23 - L'épée contre la griffe

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34ième jour de la saison de la lune 2448 - PDV Azéna

Le soir, avant de s'endormir, Azéna s'installa confortablement dans son lit et se roula de sorte à ce qu'elle fasse face à Fayne qui se préparait aussi à une bonne nuit de sommeil bien méritée.

- Tu sais, commença-t-elle.

- Oh, l'interrompit Fayne, ce n'est pas la peine de t'excuser à propos de tout à l'heure dans la bibliothèque. J'ai cherchée pendant de longues heures et je n'ai rien trouver d'intéressant. J'étais irritable et fatiguée... De toute façon, je propose qu'on se trouve un moyen d'infiltrer dans la bibliothèque personnel des maîtres.

Azéna cligna quelques fois, choquée.

- C'est vraiment étrange entendre ça de ta bouche, mais j'aime ton plan. La bibliothèque des maîtres se trouve dans la Tour Mère et aucun apprenti n'y a accès sans la surveillance d'un membre du personnel. Ça va être difficile de s'y rendre.

- Soit logique un peu et cherche des liens entre la solution et le problème. C'est simple comme bonjour.

- Dis le donc si tu as trouvé une solution alors. Allez, arrête de me faire languir.

Fayne soupira, clairement peu impressionnée.

- Quelqu'un qui a accès à ces livres, c'est un membre du personnel tandis que quelqu'un qui a des permissions spéciales en raison de ses relations avec ces gens...

Elle s'interrompit pour voir la réaction de son amie. Azéna ne dit rien et la fixa bêtement. Découragée, Fayne compléta l'énigme par elle-même.

- Arièlla, espèce de dinde. Réfléchit un peu. Où est ton sens de logique ?

- Oh, s'exclama Azéna qui avait enfin compris le sens du lien. Bien sûr. Je pourrais lui demander des faveurs spéciales.

- Bon, va te coucher avant que ton cerveau ne fonde pour sur-usage.

- Très drôle, marmonna Azéna.

Fayne tomba aisément endormie, contrairement à Azéna qui s'assied en croisant les pieds et qui fixa longuement la fenêtre. À la lumière apaisante de la lune bleue, les dragons blancs brillaient tandis que les dragons noirs semblaient encore plus mystérieux qu'à leur habitude. L'un des plus petits dragons se percha sur un toit à proximité de la fenêtre de la chambre d'Azéna et de Fayne. À peine plus grand que Tyrath, il possédait une apparence jeune mais endommagée. Ses écailles noires étaient usées et certaines étaient cassées. Il fixa ses frères et sœurs avec amertume. Azéna reconnaissait cette expression familière; il avait honte et inspirait d'être normal comme les autres. Il était l'avorton de la portée, soit naturellement ou par malchance.

Azéna ressentit une vague de tristesse l'envahir en observant ce drake. Ils étaient peut-être puissants et supérieurs aux autres races, mais leurs sentiments les accablaient comme le commun du mortel ce qui prouvait que personne n'était parfait. Puis, comme par instinct, elle se concentra sur le capteur de rêves que Teriondil lui avait offert et trouva le sommeil enroulé dans ses couvertures douillettes.

***

Le lendemain, elle profita du temps libre qu'elle avait durant le déjeuner pour faire part du plan de Fayne à Arièlla. La dragonnière rouge s'avérait hésitante face à la faveur que lui demandais son amie.

- Tu m'en demande beaucoup, dragonnière grise, dit-elle sévèrement entre deux bouchées de son omelette.

Azéna ne déclara pas défaite si facilement. Réalisant qu'elle avait besoin d'être plus subtile, elle s'assied à la droite de la blonde et approcha son visage de son oreille.

- Tu n'as qu'à ne pas en parler à ta mère, conseilla Azéna. Allez, un peu d'aventure ne te fera pas de mal. De plus, c'est pour une bonne cause.

- On dirait les idioties que Maître Eldarytzan lance, rétorqua Arièlla. Mais, pousse-toi un peu. On dirait que tu me dragues et ça me rend inconfortable.

- Quoi ? questionna Azéna, laissée pantoise par les accusations d'Arièlla.

- Rah, tu es dans ma bulle, énervante.

La demie-elfe poussa son amie avec force puis, elle analysa les risques et les bénéfices de cette manœuvre pendant un moment avant de répondre.

- C'est entendu. Par contre, je ne te promets rien et je refuse d'aller en retenue alors que c'est ton idée et ta faute. Peux-tu me garantir cela ?

- Je me résoudrai à te défendre et à prendre ta place dans le donjon, soupira Azéna en se levant du sol où elle avait atterri après avoir perdu son équilibre. Et puis, c'était quoi ça ? Me pousser comme ça sans raison ?

- Merde, arrête de hurler comme un babouin enragé. Sérieux, c'est marché conclu. Maintenant, laisse-moi tranquil. J'ai une partie importante de skotar ce soir et ça me préoccupe beaucoup.

Azéna sentit un petit noeud à la gorge, restes de jalousie qu'elle surmonta aisément. Elle avait réalisé que la saison de skotar débutait officiellement. La première partie des quart de finales opposait Fergriffe de l'Académie d'Isriss contre Sombrelame.

- Bonne chance pour ce soir, dit Azéna avec sincérité.

- Je n'aurai nul besoin de chance mais de performance, répondit Arièlla avec un sourire narquois aux lèvres. D'ailleurs, comment as-tu su que j'ai été transférée d'équipe ?

- J'ai mes sources.

- Garde donc tes secrets. Ta présence serait appréciée et aiderait surement à me motiver.

- J'y serai, petite vantarde.

Elle alla s'installer en face de Fayne et de Teriondil. Fayne passa tout son temps libre à fouiller dans ses livres pour un indice quelconque qui mènerait à l'identification des quatre objets volés. Azéna tenta de l'aider, mais s'avéra si nulle en recherche que Fayne lui conseilla de travailler sur ses devoirs à la place. Teriondil, de son côté, ne comprenait pas trop les humeurs changeantes de la dragonnière bleue et se concentra sur sa recherche qui s'avéra aussi ineffective en raison de son manque de concentration.

- Ce livre est horriblement conçu, s'exclama Fayne soudainement alors qu'elle survolait le même manuel rapidement pour la troisième fois.

- Qu'est-ce qu'il y a encore ? questionna Teriondil avec une patience qui éberlua Azéna.

- Il n'y a pas d'index, pas de glossaire, pas de référence, rien du tout! Comment veulent-ils que l'on retrouve quoi que ce soit ?

- Glossaire ? Index ? demanda Azéna avec incompréhension. C'est quoi ces trucs ?

Fayne soupira et posa sa paume sur son front.

- J'oublie à chaque fois que tu es ignorante en ce qui concerne les livres. Comment t'es parents ont pu omettre une telle facette de ton éducation alors que tu viens d'une famille noble ?

- Ils n'ont pas omis, ils ont abandonné. Nuance.

- Ce que tu es désespérante. Tu m'étonnes à chaque fois.

- Au moins, je sais lire et écrire.

- Heureusement, sinon je douterai sérieusement de ton rang social, dit Teriondil sans gêne.

- C'est normal car tous les elfes savent le faire, répliqua Azéna avec légère irritation.

- Oui mais je connais un peu la culture et les manières des humains. Vous omettez souvent d'apprendre cet aspect essentiel de la vie. Il n'y a que les figures importantes, les scribes et quelques autres métiers qui en tiennent compte. Vraiment, je ne comprend pas...

Teriondil fit une pause. Le visage de Fayne s'était un peu rosit sous la flatterie indirecte. C'était effectivement très rare que les roturiers savaient lire et écrire.

- D'ailleurs, Fayne, comment as-tu appris ? demanda l'elfe sylvain.

- Au travers d'Azéna ainsi que de mon ancien mentor en herboriste, répliqua-t-elle.

- Ah bon, je vois.

- J'emprunte des livres de la bibliothèque de ma famille et je lui emmène, expliqua Azéna. Ça l'amuse alors, pourquoi pas ?

- Oui, dit Fayne, mais à quel prix ? À chaque fois, ton père voulait t'étrangler. C'est interdit de sortir ces livres du château et encore moins de laisser une personne de classe pauvre ou moyenne les lire.

- Donc, dit Teriondil, techniquement, elle les vole.

- Roh, vous exagérez, dit Azéna. Ce n'est pas si dramatique que ça.

- Si, ça l'est, ricana Fayne. Les gardes mettaient Nothar à l'envers pour te retrouver lorsque tu faisais ça. Ce n'était pas amusant, ça faisait peur aux habitants.

- Tants d'efforts pour des livres. Je ne comprendrais jamais et je ne comprends toujours pas.

Fayne pouffa de rire et ébouriffa les cheveux d'Azéna. Cette dernière lui lança un regard agacé et les aplatit. Quelques minutes passèrent et la conversation mourut. Le trio avait retourné à leur tâche respective.

***

Le soir venu, Azéna sentit l'impatience qui grandissait en elle et qui lui rongeait l'âme. La partie de skotar allait débuter dans une demie-heure et Arièlla allait lui annoncer les détails de son plan bientôt. En fin de compte, elle s'était fait une alliée dans les circonstances les plus improbables. À contre-coeur, elle devait avouer que Reaginn avait eut raison. En ce moment, elle était en route vers le terrain de skotar du territoire neutre d'Atgoren. C'était là où les partis du tournois se déroulaient afin d'éviter des conflits entre les équipes et les académies. Malgré cela, il y avait souvent de la frictions et parfois, des combats en naissaient, obligeant les maîtres et les gardes d'interférer. Du moins, c'est ce qu'Azéna avait entendus des apprentis plus âgés.

« Patience, patience, songea-t-elle en essayant de se convaincre que la partie allait débuter sous peu. »

Ses deux meilleurs amis, leurs dragons ainsi que Tyrath la suivaient de près. Le dragon gris était aussi emballé qu'elle et ne cessait de tourner en rond, de monter, de descendre en piqué et de zigzagué, le tout en plein vol. Incapable de se contenir plus longtemps, Azéna décida de prendre de l'avance sur les autres puisqu'ils attendaient Fayne qui refusaient encore de voler avec Buhrik.

- Je vous rejoins au terrain, dit-elle. Vous êtes lents!

Elle fit signe de la main à Tyrath de la rejoindre, ce qu'il fit avec enthousiasme. Elle l'enfourcha et il prit son essor, laissant un nuage de poussière dans son sillage.

- Tu n'as même pas ta selle, hurla Fayne entre deux toussotements. Arrête! Tu vas te blesser.

La brunette continua de crier après son amie, mais Azéna était déjà trop loin pour l'entendre. Cette dernière était consciente de sa situation, mais elle ne s'en préoccupait pas. Tyrath rugit alors qu'il aperçut le terrain de skotar qui grossissait à l'horizon. Il prit un détour afin de scruter les environs du terrain. Deux points noirs se trouvaient derrière les gradins. Curieuse, Azéna fit signe à Tyrath de s'approcher.
« Qui se cache et pourquoi ? se demanda-t-elle avec malice. »

Lorsqu'ils furent assez près des deux individus sans avoir l'air suspicieux, Tyrah s'arrêta et maintint tout simplement son altitude. Azéna les fixa avec intérêt; c'était un homme et une femme. L'homme était grand, svelte et possédait une chevelure d'argent tandis que la femme était plus courte et costaude que lui. Son visage était encadré de cheveux blond foncé.

- Eldarytzan et Nymia, dit Azéna.

- Ils se retrouvent toujours là en cachette ceux-là, dit Tyrath en battant des ailes lentement, mais avec puissance.

Azéna ne pouvait entendre les paroles des deux dragonniers. Les gestes des mains de Nymia étaient légèrement exagérés et d'après son expression faciale, elle semblait furieuse.

- Approche-toi, ordonna Azéna à Tyrath.

- On va se faire repérer, avertit le drake.

- Ils sont trop préoccupés. Allez, tu vas voir. Fais-moi confiance.

Tyrath ronchonna et avança de quelques mètres. Là, Azéna pouvait entendre des murmures. Elle se concentra sur ce que les deux maîtres se disaient et enfin, elle comprit leur discussion.

- ... as-tu osé faire ça ? rugit Nymia sur un ton accusateur.

- Je voulais tout simplement lui faire plaisir, répliqua l'elfe lunaire avec un brin de culpabilité qui teintait sa voix normalement mélodieuse. Je ne savais pas qu'elle allait voler.

- Lui en as-tu parlé au moins ?

- Bien sûr, mais...

- Dit-moi que tu l'as punis au moins, coupa Nymia avec froideur et autorité.

- Elle m'a promis qu'elle allait me le rendre dès qu'elle aura terminé avec.

Le visage de Nymia se tordit de colère et ses poings étaient si fermes que lorsqu'ils se relaxèrent, on pouvait apercevoir les marques rouges qu'ils avaient laissés sur sa peau.

- Elle était curieuse; elle le voulait seulement à titre de lecture personnel, mais elle n'avait pas osé me demander pour l'avoir car elle croyait que j'allais l'engueuler, expliqua Eldarytzan alors que son anxiété trahissait son début de panique.

- C'est quand-même une apprentie et elle n'a pas accès à ces documents, hurla Nymia. Quand vas-tu prendre ta profession au sérieux ?

Aucun des deux ne prononça un mot de plus. Ils ne firent que se fixer en restant immobiles. Après un bref instant, Eldarytzan baissa le visage.

Azéna, de son côté, encaissa la nouvelle avec joie. Arièlla avait accomplit sa mission et son père ne l'avait même pas puni.

- Ça ne pouvait pas mieux se passer, n'est-ce pas ? dit Tyrath qui semblait aussi ravie que sa dragonnière.

- Pour nous, répliqua Azéna dans un demi-sourire. Je suis heureuse pour nous, mais le pauvre Eldarytzan ne mérite pas ce châtiment. Nymia est brutale. Les couples c'est le bordel parfois.

- Et vous appelez ça un couple ? Je ne comprendrai jamais les humanoïdes.

Azéna ouvrit la bouche pour entamer sa réplique mais une série de sons graves qui rappelaient à des battements d'ailes l'interrompit. Lorsqu'elle détourna la tête, elle aperçut un immense dragon aux écailles écarlate qui scintillaient sous les rayons des soleils. Ce dernier devait faire au moins le double de taille de Tyrath, sans toutefois surpasser la splendeur qu'était Rendar. Ses mouvements parfaitement coordonnées était la preuve d'un entraînement intensif. Il vint se posa avec lourdeur près de Nymia, signe que la partie de skotar allait bientôt débuter. La blonde dit au revoir d'un hochement de tête à son amoureux et grimpa avec aise sur la selle de son dragon accroupi. Celui-ci se releva et prit son essor sans accorder d'attention à Eldarytzan. Lui et Nymia se dirigèrent vers le terrain de skotar où la foule les attendait.

- Allez, on y va aussi, dit Azéna en empoignant fermement deux piquants.

Tyrath s'élança vers le terrain. Pour ne pas tomber en raison de cette vitesse soudaine, Azéna serra ses cuisses sur les flancs de Tyrath. Elle pouvait sentir la friction de son corps contre les écailles rugueuses du drake qui menacaient d'endommager son linge.

- Où peuvent-ils êtres ? se questionna Azéna en cherchant ses amis du regard.

Après avoir fait le tour du terrain, ils les repérèrent enfin et s'installèrent à leur côté. Azéna s'empressa de leur raconter ce qu'elle et Tyrath venaient d'entendre.

- Pauvre Maître Eldarytzan, dit Fayne. C'est en cause de mon idée s'il est dans cette situation fâcheuse.

- C'est dommage qu'Arièlla n'a pas pris ses précautions, affirma Teriondil qui était accoté sur la gigantesque patte avant d'Ella. Je paris qu'elle aurait été capable de ne pas se faire remarquer.

- Je ne sais pas trop quoi penser de cela.

- Ne t'en fait pas, conseilla Azéna en grattant le museau de Tyrath qui ronronnait. Au moins, nous aurons une bonne piste en lisant ce livre. Pour le moment, n'y songe pas et régale-toi de cette partie de skotar. Fergriffe contre Sombrelame, ça va être tout un spectacle d'après ce que j'ai entendu. Ils sont des rivaux de longues dates.

- Je suppose...

Une bourrasque ébouriffa la chevelure du trio ainsi que tous ceux qui se trouvaient autour d'eux. Les dragons qui passaient à proximité causaient toujours ce genre de réaction en raison de leurs battements d'ailes puissants. Par contre, celui-ci était différent, comme s'il était exagéré. Azéna se retourna et aperçut un immense dragon blanc derrière elle qui se maintenait en altitude.

- Acceptez mes sincères excuses pour cela, s'excusa Karia de sa voix douce et claire. C'est cet idiot qui voulait absolument que je cause cette provocation désagréable afin d'attirer votre attention.

- Karia, s'exclamèrent Fayne et Azéna avec autant de joie que de surprise.

Elles montèrent la tête et aperçurent le cavalier de la dragonne qui souriait largement.

- Grand Maître Vigoth!

- Alors, quelle équipe soutenez-vous ? questionna Vigoth avec malice et amusement.

- Heu... balbutie Fayne qui paraissait tordue entre deux choix impossibles.

En fin de compte, elle ne répondit pas. Teriondil haussa les épaules comme si le dénouement de cette partie ne lui importait nullement. Azéna, elle était bien trop loyale envers sa nouvelle amie pour dénié son allégeance.

- Pour Sombrelame bien sûr, répliqua-t-elle avec assurance. Mon amie est dans cette équipe. C'est l'une des rares apprentis de premières années à jouer au skotar.

- Oh, la jeune Valkirel, dit Vigoth. J'en ai entendu parler. C'est rare que mon frère brise les règlements. J'ai bien hâte de voir si son héritage va faire la différence. Mon frère lui accorde une chance bien spéciale de se prouver.

- Et toi, tu es de quel côté ? questionna Fayne.

- Éh bien, je n'ai pas vraiment le choix d'être du côté de Fergriffe, n'est-ce pas ? répliqua Vigoth avec autant de confiance qu'Azéna. Quelle sorte de grand maître ferais-je si je ne supporterai pas ma propre académie ? Malgré tout, on ne peut pas toujours se fier aux apparences.

L'elfe lunaire à la parure noble fit un clin d'œil aux adolescents. Karia émit un grognement exaspéré, se dirigea vers les membres du personnel et se posa à côté de Rendar, le plus immense dragon des deux académies réunies. Sur le dos de ce dernier se trouvait le frère aîné de Vigoth, Terenas.

Curieuse, Azéna tendit l'oreille. Heureusement, ils étaient assez à proximité pour qu'elle puisse les entendre discuter.

- On se fait un pari sur qui gagnera cette fois ? demanda Vigoth à son frère.

- Tu es ridicule avec ces jeux stupides, lui répondit Terenas avec sévérité.

Il tenta d'ignorer son frère et posa son regard sur les deux entraîneurs de skotar qui se serraient la main au centre du terrain. Vigoth insista en le fixant avec une subtilité de pitié cachée derrière un masque d'enjouement.

- Bah, d'accord. Mais, tu te trouves un autre partenaire de pari si je gagne, déclara Terenas.

- Et si tu perds, tu me garantis que tu parieras avec moi à la prochaine partie, répliqua Vigoth.

- Ais-je vraiment le choix ?

- Non.

- Marché conclu, alors. Tu es un véritable enfant parfois.

Vigoth posa ensuite son attention sur Karia et Rendar.

- À vous de jouer, puissances incarnées dans un corps physique.

Karia roula les yeux, clairement peu impressionné par la flatterie exagéré de son dragonnier tandis que Rendar resta impassible. Les deux dragons échangèrent un regard et poussèrent un rugissement assourdissant. Les spectateurs qui barvardaient bruyamment se turent immédiatement. De toute façon, le rugissement des deux dragons avaient complètement enterré leurs voix.

Comme si une rivalité temporaire s'était formé à ce moment, une fois que le silence fut, Rendar posa un œil furieux sur Karia qui l'observait avec autant de défiance. Elle bomba le torse et détourna le regard vers le terrain. Rendar poussa un grognement silencieux, découvrant ses crocs. Le raclement de la gorge de Terenas lui donna l'indice qu'il devait mieux se comporter. Rendar renifla agressivement et porta son attention sur le terrain où les regards étaient tous fixés. Là se trouvait deux dragonniers et leur dragon. Nymia et son dragon rouge faisaient face à un homme chauve aux épaules solides et au torse musclé ainsi qu'à son dragon, un mâle brun au regard dubitatif, de petite taille et aux allures d'âge avancé.

- Du côté de l'académie d'Archlan, voici l'équipe sournoise de Sombrelame, tonna Karia pour que tous les spectateurs puissent l'entendre clairement.

De derrière les gradins apparurent sept dragons montés de leur dragonnier qui s'élevèrent avec grâce vers le ciel. Après avoir pris assez d'altitude, ils passèrent par-dessus les spectateurs éberlués et ils piquèrent vers le centre du terrain. Serfantor, accompagné par Shalith, était suivit de ses deux attaquantes : Arièlla Valkirel, accompagnée par Harath et de Lythrana Undrèm, accompagnée par Zurof. Les deux défendeurs, Beldroth Glyn, accompagné d'Ancus et Ragnor Cythra, accompagné d'un dragon blanc, les talonnaient et finalement, la gardienne, Restelle Virna, accompagné d'un dragon gris dénommé Kold apparut dans un spectacle solitaire. Ils se positionnaient du côté gauche du terrain.

- Du côté de l'Académie d'Isriss, voici l'équipe intimidante de Fergriffe, annonça Rendar de sa voix caverneuse.

Dans le même style, l'équipe de Fergriffe fit son entrée, mais du côté inverse du terrain. Tous leurs dragons étaient comme leurs cavaliers, costauds, larges et musclés. Ils étaient plus lents que leurs rivaux, mais ils s'avéraient beaucoup plus puissants et dangereux. Leurs capitaine d'équipe, un défendeur, s'avança vers le milieu du terrain et serra la main de Serfantor. Son uniforme, tout comme ceux de son équipe entière, était semblable à celui de leur adversaire. Par contre, le noir était la couleur dominante de l'arrière-plan et leur symbole était une griffe acérée de couleur gris fer. C'était la griffe contre l'épée.

- Tu vas crever, minable, dit le capitaine de Fergriffe avec cruauté.

L'elfe sylvain dépassait Serfantor d'une tête et arborait plusieurs tatouages tribaux et perçages comme la plupart de ses congénères. Ses cheveux vert-gris étaient hérissés, sa dragonne appartenait au vol brun et avait un corps trapu. Elle était beaucoup plus petite que le dragon de Serfantor, mais son regard indomptable fixait les yeux du dragon noir avec une résolution solide.

- Un maigrichon comme toi ne va résister longtemps contre moi, ricana l'elfe des bois.

Serfantor ne dit rien. Son dragon, par contre, semblait contrarié. Ses naseaux reniflaient avec férocité.

- Sage décision de garder le silence, continua le capitaine de Fergriffe.

L'entraîneur de l'équipe de Fergriffe s'approcha du capitaine, posa une main sur son épaule et serra fermement.

- Ça suffit, Agalim, ordonna-t-il d'une voix fauve. Soit poli, hé ?

Il lâcha prise et s'éloigna à grandes enjambées. Agalim avait une veine palpitait sur la tempe de son visage légèrement empourpré par la colère.

Les deux capitaines baissèrent la tête en signe de respect puis, ils enfourchèrent leur dragon. Le dragon brun d'Agalim se positionna en tant que défendeur derrière les trois attaquants de son équipe tandis que Shalith se plaça en tant qu'attaquant entre Harath et Zurof.

Nymia et l'entraîneur de l'Académie d'Isriss, tous deux à pieds, s'avancèrent sous les six attaquants. Leurs mains touchaient chacun de leur côté à la balle élémentaire afin de la supporter sous tous ses angles.

- Commencez! annonça Rendar et Karia en parfaite synchronisation.

Les deux entraîneurs de skotar lancèrent ensemble la balle vers le ciel. Lorsque cette dernière tomba, les six attaquants se précipitèrent vers elle et se l'arrachaient des mains. En fin de compte, Arièlla réussit à s'enfuir avec la balle devenue une sphère enflammée. L'hexagone de l'équipe adverse était engouffré d'ombre ce qui signifiait que Serfantor devait marquer le but. Pénétrant dans le territoire de Fergriffe, la demie-elfe chercha son capitaine du regard tandis que son dragon évitait les attaquants ennemis.

- Arièlla, s'écria Lythrana avec affolement, le gros lourdaud est sous toi.

Arièlla et Harath détournèrent leur regard vers le sol et aperçurent Agalim ainsi que sa dragonne brune qui fonçait sur eux. Harath battit furieusement des ailes pour se dégager du chemin. Tête penchée vers l'avant, la dragonne brune frappa violemment le ventre de sa victime. Harath hurla sa douleur et Arièlla faillit laisser tomber la balle sous le choc. Furieux, la dragonne rouge se tordit de façon à ce que son agresseuse se trouve face à elle. Elle ouvrit la gueule et un jet de flammes de plusieurs mètres s'en échappa. La dragonne brune l'évita de justesse et fila.

- Arièlla, appela Lythrana qui se trouvait sous sa partenaire. Ici.

Arièlla lança la balle élémentaire dans les mains de Lythrana qui l'empoigna fermement. Son dragon s'élança en direction de l'hexagone le plus haut de Fergriffe qui était protégé par son gardien, un dragonnier gris. Le dragon gris exhala des bourrasques violentes dans l'espoir de les faire dévier. Son cavalier n'avait pas remarqué le dragon noir de Serfantor à sa gauche. L'hexagone était toujours enveloppé d'ombre; c'était le moment ou jamais. Alors que Lythrana lança la balle à son capitaine, quelque chose heurta son dragon avec force. L'impact le blessa à l'aile droite. Lythrana fut si secoué que son esprit se brouilla. Toute sa concentration fut requise pour qu'elle reste cramponnée à Zurof qui tournait en rond à perpétuité. Finalement, un autre tremblement lui fit lâcher prise et elle s'écrasa au sol.

- Lythrana! s'écria une voix féminine. Lythrana!

Lythrana ouvrit les yeux alors qu'on la tenait assise et aperçu Arièlla qui la soutenait.

- Arièlla ? balbutie-t-elle.

- Allez, on se lève. La partie n'est pas terminée.

- Qu'est-ce qui s'est passé ?

Arièlla l'aide à se relever en lui tirant le bras.

- Le dragon de cet espèce de brute a chargé dans Zurof qui par la suite avait trop de douleur pour s'enfuir alors, le gardien a profité de sa faiblesse et l'a emprisonné dans un mini tourbillon de vent. Par la suite... Ton dragon a foncé dans l'hexagone et vous êtes tombés.

La panique prit contrôle du corps de Lythrana qui se mit à respirer rapidement, les yeux larmoyants.

- Est-ce qu'il va bien ? Zurof!

- En pleine forme, dit Zurof qui câlina la joue de Lythrana de son museau et qui ronronna brièvement.

Lythrana se calme instantanément.

- Les dragons rouges sont endurants, de véritables durs.

- Serfantor a pu marquer un but grâce à toute cette distraction, informa Arièlla. Le capitaine de Fergriffe est en rogne. C'était hilarant de le voir perdre la tête. Il a pété les plombs contre son équipe. Leur entraîneur a été obligé de le calmer encore une fois.

- On va casser la griffe de fer en deux, dit Lythrana avec détermination en souriant.

Zurof et Harath poussèrent un rugissement, puis invitèrent leur dragonnière à grimper sur leur dos.

- Allons s'y, lança Lythrana. Whoo!

Pendant ce temps, depuis les gradins, Fayne grimaçait devant toute cette violence tandis qu'Azéna et Tyrath clamaient sans arrêt, encourageants chaque joueur de Sombrelame. Teriondil était calme, buvant son thé comme à son habitude avec la queue d'Ella qui serpentait protectivement autour de lui. On dirait qu'elle avait peur que les joueurs de Fergriffe allait s'en prendre à lui. Elle grognait fréquemment et ne lâchait pas la partie des yeux.

- On dirait une bande de barbares qui se harcèlent pour un morceau d'os, dit Fayne pour elle-même.

- Allons, allons, dit Buhrik. Je sais que ce n'est pas ton activité préférée, mais prétend que c'est une forme d'entraînement et que les accidents sont inévitables parfois.

- Là, tu me prend pour une dinde. Entraînement, mon postérieur. C'est juste une excuse pathétique pour divertir les gens et satisfaire leur soif de sang.

- Language, grogna Buhrik.

Le dragon bleu se mit à ricaner et fit un clin d'oeil à sa dragonnière pour détendre l'atmosphère.

- Non, mais la ferme, râla Azéna.

Buhrik parut autant offusqué que surpris. Celui-ci racla sa gorge et détourna son attention vers le terrain. Azéna savait bien qu'elle était très bruyante aussi, mais au moins, ça avait un lien avec la partie de skotar.

Le pointage demeura serré. Les deux équipes ne faisaient que se surpasser. Fergriffe démontrèrent leur force impressionnante tandis que Sombrelame prouvèrent qu'ils pouvaient les dupé aisément. Lythrana eut sa vengeance en volant la balle élémentaire d'Agalim. Elle l'entraîna par la suite vers la base des gradins où un mur protecteur se dressait afin d'assurer la sécurité des spectateurs de premier rang. Au dernier moment, son dragon changea de cape. La dragonne brune ne put s'arrêter à temps et s'écrasa contre le mur qui se fendit à quelques endroits. Heureusement, les têtes de dragons bruns sont les plus dures alors elle ne se blessa pas. Enragée, elle se chargea à toute allure vers Zurof qui l'évita de justesse. Sur le coup, une bataille fut déclenchée. La partie fut arrêtée momentanément. Tous les regards étaient fixés sur les quatre combattants et ce n'est que lorsque Lythrana reçut un coup de poing au visage que son frère jumeau, Nymfrein, ainsi que sa dragonne blanche se placèrent entre les deux pour les arrêter. Un cri de surprise fut émis par les spectateurs car Nymfrein n'était pas un joueur de skotar et n'avait pas le droit de se mêler à la partie. Les deux entraîneurs se précipitaient à eux pour vérifier qu'ils n'avaient pas besoin de soins. Aucun des quatre n'était gravement blessé, mais Lythrana était en piteux état à comparer à Agalim. Les deux joueurs furent envoyés à l'infirmerie et leur dragon à l'écurie de leur académie respective. Lythrana jeta un regard noir à son frère avant de partir.

- C'est bon, annonça Nymia. Continuer la partie. Chaque équipe a perdu un joueur donc, le compte est toujours égale.

Quelques minutes plus tard, alors que le temps restant à la partie se faisait court, Arièlla se faufila derrière l'un des défenseur de Fergriffe et signala à son dragon de charger. Le reptile ailé rouge obéit, poussa brutalement le plus petit dragon hors de son chemin et permit à sa cavalière de voler la balle élémentaire de son adversaire en passant.

Azéna, incapable de retenir son excitation plus longtemps, se leva et hurla:

- Casse lui la gueule Ari! Whooo!

La dragonnière rouge entendit l'acclamation de son nouvelle amie, se retourna pour voir de qui il s'agissait et sentit ses joues brûler de honte.

- Arrête! cria-t-elle à son tour. Tu me distrais!

Elle continua son chemin en passant devant la dragonnière grise et fila en direction de l'hexagone le plus haut de Fergriffe. Azéna continua ses encouragements exagérées. Éventuellement, Fayne dû la forcer à se rasseoir. Elle posa sa main sur l'épaule de la quasi-groupie et murmura à son oreille:

- Calme toi... S'il te plaît.. On nous regarder avec des gros yeux... Je n'aime pas ça.

Azéna parut offusquée. Elle se dégagea de l'herboriste et continua d'agir comme une démente en frappant les pieds sur les gradins.

- Tu ne me laisses pas le choix, décida Fayne.

Elle invoqua toutes les goûtes de sueur qui parsemaient la peau d'Azéna pour former une bonne somme d'eau, lui donna un pousse pour qu'elle s'assoit et gela ses mains au banc. Fière d'elle, Fayne bomba légèrement le torse et continua de regarder la partie de skotar qui touchait à sa fin. Arièlla avait marqué un but et Sombrelame allait être victorieux dans quelques secondes.

- VICTOIRE À SOMBRELEME! s'écria Azéna.

Sans même se préoccuper de sa situation, elle se releva et brisa la glace d'un coup sec. Fayne abandonna la bataille et soupira son martyr en tentant d'ignorer les apprentis irrités du comportement de sa compagne.

Teriondil de son côté fut si si secoué par le cri qu'il échappa son thé et oublia ce qu'il se passait, sa concentration entièrement dédié à l'horreur qui venait de se produire. Le liquide bouillant roula sur ses jambes et dérangea ses bijoux de famille, mais il ne s'en préoccupa pas; son thé avait été souillé par la mort!

***

En fin de compte, Sombrelame avait été accordé deux points et Fergriffe qu'un seul pour leur défaite. À la fin de la partie, le trio se rendit à l'infirmerie ensemble. Teriondil expliqua à Azéna et Fayne que Lythrana et Nymfrein étaient ses partenaires de classe de l'an dernier et qu'il les connaissait un peu.

- Enfin.. pas vraiment, mais assez pour rendre visite à Lythrana, se corrigea-t-il nonchalamment. Vous savez, on avait un projet en maîtrise élémentaire de base et nous formions une équipe. Sacrée Maîtresse Blakar... Il fallait s'organiser avec nos éléments à créer quelque chose d'artistique à l'improviste. Ma plante formait le corps d'une torche et Lythrana l'enflamma alors que Nymfrein éclairait la pièce en prétendant que notre torche fonctionnait. C'était bien marrant.

Arrivé à destination, Azéna et Fayne attendirent à l'entrée. Teriondil aperçu des lits, dont plusieurs étaient vides, ainsi qu'un visage qui ne lui était pas familier. Ce n'était plus la même guérisseuse que l'an dernier.

- Excusez-moi, où est Lythrana Undrèm ? questionna-t-il en approchant de la vieille femme.

- Là-bas, répliqua Leith en souriant malgré son air sévère qui trahissait sa joie. Ne restez pas trop longtemps. Apprentie Undrèm a besoin de repos.

- Va-t-elle...

- Oui. Elle va bien. Ne vous inquiétez pas.

- Merci.

Teriondil se rendit à l'endroit désigné par Leith. Il ne fut pas surpris de retrouver Nymfrein assied sur une chaise à côté du lit de Lythrana. La jeune dragonnière faisait la moue et semblait de mauvaise humeur. Azéna pouvait enfin les observer de plus près. Les jumeaux se ressemblaient énormément: peau grise pâle, longs cheveux neige, beau visage à la mâchoire carré, taille moyenne... les yeux de différentes couleurs. Azéna fronça les sourcils, un peu surprise de sa découverte. L'oeuil droit de Lythrana était bleu et celui de gauche était vert; ceux de Nymfrein avaient l'effet contraire de sa soeur.

- C'est normale ça ? chuchotta-t-elle à Fayne.

- Leurs yeux ? devina la brunette. C'est plus commun chez les hybrides. Ils paraissent comme des elfes gris, mais ils doivent avoir du sang d'une autre race.

Elle jeta un coup d'oeil en direction d'Azéna et se fâcha en remarquant où elle regardait.

- Mais arrête de la fixer. C'est impoli.

Azéna dirigea son attention vers le plafond, incapable de détacher ses pensées des jumeaux. Fayne soupira longuement.

- C'est le mieux que je puisse faire, rétorqua Azéna avec impatience.

Fayne se racla la gorge et se mit à discuter avec Leith tandis qu'Azéna tendait l'oreille en espérant entendre quelque chose d'intéressant du côté de Teriondil et des jumeaux.

Lythrana aperçut Teriondil la première.

- Bonsoir, Teriondil.

- Teriondil Murkwan, dit Nymfrein en souriant largement. Ça fait longtemps qu'on ne ta pas vu.

Les deux Undrèm regardèrent l'elfe des bois avec joie et surprise.

- Alors, s'impatienta Lyrthrana, qui a gagné ?

- Sombrelame a triomphé d'un point, expliqua Nymfrein. Donc, vous avez gagné deux points pour la partie gagné et Fergriffe, qu'un seul.

- Il va falloir se défoncer la prochaine fois, grogna-t-elle avec passion. Deux points n'est pas assez! Il en faut trois pour montrer à ces morveux insolents qui sont les maîtres!

- La prochaine fois, je serai là pour te surveiller, répondit Nymfrein avec sévérité.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Je reviens dans l'équipe pour toi. Je ne supporte pas de te regarder te faire massacrer sans pouvoir faire quelque chose. Je serai défendeur de Sombrelame.

- Va en parler avec Nymia et Serfantor, mais je ne crois pas que tu pourras. C'est trop tard dans la saison. De plus, je te préviens, je ne veux pas t'avoir dans mon chemin.

La tension montait et Teriondil avait l'impression qu'il devrait peut-être revenir plus tard et laisser les jumeaux discuter entre eux.

- C'est bien la première fois que je te vois aussi sévère, commenta Teriondil à Nymfrein.

- Je m'inquiète pour elle, c'est tout.

- C'est bien. Bon, je ne vous dérangerai pas plus longtemps. Je voulais tout simplement avoir des nouvelles de Lythrana. Bonsoir à vous deux.

Il tourna les talons et partit. Il se sépara de ses deux compagnonnes pour un moment et les rejoingnit dans la salle commune de la Tour de la Connaissance. Celles-ci l'attendaient installé à une table avec un gigantesque livre aux pages jaunis par l'âge et à la couverture en cuir bosselé. L'herboriste avait le nez plongé dans ce nouveau monde tandis qu'Azéna attendait pour une réaction avec une impatience évidente.

- Alors ? questionna-t-il alors qu'il s'asseyait en face d'elles.

- Étonnant! s'écria Fayne avec enthousiasme, ce qui fit sursauter ses deux amis.

- Quoi ? questionna Azéna alors qu'elle se remettait de son choc.

- Dans ce livre, on retrouve un peu d'information à propos du vol draconique violet.

- Mais, raconte! Qu'est-ce que tu attends ?

Fayne retourna en début de page et récita le texte:

- Dans l'ombre se cache les dragons aux écailles violettes et à l'esprit sensible. De tous les vols draconiques, c'est la leur qui est la plus méconnue et incomprise. On les caractérise de créature magique et surnaturelle car eux-mêmes ne comprennent pas toujours leurs pouvoirs. Contrôlant non un élément, mais un aspect vital de la vie, ils ne sont pas toujours en mesure de définir l'ampleur de leurs actions. Imprévisibles et dangereux, certain les craignent tandis que d'autres les admirent. Aujourd'hui, ils sont les plus nombreux des dragons et on les considère comme le vol draconique dominante. On les surnomme les dragons dieux, mais ils sont passifs, humbles et doux. Ainsi, ils rejettent ce titre.

- Irréel, répondit Azéna avec étonnement. Comment ont-ils pu devenir ce qu'ils sont aujourd'hui avec toute cette puissance et ce respect ?

- Je n'en n'ai aucune idée, continua Fayne avec un léger brin de tristesse. D'après moi, c'est possible qu'on n'ait renversé leur vol draconique pour une raison quelconque.

- Je ne vois vraiment pas pourquoi.

Arièlla entra dans la salle avec une mine sévère. Elle s'approcha du trio et soupira avant de leur tendre la main.

- Je dois reprendre l'encyclopédie. Je suis désolée. C'est le plus longtemps que j'ai pu négocier. Je dois le retourner à mon père à présent.

- Merci quand-même, dit Fayne.

- Merde, grogna Azéna. Nous n'avions pas terminé de le lire.

Arièlla sourit faiblement, lui donna une tape d'encouragement sur l'épaule et partit.

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