23 - Jen

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Réveillée depuis un moment, je regarde Jayden dormir à mes côtés comme un bienheureux. Seulement vêtu d'un boxer, je le trouve terriblement sexy, malgré sa pommette gonflée et sa lèvre fendue. Avec douceur pour ne pas lui faire mal je les effleure de l'index, avant de le laisser descendre le long de sa mâchoire, puis de son cou pour atterrir, au final, sur ses côtes. Là où ses douleurs sont les plus intenses. Mes yeux ne quittent pas une seule seconde son visage, on dirait un ange tant il est sublime.

Depuis plusieurs années, cinq, pour être exact, je ne m'étais jamais sentie aussi bien en dormant dans les bras d'un homme. Ce que je vis auprès de lui n'a rien à voir avec ce que j'ai vécu avec Pete. C'est doux et intense à la fois. Ça me réchauffe de l'intérieur et m'aide à combattre mes démons. Quand je suis tout contre lui, j'arrive à affronter la perte de ma fille. Tôt ou tard, je devrais lui révéler toutes les conséquences de mon accident, mais pour l'heure je veux juste profiter de sa présence dans mon lit.

Sous mes caresses, il finit par se réveiller avec un demi-sourire qui illumine son visage. Il s'empare de ma main pour la remonter vers sa bouche. Il recouvre ma paume de petits bisous qui me font vaciller, avant de plonger mon index dans sa bouche. Son regard coquin rajoute à l'érotisme de cette scène. Sa sensualité réveille chacune de mes hormones qui ne demandent qu'à être stimulées un peu plus. Mon Dieu, comment avec ce simple geste parvient-il à allumer un tel brasier entre mes cuisses ? C'est si intense que plusieurs spasmes se font ressentir dans mon bas-ventre.

— Tu veux déjà me torturer, ma belle ensorceleuse ?

Sa voix rauque me fait défaillir. Mon pouls s'emballe si vite, que je suis presque certaine qu'il peut l'entendre. Pour le coup, c'est lui qui me torture. Afin de reprendre le contrôle de mon corps, j'entre dans son jeu.

— Si tu n'avais pas si mal, j'adorerais ça.

Il se touche le flanc, avant de grimacer. La douleur semble encore bien présente. Il aurait dû aller passer une radio hier soir, mais têtu comme il est, il a préféré rencontrer ses fans, plutôt que de m'écouter. Ce matin, je ne vais pas lui laisser le choix, si je ne souhaite pas qu'il s'écroule sur scène ce soir.

— Si je n'avais pas si mal, c'est moi qui te torturerais, princesse. Et je te promets que tu en demanderais encore.

Son sourire espiègle me fait fondre. Je me redresse sur mon coude, pour venir l'embrasser. Je crois que poser mes lèvres sur les siennes risque de devenir mon passe-temps favori dans les heures, les jours et les mois à venir. À eux seuls, ses baisers sont une véritable torture. Hors de question, toutefois, de le lui avouer, si je ne veux pas qu'il passe son temps à me dévorer les lèvres.

— Je n'en doute pas une seconde. Tu n'as pas hérité du surnom de dieu du sexe pour rien, si je ne m'abuse.

Il éclate de rire, vite interrompu par ses côtes qui doivent le faire souffrir le martyr.

— Saleté ! grince-t-il, en se tenant le flanc.

Pour le soulager un peu de sa peine, je viens déposer de délicats baisers à cet endroit. Il caresse mon dos avec tendresse, avant de se retourner pour me faire face. Je me redresse, afin de plonger mon regard dans le sien. Toutes les émotions qui brillent dans ses magnifiques obsidiennes m'enveloppent dans une sorte de cocon.

— Arrête de me regarder comme ça ou je te promets que je risque de te torturer, même si j'ai atrocement mal.

Je ne me suis même pas rendu compte de la manière dont je le regardais, mais vu son érection contre mon ventre, ça doit extrêmement lui plaire.

Pour bien me faire passer le message, il laisse ses doigts glisser sensuellement le long de mon dos. De doux frissons remontent ma colonne vertébrale pour venir éclater dans ma nuque. C'est tellement exquis, que je voudrais passer ma vie à le laisser me toucher. Audacieuse, sa main se faufile sous ma culotte pour venir s'agripper à ma fesse alors que sa bouche se colle à la mienne. Je ne sais pas qui vient de monter le thermostat, mais il fait terriblement chaud d'un coup. La chaleur monte encore d'un cran lorsque sa langue vient trouver la mienne et que l'un de ses doigts se met à effleurer mon intimité. Doux comme une plume.

Totalement envoûtée par ses caresses, je pousse un ronronnement de plaisir, qui se traduit par un léger gémissement. Amusé par ma réaction, il sourit contre ma bouche.

— J'ai l'impression qu'il ne te faut pas grand chose ce matin pour te torturer.

Il a raison. Saleté d'hormones. Il m'a à peine touchée que ma libido est déjà à son paroxysme. Il pourrait me faire jouir rien qu'en me touchant de cette façon. Malheureusement pour moi, ou bien heureusement, je n'en sais rien du tout, il parvient, par je ne sais quel miracle à lire dans mes pensées. Ses doigts trouvent leur chemin jusqu'à mon clitoris. Tout en se délectant de ma bouche, il s'amuse à le tourmenter en y décrivant des cercles de plus en plus appuyer, avant de le pincer. Sous ce délicieux tourment, mes gémissements se font de plus en plus fréquents.

— Ça te plaît ? me questionne-t-il, joueur.

— Pour le Dieu du sexe, je trouve que tu pourrais faire mieux, réussis-je à lui répondre, provocatrice.

Il hausse un sourcil, amusé.

— Vraiment ? Bien, voyons ce qu'on peut faire pour arranger ça.

Je m'attends à ce qu'il poursuive son petit jeu ou introduise un doigt en moi, mais à la place, il me renverse sur le dos et retire ma culotte. Son sourire en coin m'annonce presque la couleur de ce qui m'attend. Agenouillé, il me contemple sans rien faire. Chacune de mes cellules rentrent en ébullition sous son regard brûlant. Il va me rendre barge à me faire attendre de la sorte. Impatiente, je soulève le bassin pour lui faire comprendre que je désire plus.

Il pose une main au bas de mon ventre pour me retenir.

— Doucement, princesse. J'ai envie de prendre mon temps ce matin. Ça n'en sera que meilleur pour toi.

Frustrée, je grogne. Il éclate de rire. Mince, même ce son me fait vibrer. Cependant, encore une fois, il est obligé de se tenir les côtes. En le voyant souffrir, ma libido en prend un coup. Je n'ai aucune envie qu'il se sente mal par ma faute.

— Laisse-moi m'occuper de toi !

Il s'avance jusqu'à moi, pose ses lèvres sur les miennes et m'embrasse avec volupté. Conquise, je me laisse retomber sur le lit.

— Plus un mot, ma belle. La seule chose que je veux qui sorte de cette bouche sont tes gémissements. Je ne te ferais pas l'amour, ni aujourd'hui, ni certainement demain, mais je te promets de te faire jouir tous les jours.

Il laisse ma bouche pour venir placer sa tête entre mes cuisses. Mon excitation s'envole en imaginant ce qui m'attend. Pourtant, lorsqu'il se met à titiller mon Mont de Vénus, la sensation est mille fois meilleure que tout ce que j'aurais pu imaginer. Son expérience le rend expert en la matière. Il lèche, suce, introduit un, puis deux doigts au fond de moi. Je perds la tête, je deviens dingue. Totalement soumise à ses désirs, il peut faire de moi ce qu'il veut. Je halète, gémis. Emportée dans un tourbillon d'émotions et de sensations, je crie de plus en plus fort, jusqu'à ce que les portes du paradis s'ouvrent devant moi. Après une dernière contraction de mes muscles, j'entre dans ce lieu aux multiples splendeurs.

Quand je reviens à moi, Jayden est allongé à mes côtés et me caresse avec tendresse. Un léger sourire illumine son visage. Il est tellement beau. Je me rends compte à cet instant de la chance que cet homme soit à moi.

— De retour parmi nous ?

Je hoche la tête, subjuguée par l'aura qu'il dégage. Il semble tellement heureux, tout comme moi. Ces derniers jours passés loin l'un de l'autre paraissent très loin derrière nous.

Lorsqu'il entend mon estomac grogner, il sourit, amusé.

— Je crois que ma petite séance de torture t'a ouvert l'appétit.

Je pouffe.

— Je ne voudrais pas que tu t'imagines que si je meurs de faim, c'est à cause de ce que tu viens de faire.

Sa lèvre inférieure s'avance légèrement. On pourrait croire qu'il boude, mais vu l'éclat espiègle dans son regard, je sais qu'il joue juste la comédie.

— Tu m'en vois vexé. J'ai vraiment cru que tu avais tellement pris ton pied que...

Plutôt que de l'entendre dire des bêtises, je pose ma main sur sa bouche pour qu'il se taise. Il profite de mon geste pour couvrir ma paume de nouveaux bisous. Bien trop appréciable. Je pourrais le laisser faire toute la journee si on avait rien d'autre à faire.

— Tu veux qu'on aille rejoindre les autres ou tu préfères qu'on fasse monter notre petit-déjeuner ?

— La deuxième option.

Il opine du chef avant de se lever pour aller appeler la réception, afin de faire monter de quoi nous remplir l'estomac. Alors qu'il passe son coup de fil, je ne peux détacher mon regard de son corps. Tellement parfait. J'en apprécie chaque détail avec un regard rempli de gourmandise. J'ai encore plus faim à présent, mais cette fois c'est de lui dont j'ai envie. Je dois être devenue folle pour le désirer encore, alors que je viens d'avoir un sacré orgasme. Et je peux dire qu'à côté de Pete, il ne m'en faut pas beaucoup pour décoller avec lui.

— Tu devrais cesser de me mater comme ça. Tu me rends dingue et en même temps, ça me frustre de ne pouvoir rien faire à cause de ces putains de douleurs.

Rien est un euphémisme, vu la façon dont il m'a fait grimper au rideau. J'en tremble encore.

— Tu devrais vraiment aller passer une radio pour voir si tu n'as rien de cassé.

Comme il a lancé le sujet le premier, autant lui annoncer maintenant ce que j'envisage pour les heures à venir. Sa grimace m'indique que c'est loin d'être l'idée du siècle.

— Pourquoi pas ? demandé-je, étonnée qu'il n'ait pas envie de se faire soigner.

Nerveux, il glisse une main sur sa nuque, qu'il masse, tout en se mordillant la lèvre.

— Je hais les hôpitaux, m'avoue-t-il d'une tout petite voix.

Aurait-il honte de cet aveu ? Surprise de le voir si peu à l'aise, je hausse un sourcil.

— Mon père est enfermé dans un hôpital psychiatrique depuis pas mal d'années, m'explique-t-il.

Désolée par cette nouvelle, je me lève à mon tour pour aller le serrer dans mes bras. Je suis si triste pour lui. J'enroule mes bras autour de son magnifique corps et pose ma tête sur son torse. Je veux qu'il comprenne que je suis là pour lui. Peu importe ce qu'il me dira sur sa famille, je ne le jugerai pas.

— Est-ce qu'un jour il en sortira ?

Il secoue la tête, avant de se dégager de mon étreinte. Il se dirige vers la fenêtre par laquelle il observe la vue. J'attends qu'il reprenne la parole sans le brusquer.

— Mon père a totalement perdu la tête depuis que ma mère s'est barrée. Au départ, c'était par crise. Il pouvait rentrer dans des colères noires ou me tenir son foutu discours sur les femmes. Pour lui, vous êtes toutes les mêmes : des salopes qui finissent par nous briser le cœur.

Je me rapproche de lui et pose sa main sur son dos, entre ses omoplates.

— Et t'en penses quoi ?

Son absence de réponse immédiate m'effraie. S'il croit que je vais lui briser le cœur, alors tôt ou tard, il risque de briser le mien, pour éviter que je le fasse souffrir en premier. Cette idée me vrille l'estomac. Je n'ai pas envie de le perdre, je suis déjà bien trop attachée à lui.

Il se tourne vers moi, tout en laissant une certaine distance entre nous. Ce qu'il va me dire ne va pas me plaire du tout. Je le sens, c'est viscéral. Il plonge un regard des plus sérieux dans le mien avant de prendre la parole.

— Pendant des années, j'ai subi un véritable lavage de cerveau, si bien que j'ai tout fait pour ne pas m'attacher. Ne va pas croire que tu es ma première copine, j'en ai eu quelques-unes avant toi, mais ma dernière vraie histoire remonte à ma dernière année au lycée. Quand j'ai capté que je commençais à vraiment trop tenir à elle, je me suis barré. Puis, je suis devenu celui que tu as rencontré...

Je ne sais pas comment prendre tout ça. Est-il en train de me dire qu'il finira par prendre la fuite, comme avec elle ? Cet avenir incertain me mine le moral. Je pars m'assoir sur le canapé, la boule au ventre. Mon rêve est en train de virer au cauchemar sans que je ne puisse rien y faire. Et ça m'effraie. Je suis en train de tomber amoureuse d'un homme qui ne m'apportera peut-être rien de bon. Suis-je prête à souffrir encore une fois ? Les paupières closes, je repense à Shawn et à cet hiver sans fin qui s'est abattu sur moi lorsque j'ai découvert toute la vérité sur son compte. Est-ce que je désire vraiment retraverser les plaines sibériennes ?

Je n'ai pas le temps de chercher une réponse à cette question, que Jay se retrouve accroupi devant moi.

— Jen, regarde-moi.

Je refuse de le faire. Depuis deux semaines, je lui ai confié mon cœur et en quelques mots, il vient d'y planter un premier coup de poignard.

— S'il te plaît, insiste-t-il.

Je secoue la tête, trop touchée par son discours.

Je l'entends souffler bruyamment, avant de le sentir s'éloigner de moi. Perdue face à son éloignement, je le cherche des yeux pour m'assurer qu'il ne m'a pas laissée seule. Les doigts croisés au-dessus de la tête, il fait les cent pas entre la fenêtre et la porte. Ses yeux portés vers le sol me signalent qu'il est vraiment soucieux. Je déteste ça. J'aurais dû me douter qu'après un tel réveil, quelque chose allait finir par me tomber sur le coin du visage. Anxieuse, je mordille mon pouce, attendant qu'il brise ce silence de plus en plus intenable.

— Je crois que mon père a oublié de me prévenir d'un truc...

Il laisse tomber sa phrase en suspens. Comme il semble attendre ma réaction, je le questionne.

— Lequel ?

Il tourne la tête dans ma direction et plante son regard dans le mien. Lorsque j'y lis tous les sentiments qu'il le submerge, je reprends un peu confiance.

— Que Cupidon ne prévient jamais avant d'envoyer sa foutue flèche. Cet enfoiré m'a touché en plein coeur quand le destin t'a mise sur ma route et je n'ai rien pu faire pour l'éviter.

Touchée par ses mots, mon sang palpite dans mes veines. Sa déclaration se grave au fer rouge dans mon âme, juste à côté de ses initiales. Jamais je n'aurais pu croire qu'il puisse être aussi romantique. Et ça me plaît... beaucoup même.

— Tu me briseras peut-être le cœur, Jenny Hollister, mais je suis prêt à prendre le risque. Je te l'ai dit et te le répéterai aussi souvent que nécessaire, tu m'as ensorcelé.

Un poids énorme vient de quitter ma poitrine. Soulagée, je me précipite dans ses bras. Il m'attrape par la taille et me plaque contre son torse. Sa bouche s'abreuve de la mienne. Encore et encore. Sous son baiser, la peur de le perdre s'envole. Des nuées de papillons battent des ailes au fond de mon ventre, avec tant de force que j'en frémis. Après tous les obstacles que la vie a mis sur ma route, j'ai enfin fini par trouver ma place. Juste ici, contre lui, enveloppée par ses bras musclés, soutenue par ce lien qui nous relie.

Il restera jusqu'à ce que nos sentiments l'un pour l'autre se tarissent, j'en suis convaincue. Même s'il s'avère que j'ai tort, je suis prête à me planter juste pour continuer à ressentir toutes ces émotions qui s'imprègnent en moi et à partager d'autres moments complices avec lui.

— Je prends également le risque, Jayden Miller, lui déclare-je, essoufflée.

Quelques coups frappés contre la porte nous sortent de notre bulle de bonheur. Il dépose un bisou sur mon front, avant de partir ouvrir. Le groom nous apporte notre petit-déjeuner, qu'il pose sur la table basse.

Après nous être régalés des mets succulents, entre deux taquineries ou baisers, nous décidons de nous séparer, à regrets, le temps de prendre notre douche chacun dans notre chambre. Jamais, je ne me suis autant dépêchée de me laver. Cet éloignement, bien que momentané, me rappelle trop son absence de ces derniers jours. Intolérable.

Lorsque je quitte ma suite, Jay m'attend déjà à l'extérieur. Il se rince l'œil en étudiant ma tenue. Appréciateur, il esquisse un sourire en coin. Mon slim noir et mon top décolleté semble réellement le ravir. Sans aucune gêne, je l'observe à mon tour. Vêtu d'un jeans brut troué au genou et d'un t-shirt blanc qui moule à la perfection chacun de ses muscles et fait ressortir sa peau hâlé, il est canon. Quoique, même ce mot est faible pour décrire à quel point, il est proche de la perfection. Jayden Miller pourrait rivaliser avec Apollon, tellement je le trouve éblouissant.

Quand il m'attire à lui, mon cœur reprend sa course folle. Mon corps trouve parfaitement sa place contre le sien. À croire qu'ils sont faits l'un pour l'autre. J'en suis de plus en plus convaincue.

— Tu m'as manqué, me souffle-t-il en enroulant une de mes boucles autour de son doigt.

Il semble adorer ça. Je le laisse faire, tant je raffole de sa façon de me toucher. Quand il pose ses lèvres sur mon front pour m'embrasser avec délicatesse, je frissonne de plaisir. Je retiens de justesse un ronronnement, qui s'apprêtait à franchir mes lèvres. Voilà dans quel état me rend le plus beau bassiste du monde. Et vu la bosse que je sens contre mon ventre, je sais qu'il ressent la même chose que moi. Ça risque d'être difficile de se rendre à l'hôpital si on ne s'éloigne pas l'un de l'autre très vite.

— On devrait vraiment y aller, suggéré-je en glissant une main sur son torse pour le repousser un peu.

— Tu ne voudrais pas que je te convainque de venir au concert ce soir.

Sa voix rauque me rend tout chose. L'évocation de ce souvenir réveille en moi un véritable brasier. Une terrible chaleur se diffuse dans mon bas-ventre, pire qu'une journée sous un soleil de plomb du mois d'août.

— Tu m'as déjà convaincu, beau gosse. Par contre, il faut vraiment que tu ailles te faire soigner. Et je ne plaisante pas !

Face à mon regard déterminé, il grimace, mais hoche tout de même la tête, avant de glisser son bras autour de mes épaules.

— Ouais, même si je n'ai pas trop envie d'aller à l'hôpital, t'as raison. J'espère qu'ils me donneront des médocs pour me soulager, sinon je ne vois pas comment je pourrais tenir ma basse. Si je ne peux pas jouer, les concerts vont finir par être annulés.

Son regard s'attriste. Au départ, je ne réalise pas vraiment ce que cela signifie, mais au fur et à mesure que nos pas nous mènent vers l'ascenseur, la lumière fait jour dans ma tête. Si les concerts sont annulés, alors il devra repartir. Mon cœur se serre devant cette idée. Affligée par cette douloureuse vérité, je peine à avancer. Pourquoi la vie se veut-elle aussi injuste avec moi ? Ce n'est pas parce que je suis milliardaire que je n'ai pas le droit d'être heureuse. L'argent n'est pas seul à faire le bonheur, même s'il y contribue beaucoup. J'ai aussi besoin d'affection et surtout de la sienne.

Lorsqu'il remarque que je traîne des pieds, il se place devant moi et plante son regard dans le mien.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— Je...

Je n'arrive même pas à lui dire ce qui me tracasse, tant ça m'affecte. Ses yeux font des va-et-vient comme s'il cherchait à percer mon secret.

— Je viens de réaliser que tu pourrais repartir, finis-je par sortir après un moment de silence.

Il caresse ma joue avec tendresse.

— Je suis certain que ce n'est rien. Puis, si je dois repartir, tu pourrais peut-être me suivre.

Sa proposition est des plus alléchantes, mais serais-je capable de tout plaquer sur un coup de tête ? La vie m'a tellement appris à rester sur mes gardes, que je pense avoir besoin de temps pour y réfléchir. J'en sais rien en fait. Tout ce que je sais c'est que j'ai besoin de sa présence.

— Pour le moment, on ne sait pas de quoi il en retourne, alors je veux que tu arrêtes d'y penser, ajoute-t-il. Je veux te voir sourire

Pour me convaincre de cesser de faire la tête, il pose ses pouces à la commissure de mes lèvres qu'il étire. Amusée, je finis par éclater de rire.

— Je préfère, me déclare-t-il, avant de m'embrasser sur la tempe.

Quelques minutes plus tard, nous retrouvons un des gardes du corps du groupe devant la réception. À mon avis, Jay a dû l'informer de notre sortie alors qu'il se trouvait dans sa chambre. Je suppose que si je veux être avec lui, il va falloir que je m'habitue à sa présence pour ce genre d'escapade, bien que j'aurais largement préféré être seule avec lui.

Lorsque nous quittons l'hôtel, il ne me faut pas deux plombes pour comprendre pour quelles raisons il l'a contacté. Ici, ce n'est pas comme à Londres oùnous pouvons passer par une deuxième sortie. Obligés de passer par la porte principale, pour rejoindre la voiture qui nous attend, nous nous confrontons directement à ses fans. Quand elles le voient arriver, elles scandent son nom, avant de se précipiter vers lui, portables ou feuilles et stylo pointés dans sa direction. Tout ça me dépasse. Mal à l'aise face à cet afflux de personnes, je me crispe. Mon petit-ami doit le sentir puisqu'il me serre un peu plus contre lui et dépose un baiser sur le sommet de ma tête.

— Ça ne te dérange pas si je signe quelques autographes et pose pour quelques photos ?

Je hausse les épaules. Même si ça ne me plaît pas vraiment que d'autres filles puissent se trouver dans ses bras, j'ai conscience que ça fait parti de sa vie. Je vais devoir m'y habituer.

Au moment où la première groupie se jette dans ses bras et l'embrasse sur la bouche, pas gênée pour le moins du monde, je prends sur moi, tant bien que mal – plus mal que bien, d'ailleurs – pour ne pas aller lui arracher la tête. La jalousie me serre le ventre. Je meurs d'envie de lui hurler qu'il est à moi et d'ôter ses sales pattes de lui. Je bouillonne tellement que je dois ressembler à une cocotte-minute sur le point d'exploser.

Une main réconfortante se pose sur mon épaule. Surprise, je sursaute avant de me tourner vers le coupable. Une armoire à glace me fait face, un sourire bienveillant sur les lèvres.

— Ne t'inquiète pas, me rassure-t-il. Jay ne voit que toi. Depuis que nous sommes arrivés en Europe, il a beaucoup changé. Je suis persuadé que tu en es la cause.

Certainement, mais ce n'est pas pour ça que j'apprécie plus de voir ces filles lui tourner autour. Il n'est quand même pas un putain de trophée pour lequel elles doivent se battre ! Je suis en train de jurer alors que je ne le fais jamais. Foutue jalousie ! Je me mords la joue pour tenter de ravaler ce qui grogne au fond de moi, tout en mordillant mon pouce, bien trop nerveuse.

— Jay !

Je l'appelle, mais le son de ma voix est si faible que j'ai plus couiné qu'autre chose. Qu'est-ce qu'il m'arrive à la fin ?

— Jayden ! l'interpelle son garde du corps.

Quand mon petit-ami se tourne vers nous, je remercie l'homme à mes côtés en pressant son avant-bras.

— De rien, ma belle.

Sans se presser, Jay me rejoint. Son regard me transmet tout un tas d'émotion : désir, tendresse et quelque chose qui pourrait se rapprocher à de l'amour. Mon cœur manque plusieurs battements. La frousse de le perdre pour l'une de ses groupies s'envole à cet instant. C'est moi qu'il veut à ses côtés. Je devrais apprendre à me faire confiance. À lui faire confiance. Il n'est ni Shawn, ni Pete. Quelque chose, au fond de ses magnifiques iris, me dit qu'il ne me trahira pas.

D'un bras autour de ma taille, il m'attire contre lui. Et là, devant tous ses fans, il m'embrasse comme si sa vie en dépendait. Son baiser passionné me fait perdre de vue l'endroit où nous nous trouvons. Il n'y a plus que lui et ses lèvres qui comptent. Lui et son odeur, si mâle, qui m'enivre un peu plus à chaque seconde qui s'écoule.

Bien malgré moi, je viens de marquer mon territoire devant toutes ces femmes qui rêvent de passer une nuit entre ses bras. Essoufflé, il pose son front contre le mien. Ses yeux happent mon regard, avec tant d'intensité que même si je le désirais de tout mon être, je serais incapable de le dévier.

Des chuchotements s'élèvent autour de nous. Je m'en fiche. Ce qui compte c'est lui et cette bulle dans laquelle il nous a enveloppé.

— Je crois que tu es en train de faire des jalouses.

Son sourire espiègle me fait défaillir. Heureusement qu'il me retient sinon je serais capable de chuter.

— On devrait peut-être y aller, lui soufflé-je.

Il baise mon front, puis enroule son bras autour de mes épaules pour me guider vers la voiture qui nous attend un peu plus loin. Plusieurs regards pèsent sur moi. On me juge sans aucune discrétion. Je déteste ça. J'ai l'impression d'être mise à nue devant des dizaines de personne, d'être devenue un objet de foire. J'entends déjà certaines critiques.

Un peu trop grosse, pas assez belle. Qu'est-ce qu'il fout avec elle ? Il pourrait avoir mille fois mieux.

Mal à l'aise devant tout ce qui sort de leurs bouches, mes muscles se tendent.

— Ne les écoute pas. Pour moi, tu es parfaite.

Sa voix cajoleuse m'apaise un peu et me donne l'assurance nécessaire pour avancer.

Une fois enfermée à l'arrière de la voiture, je relâche tout l'air contenu dans mes poumons. Être la copine d'une star aussi convoitée que mon mec ne semble pas être chose aisée.

Alors que nous nous dirigeons vers l'hôpital, je repense à tout ce que j'ai entendu.

Et si elles avaient raison ? Si je n'étais pas assez bien pour lui ?

Je suis loin d'être parfaite. Mes deux derniers mecs m'ont bien prouvé qu'il me manquait quelque chose, puisqu'ils se sont foutus de moi en menant une double vie.

Jay replace une mèche de mes cheveux derrière mon oreille, puis il pose ses doigts sur ma joue pour me forcer à le regarder.

— Je te trouve bien silencieuse.

Puis-je lui dire ce qui me tracasse ? Si je le fais, se moquera-t-il de moi ou bien essaiera-t-il de me rassurer comme tout à l'heure ?

— Princesse, dis-moi ce qui ne va pas, tu m'inquiètes.

— Je pensais juste à ce que ces filles ont dit. Je me demandais si j'étais vraiment assez bien pour toi.

Quand je le vois grimacer, mon cœur se serre. Je me doutais bien que je n'aurais pas dû lui en parler. Le silence qui s'ensuit me tue. Je voudrais qu'il me dise quelque chose, n'importe quoi, mais il semble perdu dans une réflexion intense. Je pose ma main sur la sienne pour tenter de le ramener vers moi. Le regard triste qu'il me lance me fait plonger dans un lieu morne. Je l'ai blessé et je m'en veux.

— Je pensais que tout ce que je t'ai dit depuis hier suffirait à te faire savoir à quel point tu me plais. Tu ne dois pas douter une seule seconde de ce que j'éprouve pour toi. Jamais, je ne me suis aussi senti bien depuis que je te connais. Alors, n'écoute pas ces filles qui crèvent d'envie d'être à ta place. Parce que la mienne est là, à tes cotés et je te jure que je n'ai aucune envie d'être ailleurs.

Mon cœur danse la farandole devant cette déclaration. J'en avais fortement besoin pour me rassurer après tous ces propos injuriants que j'ai entendu sur mon compte.

— Désolée. Je doute beaucoup de moi. Mes deux dernières histoires m'ont laissées sur le carreau. Parfois, je me demande ce qui cloche avec moi pour que ceux dont je tombe amoureuse me trahisse.

— Je sais ce que Shawn a fait, c'est moi qui lui ai dit de te parler. Je ne suis pas lui, je préfère me tuer que de te faire subir ce qu'il t'a fait. Jamais, je ne te mentirai ou te trahirai. Fais-moi juste confiance, Jen.

Il me paraît si sincère que je ne peux que hocher la tête.

— Tu sais quoi ? Quand on sortira de l'hôpital, je t'invite au resto et tu pourras me poser autant de questions que tu veux sur mon passé. Je te promets d'y répondre à toutes.

Devant tout son sérieux, j'éclate de rire.

— J'ai dit quelque chose de drôle ?

Il gratte sa barbe de trois jours, perplexe. Mince, même ce geste le rend terriblement sexy.

— Non, c'est ta façon de parler. Tu m'avais l'air si sérieux que j'ai trouvé ça hilarant.

— Oh, je vois ! Tu préférerais peut-être que je te dise tout ça en plaisantant ? Ou alors lorsque je te ferais l'amour ?

Quoi ? Il est vraiment sérieux ?

— Tu plaisantes, j'espère ?

— Je n'ai jamais testé de tenir ce genre de discussions en baisant, mais on pourrait essayer.

Quel idiot ! J'éclate de rire et il me suit. Ça fait tellement longtemps que je n'ai pas autant rigolé que mes zygomatiques me font mal, mais, bon sang, que ça fait du bien. Tellement que cet instant me grise. Je suis presque certaine qu'une substance illicite aurait bien moins d'effet que ce fou rire partagé avec l'homme qui fait battre mon pouls un peu trop vite.

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