Chapitre 12. Désaccords et écart.

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—Sélène ! Réveille-toi !

Une voix lointaine me perce les tympans, mais je ne saurais l’identifier.

—Hmmm, ahh ! J’ouvre les yeux, ma mère est juste au dessus de moi.

_ Tu commençais à devenir noire, tu m’as fait peur, ne refais plus jamais ça. Avec toi, je vais finir par mourir de frayeur !

_ Désolée ! Mais j’ai fait un rêve étrange…

_ Rêve ou cauchemar ? me demande l’Ancien.

Tiens, je n’avais pas remarqué sa présence. Il a le chic de surgir devant les gens, sans téléportation, et de leur faire peur.

— Rêve qui a tourné au cauchemar. Leur expliquais-je, ainsi que la suite de mon rêve.

_ Dis moi, sur sa couronne, de quelle couleur était la pierre centrale ?

_ Rouge. dis-je sans hésitation.

_ Tu sais que nous ne devons pas révéler notre don, sauf si on doit apporter une explication ou si quelqu’un l’a deviné. Tu as deviné son pouvoir je suppose.

_ Oui. Il peut visiter les rêves et les rendres mauvais.

_ Exact. Ce qui est bien pour nous et dommage pour lui, c’est qu’il n’a pas la capacité de les contrôler.

_ Si, parce qu’il a modifié le paysage initial en plus de le mettre en cauchemar. Et il peut aussi manipuler la personne dans son rêve, en lui parlant.

_ Oui, bon, en tout cas ce n’est pas très puissant pour un Roi. me répond-il légèrement acerbe.

_ On arrive quand ? Où est l’armurerie ? Votre…pays ? Planète ? Est faite d’égouts ? On ne sort jamais d'ici ?

_ C’est une planète, jeune fille. Si, on peut en sortir, c’est juste que tu nous déposés là-bas et qu’il n’y avait pas de sortie. Ici il y en a une proche. Regarde à gauche.

_ Je vous signale que je n’ai pas choisi de me retrouver ici !

Il ne répond pas. Mais en effet, un peu plus loin, il y a une échelle et on voit de la lumière. Une fois tout le monde éveillé nous nous y précipitons, et grimpons chacun notre tour. Nous avions vérifié qu’il n’y avait pas de soleil. Ce n’est pas une très belle planète. Tout y est gris, sale, il y a peu de verdure, voire presque pas. C’est un paysage triste. Il n’y a pas de bruits autres que ceux qui viennent de notre groupe. Les bâtiments, au loin, sont gris, ce qui rend le décor plus mélancolique.

J’ai l’impression qu’il y a deux soleils. Je n’en suis pas sure car il y a de gros nuages gris-noirs. Au dessus des pâtés de maison qui sont éloignés, on voit une sorte de dôme dépasser. J’interroge notre doyen.

— Quel est ce dôme ?

_ Là où nous devons aller. L’Armurerie.

_ Ah. C’est loin ?

_ Oui, à une bonne centaine de kilomètres.

_ Quoi ? Mais c’est encore plus loin que ça en à l’air !

_ Tu vas être ravie : le Palais, une fois que nous serons à l’Armurerie, sera à l’opposé de la ville.

_ Quoi ! Je me répète, stupéfaite.

_ Eh, oui, il va falloir beaucoup marcher.

_ J’ai juste une question : on va chercher des armes pour détrôner le Roi. Ça c’est compris. Mais, est-il protégé ? Y a-t-il du monde à son service, actuellement ?

_ Nous ne le savons pas. C’est pour cela que nous allons chercher des armes. Me répondit tranquillement l’Ancien.

Je m’exclame aussitôt, devant tout le monde :

— Mais vous êtes inconscient ma parole ! Non mais enfin, prendre un palais d’assaut sans même savoir ce qu’il nous y attend c’est du suicide !

Je fais une pause, me retourne légèrement vers l’arrière et tends mon bras de manière accusatrice vers les égouts, d’où nous venons. M’apercevant qu’il cherche à reprendre la parole, je le devance :

— Vous avez vu le nombre de gens que nous avons perdu ! Ce n’est pas encore fini ! D’ici là nous allons en laisser encore d’autres derrière nous !

Profitant d’une nouvelle pause, il lance rapidement une phrase qui me cloue sur place.

_ Mes amis, voilà comment meurt une révolution.

Il a prononcé ces mots avec une telle nonchalance que je ne sais plus quoi dire. C’est vrai qu’en y réfléchissant bien, dire ce que j’ai dit au milieu d’une foule fatiguée ça n’aide pas. Il a raison. Ce n’était pas très malin de ma part. Comme plein de fois après que j’ai parlé pour rien et que je regrette un tant soi peu mes paroles, dans ma tête une petite voix narquoise me souffle que je n’aurais pas dû ouvrir ma grande bouche.

Sur le même ton je lui réponds qu’elle représente mon esprit et que c’est elle qui me fait parler. Et toc pour la petite voix narquoise. C’est moi qui décide ! Sortant de mes pensées je me rends compte que l’Ancien était en train de parler. Il est au bout de sa phrase.

— … et nous allons prendre plusieurs jours pour atteindre notre but.

Je cherche à m’écarter du groupe et Lilianna m’a repérée. Elle s’approche discrètement de moi et me demande ce que je fais. Je suis contente que ce ne soit pas ma mère sinon je ne pourrais pas me débarrasser d’elle en prétextant une envie pressante. Elle rosit un peu avant de me dire que je dois faire vite car elle ne sait pas quand nous partons et que l’on ne peut pas savoir ce qu’il peut se passer quand nous sommes seuls. Elle me laisse pour aller discuter avec quelqu’un d’autre.

Pour la première fois depuis qu’il est parti, je songe à David, je me demande comment il va, s’il est toujours en vie. Brusquement mon pied heurte un caillou et je tombe en m’étalant de tout mon long sur le sol jonché de débris. Je n’ai pas le temps de mettre mes bras en avant pour me protéger. Ma tête touche par terre et un morceau de verre fait une estafilade sur ma joue gauche. Sonnée par la douleur, je deux ou trois minutes couchée sur de la poussière et des débris de je ne sais trop quoi. J’espère que je ne suis pas trop visible. Pour la énième fois depuis que tout cela à commencé, je pousse un gémissement de douleur. Quand tout cela finira t-il ? Pourquoi dans les livres les héros survivent toujours et tout se passe bien ? Pourquoi, dans la réalité, est-ce si difficile ? Tant de questions sans réponses se bousculent dans ma tête. Je me lève en poussant sur mes bras. Ce qui ne manque pas de me rappeler mon épaule fragile.

Je ne sais pas pourquoi mais un sentiment étrange s’empare de moi. Le désir, brûlant, d’être loin d’eux et de faire cavalier seul. Je jette un œil en arrière. Ils ne sont presque plus dans mon champ de vision. Je ne m’étais pas autant éloignée pourtant. C’est sans doute eux qui ont avancé. Je n’ai pas l’intention de les rejoindre. Ils ne tiennent pas tant que ça à moi on dirait. Ils n’ont envoyé personne, ni ma mère, ni Raven, ni personne et Lilianna n’est pas venue me chercher.

Après la forte envie de partir loin d’eux, un sentiment tout aussi fort, mais d’abandon cette fois, se fait ressentir. J’ai l’impression que tout le monde me renie. Pour la première fois depuis longtemps je pleure de tristesse. Cela me paraît exagéré, faux mais mes larmes redoublent de puissance, mélangées à de la douleur. Le sel, sur une plaie qui saigne me fait mal.

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