11 - Jen

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Quand j'ai senti cette larme sur ma joue, j'ai fui en courant pour ne pas me montrer vulnérable devant lui. Je ne voulais pas qu'il voie à quel point parler de notre enfant me bouleverse encore, malgré les années qui se sont écoulées. Je ne sais pas comment j'aurais réagi s'il m'avait pris dans ses bras ou si j'avais lu de la compassion dans son regard. Je crois que je n'aurais accepté ni l'un, ni l'autre.

Assise à l'arrière de la limousine, j'essaie de me rattacher à n'importe quoi pour ne pas couler sous cette lame de douleur qui me submerge.

Antonio ne dit rien, il sait que je lui parlerai quand je m'en sentirai capable. En attendant, il fait ce pour quoi mon père le paye, il me conduit là où je désire. Et pour le moment, je veux juste être très loin de cette ville, de Lui, de Pete et surtout de toute cette douleur. Il m'emmène dans une petite ville côtière que j'apprécie énormément, là où je laisse fuir ma peine chaque fois que j'en ressens le besoin. De ce côté de la Manche, ce lieu est celui qui m'apaise le plus.

Je ferme les yeux et me laisse bercer par le ronronnement du moteur. Je pense à Jay et à mon réveil dans ses bras. Est-ce que mon début de matinée aurait été différente si je ne l'avais pas embrassé hier ? Sûrement, je ne me serais pas trouvée près de lui en ouvrant les yeux et, surtout, il n'y aurait pas eu cette histoire avec Pete. Néanmoins, je n'aurais pas pu éviter Shawn, car c'est en retrouvant Haley que nous nous sommes revus. Le visage de mon ex vient se superposer à celui de son meilleur ami. Mon pouls tente de s'accélérer, mais je lui interdis de le faire en pensant à notre séparation. Rien ne pourra jamais effacer cette haine viscérale que j'éprouve à son égard, même s'il n'en reste pas moins beau comme un Dieu.

Peu à peu, bercée par la voiture, je finis par m'assoupir.

— Jen !

Antonio essaie de me sortir avec tendresse de la douce torpeur dans laquelle j'ai plongé. Très lentement, je me reconnecte à la réalité. Je m'étire comme si je sortais de ma nuit, puis jette un coup d'œil aux alentours. Nous sommes arrivés à Folkestone.

— Comment tu te sens ? me demande-t-il une fois que j'ai quitté l'arrière de la limousine.

Je hausse les épaules. Que dire de plus ? Si mon réveil pourrait être considéré comme un beau rêve, les minutes suivantes m'ont rapidement plongé dans un cauchemar. Son retour dans ma vie m'a ramené loin en arrière, dans un monde endeuillé.

— Et si on allait en discuter autour d'un bon repas ? me propose-t-il.

— C'est gentil, Antonio, mais je n'ai pas très faim.

Il tire une légère moue sous cette réponse inadéquate.

Je le connais par cœur, il ne me laissera pas m'enfoncer dans la déprime et fera tout pour que je me relève très vite quoi qu'il arrive. Toujours. D'ailleurs, il n'a pas très bien accepté mon départ pour Paris, car il pensait que sa présence me suffirait pour m'en sortir. Erreur. J'avais besoin d'être loin de mon pays natal, même si ça signifiait le tenir à l'écart quelques temps.

— Non, non, non, ma belle. Tu sais que ça, ça ne fonctionne pas avec moi.

Je l'avais dit.

Il passe son bras autour de mes épaules et m'attire contre lui, pour me guider vers une petite ruelle tranquille, dans laquelle se trouve le meilleur restaurant de cette ville. Quiconque nous verrait ainsi croirait que nous sommes un couple. Pourtant, il serait très loin de la vérité. Antonio n'a toujours été qu'un ami depuis notre première rencontre. Nous n'étions à ce moment-là que de jeunes enfants. Célibataire, sa mère, la nouvelle réceptionniste de notre hôtel londonien, n'avait souvent que d'autres choix de l'emmener sur ce lieu de travail pour le garder. Nous avons sympathisé un jour où j'avais absolument tenu à passer ma journée avec mon père. Comme il ne me refusait rien, il a accepté en me faisant toutefois promettre de rester sage.

Quand nous sommes arrivés à l'établissement, j'ai tout de suite remarqué la présence de ce garçon que je voyais pour la première fois, assis seul à une table du restaurant. J'ai demandé à mon père si je pouvais aller jouer avec lui et il a aussitôt accepté. C'est ainsi que j'ai fait la connaissance du mec le plus extraordinaire de la Terre et même de l'Univers. Mon meilleur ami, Antonio Parker.

Quelques années plus tard, alors qu'il cherchait du travail, j'ai supplié mon père de l'engager. Comme il était à la recherche d'une personne qui pourrait m'emmener lors de mes sorties et qu'Antonio avait déjà son permis, il lui a offert une place de chauffeur.

Je ne sais pas ce que j'aurais fait aujourd'hui, s'il avait travaillé pour une autre entreprise. Je l'aurais sûrement supplié de poser une journée pour venir passer du temps avec moi.

— Après toi, m'invite-t-il à rentrer après avoir poussé la porte du restaurant.

Je lui fais une légère révérence pour le remercier. C'est un jeu entre nous depuis plusieurs années. Je suis la princesse et lui mon serviteur, même si je n'ai jamais réussi à le considérer ainsi, contrairement à Leslie. Pour ma sœur, il n'est qu'un employé supplémentaire.

À peine la porte franchie, l'odeur alléchante venue tout droit des cuisines me met l'eau à la bouche, malgré mon manque évident d'appétit.

Une jeune serveuse vient de suite nous accueillir, puis nous accompagne jusqu'à une table libre au fond de la salle.

— Je vous laisse les cartes, dit-elle, avec un large sourire.

Tout dans cet endroit respire la tranquillité, jusqu'au personnel. Cette ambiance bon enfant, très loin de celle des restaurants mondains que je côtoie fréquemment me plaît énormément.

Je jette un coup d'œil sur le menu et porte mon choix sur un fish and chips, tout comme Antonio. En attendant nos plats, nous sirotons un cocktail sans alcool. Mon ami porte un regard lourd sur moi, comme s'il cherchait à percer mes secrets.

— Tu veux m'en parler maintenant ? finit-il par me demander.

— De quoi ?

— À ton avis, de quoi ? Du fait que tu sois venu me chercher dans l'arrière salle et qu'ensuite tu sois sortie en larmes. Puis, quel rapport entre le leader des Diamond Angels et toi ?

Surprise qu'il puisse le connaître, j'écarquille les yeux.

Il éclate de rire, comme si ma réaction était des plus risibles.

— Qui ne connaît pas Shawn Black, le Dieu du métal ? À part toi, peut-être, mais quelque chose me dit que tu ne le connais que trop bien et de façon bien plus intime que ses fans. Je me trompe ?

L'arrivée de la serveuse me permet de gagner quelques secondes avant de répondre à cette question piège. Au moment, où elle s'éloigne, je me mets à jouer nerveusement avec ma fourchette. Antonio est mon meilleur ami, il sait tout de mes relations précédentes, sauf en ce qui concerne le père de mon enfant, je lui ai juste dit qu'il s'agissait d'un musicien et expliquée en détail les raisons de notre rupture. Mais, pas une seule fois, je n'ai prononcé le nom de Shawn. Le faire aurait été comme avaler des lames aiguisées, ça m'aurait tranché la gorge.

À présent, sa réaction, lorsqu'il va découvrir quel homme m'a brisée le cœur et mise enceinte, m'effraie.

— C'est son père, n'est-ce pas ? s'enquiert-il.

Il n'a pas besoin d'ajouter plus pour que je comprenne qu'il fait allusion à ma fille.

Je me mords l'intérieur de la joue, tout en levant les yeux vers lui. Mon langage corporel suffit à lui fournir ma réponse.

— Waouh ! Je n'en reviens pas que ce soit lui. J'ai toujours vénéré ce gars pour sa musique, mais là d'un coup, il descend de son piédestal.

Et moi, je tombe des nues en apprenant qu'il est fan de mon ex.

Un lourd silence s'abat sur nous durant quelques minutes. Antonio mange tandis que je picore. À mon avis, il est en train d'analyser ce que je viens de lui révéler. Son idole, père du bébé de sa meilleure amie. Ça doit faire beaucoup à encaisser.

— Désolé, Jen. Je suis juste un peu abasourdi par tout ça. Ça fait un choc de savoir qu'un musicien qu'on adore est un gros connard en fait. Et ce n'est pas comme si je venais de l'apprendre par la presse, cette vérité sort de la bouche de ma sœur de cœur, c'est pire.

— Quoiqu'il se soit passé entre lui et moi, tu n'as pas à remettre en cause ce qui te plaît en lui. Sa vie privée n'a rien à voir avec son côté artistique. Même moi, là-dessus, je ne pourrais pas dire que c'est un piètre chanteur et guitariste. Ce serait mentir. Il a une voix qui te tire des émotions de dingue et quand il est sur sa guitare, on dirait un magicien, tellement c'est ensorcelant.

— Tu prends sa défense maintenant ? s'étonne-t-il.

— Non, je te dis juste que tu ne dois pas confondre l'artiste et l'homme. C'est peut-être un connard de première, mais c'est un... comment tu dis déjà ?

Je me gratte le front, pour faire semblant de réfléchir, même si je me souviens très bien des termes qu'il a employés.

— Un Dieu du métal ? C'est bien ce que tu as dit, non ? le questionné-je, en plantant mon regard dans le sien.

— Oui, mais ça n'empêche pas que je le garde en travers de la gorge. Il a mis enceinte ma meilleure amie, alors qu'il menait une double vie.

Il a l'air tellement déçu de son idole, que ça me rend triste pour lui.

— Tu vas faire quoi ? me demande-t-il après quelques secondes silencieuses.

Je hausse une épaule. À vrai dire, je n'en ai aucune idée..

— Retourner chez mon père serait la solution la plus simple, mais je me suis pris la tête avec lui ce matin. Puis Leslie ne comprendrait pas et je n'ai aucune envie de lui en dire plus que nécessaire.

— Ouais, surtout qu'elle craque totalement sur ton Shawn !

Alors, comme ça, c'est lui son préféré.

Si tu savais petite soeur que ta nièce était sa fille, je crois que tu en ferais une crise cardiaque.

— Qu'est-ce qu'il s'est passé entre ton père et toi ?

Cette question me renvoie direct au début de la matinée. Mes joues prennent feu d'un coup. Honteuse de ce que j'ai fait au cours de la nuit, je n'ose même plus le regarder.

— Qu'est-ce que tu me caches encore, ma belle ? Ne me dis pas que tu as fait des abus de ton corps avec un bel inconnu dans une petite ruelle et que les paparazzi vous ont mitraillés en plein ébat.

— Tonio ! m'insurgé-je.

Il explose de rire.

— Bon, alors quoi ? reprend-il plus sérieux.

J'inspire profondément avant de tout lui raconter dans les moindres détails. En comprenant ce qu'il s'est passé avec Jayden, il recrache la gorgée d'eau qu'il venait de porter à sa bouche.

— Putain ! Après Shawn Black, il faut que tu te tapes son meilleur pote. J'ai du mal à le croire.

— On n'a pas vraiment couché ensemble. Enfin d'après ce que j'ai compris, on n'a pas vraiment été jusqu'au bout.

Il fronce les sourcils, perplexe.

— Comment ça, d'après ce que tu as compris ? Ne me dis pas qu'il t'a drogué pour te mettre dans son lit !

— En vérité, c'est plus dans mon lit que nous étions et non, il ne m'a pas drogué, mais j'étais tellement bourré que c'est le trou noir ici, réponds-je en désignant ma tête de l'index.

Il opine du chef, avant de porter quelques frites à la bouche. Je profite de son silence pour en butiner également une.

— Par contre, Pete est un gros con. J'espère ne pas avoir à le croiser, sinon j'te jure que ça va être sa fête. Toi qui tiens tant à garder ton anonymat, il vient de te balancer sous les feux des projecteurs.

Il a raison et je déteste ça. J'ai toujours tout fait pour ne pas être mis en avant et il suffit d'une soirée à laquelle, je n'avais même pas envie de me rendre pour que ce soit, malheureusement, le cas.

— Ouais, mais on va trouver une solution avec Jayden, pour que la vérité éclate au grand jour, avoué-je. Ensuite, je laisserai mon père le mettre à la porte, même si c'est dommage de perdre un bon élément.

— Décidément, t'as le chic pour te trouver des gros connards, excellents dans leur travaille.

Je pouffe.

— En effet.

Un ange passe, avant qu'il me demande :

— Donc, tu vas revoir le bassiste ?

— Ouais, on doit sortir au resto ce soir, pour voir comment on peut remédier à ce souci.

— Et du coup, finir votre nuit ?

— Antonio ! le grondé-je en plissant les yeux.

Son regard se fait insistant afin d'obtenir une réponse.

— À la base, je voulais juste prouver à Pete que je me portais très bien sans lui, qu'il n'était pas le seul type digne de mon intérêt. C'est malheureusement tomber sur Jayden Miller. Et les gens ne se sont pas gênés pour nous filmer... Même si je ne l'ai pas trouvé désagréable à regarder et qu'il sait s'y prendre avec une femme, je n'ai pas envie de plus. Si nous n'avions pas ce problème à régler, je ne sortirais certainement pas ce soir avec lui au restaurant.

Sur ce, nous terminons notre repas, avant d'aller marcher sur la plage. Tout au long de l'après-midi, Antonio cherche à me changer les idées. Nous parlons de sa copine, du futur tournoi des six nations qui va bientôt démarrer et surtout, nous jouons comme de vrais gamins.

Lorsqu'il est temps de repartir, je le remercie en le prenant dans mes bras, avant qu'il ne m'ouvre la portière. Sans lui, la journée aurait été horrible. À présent, toutes mes pensées parasites se sont envolées et je me sens aussi légère qu'une plume.

Nous arrivons à l'hôtel sur les coups de dix-huit heures. J'ai donc deux bonnes heures devant moi pour me préparer tranquillement.

À peine suis-je entrée dans ma suite que je me rends dans la chambre, afin d'y dénicher la tenue adéquate pour ce soir. Je farfouille dans mon armoire jusqu'à tomber sur une petite robe noire, ni trop sage, ni trop sexy, juste parfaite pour ce genre de repas. Je file ensuite dans la salle de bain et après y avoir fait couler suffisamment d'eau me glisse dans la baignoire. Les yeux fermés, je pense à mon futur rendez-vous. Si je ne veux pas que la nuit se termine comme celle d'hier, il va vraiment falloir que j'évite de trop boire. Jayden est terriblement sexy et sous le coup de l'alcool, je pourrais me laisser encore une fois avoir.

Après une grosse demi-heure à me prélasser, je quitte la salle de bain, pour finir de me préparer. Je suis en train de dompter mes boucles lorsque la porte de la suite s'ouvre. Cette fois, je ne suis pas surprise d'entendre Leslie m'appeler.

— Dans la chambre !

Par contre, je ne m'attendais pas à ce qu'elle déboule ici, furieuse.

— Tu m'expliques ? tonne-t-elle en me fourrant son téléphone sous le nez.

Sans même attendre ma réponse, elle lance une vidéo. La même que celle que mon père m'a déjà fait visionner.

— Tu y étais toi aussi, tu sais très bien que ça ne s'est pas passé comme ça. D'ailleurs, Pete a été...

— Oh, mais attends, tu n'as pas tout vu ! me coupe-t-elle. J'en ai encore une autre à te montrer.

Cette fois, je peux voir Shawn cogner Jayden. Le son n'est toutefois pas assez net pour que je saisisse les paroles qu'ils échangent. J'espère que ce n'est pas à cause de moi.

— Et ? fais-je seulement en haussant les épaules, comme si ça ne m'atteignait pas.

— Et ? Tu me demandes et ? Ils se sont battus à cause d'une ex de Shawn et je pense que tu sais très bien de qui je parle.

J'éclate de rire. Elle n'en a pas des meilleurs à me sortir. Vraiment ?

— Tu délires, ma pauvre !

— Dans ce cas, va dire ça à April car c'est elle qui a tout filmé. Bon, tu la connais, elle se prend pour la reine du monde et au début, elle a cru que c'était à cause d'elle qu'ils se battaient.

J'explose de rire. De plus en plus comique.

— Mais elle a très vite compris en les écoutant que c'était à cause d'une fille avec qui Shawn est sorti et qui a couché avec Jayden, poursuit-elle. Tu n'as rien à me dire.

De quoi je me mêle ? Je déteste vraiment ce genre de curiosité mal placée

— Que voudrais-tu que je te dise ? lui demandé-je

— Ça ne te dérangera pas de savoir alors que Shawn Black a passé sa nuit avec elle ?

— Qu'est-ce que ça pourrait bien me faire ?

— C'est drôle que tu dises ça, parce que regarde...

Et elle me fout une troisième vidéo sous les yeux. Cette fois, il s'agit de Shawn en train de me courir après, puis de lui et moi en train de discuter, avant que je parte en courant.

La salope ! Je vais lui démonter la tête. Mon cauchemar est en train de reprendre vie, mais très vite, je risque de ne pas être la seule à en pâtir. Si elle balance ça sur les réseaux sociaux, les commentaires risquent d'y aller de bon train sur le groupe.

Bordel de merde !

— À quelle heure devait-elle finir son service hier ? demandé-je à ma cadette, amère qu'April ait pu s'insinuer ainsi dans ma vie privée.

— Quel rapport ? Moi, tout ce que je te demande c'est de m'expliquer ce qu'il y a entre Shawn et toi !

— Dis à April que si elle diffuse ça, je trouve n'importe quel prétexte pour la foutre à la porte. Quant à ce musicien et moi, il n'y a rien entre nous...

Leslie m'observe et mal à l'aise devant son regard pénétrant, mes joues s'enflamment.

— Mais il y a eu, n'est-ce pas ?

Je me fige un instant, incapable de lui répondre.

— Jen ? insiste-t-elle, les bras croisés sur la poitrine et son pied battant son impatience.

Je pourrais lui dire que ça ne la regarde pas, mais elle ne lâchera pas l'affaire comme ça. Surtout que ce matin, elle n'a pas eu le droit aux détails croustillants qu'elle désirait.

Vaincue, je pose carte sur table et lui avoue l'importance de Shawn dans ma vie. Elle blêmit à vue d'œil et tombe, abasourdie, sur mon lit.

— Tu aurais dû me le dire bien avant, au lieu de me laisser dans le flou durant cinq ans ! Je n'en reviens pas que tu aies pu me cacher un tel truc ! Merde, Jen, tu es sortie avec le mec sur lequel je fantasme ! crache-t-elle en bondissant sur ses pieds.

Furax, elle arpente l'espace devant le lit de long en large, en soufflant à plus d'une reprise.

— Eh bien, maintenant tu arrêteras peut-être de fantasmer sur lui et de lui courir après. En attendant, je dois finir de me préparer, alors si tu veux bien sortir de ma chambre.

Elle s'arrête d'un coup devant moi et me darde un regard aussi noir que la nuit.

— Tu vas le rejoindre ? me questionne-t-elle en désignant ma robe d'un signe de tête.

— Ce n'est pas ton problème.

Quelques coups donnés contre la porte de la suite m'annoncent que mon cavalier pour la soirée vient d'arriver et je ne suis toujours pas prête. Je grogne, mécontente, tout en me hâtant de finir ma coiffure.

— Tu veux que j'aille ouvrir ?

Vu la conversation qu'on vient d'avoir, je préférerais surtout qu'elle se volatilise dans sa chambre ou n'importe où ailleurs, pour qu'elle ne puisse pas découvrir avec qui je sors ce soir. Si elle se met à croire, qu'à présent, je fréquente le meilleur ami de mon ex, elle risque de me prendre pour une grosse pétasse, qui ne vaut pas mieux que Wendy Johnson. En même temps, elle doit sûrement déjà le penser, vu qu'elle m'a trouvé en sa compagnie ce matin.

— Jen ? Je vais ouvrir ou pas ? me demande-t-elle lorsque nous entendons de nouveaux coups.

Ai-je vraiment le choix ? Je ne vais pas renvoyer Jayden m'attendre à la réception, si ? De toute façon, vu la curiosité de ma cadette, elle tenterait par tous les moyens de découvrir qui est mon visiteur. Alors autant qu'elle s'en rende compte dès maintenant. Puis, ça me laissera le temps de finir de me préparer.

— Vas-y, si tu veux.

La porte s'ouvre et j'entends Jayden saluer Leslie, avant que celle-ci me lance :

— Il ne manque plus que le batteur et tu te les seras tous tapés, Jenny. À moins que tu préfères un plan à trois avec le leader et le bassiste ?

Quoi ? Comment peut-elle sortir ça ? Et devant lui, en plus ? Serait-elle devenue folle en l'espace de quelques secondes ? Furieuse, je me précipite dans le salon et la fusille du regard.

— Qu'est-ce que tu insinues ? Que je suis une grosse pute qui se tape plusieurs mecs à la fois ?

— J'ai juste du mal à encaisser que tu m'aies menti durant des années.

Sidérée qu'elle puisse m'en tenir autant rigueur, je secoue la tête.

— Je ne t'ai pas menti. Je ne t'ai juste pas tout dit.

— C'est la même chose, tu m'as caché la vérité !

Elle quitte la chambre, en me jetant un dernier regard plein de mépris.

Pourquoi m'en tient-elle autant rigueur ? Je croyais qu'elle réagirait comme Antonio, mais non, c'est tout l'inverse.

Dépitée, je me laisse tomber sur le canapé. Jamais, je n'aurais dû l'écouter et quitter Paris. J'y étais tellement bien, loin de tout cet enfer.

— Si tu veux, on peut remettre le dîner à une prochaine fois.

La voix de Jayden me rappelle que je ne suis pas seule dans la pièce.. Mon regard se pose aussitôt sur son visage. Mes exs ne l'ont pas raté. Sa pommette porte une belle ecchymoses tandis que sa lèvre est fendue.

Tout ça par ma faute.

— Je suis désolée pour ça, déclaré-je en désignant mon visage de la main pour lui faire comprendre de quoi je parle.

— T'inquiète, j'en ai vu d'autres.

Je lui lance un sourire, avant de me relever pour aller le saluer d'une bise sur la joue. Après tout, on a bien été plus loin cette nuit, alors je peux bien me permettre un tel geste. Appréciateur, ses lèvres esquissent un sourire en coin.

— Je vais chercher mon manteau et je suis prête.

— D'accord, je t'attends.

Tandis que je me dirige vers la chambre, je sens son regard me suivre. Arrivée au chambranle, je me tourne pour le prendre en flagrant délit de mattage.

— La vue te plaît ? demandé-je, un large sourire sur les lèvres.

— Joker. Je risque de me faire tuer si je réponds.

Il paraît si sérieux, que je ne peux m'empêcher d'éclater de rire.

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