüe et s’y reposait jusqu’au prochain passage de nuage.

Elle s’allongeait sur sa couchette gelée et fermait doucement les yeux après une dizaine de secondes. Elle plongeait dans un profond sommeil où la noirceur n’existait pas.

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