29 - Jen part 2

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Une fois à l'extérieur de cette emblématique salle de spectacle, nous décidons d'aller nous balader dans le parc en contrebas. Pour y avoir déjà été plus d'une fois lors de mes escapades parisiennes, je sais que c'est un endroit très agréable. Je vais pouvoir me détendre un peu. Et vu ce qu'il vient de se passer, j'en ai vraiment besoin. Mes nerfs sont encore bien à vifs.

Après avoir traversé la grande place, jouxtant l'AccorHotel Arena, nous descendons d'innombrables petites marches, qui nous conduit dans le parc de Bercy. Une fois en bas, nous empruntons un des chemins au travers des carrés de pelouse, en direction de l'un des deux portails, derrière lequel se cache l'un des lieux les plus attrayants de la capital. Le parfum des fleurs qui y sont plantées vient me chatouiller agréablement les narines. Je m'arrête un instant pour inspirer à pleins poumons, tout en contemplant les roses à peine écloses.

— Sympa comme endroit, déclare Haley.

— Oui, j'adore y venir quand je suis sur Paris.

— Je comprends pourquoi. On se croirait à la campagne en plein milieu de la ville.

— C'est tout à fait ça.

Ma tension s'apaise peu à peu alors que nous déambulons dans ces allées fleuries. C'est si beau que j'en oublierai presque ce qu'il vient de se passer. Si en premier lieu, nous discutons de tout et de rien, très vite, Haley aborde le sujet qui l'intéresse. Jayden.

— Vous en êtes où tous les deux ? me demande-t-elle.

Les joues en feu, je lui annonce que nous avons décidé de vivre ensemble dans sa maison. Elle s'arrête net, passe devant moi et me lance un sourire digne des pubs pour dentifrice.

— J'y crois pas ! Waouh ! C'est du sérieux entre vous, alors ?

— Oui, je suis vraiment amoureuse de lui et il m'a dit deux fois qu'il m'aimait.

— J'en reviens pas. Si on m'avait dit que notre célibataire endurci repartirait avec la corde au cou, je ne l'aurais pas cru une seule seconde. Je savais qu'il tenait à toi, mais je ne pensais pas que c'était à ce point. Je suis vraiment contente pour vous, me félicite-t-elle en venant me serrer dans ses bras.

Après cette brève étreinte, nous partons nous asseoir sur un banc face à un mur en ruine. Je me suis toujours demandé ce qui avait pu se trouver ici. Était-ce une maison ? Je n'en ai jamais rien su. Bon, maintenant, il sert de support pour quelques tags à des délinquants.

Nous restons encore quelques minutes à papoter, comme les filles savent si bien le faire. Elle me parle de son bébé qui attend sagement l'heure du départ dans la loge de son père en compagnie d'une baby-sitter, engagée pour la soirée.

— J'aurais préféré qu'il reste à l'hôtel, ils ont des oreilles si sensibles à cet âge. Mais vu que nous partons tout de suite après le concert, je n'ai pas eu le choix.

Me rappeler leur départ n'était pas la meilleure idée du siècle. Mon cœur se retrouve coincé dans un étau. La sensation qui en ressort n'a rien d'appréciable. Bien au contraire. C'en est presque étouffant. Je dois vraiment me faire à l'idée que Jay et moi nous retrouverons ensuite et que ça n'en sera que meilleur. Notre manque à tous les deux se transformera en un gigantesque feu d'artifice. J'en suis certaine.

— Désolée, Jen. Je ne voulais pas t'y faire penser, dit Haley.

Elle me regarde, vraiment navrée.

— Ce n'est rien, ne t'en fais pas.

— Si tu veux, je peux rentrer avec toi à Chicago. Tu te sentiras moins seule. De toute façon, je pense que ce sera mieux pour mon fils. À vrai dire, je ne sais même pas pourquoi je les ai suivis. Ashton est encore si jeune.

Je hausse les épaules, je n'ai pas envie qu'elle se sente forcée de le faire. Cependant, si elle décide de rentrer, elle a raison, je me sentirai moins seule eet surtout moins perdue dans cette ville, qui m'est totalement inconnue.

— Écoute, je vais en parler à Dan et je verrai ce qu'il en dit. Mais, à mon avis, il n'y verra aucun inconvénient.

— Merci, soufflé-je.

Nous restons quelques minutes, silencieuses, à contempler la nature devant nos yeux. Puis, lorsque nous décidons de nous lever, je lui propose d'aller visiter l'autre partie du parc. Elle jette un coup d'oeil à son portable, avant d'accepter d'un simple mouvement du chef.

Nous nous dirigeons alors vers des escaliers, qui nous mènent sur un pont métallique au-dessus de la route. De l'autre côté, les fleurs disparaissent pour laisser place à des arbres. Leurs ombrages nous protègent des rayons du soleil, plutôt fort en cette journée d'avril. Nous longeons un petit sentier qui nous emmènent vers des petites mares, où nous apercevons des carpeaux gober des mouches, ainsi que des canards et des poules d'eau. Un peu plus loin, Haley s'extasie devant des petites tortues. À la voir faire, on dirait une véritable gamine. Elle me fait trop rire.

Quand la soif commence à se faire ressentir, je lui propose d'aller prendre un verre à l'une des terrasses de Bercy Village.

— Wouah ! Il y a même un ciné ! s'exclame Haley alors que nous nous asseyons à une table. Ça te dit qu'on se fasse un film après, en attendant que les garçons finissent leur soundcheck ?

— Ouais, à condition qu'il y en ait un en VO.

— Ah, oui ! C'est vrai. J'avais oublié que nous n'étions pas dans un pays anglophone.

Amusées par sa réplique, nous partons toutes deux dans un éclat de rire. Au final, je pense que sa présence à Chicago me permettra de moins penser à l'homme qui va sérieusement me manquer.

Le reste de l'après-midi passe à une allure folle. D'autant plus que le cinéma offrait plusieurs films dans notre langue. Même si nous avons visionné un navet, ça nous a au moins permis de tuer le temps.

Lorsque nous retournons dans la salle, Haley part directement dans la loge de Dan retrouver son fils. Quant à moi, j'attends sagement le retour de Jay devant la sienne. Il m'y rejoint peu de temps après. Au moment où il me voit, il se précipite jusqu'à moi, me soulève et m'embrasse passionnément. Puis, il me repose, avant de m'entraîner à sa suite dans sa loge.

— Ça va mieux avec Shawn ? lui demandé-je dès qu'il a refermé la porte derrière lui.

Il hausse les épaules et affiche une légère grimace. Pas de doute, c'est toujours aussi tendu entre eux.

— Je n'ai plus qu'un mois à tenir, ensuite je quitterai le groupe.

Voir sa carrière s'achever ne doit pas être évident pour lui. Bien que nous n'en ayons pas vraiment parler, je sais combien il aime jouer sur scène et être au contact de son public.

Attristée pour lui, je pars m'asseoir sur le canapé en cuir crème. D'un signe de la main, je l'invite à m'y rejoindre. Ce qu'il fait sans perdre de temps. Dès qu'il se trouve près de moi, je passe mon bras autour de son corps, si musclé, et l'attire contre moi. Sa tête se niche aussitôt dans mon cou. Je caresse son dos avec une infinie douceur.

— Peut-être que vous devriez tenter de mettre vos différends de côté, juste pour continuer.

Il redresse la tête, afin d'ancrer son regard au mien. Puis, tout en souriant, il secoue la tête.

— Tu es trop naïve, ma belle ensorceleuse. Shawn ne me pardonnera jamais de sortir avec toi. Et je crois que même s'il n'y avait plus rien entre nous deux, lui et moi ne redeviendrons pas potes pour autant. Je ne vois pas comment je pourrais continuer à bosser avec un gars qui me cherchera à la moindre occasion.

J'opine du chef. C'est sa décision, je la respecte, même si ça m'ennuie pour lui.

— Quoi que tu décides, je serais toujours là.

Il me lance un nouveau sourire et cette fois, je fonds totalement.

— J'espère bien, me dit-il en posant un baiser sur le sommet de ma tête.

Nous restons dans sa loge, même pour dîner, jusqu'au moment où Leo vient toquer à la porte. D'un baiser passionné, j'encourage mon homme, avant de quitter la pièce. Lorsque nous en sortons, Shawn nous regarde, sans se départir de ce sourire démoniaque qui me glace le sang. Il a prévu quelque chose et il semble bien vouloir s'y tenir. Si au moins, je pouvais avoir un aperçu de ce dont il s'agit, je pourrais prendre une décision adéquate. Peut-être, va-t-il tenter de m'embrasser comme l'autre fois ? Si c'est le cas, je me tiens prête à le recevoir. Cette fois, il ne m'aura pas par surprise. À moins qu'il pense pouvoir me dévoiler un secret sur Jay ? Un instant, je prends peur, en me disant qu'il pourrait me cacher quelque chose, comme son ex-meilleur pote l'a fait des années auparavant. Et si mon homme était marié ? S'il avait déjà une copine à Chicago ? Comment réagirais-je ?

— Ça va ? me questionne Jay.

En réalisant qu'il n'est pas encore entré sur scène, je secoue la tête afin de me remettre les idées en place.

— Oui, tenté-je de le rassurer.

Mais au vu de la grimace qu'il affiche, je semble très loin d'y être parvenue.

— Je pensais juste à un truc, ne t'en fais pas, rajouté-je.

— Vu la tête que tu tirais, ça n'avait pas l'air d'être très plaisant !

— Je pensais juste à Black et à ce qu'il m'a dit avant que je parte avec Haley.

Sous la pression de son manager, il n'a pas le temps de répliquer. Il baise juste mes lèvres de manière furtive, avant de rejoindre le reste du groupe.

À peine est-il parti que Haley s'accroche à mon bras, afin de m'entraîner sur le devant de la scène. Tandis que nous franchissons les quelques mètres qui nous en séparent, j'enfile mes protections auditives. Il vaut mieux si je ne veux pas que mes oreilles saignent à la fin du show.

Dès que Jay me voit, son public semble se réduire à moi. Pas une seule fois, il ne me lâche du regard tandis qu'un son grave et mélodieux sort de sa basse. Malgré les dix-huit mille personnes présentes dans la salle, nous sommes seuls au monde, enveloppés par notre bulle de bonheur. Chaque fois que son désir pour moi traverse son regard, mon cœur bondit dans ma poitrine. Si fort que je me demande quand est-ce qu'il va la transpercer.

Je suis soulagée de voir que Shawn ne lui joue aucun tour. Malheureusement, ce sentiment s'évapore vite quand je remarque Jay s'interroger, les sourcils froncés, avant qu'il ne jette un rapide coup d'oeil sur le leader. Je n'en comprends la raison qu'à l'instant où je reconnais la chanson qu'il a décidé de lancer. Remember. Tellement obnubilée par le bassiste, je n'avais pas prêté attention aux premiers accords. Mécontent, et il a de bonnes raisons de l'être, Jay secoue la tête. Il reste figé quelques secondes sans jouer aucune note, pour bien lui faire comprendre que ça ne lui plaît pas du tout. Puis, il vient s'asseoir sur le bord de la scène juste devant moi. Ses yeux plongés dans les miens, il se met à gratter son instrument, tout en bougeant ses lèvres sur les paroles de la chanson. Il me faut un petit moment et l'aide de Haley pour comprendre qu'il a décidé de s'accaparer cette chanson pour qu'elle devienne nôtre. Pour effacer l'histoire qui s'y rattache. La connaissant aussi bien que lui, je me mets à la fredonner à mon tour. Shawn doit sûrement le remarquer, puisqu'avant même qu'elle soit terminée, il enchaîne sur une autre beaucoup plus rythmée, laissant à peine le temps à mon bassiste de se relever. Il est vraiment en train de faire n'importe quoi et s'il ne se ressaisit pas vite, il risque de se retrouver avec une horde de fans mécontents. Mes pensées se confirment lorsqu'il décide d'embrouiller encore ses acolytes avec un tout autre morceau. Quelques huées s'élèvent instantanément dans notre dos.

— Mais qu'est-ce qu'il fout ? grogne Haley, qui ne semble pas apprécier non plus l'allure que prend la scène.

Je hausse les épaules. Que puis-je lui répondre alors que je n'en ai aucune idée ? Avant même que je puisse trouver quoi que ce soit à lui dire, la salle se retrouve plongée dans le noir. Fait exprès ou non, je ne saurais le dire. Toutefois, ça ne semble pas plaire du tout au public, puisqu'il se met à protester fortement.

— Je pense que Leo a demandé d'éteindre les lumières pour aller remonter les bretelles à Shawn, m'informe Haley.

— Tu crois ?

— Ouais, il est en train de foutre en l'air leur concert. Je ne sais pas ce qu'il a consommé, mais crois-moi, il n'est pas clean du tout.

Je pince les lèvres, affligée d'entendre Haley m'annoncer cette triste vérité. Pourquoi fait-il ça ? Pourquoi ce soir ? Je suis encore une fois totalement paumée. Perdue dans mes pensées, je remarque à peine que les lumières se sont rallumées. Il me faut un coup de coude de ma meilleure amie pour revenir à l'instant présent, sans avoir trouvé la moindre réponse à mes interrogations. Quand je relève les yeux vers la scène, Jay darde un œil sur moi, une drôle de lueur dans le regard. Vient-il de se prendre la tête avec Shawn ? Est-il inquiet ? Je n'arrive vraiment pas à définir ce qui se trame dans sa tête. Vivement la fin que je puisse l'interroger.

Heureusement, le reste du concert se déroule bien mieux. Je ne sais pas si c'est vraiment Leo qui a parlé à Shawn, en tout cas, il l'a bien remis à sa place. Tant mieux. Je ne vais pas dire le contraire. Balancer notre chanson, alors qu'elle n'est plus à leur répertoire, n'était pas du tout sympa de sa part.

À la fin du show, Jay pose sa basse et saute de la scène, comme à chaque représentation. Il se précipite vers moi, me soulève dans ses bras et me fait voler dans les airs. Heureux d'avoir encore une fois tout donné pour ses milliers de fans. Heureux de me retrouver. Comme le veut ce qui est devenu notre petit rituel, je pose mes mains sur ses joues tandis que ma bouche vient à la rencontre de la sienne. Nous nous embrassons avec passion alors que derrière nous les spectateurs commencent à quitter la salle. Essoufflé, il finit par me reposer au sol. Il enroule ses doigts autour des miens et encore sous l'excitation de son concert m'entraîne rapidement vers sa loge. À l'idée de ce qui m'attend, une douce chaleur se propage dans tout mon organisme.

Lorsque nous arrivons devant cette pièce dédiée à mon homme, pressés de nous retrouver isolés, Shawn se tient devant la porte, les bras croisés sur son torse. Nous nous arrêtons net à quelques pas de lui. Jay se tend aussitôt. Il doit sentir que le leader va encore nous emmerder.

— Dégage ! lui ordonne-t-il. Juste au cas où tu ne l'aurais pas remarqué, c'est mon nom qui est placardé sur cette porte.

Mon ex redresse un peu le menton, histoire de le défier, avant de laisser ses yeux couler le long de mon corps. Sa façon de me regarder me donne la chair de poule. On dirait un prédateur sur le point de s'en prendre à sa proie. Pas à l'aise pour un sou, je me blottis contre mon copain. D'un bras autour de mes épaules, il m'offre une armure inébranlable.

— Pourquoi tu ne bouges pas ? gronde ce dernier.

— Vu que c'est notre dernière scène européenne, je me demandais si je pouvais également participer.

Mais de quoi il parle ? Il n'est vraiment pas normal aujourd'hui. Je fronce les sourcils, dans l'incompréhension la plus totale. Jay semble l'être également, puisqu'il le relance :

— Je capte rien ! Alors, je te le redis, dégage !

Un large sourire, de celui qui vous donne envie de fuir à toutes jambes, fend aussitôt le visage du guitariste.

— Je sais très bien que tu vas la baiser avant de partir...

En entendant ces mots, Jay se jette sur lui, sans lui laisser le temps de terminer sa phrase. Il l'attrape par le haut de son t-shirt, son second poing serré, prêt à lui abattre sur le coin du nez ou je-ne-sais où. En tout cas, il n'a pas l'intention de le laisser s'en prendre à nous.

Complètement médusée par l'attitude de Shawn, je reste immobile, les bras ballants, sans savoir comment réagir.

— Pour info, je ne la baise pas, je lui fais l'amour. Et les plans à trois, c'est pas mon truc. Alors fous-nous la paix !

Mon ex hausse les épaules, comme si la réponse de Jayden lui était égal.

— J'aurais au moins essayé ! lance-t-il en attrapant l'avant-bras de mon homme pour se dégager de son emprise.

Jay recule d'un pas afin de le laisser partir. Il ne doit certainement pas s'attendre à ce que Black s'arrête à côté de moi, se penche au-dessus de mon oreille et me murmure :

— En tout cas, ça ne l'a pas dérangé avec la mère de son fils.

La quoi ? Non, c'est impossible, j'ai du mal comprendre ! Il ne peut pas être père, il me l'aurait dit. Entre nous, c'est la vérité. Toute la vérité. Rien que la vérité. Il n'aurait pas pu me cacher une chose aussi importante. Je n'y crois pas. Je ne veux pas y croire. Je... Non, non, non ! Je ne veux pas que mon rêve se brise. Jayden ne peut pas... Non !

— Il ne t'en a pas parlé, je me trompe ? me demande Shawn.

Incapable de prononcer le moindre mot, je ne fais que lancer un appel de détresse à travers mon regard à mon amour. Je veux qu'il me rassure, qu'il me dise que tout est faux. Que Shawn vient d'inventer un putain de mensonge, juste pour nous détruire.

— Vu comme t'es blanche...

La fin de sa phrase meurt sur ses lèvres, lorsque Jay le pousse brutalement contre le mur. Acculé, il n'a plus aucune échappatoire. Je regarde cette scène un peu comme si je me trouvais hors de mon corps. Ses mots résonnent dans ma tête, encore et encore, à la manière d'un écho.

— Qu'est-ce que tu lui as dit, connard ?

— La vérité, mon gars. Tu sais, au sujet de ton fils.

À l'instant où Jayden me porte un regard par-dessus son épaule, mon monde s'écroule. La vérité vient de transparaître dans ses yeux. Foudroyante. Destructrice. C'en est si douloureux que mes poumons peinent à remplir leur rôle. Sous le choc, je me tiens l'estomac. On m'y aurait envoyé un coup, je n'en souffrirais pas moins. Pourquoi ? Pourquoi ne m'en a-t-il pas parlé ? Je croyais en lui, mais il ne vaut pas mieux que les autres. Anéantie, je n'arrive qu'à secouer la tête. Quand celui que je pensais connaître se retourne, je recule. Je ne peux pas faire autrement. J'ai trop mal. Je me sens encore une fois salie. Humiliée. Je lui ai tout donné, y compris mon cœur.

— Princesse...

Je secoue la tête, je refuse de l'entendre.

Il tente de s'approcher, mais je lui intime de rester à sa place en tendant la main devant moi.

— Jen, s'il te plaît, écoute-moi. Ce n'est pas ce que tu crois.

Je ne crois plus rien. Je sais juste qu'il m'a dissimulé la vérité, comme le gars qui se tient à mes côtés. Que m'a-t-il caché d'autres ?

— Pourquoi ne m'as-tu pas dit que tu étais père, Jayden ? On avait dit toute la vérité !

— Je voulais le faire. Je te jure.

— Comme lui, hein ? vociféré-je en tendant la main dans la direction de Shawn.

Le regard de Jay s'assombrit. Il est en colère que je puisse le comparer à mon ex, mais je m'en fiche. Plus rien n'a d'importance hormis cette foutue douleur. Elle me maintient la tête sous l'eau, me fait boire la tasse. Je suis en train de me noyer. J'ai besoin d'air. D'une branche à laquelle me raccrocher pour pouvoir me redresser. Pourquoi m'a-t-il fait ça ? Il connait mon passé, je lui ai tout dit, révélé le moindre de mes secrets. Je me suis mise à nue devant lui. Et il vient de me piétiner.

Perdue au milieu de cet océan de souffrance, je n'ai pas vu Jayden se rapprocher de moi. Ce n'est qu'à l'instant où je l'entends tonner que je réalise qu'il est tout près. Bien trop près.

— Ne me compare pas à lui ! Jamais !

En relevant les yeux, je le vois secouer la tête. Ses yeux sont voilés de tristesse, mais ça m'est égal.

— Je ne le connais même pas, souffle-t-il.

Surprise, j'écarquille les yeux. Je ne suis pas certaine de comprendre réellement le sens de ses paroles. Est-ce vraiment de son fils dont il me parle ?

— Mon fils, je ne le connais pas, m'annonce-t-il comme s'il venait d'entendre ma question muette.

Sous le coup de l'incompréhension, je secoue la tête. Trop de questions se bousculent sous mon crâne. Comment peut-il être sûr qu'il a vraiment un enfant s'il ne le connaît pas ? Je tente de me raccrocher à cette perche, la seule qui me semble valable.

— Comment peux-tu être sûr, alors, que tu as un enfant ?

Il se mord la lèvre et ça me suffit pour perdre à nouveau pieds.

— Parce qu'elle me l'a dit...

Tout devient sombre autour de moi. Mes yeux me piquent tant, que je n'arrive plus à retenir mes larmes. Elles se déversent sur mes joues, en brûlant chaque centimètre de ma peau sur leur passage.

Il a la chance d'avoir un enfant, mais il n'a même pas souhaité le rencontrer. Quel genre de type est-il ?

Tout est si mélangé dans mon esprit que mes pensées sont à peine cohérentes.

Jay tente de me prendre dans ses bras, mais d'un mouvement d'épaule, je lui en refuse le droit.

— C'était une erreur, Jen. Je te jure que ça n'aurait jamais dû arriver. J'étais bourré et shooté ce soir-là. Quand elle me l'a dit, je n'y ai pas cru une seule seconde. Ce n'est que lorsqu'elle m'a menacé de tout révéler à la presse que je me suis dit que ce n'était pas des bobards. À l'époque, j'avais bien assez à faire avec ces putains de journaliste. Je ne voulais pas qu'une autre de mes conneries s'ébruite. Je n'en avais pas besoin. Tu comprends, je n'en avais vraiment pas besoin.

La fin de sa phrase s'étrangle dans un sanglot.

— Qu'est-ce...

J'aimerais lui demander pourquoi il n'a pas été le voir, mais je ne parviens même pas à formuler mes pensées. J'ai trop mal.

— Je te jure que c'est la seule chose dont je ne t'avais pas encore parlé. Je voulais le faire. Je te jure que c'est vraiment le cas. Je ne suis pas Shawn, merde !

Le cœur brisé, je le regarde une dernière fois, pour graver dans ma mémoire ses sublimes traits.

— Entre nous, c'était la vérité. Toute la vérité, Jayden ! Même si elle n'était pas belle à voir.

Il secoue la tête, tente de s'approcher de moi, mais se ravise à la dernière seconde.

— Ne fais pas ça, Jenny... S'il te plait... Je t'aime.

Devant cette déclaration, mon cœur tente de lutter pour reprendre les commandes, mais ma raison le chasse d'un bon coup de pieds aux fesses. Elle lui rappelle combien j'ai souffert des mensonges de Shawn et de Pete. Combien, il est douloureux de s'en relever. Vaincu, il s'écrase.

— C'est terminé, Jayden, soufflé-je.

Les mains tremblantes, je farfouille dans mon sac à la recherche de sa clé, puis la lui tends. D'un signe de tête, il la refuse.

— Garde-la, me supplie-t-il d'une voix tremblante.

Je ferme les yeux un instant. Quand je les rouvre, j'attrape son poignet, la pose dans sa paume, avant de refermer ses doigts dessus.

— Au revoir, Jayden.

Et sans perdre de temps, mon cœur à ses pieds, je m'éloigne de lui.

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