10 - Shawn

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London Hollister Hostel, voilà dans quel établissement je me trouve. Depuis que j'ai posé mes yeux sur l'un des flyers présent sur le comptoir de la réception, je n'arrête pas de penser à Jen. Et au lieu de sortir, comme prévu, avec mon pote hier soir, j'ai préféré appeler Laura, afin qu'elle me change les idées. Sauf que ça n'a pas vraiment fonctionné et j'ai mis un terme à notre histoire. Elle n'avait qu'à pas me poser ces questions de merde après tout. J'avais juste envie d'entendre sa voix, rien de plus. Elle m'a vraiment gonflé en me demandant si les anglaises étaient à mon goût et si elle devait se faire du souci ou non. Sa jalousie est devenue vraiment trop intolérable. Je ne suis pas le gars qu'elle pourra mettre à genoux, même si elle a toujours pensé y parvenir. Avec elle, je ne serais jamais un clébard qui rentrera docilement à la maison, avec la langue pendue et la queue entre les jambes. L'entendre pleurer ne m'a fait ni chaud, ni froid. Je crois que c'était fini entre nous depuis bien trop longtemps pour que ça m'atteigne.

Une fois la conversation close, je suis descendu au bar dans l'optique de m'y bourrer la gueule. Je voulais juste ne plus ressentir ce cœur qui continue de saigner lorsque je pense à mon amour perdu.

Putain, ça fait cinq ans et je n'arrive toujours pas à passer à autre chose !

Je venais tout juste d'entamer mon troisième verre lorsque la serveuse que Jay a dragué au cours du dîner est venue me demander où était mon pote. Chauffé par l'alcool, je l'ai dragué comme un gros lourd, avant de la ramener dans ma chambre. Dire que j'ai passé un bon moment avec elle serait mentir. Jamais je ne me suis autant ennuyé au pieu. Je l'ai laissé faire tout le long de notre partie de jambes en l'air, la tête complètement ailleurs, à des années de là. Actuellement, elle dort comme une bienheureuse, sa tête sur mon torse.

Je ne sais vraiment pas ce qui m'a pris de la faire monter avec moi. D'autant plus qu'elle n'a pas grand-chose d'attirant. Même sa poitrine, dont beaucoup de mecs raffoleraient, me laissent de marbre. Pour moi elle est bien trop opulente, je préfère largement les filles avec des seins ni trop gros, ni trop petits, comme ceux de Jen. Rien que d'y penser, le sang afflue vers mon sexe. April, vu que c'est son nom, doit avoir un sixième sens. À peine réveillée, elle glisse sa main vers mon érection, avant de se mettre à genoux pour m'offrir une gâterie.

Sans ménagement à son égard, je la repousse brutalement et quitte le lit. Je sors ma tenue de sport, bien décidé à aller me vider la tête en courant quelques kilomètres. Il est à peine huit heures, j'ai le temps de me taper une dizaine de bornes avant d'aller rejoindre les autres.

— Tu vas où ? me questionne-t-elle en remontant les draps sur sa poitrine, à présent gênée.

Ça me fait bien rire. Comme si je ne l'avais pas vu durant la nuit jusqu'à ce que Morphée m'appelle à lui.

Ce que je retiens surtout, c'est cette question. On n'est pas maqué à ce que je sache ! D'où elle se permet de me demander des trucs de ce genre ? Je lui ai juste donné le droit de me chevaucher. Point barre. D'ailleurs vu l'heure à laquelle on est monté, elle risque d'avoir quelques ennuis si sa direction apprend qu'elle a quitté son service plus tôt que prévu. En même temps, je n'en ai rien à cirer.

— Si on te demande, tu diras que tu n'en sais rien. Par contre, moi je sais que tu vas attraper tes fringues et virer ton gros cul de ma chambre !

Époustouflée par ma repartie, elle me fusille du regard et ouvre sa bouche avant de la refermer aussitôt. Pas perturbé pour un sou, je lui lance un sourire mesquin, qui la fout encore plus en rogne. Là, non plus, ce n'est pas mon problème. Des filles comme elle, je peux en avoir à la pelle. Alors une de plus ou une de moins, ça ne fait aucune différence.

— Connard ! me lance-t-elle en se levant à la quatrième vitesse pour récupérer ses sous-vêtements et sa tenue de serveuse éparpillés à travers la chambre.

Elle les enfile à la hâte et se barre comme si je venais de lui foutre le feu au cul.

Une fois seul, je récupère mon Iphone et passe un coup de fil à Tom, afin qu'il me suive. Son jumeau est un peu moins running, il préfère largement soulever des poids que de me courir derrière pour assurer ma sécurité. Avant de quitter ma chambre, j'attrape mes Airpods et lance un bon morceau de métal. En longeant le couloir, je passe devant la suite de Jay et frappe à sa porte, dans l'espoir que ce petit con accepte de se joindre à moi. Ancien boxeur, il adore se maintenir en forme en courant ou en allant cogner sur des sacs de frappe lorsqu'il en a à disposition. Sa présence me donne la force de toujours me surpasser et c'est ce dont j'ai besoin ce matin pour faire le vide dans ma tête.

J'attends quelques secondes, mais soit il dort encore, soit il se trouve encore dans les bras de la nana qu'il s'est dégoté pour la nuit. Le jour où il se casera sérieusement, les poules auront des dents. S'amuser a toujours été son maître mot. Je crois que le divorce de ses parents l'a trop marqué pour qu'il ait envie de se fixer avec quelqu'un.

Voyant qu'il ne m'ouvrira pas, j'abandonne et pars rejoindre Tom qui m'attend déjà devant la réception. Cette fois, j'évite de poser mes yeux sur les dépliants qui me rappelleraient inéluctablement ce que je désire oublier. Dès que j'arrive à hauteur de mon garde du corps, je claque son épaule pour le saluer. Ce mec est vraiment imposant. Il me dépasse de deux bonnes têtes et doit peser une bonne vingtaine de kilos de plus que moi. Anciens militaires, son jumeau et lui se sont reconvertis sans la protection rapprochée des stars, après que l'un d'eux ait failli crever lors d'une mission. Par contre, je ne sais jamais duquel des deux il s'agit.

— Prêt ? lui demandé-je.

— Toujours, me répond-il avec un large sourire scotché sur ses lèvres.

Dès que nous franchissons la porte, je tombe sur plusieurs groupies. C'est vraiment ma veine ! D'un signe de tête, je demande à Tom de s'en occuper. Je n'ai franchement pas envie de me prêter au jeu ce matin. Elles ne pourraient que pâtir de ma mauvaise humeur. Toutefois si elles se mettent à me courir après, ça pourrait être une bonne source de motivation. Mon garde du corps gère l'affaire en quelques secondes à la perfection, en les empêchant de m'approcher. Sans perdre de temps, je m'échauffe en courant à petites foulées, puis j'accélère le rythme. La musique diffusée à travers mes Airpods me déconnecte de toutes pensées. Tant mieux, c'est ce que je recherchais en partant.

Lorsque je reviens à mon point de départ, je suis bien plus détendu que lorsque je suis parti. Avant de franchir les portes, je signe quelques autographes. Certaines tentent de me draguer, je les laisse faire, amusé. Surtout que celles qui restent ne sont que des gamines. Quatorze ou quinze ans peut-être. Des petites séductrices en herbe, poussées par leurs hormones qui commencent à les titiller. Parfois, même si c'est rare, je trouve ça mignon.

— J'adore ta musique et t'es vraiment trop beau.

Je cherche qui vient de me tenir ses propos, d'une petite voix enfantine. En baissant les yeux, je découvre une petite rousse qui ne doit pas avoir plus de neuf ans. Ses petites taches de rousseur me font littéralement craquer. Elle me fait penser à l'une de mes nièces. Je cherche sa mère du regard, avant de m'accroupir devant la fillette.

— Alors comme ça, tu aimes ma musique et je suis trop beau ?

Elle secoue la tête en signe d'approbation.

— Je peux te faire un bisou ?

Son innocence me fait largement sourire. J'aimerais tellement rencontrer plus souvent ce genre de fans qui ne pensent pas qu'à se retrouver dans mon lit après avoir discuté un peu avec moi.

— Avec plaisir.

Elle pose une bise sur ma joue, avant de se précipiter vers sa mère. Ce moment vient de finir de me détendre complètement.

En regagnant ma chambre, je suis complètement zen. J'attrape mon Iphone et adresse un message groupé à mes potes afin de savoir où ils se trouvent.

Dan : Haley et moi sommes déjà au resto.

Comme mon meilleur pote ne semble pas daigner répondre, j'envoie un nouveau message à Dan.

Shawn : T'as vu Jay ?

Dan : Non, pas depuis hier. À mon avis, il a bien dû profiter encore cette nuit.

Comme d'hab', quoi ! Rien d'étonnant.

Shawn : Ok. Je prends une douche et je vous rejoins. Notre Don Juan aura peut-être refait surface d'ici là.

Je pose mon téléphone sur le meuble en acacia qui décore la suite, puis me dirige dans la salle d'eau. Je reste un moment sous la douche pour détendre mes muscles, avant de retourner m'habiller dans la chambre. J'enfile un de mes jeans noirs déchirés et un t-shirt blanc moulant. Je jette un coup d'œil dans le miroir et, satisfait de mon look, pars rejoindre mes potes au resto de l'hôtel.

Au moment où j'y arrive, j'entends Haley prononcer le prénom de la femme dont je rêve depuis des années. Je reste sur place et suis mon amie du regard. Quand mes yeux tombent sur elle, ma respiration se coupe et mon cœur cesse de battre. Pas un seul instant, je n'aurais cru qu'elle pourrait être encore plus belle que dans mes souvenirs et pourtant c'est le cas. Vêtue d'une longue jupe kaki et d'un chemisier blanc, elle est resplendissante. Je meurs d'envie de dénouer le lien qui retient ses cheveux pour glisser mes doigts dans ses jolies boucles et me repaître de leur odeur.

Je reste en retrait afin de l'observer à loisir. J'ai peur qu'elle découvre un peu trop vite ma présence dans ces lieux et qu'elle me rejette comme la dernière fois qu'on s'est vus. Acceptera-t-elle de me parler ou préférera-t-elle me tenir à l'écart ? Cinq ans plus tôt, elle m'a bien fait comprendre qu'elle ne voulait plus jamais me croiser. Pour ne pas m'enfoncer sous ce sale souvenir, je me raccroche aux temps qui s'est écoulé. Durant ces longues années, elle a pu oublier sa rancœur à mon encontre. Il y a peut-être un infime espoir pour qu'elle me laisse l'approcher de nouveau. Si seulement ça pouvait être le cas, je pourrais avoir une toute petite chance de la reconquérir.

Égaré dans mes pensées, je viens de les perdre du regard. Je fouille la salle des yeux et finis par les retrouver à quelques tables d'ici. Dan et Jay y sont déjà installés et ce dernier porte un regard interrogateur à Haley, avant d'en poser un complètement indéchiffrable sur mon ex. Il aurait vu un fantôme, il n'aurait pas réagi différemment. Est-ce à cause de moi ou bien y a-t-il autre chose derrière ? Je ne l'ai jamais vu aussi gêné devant une fille et pour la première fois depuis qu'on se connaît, je ne suis pas foutu de lire en lui. J'avoue que ça m'inquiète un peu et encore plus lorsque son regard percute ma présence. Je le vois blêmir, au point qu'il devient encore plus blanc que mon t-shirt.

Je m'avance vers eux, tout en évitant d'être dans le champ de vision de Jen. Je ne veux pas qu'elle parte en courant et que sa présence ne ressemble plus qu'à une douce chimère.

— ... la dernière fois qu'on s'est vu, tu étais enceinte, non ? Il doit être grand à présent. Ça lui fait quoi ? Cinq ans ? entends-je Haley prononcer au moment où je suis assez proche pour que sa voix me parvienne.

Je m'arrête net, terrassé par ces propos. Cinq ans ? Un gosse ? Mon gosse ? Non, ça ne peut pas être possible ! Elle m'en aurait parlé si elle avait été enceinte de moi. Elle n'aurait pas pu me le cacher. Je ne peux pas y croire ! Je ne veux pas y croire !

Je rassemble mes esprits avant de demander d'une voix assurée :

— De quel bébé vous parlez ?

Jay noue ses mains sur sa nuque tandis que Jen reste stoïque. Ma présence semble les troubler autant l'un que l'autre. Si je peux le comprendre pour mon ex, ce n'est pas du tout le cas de mon meilleur pote. Est-ce lui le père ? M'aurait-elle trompé et trouvé un prétexte pour me larguer ? Non, ça ne colle pas, sinon ils auraient fini ensemble. Jay n'aurait jamais pu me cacher un tel secret.

— Shawn Black, sort Jen, méprisante.

Sa voix aussi froide que les plaines sibériennes et son regard digne du plus puissant blizzard hivernal me heurtent avec violence.

Je tente de passer outre cette nouvelle blessure qu'elle m'inflige, pour ne pas lui montrer à quel point cela m'atteint. Sans la quitter des yeux, je la salue à mon tour, d'une voix aussi neutre que possible. Pas simple, vu la violence des émotions qui me bousculent.

Quand elle me toise, je ne suis plus qu'un putain de château de cartes sur lequel on souffle un peu trop fort. Mes espoirs et mes rêves se brisent telles des brindilles un peu trop fragiles. Je n'ai pas besoin de plus que ce regard plein de dédain pour savoir qu'elle m'en veut toujours et qu'elle aurait préféré ne jamais me revoir. Je pensais ne plus autant souffrir cinq ans après et pourtant ça fait toujours aussi mal de savoir que la personne que l'on aime désire vous tenir éloigner d'elle.

Elle porte son regard vers Jay et lui demande de la suivre. Docile, mon pote se lève. Il me surprend de plus en plus et je déteste ça. Depuis quand sont-ils proches au point qu'il lui obéisse sans poser de questions ? Il passe à côté de moi et me donne un coup viril dans l'épaule, genre de dire qu'il est de mon côté. Pourtant j'ai du mal à le croire quand je les vois discuter un peu plus loin, à l'abri des oreilles indiscrètes.

— Où est Jay ?

En gueulant notre manager me sort du monde terne dans lequel je m'étais enfermé. Je pose un regard interrogateur sur lui. Jamais, je ne l'ai vu aussi furieux. Il l'est tellement que ses joues en sont cramoisies.

Qu'a donc bien pu faire mon pote pour que Leo réagisse ainsi ? Ça doit vraiment être grave.

— Il arrive, lui répond Haley en lançant un signe de tête dans la direction où il se trouvait avec Jen.

En temps normal, j'aurais demandé à notre manager des explications sur sa colère, mais là je ne suis pas du tout dans mon assiette et je suis incapable d'ouvrir ma gueule.

— Tu m'expliques tes conneries, Jayden Miller ?

— Quelles conneries ? s'étonne mon pote.

— Fous-toi bien de ma gueule, on risque de se faire virer d'ici par ta faute ! Tu crois qu'un hôtel de ce standing se trouve en un claquement de doigt ! Putain, t'imagine ce qu'il va falloir que je fasse pour pouvoir vous reloger en peu de temps !

Dan, Haley et moi nous regarderons, dans l'incompréhension la plus totale.

— Je ne vois absolument pas de quoi tu parles !

— Vraiment ? Et ça ? le questionne Leo en lui tendant son portable.

Jay perd des couleurs au fur et à mesure des secondes, avant de tendre le portable à notre manager dans un geste rageur.

— Ça ne s'est pas du tout passé comme ça. Ce con l'a insulté et m'a cogné, avant que je lui rende son coup ! Putain, j'en ai encore la marque !

Et en effet, maintenant qu'il le dit, j'aperçois un léger hématome sur sa pommette.

— Quelqu'un nous explique ? finis-je par m'enquérir.

— Non ! Ils n'ont pas besoin de savoir !

Depuis quand me cache-t-il des trucs ? Je peux à la limite comprendre que s'il a fait une grosse connerie, il n'ait pas envie que Dan et Haley soit au courant, mais moi... Merde, quoi ? On est censé être comme des frères, sans secrets l'un pour l'autre. Depuis que je l'ai vu au côté de Jen, son attitude me paraît de plus en plus louche. J'espère que ce n'est pas ce que je pense. Si ce con a posé une seule main sur elle, pote ou pas, je vais l'éclater !

— Comme si ton pote n'avait pas eu assez de déboires avec la presse pour son crime, il a fallu qu'il embrasse la fille du propriétaire de l'hôtel, avant de cogner son mec. Tiens, regarde !

Une putain d'arme blanche se plante dans mon bide et remonte très lentement jusqu'à ma poitrine, où quelqu'un s'amuse à l'enfoncer et la ressortir, pour l'enfoncer encore plus fort à chaque nouveau coup.

Je vais me réveiller ! Ça ne peut qu'être un sale cauchemar ! Jay ne m'aurait jamais fait ça ! Il sait que je tiens encore à elle.

Tout ça me semble tellement énorme que j'ai besoin de preuve pour le réaliser. J'attrape le portable de Leo et visionne cette vidéo, qui me retourne l'estomac dès les premières images. Elle, lui, en train de s'embrasser. Et vu la façon dont elle se colle contre son torse, dont elle l'attire vers elle, elle en veut plus. Jusqu'où sont-ils ensuite allés ? Je joue nerveusement avec mon piercing labial tandis que mon autre poing se serre convulsivement. Je lève les yeux vers mon pote, qui n'ose même pas soutenir mon regard.

Je hoche lentement la tête, tellement déçu et écœuré. Je ne lui en veux pas à elle, car elle ne le connaissait pas. Mais merde, lui a vu des photos d'elle dans l'avion, il aurait dû la reconnaître !

— T'as des trucs à te reprocher ? lui demandé-je d'une voix atone.

— Ce n'est pas ce que tu crois !

Il est sur la défensive. Il a bien des trucs à se reprocher. S'il a été plus loin que ce baiser, je vais me le faire ! Rien à foutre que ce soit un ancien boxeur. Il n'aura pas le temps de voir mon coup partir.

— Shawn, j'te jure que ce n'est pas ce que tu crois ! se défend-il une nouvelle fois, sous mon regard menaçant.

— Merde ! entends-je Haley souffler.

Je me tourne vite fait vers elle. Le portable de Leo se trouve encore dans la main de Dan. Très bien, ils savent à présent quel genre de mec est mon pote.

— T'étais où ce matin ? lui demandé-je, hargneux.

Il secoue la tête. Soit il joue au con, soit il fait semblant de ne pas comprendre. Dans les deux cas, ça ne fait qu'augmenter la rage qui coule dans mes veines. Furax, je bondis sur mes pieds et me place juste sous son nez.

— Je suis venu frapper à ta porte, avant d'aller courir. Alors, tu. Étais. Où. Ce. Matin ? insisté-je.

Cette fois, ma voix vibre de colère.

— Dans sa chambre.

Dans sa chambre ? J'ai bien entendu ? Il a passé sa putain de nuit dans sa chambre ?

Ma vision s'assombrit, au point de ne voir que l'ennemi à abattre. Se faire trahir par son meilleur pote est un poison mortel, mais avant de crever, je vais lui déglinguer la tête. Mon poing part sans que je ne tente de le retenir et s'abat dans son estomac. Le souffle coupé, il se plie en deux.

— On a rien fait, m'avoue-t-il avec difficulté.

Je ricane. Lui, le roi de la baise n'a rien fait avec une meuf aussi canon que Jen dans un lit. Il se fout vraiment de ma gueule ! Je lui balance un crochet qu'il n'a pas le temps de voir venir. Sous ce coup, il tombe à la renverse.

— Ça suffit ! tonne Leo. On a bien assez d'emmerdes !

— J'te jure, mec que c'est vrai. Je n'ai pas couché avec elle, on a juste flirté et on s'est endormi.

Je m'avance vers Jay, prêt à lui foutre un coup de pied dans la tronche pour qu'il ferme sa gueule.

— Je ne savais pas que c'était elle, ajoute-t-il avant de cracher un peu de sang.

Je ne l'ai pas raté.

— Va te faire foutre, Miller ! craché-je. Tu mens ! T'as vu les mêmes photos que moi dans l'avion.

— Ouais, j'ai vu les photos, mais je ne la connaissais pas et elle n'était pas vêtue, ni coiffé pareille hier. Je ne l'ai pas reconnue.

— C'est bon, les gars, on se calme ! intervient Dan. Peut-être que si tu nous l'avais présentée quand vous étiez ensemble, Jay aurait pu la reconnaître en la voyant hier.

Alors, maintenant, ça va être de ma faute, si Miller baise mon ex !

— Jay, t'as l'intention de la revoir ? demande Dan en se tournant vers lui.

Il met trop de temps à répondre, putain !

— Non, finit-il par dire.

Foutu mensonge ! Je mettrais ma main à couper qu'ils se sont fixés un rencard lorsqu'ils discutaient loin de nous.

— Un conseil, mon pote, ne t'approche plus d'elle ! Jamais ! grondé-je.

D'un hochement de tête, il accepte ma requête. Pourtant, quelque chose me dit qu'il ne va pas la laisser filer comme ça. J'espère qu'hier, il déconnait vraiment quand il nous a fait comprendre qu'il avait encore craqué sur une nana ou alors espérons que c'en était une autre. Sinon, lui et moi sommes dans une belle merde.

Maintenant que ce problème est à moitié réglé, je vais pouvoir me concentrer sur celui qui m'a interpellé lorsque je les ai rejoints. Je veux savoir de qui est ce gosse et si c'est le mien, je veux le rencontrer ! Pour ça, il faut que je trouve Jen, même si je ne sais pas comment m'y prendre.

Au moment où j'envisage les multiples possibilités qui s'offrent à moi pour obtenir son numéro de chambre, elle passe dans la salle accompagnée d'un mec vêtu d'un smoking. Le gars a son bras sur ses épaules et elle a sa tête tout contre son torse.

Alors, c'est ça ? T'es devenue ce genre de filles qui a besoin de plusieurs mecs depuis notre rupture ? Jay, le type sur la vidéo et maintenant lui ! Je vais devoir lutter contre combien de mecs pour pouvoir te reconquérir, chaton ?

— Jen, attends ! lancé-je.

Au lieu de s'arrêter, elle accélère le pas, contourne rapidement la réception avant de rentrer dans un long couloir. Poussé par le désir de savoir qui est ce gamin, je trottine derrière elle.

Son mec s'arrête, lui murmure quelque chose à l'oreille, avant de la laisser seule au milieu du couloir.

— Qu'est-ce que tu veux, Shawn ?

Devant elle, je n'en mène pas large, mais il faut que je l'affronte si je veux obtenir des réponses à mes questions.

— Le bébé, c'est le mien ?

Elle triture ses ongles, nerveuse.

— Oui, souffle-t-elle.

Durant un instant, je reste comme un con à la fixer. Mon pouls vient de s'accélérer. Je n'arrive pas à croire que je suis père. Pour quelles raisons ne m'a-t-elle rien dit ?

— J'aimerais le voir.

— C'est impossible.

Quoi ? Pourquoi ça ? J'ai peut-être été le roi des connards avec sa mère, mais c'est mon gamin également, elle n'a pas le droit de me tenir éloigné de lui.

— On était deux, Jen. J'ai le droit de le connaître.

Un voile de tristesse recouvre son regard et la suite me fait déjà peur.

— Et j'étais seule quand elle s'est envolée rejoindre les anges.

Je viens à peine d'apprendre que j'étais père et elle m'annonce que notre enfant n'est plus de ce monde. Je reste pantois, sans savoir quoi répondre, affligé par cette nouvelle. Elle m'observe un instant, jusqu'au moment où une larme glisse sur sa joue. Elle la chasse aussi vite qu'elle est arrivée, avant de s'enfuir loin de moi en courant. J'aimerais tellement la rattraper, lui dire que je suis là, que je l'aime toujours, lui promettre d'avoir une grande famille si elle le souhaite, mais le poids sur mes épaules m'empêchent d'effectuer le moindre pas.

Depuis plusieurs minutes, le monde s'est mis à tourner à l'envers. Mon ex, Jay et le décès de mon bébé. Tout ça c'est beaucoup trop pour moi. Je me laisse tomber le long du mur et reste là je ne sais combien de temps à ressasser tout ce qu'il vient de se passer. 

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