Chapitre 29

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Le jeune homme tenait l'écharpe en l'air. Pétrifié, il retournait l'information dans sa tête tandis que l'adolescente rougissait, mal à l'aise.

- J'aurai dû la lui rendre il y a longtemps. Luc me l'a prêtée un jour, puis m'a proposée de la garder alors que j'avais oublié de la lui remettre. Mais en y réfléchissant, je comprends que cela puisse sembler indécent... Ce sont ses affaires, pas les miennes... Oui, je la lui redonnerai dès qu'il rentrera en ville...

Fanny parlait plus à sa conscience qu'à Gatien, et de fait, ne remarqua pas la colère qui avait remplacé l'effroi sur le visage du garçon. Elle ne reprit ses esprits que lorsqu'il éleva la voix.

- C'est le type que j'ai vu dans la bibliothèque ?... Asvaldi ? lâcha-t-il, froidement.

Fanny sursauta.

- Euh, oui. C'est un ami...

Gatien eut un rire mauvais, attrapa sèchement ses vêtements, et regarda à peine Fanny en sortant.

- Moi aussi j'ai ce genre d'amis.

Puis il claqua la porte derrière lui et rejoignit Pia, furieux. Considérant à peine l'adolescente, il marchait droit devant lui, les mains dans les poches, le visage cramoisi. La jeune fille, qui avait du mal à le suivre, cherchait les mots justes pour excuser sa "petite tenue" dans l'escalier, alors que Gatien n'y pensait déjà plus.

Après avoir enjambé son scooter garé un peu plus loin, le garçon alluma le moteur tandis que Pia s'installait derrière lui et s'accrochait à sa taille. Le conducteur tapa du pied sur le sol, et démarra sur les chapeaux de roues.

Dans sa course folle, le vent fouettait son visage et ses cheveux châtains étaient ramenés en arrière. Pia, qui le serrait plus fort, se taisait pourtant devant la vitesse du véhicule. De toute façon, Gatien n'aurait pas écouté ses supplications. Il agissait au rythme de ses émotions, et rien ne pouvait le calmer en cet instant. Au coin d'une rue, une première voiture manqua de les renverser, puis une seconde un peu plus loin. Le garçon explosa de rire à chaque fois, alors que sa passagère gémissait en tremblant. Sur les derniers kilomètres de route plate et silencieuse, Gatien accéléra encore, fébrile, et s'arrêta finalement devant un pavillon en faisant grincer les pneus.

Pia descendit en chancelant tandis que ses amies la rejoignaient. Faisant de même, le lycéen passa une main dans ses boucles indisciplinées, et les adolescentes qui le regardaient chuchotèrent en souriant. Tout le monde salua son arrivée, aussi téméraire qu'inconsciente. Mais Gatien, qui retenait sa rage depuis dix bonnes minutes, exprima une désinvolture intimidante. Les garçons lui donnaient des petites tapes dans le dos, tandis que les filles baisaient ses joues en rougissant. Lorsque Joris cria haut et fort son nom, on se tourna vers lui. Le beau brun ouvrait les bras comme si la terre entière pouvait s'y jeter, et rejoignit son ami sans se préoccuper des autres - qui le considéraient pourtant avec respect.

- Ca va, vieux ? Bordel, t'en as mis du temps !

Gatien leva les yeux au ciel.

- T'exagères.

Joris sourit bêtement.

- Je vois... T'es venu avec laquelle cette fois ?

Agacé d'en revenir à la famille Lans, Gatien fit tout de même un signe de tête en direction de Pia. Son ami siffla en découvrant la jolie fille, puis fit un clin d'œil au "chanceux".

- Alors c'est bon ? Tu vas enfin te la faire ?

Une moue discrète apparut sur le visage de Gatien. La simple idée de coucher avec Pia le révulsait. C'était comme si on lui proposait un plan incestueux, sans que Pia représente vraiment une sœur à ses yeux.

- Ca m'étonnerait, lança-t-il sobrement - puisque la jeune fille était le fantasme de la plupart des étudiants.

- Attends, t'es sérieux ? s'exclama Joris. Vous arrivez ensemble et tu veux me faire croire qu'il n'y a rien du tout ?

Gatien haussa les épaules.

- C'est elle qui a insisté pour que je l'emmène. Ses parents n'étaient pas là, et finalement, j'ai pas vraiment eu le choix.

Joris secoua la tête sans comprendre. Décidément, son ami restait un véritable mystère.

Ils entrèrent dans la maison où d'autres lycéens s'entassaient. S'approchant du sofa, le jeune homme brun "libéra de l'espace" pour y prendre place.

- Bon, tant pis pour toi… Mais du coup, quelqu'un doit remplir ton devoir à ta place, relança-t-il avec arrogance.

Gatien remua, gêné par la tournure que prenaient les choses.

- Je crois pas que ce sera utile…

Le garçon ignorait la raison pour laquelle il s'inquiétait du sort de Pia, mais son instinct protecteur s'imposait.

- En plus, tu rentres pas dans ses cases.

- Et c'est quoi ses cases ?

- Un intello qui gère au pieux.

Joris s'esclaffa.

- C'est bon, je sais compter jusqu'à dix. Et puis, qui t'as dit que j'étais pas un dieu au lit ?

- Ta mère.

- Ta gueule.

Gatien sourit, et Joris pouffa devant son audace.

- Très bien, alors je me contenterai de toi ma Pauline, dit ce dernier en attrapant la jeune fille qui passait près d'eux.

La jolie brune gloussa sous les caresses du lycéen, et finit par s'asseoir sur l'un de ses genoux. Gatien, ennuyé de les voir s'embrasser, se leva et chercha la cuisine pour se servir à boire. A la vue d'un paquet de bières, il attrapa une bouteille et s'apprêta à l'ouvrir lorsqu'une voix l'arrêta.

- Tu m'en donnes une ?

L'adolescent leva la tête et découvrit Sophie Calice, appuyée contre la table de bar. Les palpitations de son cœur s'accélérant, il la considéra avec mépris. Prêt à partir sans un mot, il fut cependant stoppé par la jeune fille, de sorte que leur visage ne se trouvèrent plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre.

- Pourquoi tu fais ça, Gatien ? murmura-t-elle avant de refermer la porte.

Le garçon recula, hostile. Mais Sophie ne comptait pas en rester là. Plongeant son regard perçant dans ses prunelles gris-vertes, elle esquissa un sourire charmeur.

- Faire quoi ? grogna le jeune homme, aussi horripilé qu'impressionné.

Sophie s'approcha.

- Prendre soin de l'Affreuse.

Gatien tressaillit.

- Tu sais, je peux te donner tout ce qu'elle ne sera jamais en mesure de t'offrir... Tu peux me toucher, susurra-t-elle en attrapant une main de l'adolescent et en la posant sur sa hanche... me caresser, ajouta-t-elle en conduisant ses doigts vers sa poitrine... et m'embrasser.

La jeune fille approcha ses lèvres de celles de Gatien - qui ne bougeait plus. Le garçon savait qu'il aurait dû la repousser, mais s'en sentait incapable maintenant que ses baisers se joignaient à l'image de Fanny.

Il la toucha, en effet, mais accomplit chacun de ses gestes en pensant à une autre. Il poussa Sophie contre le mur et l'embrassa avec passion. Déroutée, la lycéenne se laissa soulever le bas de sa robe avec extase. Elle enlaça le cou de l'adolescent pendant qu'il défaisait sa ceinture. Et bientôt, Gatien se retrouva les mains contre la cloison, à fermer les yeux pour tout oublier… ou presque.

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