les dards

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« Zlough »

Bing. Bing. Bing !

« Satané pouvoir de merde. », m’énervai-je en me cognant la tête contre les barreaux du lit.

J’étais dans la maison de Dimitri. Enfermé précipitamment dans la salle de bains, il essayait de se calmer en reprenant son souffle.

« Zlouuugh »

Putain, c’est quoi ce truc. C’est comme si une tornade s’abattait sur ma tête maintenant…

Je jetai des coups d’œil de gauche à droite mais tout semblait en ordre… Puis je revis les images du passé proche de Dimitri, comme si on avait rembobiné le film…

Ils me filent un nouveau pouvoir. Je ne pense pas que ce soit bon signe. Rien n’est gratuit avec eux.

Je revivais l’entrée de Dimitri chez lui avec ses gestes et ses réflexions… Bon, à force, j'avais l'habitude !

Au début, tout lui avait semblé normal. Il était rentré chez lui et sa mère lui avait demandé si tout s’était bien passé.

« Impec maman, comme toujours. On a joué avec le petit nouveau et il se défend plutôt bien.

– C’est bien de voir de nouvelles têtes, approuva sa mère.

– Je confirme. Vivien ne s’attendait pas à trouver un adversaire à sa taille, rit Dimitri mais quelque chose le démangeait dans la paume de ses mains.

« Aie ! Je ressens ses douleurs maintenant !!! Tu parles d’un pouvoir à la con. »

*

Idem. Mes mains me démangent atrocement. Je ne peux m’empêcher de les frotter contre le rebord du lit métallique. Je jette un œil : elles sont rougies. J’ai la désagréable impression que ce n’est pas uniquement lié aux frictions, une cause inconnue provoque cette douleur…

Je regarde mes tortionnaires, ces derniers sourient. Avec la colère, j’arrive à serrer mes poings, ce qui n’a pour d’autres conséquences que de me brûler les poignets !

« Inspire. Expire. Pense à un endroit de rêve, loin d’ici et de ces gens. »

Ces paroles du docteur Amigo me reviennent subitement en mémoire ; je les avais bloquées inconsciemment dans mon esprit jusqu'à aujourd'hui.

Sa voix m'a toujours apaisé, malgré ce qu'ils m'ont fait subir et bien que je sache qu'il fait partie intégrante de leur projet, je ne parviens pas à le considérer comme un ennemi. Symdrôme de Stockholm penseront certains et ils n'ont peut-être pas tort.

Cependant en attendant, il reste ma seule bouée de sauvetage, lui et ses conseils prodigués, ses exercises sur la respiration, sur la plénitude de la conscience, sur le dépassement de soi et de la douleur, sur l'espoir qu'un jour je sortirais d'ici libre. Je n'y crois guère sur ce dernier point, toutefois admettre que je resterais au mieux leur prisonnier, ne sera d'aucune aide pour tenir. Un espoir ténu vaut mieux que rien, donc je m'accroche à tout ce qui peut m'aider, même si parfois, cela me semble dérisoire. En ce moment, j'ai besoin de cette petite lueur, je dois m'y raccrocher pour ne pas sombrer.

À force, la méthode d’auto-persuasion atteint son objectif : bien que latente, la douleur diminue.

Sans m’en rendre compte, je replonge.

*

– Tout va bien chéri ? Tu es un peu pâle ?

– Tout va bien maman. Un peu trop forcé sur le foot. Je vais dans la salle de bains.

« Tu veux rire, c’est super désagréable comme sensation. Je ne sais pas ce que tu as fait avec tes mains, mais je ne veux pas le savoir. », m’écriai-je.

– OK, va te débarbouiller. », conclut la maman de Dimitri.

La gêne se transforma en douleur, comme si des aiguilles s’enfonçaient dans les paumes de Dimitri !

« C’est quoi ce bordel. Hé, tu peux pas faire quelque chose ; ça fait un mal de chien ton truc. », me plaignis-je.

Dimitri tenta de rester calme pour gagner la pièce d’eau, afin d’éviter la panique de sa mère.

De toute façon, tu peux pas lui dire que ta main a avalé des aiguilles ! Elle va te prendre pour un fou. D’ailleurs, elle n’aurait pas tort. Bon, fais quelque chose : je souffre, moi !

Mon excitation amplifiant la douleur, je devais trouver un moyen de me calmer.

D’autant que lui ne pouvait savoir que je ressentais sa souffrance.

Dimitri se lava énergiquement les mains avec de l'eau froide. Ces dernières devenaient de plus en plus rouges et quelque chose semblait vouloir s'en dégager. Dimitri appuya sur ses paumes et... des dards en sortirent !

« Putain, c’est quoi ça, hurlai-je affolé.

– Chéri tout va bien ? cria maman anxieuse.

– Oui maman, j’ai vu une grosse araignée, répondis-je.

– Tu es sûr que ça va ? Je peux monter si tu veux.

– Non, c’est bon. Elle est partie, ajouté-je.

– D’accord. », conclut ma mère.

*

Pourquoi hurle-t-il ? Il a senti tout comme moi que son pote avait des sortes d'aiguilles dans ses paumes. C’est même lui qui m’a donné la réponse à mes démangeaisons.

Il est donc logique que son ami les fasse sortir d’une manière ou d’une autre !

Il m’agace parfois ce gamin...

Mes mains se crispent sur les barreaux, à un tel point que j'en saigne.

Des soubresauts agitent mon corps qui convulse tandis qu'une rage me dévore de l'intérieur. J'ai envie d'hurler pour qu'elle s'expulse loin de moi.

D'ailleurs, je ne comprends pas pourquoi cette vague m'a atteint : après tout ce qu'il vient d'encaisser, c'est normal que les événements les plus simples n'apparaissent pas si évidents.

J'ai besoin de prendre du recul et parler à la troisième personne, cela minimise parfois l'impact de ces épreuves.

Cependant, la plupart du temps, je me les prends de plein fouet.

Je sais que je ne suis pas censé commenter, mais c’est plus fort que moi. Bon avant qu’ils ne s’aperçoivent de quoi que ce soit, je vais replonger. Je pense qu’ils en ont conscience mais qu’ils me laissent un peu de répit, cependant je ne dois pas trop tirer sur la corde. Je repars là-bas.

*

En sursautant, je m’étais cogné à nouveau la tête.

« Vraiment génial le jump-look… Il est bien gentil Dimitri, mais moi ça m’inquiéterait que des dards sortent de ma main… Ils sont venus comment ces trucs ? Y avait ni guêpes, ni abeilles dans le champ !!! »

Dimitri ferma les yeux et pensa bizarrement aux couilles de Brice.

« Quel rapport entre ces dernières et les dards ? Vraiment n’importe quoi, lui. Il faut qu’il se repose. Il est en train de nous péter un câble. », pensai-je.

Quand Dimitri rouvrit ses yeux, ses mains ne le démangeaient plus.

« Super, plus de démangeaisons. Par contre pour l’explication on repassera plus tard. », maugréai-je.

Pour l’instant, Dimitri n’avait pas envie de se creuser les méninges, juste de manger et de se reposer.

« T’as raison. Tu as eu des dards d’abeilles qui sont apparus avant de disparaître comme par magie de ta main, mais ce n’est pas grave. Surtout ne cherche pas à savoir… », m’énervai-je.

*

Abeilles ou guêpes. Il est un peu confus le gamin. Promis j’arrête. De toute façon comme il ne sait pas comment les dards se sont retrouvés enfermés dans le corps de son pote, c’est normal qu’il n’ait pas les idées claires.

Et voilà que je recommence à le critiquer. Il va falloir que j'arrête de perdre mon temps et me concentrer sur ce qui pourrait m'aider, au lieu de m'en prendre à lui pour des futilités.

Moi non plus d’ailleurs, je n’ai pas d’explications. J’ai beau tourner le problème dans tous les sens, je ne vois pas de solution.

*

Je retrouvai mon calme après quelques instants.

« Tu as raison. Comme dit Hélène sans arrêt : certaines choses ne s’expliquent pas !»

*

C’est l’excuse à la mode là-bas. Certaines choses ne s’expliquent pas donc on efface tout et on recommence. Certes je n’ai pas non plus les réponses, mais j’aimerais qu’il creuse un peu plus. Il n’est pas saucissonné lui, ni gardé par des chiourmes. Restons calmes ou cela va mal finir pour moi.

*

« Zlouuugh »

Pour Dimitri et moi, le reste de la journée se passa sans aucun autre incident.


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