Chapitre 4 : Lomëar

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L’enfant de l’obscurité

Aux premières lueurs de l’aube, Rose avait poussé la porte et découvert Manfred endormi sur le sofa tenant la tasse vide dans ses mains. Lentement, elle l’avait prise et posé sur la table. Elle s’était affairée sans bruit, aux soins de sa patiente et à la préparation de la toilette. Aujourd’hui, il fallait changer les bandages qui enserraient sa tête. Les hématomes commençaient à disparaître et la cicatrisation de la plaie à l’arrière du crâne devait être un peu plus avancée à présent.

Des coups répétés, la firent sursauter. Absorbée par ses pensées, elle avait oublié Amina. Elle ouvrit la porte pour laisser passer la cuisinière dont le plateau était composé d’une théière, de petits pains chauds et de morceaux de fruits. La femme d’âge mûr la remercia d’un signe de tête et posa délicatement le plateau au côté de Manfred. Avant de quitter la pièce, elle se retourna vers Rose et murmura :

 - Mon époux a surpris une dispute entre Lady et Lord Northumberland. Elle semblait très en colère, une femme habituellement si douce ! Cela n’a pas duré longtemps, mais il a entendu, Archibald. Elle frotta ses mains nerveusement avant d'ajouter : " Rendez-vous compte, après tout ce temps !"

Rose s’efforça de cacher son malaise derrière un sourire et d’une voix qui se voulait rassurante, se contenta de répondre en chuchotant :

 -Vous connaissez Mercy, cela ne durera pas.

Puis sans plus de commentaires, elle reconduisit son amie qui ne s’attarda pas d’avantage.

Amina était une femme de cœur. Elle et son époux étaient dévoués à la famille Northumberland depuis plusieurs générations, comme la plupart des habitants du bourg voisin, Greystone. Rose savait à quel point ils avaient souffert de la tragédie qui avait frappé Lockwood, des années plus tôt. Si Mercy voulait encore s’accrocher à un infime espoir, Aguelbert, avait renoncé.

L’odeur alléchante des pains tira Manfred de son sommeil. A la vue de Rose, il se releva brusquement. Confus, il bafouilla quelques bribes d’excuses en réajustant sa ceinture sur sa longue robe noire. Amusée, l’infirmière se détourna légèrement pour verser le thé fumant dans une tasse propre avant de la tendre à Manfred.

 - Ma préparation vous a été bénéfique. Je suis soulagée que vous ayez pu goûter un peu de repos.

Le jeune mestre se saisit de la tasse en la remerciant chaleureusement. Cette nuit lui avait fait le plus grand bien. Pendant qu’il dégustait son petit déjeuner, Rose retourna à ses activités en songeant aux paroles d’Amina. L’attitude de repli d’Aguelbert et ses dernières paroles au châtelet, avaient suscité la curiosité de Manfred qui s’inquiétait du sort de sa protégée. Il était à Lockwood depuis plusieurs semaines et avait repoussé son départ à la capitale, à une date qu’il ignorait encore. Rose ne s’était jamais confiée, mais elle appréhendait les prochaines décisions du Lord.

« Nous allons ôter les bandages à présent. » La voix de Manfred la tira de ses pensées. Elle acquiesça et alla de l’autre côté du lit. Doucement, ils dégagèrent le crâne de son étau de tissus pour constater avec stupeur qu’il n’y avait plus aucune trace. Instinctivement, Manfred saisit la main de la jeune femme et constata la couleur de la peau, légèrement rosée. Sans un mot, Rose dégrafa la longue chemise de nuit. Les dernières marques violacées semblaient s’être évaporées. Le losange noir, se dessinait plus distinctement sur la peau blanche. La poitrine se soulevait légèrement, par intervalle régulier. Manfred releva les couvertures et d’un ton déterminé annonça :

 - Je me rends au bureau de Lord Northumberland. Je doute qu’il apprécie ma visite, mais se qui ce passe ici dépasse notre compréhension.

Sur ces mots, il se releva pour se diriger vers la porte. L’infirmière se précipita et saisit son bras : « Manfred ! » Surpris, il la dévisagea.

 - Pardonnez-moi mais vous ne pouvez vous présenter devant Aguelbert sans connaître la vérité sur…-elle s’interrompit un instant et prit une profonde inspiration- sur son fils !

Devant l’étonnement du mestre, elle relâcha son étreinte et continua d’une voix empreinte d’une profonde tristesse :

 - Aguelbert et Mercy ont eu un fils qu’ils ont nommé Archibald. Cet enfant était leur fierté et le dernier du nom. Il était médecin et membre de la Confrérie des Chevaliers du Sacre .

A l’appellation du nom de la congrégation, le cœur de Manfred se serra. Ignorant le trouble qu’elle venait de provoquer, Rose continua :

 - Il s’est engagé dans la guerre des Sangs Communs contre l’avis de son père, pour servir l’ordre de l’ancien code et la Guilde. Au plus fort des combats, il a été porté disparu. Cette terrible nouvelle a bouleversé ses parents, mais celle qui devait venir par la suite, les a totalement anéantis. La Guilde à mandaté deux de leurs représentants pour les informer que leurs fils s’était rendu coupable d’un vol abominable.

Sous l’émotion, elle s’interrompit puis lâcha :

 - Il a volé le Livre des Figures, le manuscrit de la Terre des Ages.

Cette révélation laissa Manfred sans voix. Il avait entendu parler de cette histoire, mais n’avait jamais fait le rapprochement avec le château de Lockwood. Son père lui vantant toujours les mérites et le savoir du grand Aguelbert Northumberland. La surprise passée, Manfred se ressaisit et ouvrit la porte pour découvrir Mercy, un ouvrage relié de cuir entre les mains.

 - Bonjour Sir Manfred, je pense que ceci peut vous être utile. Lui dit-elle, simplement.

Il saisit le livre qu’elle lui tendait avec un sourire timide et des larmes dans ses yeux bleu gris.

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