CHAPITRE 7 : L’EVEIL

3 minutes de lecture

J’ouvre les yeux.

Je suis toujours allongée dans la boîte en carton. La housse plastifiée m’enveloppe, mais la fermeture à glissière est ouverte. Je porte la main au collier métallique qui entoure mon cou. Je n’ai pas rêvé. Je réalise que tout s’est réellement passé. Je ne suis plus dans mon Noxe. Je suis ailleurs mais je ne sais pas où. Mon instinct me conseille de rester immobile. Je fais la morte, comme FIL lorsqu’elle sait que je l’observe. Je n’utilise pour l’instant que mes yeux et mes oreilles pour appréhender mon nouvel environnement, sachant que le moindre mouvement de ma part me mettrait en danger. Je suis pétrifiée de peur. MOM m’a toujours mise en garde contre l’extérieur. Elle ne m’a jamais rien caché de tout ce qui nous attend lorsque nous nous retrouvons dehors. Elle m’a maintes fois montré les images de guerres, de révoltes, de tueries, la barbarie des êtres humains. Elle m’a maintes fois montré la violence des éléments déchaînés par les dérèglements climatiques, les ravages des microbes et des virus sur le corps humains…

Et me voici sans défense, en dehors de mon Noxe, à l’extérieur. Là précisément où il ne faut jamais être, plongée au milieu de l’enfer. Je suis paniquée, je me sens si fragile. MOM me manque, mon sarcophage également. Tout me manque. Je suis désespérée. J’ai froid aussi.

La pièce dans laquelle je me trouve est beaucoup plus grande que le Noxe. Sur les murs, des dessins, et un peu partout, des étagères décorées de fleurs séchées, de livres, de cailloux et de bibelots colorés et variés.

Devant moi, une fenêtre ornée de rideaux bleus et blancs laisse entrevoir des feuillages à l’extérieur. La lumière filtre aux travers des branchages, créant des ombres dansantes un peu partout dans la chambre.

Du dehors me proviennent des bruits de conversations, des cris d’enfants, des rires, des chants d’oiseaux. La maison me semble quant à elle totalement silencieuse. Cependant, lorsque le calme se fait à l’extérieur et que mon esprit se concentre à nouveau sur l’intérieur de la pièce, un très léger bruit sec et mécanique s’accroche à mes oreilles et finit par remplir tout l’espace. A force d’attention, je découvre que ce bruit provient de la pièce voisine que j’aperçois par l’entrebâillement de la porte laissée à demie ouverte. Un balancier doré suit le rythme du tic-tac et m’hypnotise.

Je m’apaise.

Mon nez entre en scène également pour m’aider à explorer ce nouvel espace. Il détecte des odeurs, beaucoup d’odeurs qui me sont inconnues. Des parfums doux, fruités et sucrés qui me sont fort agréables.

Je ne connais rien de cet environnement. Mes convictions me rappellent que je suis très certainement en danger, mais, étrangement, je commence à m’y sentir bien. La peur me quitte petit à petit. Les tensions de mon corps se relâchent.

Je contorsionne mes globes oculaires pour tenter de retrouver FIL dans la boîte en carton. Mes tentatives sont vaines. Mon amie n’a certainement pas attendu mon réveil pour explorer les alentours et trouver un abri sûr. Je l’envie. Je lève les yeux et scrute les recoins du plafond. Je connais ses endroits préférés.

A mon grand étonnement, ce n’est pas une, mais plusieurs FIL que je découvre tapies aux angles supérieurs. Je ressens une angoisse de ne pas parvenir à la reconnaitre. A-t-elle déjà connu une fin tragique ou a-t-elle réussi à survivre dans ce monde hostile ?

Puis mes yeux descendent et s’attardent sur un parchemin punaisé au mur.

" Seul un changement de la représentation que nous avons de nous-mêmes et du monde - un changement de paradygme - peut nous faire revenir dans le sillon et retrouver du bon sens. C'est ce que nous enseignent toutes les sagesses et les spiritualités de l'humanité : ... nous rappeler que le mot "humain" trouve sa racine dans le latin humus qui veut dire "terre", cette terre où nous sommes nés, à laquelle nous appartenons et qui nous constitue, cet humus qui est aussi la racine du mot "humilité". Il est temps de se rappeler que nous ne sommes vraiment humains que si nous sommes humbles.

                  Boris Cyrulnik "

Je parcours le texte sans rien comprendre à sa signification.

Il me faudra une vie entière pour que ces mots trouvent tout leur sens.

Mes réflexions sont soudainement stoppées par un bruit de cliquetis, des grincements et des bruits de pas.

Quelqu’un vient d’entrer. Les bruits de pas approchent, je suis à nouveau pétrifiée.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Isabelle Bernard ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0