11. L'esprit ailleurs - 2/2

2 minutes de lecture

Alors que traditionellement jouer avec des tout-petits me calme et m'apaise, aujourd'hui je ne cesse d'être frustrée par la moindre trainée de bave ou le moindre début de sanglot capricieux que je vois. Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive. Charlie met une internité à franchir les portes battantes. Dès qu'il me repère derrière le comptoir, il m'invite d'un signe de la main à m'assoir à la seule table du restaurant encore libre. Je lâche la sucette d'Hajina sur une étagère, sans me soucier de ses supplications et me glisse sur la banquette en face de lui. Nous sommes coincés entre un couple qui s'embrasse goulument et un chargé d'affaires qui énonce chiffre après chiffre à un homme aux cheveux poivre et sel en face de lui.

- Tu n'es pas sensée être en cours ? sourit-il.

Des larmes perlent instantanément au coin de mes yeux. Charlie qui scrute mon visage les remarque et son visage se ternit.

- Oh ! Qu'est-ce qu'il y a ?

Il attrape ma main et la presse délicatement. Ce simple geste me réconforte et me souffle assez de courage pour réussir à m'ouvrir.

- Il y a... il y a des rumeurs au lycée et... et je ne peux pas continuer comme ça.

Ma respiration se bloque dans ma gorge et je serre si fort sa main que mes jointures deviennent blanches. Je n'arrive plus à continuer. Ma langue forme un barrage infranchissable entre mes lèvres et les mots.

Le silence s'éternise tandis que Charlie scrute mon visage. On n'entend plus que les bruits que fait le couple à côté et les rires bruyants d'un groupe d'amis derrière moi. Une larme douloureuse roule sur ma joue. Charlie retire sa main de ma poigne sévère pour l'essuyer du bout de son index. De son autre main, il fouille la poche de son pantalon jusqu'à sortir ce qu'il cherchait : son téléphone portable. À toute vitesse, il tapote partout sur l'écran. Puis, il lève ses beaux yeux bleus vers moi.

- C'est règlé, annonce-t-il avec le plus grand des sérieux.

De quoi peut-il bien parler ? A-t-il fait renvoyer Hailey ? Rectifier les informations éronées dont ont été abreuvés tous mes camarades lycéens et leurs amis sur tous les réseaux sociaux existants ?

Face à ma mine étonnée et perplexe, il ajoute :

- J'ai réservé nos billets d'avion. On part demain pour l'Italie.

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