Chapitre 14. Accidents.

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Comme je ne me suis jamais retrouvée dans cette situation, je ne sais pas du tout ce que je dois faire et non, je n'ai pas envie de mourir. Je ne dois pas m'éterniser ici. Au sol il y a des briques et des parpaings. Je m'empresse de construire un igloo et rampe pour me coucher à l'intérieur. Je décide d'attendre la nuit. Désormais, je connais la réponse à une question que je m'étais posée en sortant des égouts : il n'y a qu'un soleil. Par un trou qui fait la taille de ma rétine je monte la garde au cas où les créatures décideraient de me poursuivre. En fuyant, j'ai senti quelque chose se délier en moi, sans doute l'emprise de l'un de ces... semis-humanoïdes. La science-fiction j'aime bien mais pas l'horreur ! Leurs têtes me donnent des frissons. J'ai la désagréable sensation que si je ferme les yeux et que je les rouvre ils vont être là, juste devant moi et qu'enfermée dans mon igloo rouge et gris je serais à nouveau prise au piège. J'ai deux envies ; hurler de tout mon cœur en PLS et me transformer en souris pour disparaître.

Je ne vois personne, je crois qu'ils ne sont même pas sortis de chez eux. Un manque de forces les a sans doute empêchés de se déplacer. Le ciel se fonce petit à petit et la nuit arrive. Je pense alors à retrouver le groupe je ne veux pas rester seule ! Mon ventre est tiraillé par la faim et la soif, malgré mon désir de partir, je m'endors à la nuie tombée, blottie au coeur de ma cabane de fortune. Mon sommeil est écrasant. Je rêve de ma mère et de mes amis. Je me demande ce qu'ils deviennent. Une larme s'échappe et coule sur ma joue. Cependant ce n'est pas cela qui me réveille mais un bruit de grattement. Je fronce les sourcils, prudente mais sans ouvrir les yeux. J'écoute en bloquant mon souffle pour éviter d'être gênée par ma respiration. De nouveau un bruit, crissement aigu que je détèste comme une fourchette dans une assiette. Je frissonne, je sers les dents, comme je hais cet infame crissement qui se répercute dans mes os. Mon ventre gargouille, fort. Je me donne une gifle mentale. Des pas s'éloignent. Des briques ont été déplacées vers l'extérieur, ne voulant pas trop me déplacer, je colle mon oeil au trou. Désormais à part mon corps qui se mouve, je n'entends plus aucun bruit. A quelques mètres devant moi se trouve un garçon de mon âge. N'y a t-il pas de fille sur cette planète ? Je peux aisément l'observer. Je suis certaine qu'il n'est pas du groupe, je l'aurais reconnu à son visage. Il a l'air plutôt pas mal, mais il faut que je me méfie. Lui aussi craint le soleil, il est comme nous tous mis a part ma mère et Mickael.

Il est malin, il a fait comme s'il s'éloignait mais tout doucement il continue d'enlever des pierres et autres débris. Il fait ça dans le silence, je le remarque à peine, je vois juste ma construction bouger. Maintenant j'ai vraiment faim, je serais prête a manger du rat. Aussi sale et répugnante qu'est cette idée mais c'est la seule chose mangeable sur cette planète vide. La folie me guette t-elle ? Maman, oh maman ! Aide-moi... J'ai envie de pleurer si bien que sans que je m'en rende compte, ayant retiré le mauvais bloc, le garçon fait s'écrouler mon igloo. En une fraction de seconde, tout s'abbat sur mon corps. Lorsque, simultanément, deux pierres s'écrasent sur mes doigts et sur ma tête, je crie si fort que j'ai l'impression que je ne vais plus pouvoir parler. Et jamais deux sans trois, le comble du comble, une troisième pierre cassée, donc pointue, me percute l'épaule. L'épaule maudite. Même les pierres s'en prennent à cette épaule qui n'a jamais rien demandé. Je hurle une nouvelle fois et gémis en me recrovillant encore plus que je ne le suis déjà. Je m'évanouis de douleur pendant quelques minutes. Une voix dont je devine l'appartenance me fait ouvrir les yeux.

— Ah, oh non ! Je suis vraiment désolé ! Excuse moi, je ne pensais pas que ça allait s'affaisser comme ça.

— Aide moi au lieu de parler, répliquais-je d'une voix ferme mais très faible.

— Oui, bien sûr, mais je suis vraiment désolé !

De nouveau je gémis en lui demandant de se dépêcher. Il ne me répond pas et me délivre de cet éboulement. Il recule soudainement et je regarde son visage autant que je puisse le faire sans bouger mon coup. Je n'ai jamais vu autant d'effroi sur un visage. Il tient une pierre et non une brique, qui est sanguinolante. A la reflexion, j'ai encore plus mal qu'avant, il vient de la retirer. Il est encore plus pâle que nous ne le sommes de base. Pour une fois, c'est lui qui se tourne et vomis. Des points noirs dansent devant mes yeux et je ne sais pas si c'est les carences ou la douleur. Je retiens moi aussi un haut-le-coeur. A l'aide de ma main libre et en secouant les jambes j'essaie de débarraser mon dos et mes cuisses. Je détends mes jambes pour enlever ces poids qui m'assaillent. Je me sens mal. Ma blessure me brûle, et mon sang est chaud et poisseux. Le responsable de ma souffrance revient vers moi, enlève sa chemise et à l'aide de ses manches me fait un garrot. J'entend un cri avant de comprendre que c'est le mien, il se termine par un affreux gargouillement de gorge. Même sans chemise il paraît à l'aise tout en continuant son déblayage. Il me débarasse des quelques éboulis que je n'ai pas pu enlever. Même si j'ai peur de crier si j'ouvre la bouche, j'ai besoin de lui parler pour penser à autre chose.

— Co...Comment tu t'appelles ? ... Moi c'est Sélène.

— Sélène...

Il répète mon prénom avec délèctation et ça me fait quelque chose d'étrange.

— Moi c'est Stanislas mais je n'aime pas mon prénom donc appelle moi Stan.

— D'accord.

Sérieusement, il est musclé et je pense que sur Terre, beaucoup de filles lui aurait couru après. Il a l'air sympa finalement. En me regardant il se dandine, mal à l'aise.

— Quoi ?

— C'est gentil ce que tu penses de moi mais...

— Oh... Tu lis dans les pensées ?

— Non ! Je perçois les sentiments et chaque sentiment est lié à une image de cause de ce sentiment. Et je vois que tu es heureuse, un éclat fugace d'amour est passé rapidement et l'image qui lie tout ça c'est... moi.

— Désolée,

C'est moi qui m'excuse maintenant.

— Pas grave, on ne contrôle pas tout ce qu'il y a dans notre tête. Je voulais juste te le dire.

C'est gênant, il n'y a pas pire comme situation, et forcément il a fallu que ça tombe sur moi et que je me tape la honte. Dans de pareils moments, je n'ai qu'une seule et unique pensée, être dans ma chambre, plongée dans un bon livre sur mon lit confortable avec des bonbons. Mais je ne suis pas dans ma chambre et réalise que je ne reverrais jamais mes livres... Mon cerveau rajoute une couche de tristesse en me faisant penser à ma mère. Stan me demande qui est cette femme qui me rend triste. Je lui dis qu'elle n'est pas responsable de ma tristesse et que c'est ma mère. Je lui dis qu'elle me manque. Il m'annonce qu'il peut essayer de la retrouver mais je refuse en disant qu'il faut d'abord que je mange et que je boive avant d'aller quelque part. Il m'assure que l'on va se trouver ça. Je lui demande s'il peut repérer les sentiments des gens avec son don et sur combien de distance. Il voit où je veux en venir et m'interroge en retour ;

— Vous devez vous rendre où ?

— A l'armurerie.

Il a compris ce que nous comptions faire. Parfois, il n'est pas nécessaire de parler, surtout quand vous avec quelqu'un qui sait ce que vous ressentez. Par contre, les verrouiller est plus dur. Certaines choses de méritent pas d'être dévoilées. Après un instant de réflexion il décide :

— Dépêchons-nous de les retrouver pour assister, et avec un peu de chance, participer à la chute du tyran.

Sans rien ajouter de plus à sa parole, je cherche dans ma mémoire où nous en étions avant que je parte. Hum, qu'avait dit l'Ancien ? Des kilomètres. Si ! Mot pour mot il a dit, "une bonne centaine de kilomètres". Un voix m'interromps ;

— Eh, t'as peur d'une route ?

— Faut pas me faire peur comme ça ! Non c'est une distance pas une route. Tu penses que l'on peut faire cents kilomètres en deux, trois jours ?

— Ce vieux fou d'Ancien n'en est pas capable en tout cas. me réplique t'il amèrement.

— Tu ne le portes pas dans ton coeur, que t'as t-il donc fait ?

Stan ne me répond pas. Je me relève, faisant bien attention à mon épaule encore faible. Durant toute notre conversation je suis restée scotchée au sol en attendant que la douleur poignante s'estompe. Je suis aussi grande que lui, et scrute ses yeux pour chercher une réponse, il ne me fuis pas. C'est la première personne a avoir des yeux gris foncés, magnifiques d'ailleurs. Mais je n'y vois qu'une infinie tristesse dont j'ignore la cause. Je n'arrive pas à garder mon regard fixé au sien. Lentement mes yeux dérievent sur son visage pâle. Il finit par sourire, me demandant de pense un peu moins fort... Je ne sais même pas ce que je ressentais.

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