50 - Lucy/Logan

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Lucy

Fatiguée. Horriblement fatiguée. Jamais de la vie, je me suis sentie aussi épuisée en me réveillant. Mes paupières papillonnent quelques secondes, mais elles sont si lourdes que je ne parviens pas à les ouvrir complètement. Je ne me souviens plus du tout de ce qu'on a fait hier soir pour que je sois aussi morte ce matin.

— Pas de ça avec moi, mademoiselle Baldwin ! Ouvrez les yeux !

Cette voix claque avec tant d'autorité que mes yeux se mettent à brûler. Pourquoi me parle-t-on comme si je venais de faire une grosse bêtise ? Je n'ai rien fait. En plus mon cerveau semble me jouer un drôle de tour, j'ai cru entendre mademoiselle Baldwin. Je dois encore être en train de rêver.

— Je ne vous laisse pas le choix ! Alors, réveillez-vous !

Pour ne plus avoir à entendre cette voix digne d'un sergent-major, je lutte de toutes mes forces pour que mes paupières m'obéissent. Quand j'y parviens enfin, mes yeux se posent sur le plafond.

— Très bien. Je repasserai vous voir dans quelques temps.

Du coin de l'oeil, j'aperçois une femme en blouse blanche s'éloigner de moi. Dès qu'elle n'est plus là, je referme les yeux. C'est cet instant que mon cerveau choisit pour se poser des milliers de questions. Qui est-elle ? Où suis-je ? Est-ce que je dors encore ?

Attirée par le bip régulier d'une machine sur ma gauche, je rouvre mes yeux et tourne la tête. En découvrant le moniteur auquel je suis reliée, je réalise que je suis dans une chambre d'hôpital. Qu'est-ce que je fais là ? Je ne me souviens de rien. Dans ma tête, c'est le black-out total. Mon dernier souvenir remonte au moment où j'ai appris que Peter allait venir me chercher. Et ensuite... rien. Rien de chez rien. Le noir. Le vide. Le néant. Suis-je encore à Albuquerque ou déjà en Australie ? J'ai beau me creuser la cervelle, impossible de le savoir. J'ai comme un espèce de brouillard qui m'empêche de faire remonter mes derniers souvenirs.

Affolée face a l'idée que je sois à des milliers de kilomètres de Logan, mon pouls s'emballe et cette stupide machine passe aussitôt en état d'alerte. Une larme brûlante roule sur ma joue tandis que des hommes et des femmes se précipitent à mon chevet. Un poids énorme me comprime la poitrine, au point de ne plus laisser l'air pénétrer dans mes poumons. Une voix masculine me parle avec douceur pendant qu'on me pose un masque sur le visage. J'inspire lentement comme on me le demande. Peu à peu, je retrouve mon calme, même si dans ma tête, ça reste le chaos total.

— Comment vous sentez-vous, mademoiselle Baldwin ? me questionne une femme.

Encore une fois, j'ai l'impression que mes oreilles me jouent un drôle de tour. Pourquoi m'appelerait-on par le nom de mon amour ? Surtout si je suis, comme je le pense, de l'autre côté de la planète.

Je tourne lentement la tête dans sa direction pour porter mes yeux sur celle qui se tient à mes côtés. Un sourire bienveillant illumine les traits de cette femme aux cheveux grisonnants. À vue d'oeil, je dirais qu'elle a une cinquantaine. Je tente de lire son nom sur le badge qu'elle porte au niveau de la poitrine. Je dois m'y reprendre à plusieurs fois pour discerner les lettres " dr ". Quant au reste, j'abandonne, incapable de faire la mise au point visuel nécessaire. Paniquée à l'idée de ne plus jamais pouvoir lire correctement, mes mains se mettent à trembler. Le moniteur émet cette fois un son strident qui me fait grincer des dents.

Surprise, mes yeux s'affolent dans tous les sens.

— Ce n'est rien. Évitez juste de trop bouger, me rassure la médecin en replaçant correctement le capteur sur mon doigt.

— Où…

J'aurais aimé lui demander de quel côté de la planète on se situe, mais au moment où le premier mot a franchi mes lèvres, une terrible douleur a arraché ma gorge.

— Je vais vous ausculter un peu et ensuite j'irai appeler votre mère.

Ma… Ma quoi ? Non, non, non ! Elle ne peut pas appeler ma mère ! Je ne veux pas que Charlie me retrouve. Que me fera-t-il s'il remet la main sur moi ? Je n'ose même pas imaginer ce qu'il pourrait me faire. Je tente de hurler à cette femme de ne pas la contacter. Comme je n'y parviens pas, je me débats comme une possédée pour arracher ces fils qui me relient au moniteur. Je dois partir, jamais je ne rentrerai à la maison.

Totalement tétanisée, je ne me rends même pas compte que je suis en train de griffer le médecin. Je veux juste fuir l'horreur qui m'attend chez moi.

— Calmez-vous, mademoiselle ! m'ordonne l'homme en blouse blanche.

Pour que je cesse de me débattre, il m'immobilise sur le lit, bloquant avec force mes poignets contre le matelas. Des larmes roulent sur mon visage.

— C'est quoi ce putain de bordel ! tonne une voix que je reconnaîtrais même au milieu d'un millier d'autres.

Mon coeur se met à battre de nouveau en sachant qu'il est là. Il ne laissera personne me faire du mal et les empêchera de contacter ma mère. Je ne suis pas à des milliers de kilomètres de lui, sauf si mon cerveau a décidé de me jouer un sale tour.

— Qu'est-ce que vous êtes en train de lui faire, putain ?

Sa colère gronde comme un roulement de tonnerre. Je le connais par coeur et si l'autre ne me lâche pas, il risque d'exploser d'une seconde à l'autre.

— Écoutez, monsieur, lui répond la femme, mademoiselle Baldwin fait une nouvelle crise de panique. Elle tente d'arracher ses fils. Nous ne faisons que notre travail.

Un lourd silence seulement interrompu par le bip du moniteur s'abat. Je crains une seconde qu'il décide de les laisser faire.

— Laissez-moi lui parler. Je suis certain de pouvoir la calmer. C'est ma copine, on se connait depuis des années.

Un nouvel ange passe avant que l'équipe soignante décide de lui octroyer une chance de me ramener à la raison. Ce sont leurs termes exacts. Je ne suis pourtant pas folle, juste totalement terrorisée à l'idée de me retrouver près de ce monstre qui a tenté de me violer.

Dès que l'équipe médical s'éloigne, mes yeux peuvent enfin se poser sur lui. Je crois rêver tant il est beau. Ça ne fait peut-être pas longtemps que je suis réveillée, pourtant j'ai l'impression de ne pas l'avoir vu depuis des jours et des jours. Un sourire en coin qui fait saillir sa pommette sur les lèvres, il s'avance vers moi sans me lâcher du regard. Alors qu'il n'est plus qu'à quelques centimètres de moi, je constate les marques de coups sur son visage. A-t-on eu un accident pour que je me retrouve dans ce lit et qu'il porte des traces de blessures ?

Logan

Mon cœur devient fou alors que je m'avance vers elle. Elle est là, réveillée, ces yeux qui m'ont tant manqué plongés dans les miens. Je m'approche d'elle en silence tant j'ai la trouille que cet instant magique m'échappe. Une larme roule sur ma joue alors que je m'assois à côté d'elle. Toujours sans un mot, je pose mes mains sur ses joues, j'accroche un instant son regard au mien, avant que ma bouche vienne frôler la sienne. Mon baiser est des plus doux, je ne veux pas la brusquer. J'ai la trouille qu'elle me fuit si je brûle les étapes. Néanmoins, j'ai besoin de ce simple contact pour me dire que tout ça est réel, que ce n'est pas un rêve. Qu'elle est là, sortie d'affaire. Que notre cauchemar peut enfin prendre fin. Mes larmes se déversent sur ses lèvres et mon baiser doit avoir un goût salé désormais. Je voudrais pouvoir cesser de chialer comme une gonzesse, mais je suis tellement soulagé que je n'y parviens pas.

— Tout va bien, je suis là, lui dis-je en me redressant sans la quitter des yeux.

Je n'arrive toujours pas à croire qu'elle soit bien réveillée. Ces six derniers jours, j'ai cru devenir fou chaque fois que j'ai pensé la perdre. Et c'est arrivé à plus d'une reprise. Elle était tellement faible qu'elle a même fini intubée après avoir oublié de respirer. Mercredi, quand les médecins nous ont annoncé leur verdict, j'ai perdu tout espoir de la revoir de ce côté. Je me suis même fait à l'idée que j'allais quitter ce monde dans les prochains jours. Mon plan était simple, récupérer l'arme dans la chambre de mon père et me tirer une balle dans la tête. Je sais que j'aurais eu le cran, mais maintenant, tout ça est derrière moi, car elle est là, belle à en crever, malgré son visage encore émacié. Elle pourrait être totalement défigurée qu'elle resterait, pour moi, la fille la plus jolie de l'univers.

— pou…res.

Sous ces mots incompréhensibles, j'arque un sourcil, avant qu'elle ne me fasse capter ses pensées en séchant mes larmes du bout des doigts. Sous cette agréable caresse, je ferme les yeux. Mon cœur est au bord de l'implosion tant il est heureux. Il bondit dans ma poitrine, fait des saltos avant et arrière. Mon pouls rate des battements à chacune de ses pirouettes.

— Tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureux que tu sois réveillée ! lui avoué-je en rouvrant mes paupières pour venir plonger mes prunelles dans les siennes.

Elle affiche une drôle de moue, comme si elle était un peu désorientée par ma révélation, alors j'ajoute :

— Ça fait six jours que tu dormais.

Ses sourcils se froncent et elle tente de parler, mais encore une fois, ce n'est que du yaourt qui franchit ses lèvres. D'une main sur sa gorge, elle me fait capter qu'elle a mal. Je hoche la tête pour lui faire comprendre que j'ai saisi le truc avant de reposer mes lèvres sur les siennes. Putain, qu'est-ce que ça m'a manqué ! J'ai hâte qu'elle se rétablisse pour le lui prouver de toutes les façons possibles. Même si je me doute bien qu'après tout ce que ces connards lui ont fait, elle ne me laissera pas l'approcher aussi facilement qu'avant.

— Pourquoi tu étais paniquée ?

La lueur dans son regard change brusquement. Ses pupilles s'agitent dans tous les sens tandis qu'elle tente de me repousser.

— Eh ! Eh, bébé, calme-toi ! Dis-moi ce qui ne va pas.

Quel que soit le problème, je suis là et je ne laisserai plus jamais personne lui faire du mal. Avec douceur, mes doigts caressent son visage pour lui faire entendre le fond de mes pensées.

Elle me remontre sa gorge pour me dire qu'elle n'est toujours pas foutu de me causer. Mon cerveau se met, alors, en branle et réfléchit à toute allure pour trouver une solution afin de trouver un moyen de communiquer. Si je ne le fais pas, je risque de la voir se lever et s'écrouler sous mes yeux. Elle est encore faible, ça se voit à son teint blafard.

Puis, après plusieurs secondes,la lumière fait jour. Elle pourrait se servir de mon téléphone.

D'un bond, je me redresse pour l'extraire de la poche arrière de mon fut, avant de le lui tendre. Un doux sourire s'affiche sur ses lèvres lorsqu'elle l'allume. Sûrement à cause de la photo de nous deux qu'elle doit voir. Quand, elle me le rend, je fronce les sourcils. Avec des signes, elle finit par me faire capter qu'elle n'arrive pas à le déverrouiller. Pourtant, c'est étonnant, puisqu'elle connaît mon code. Je le débloque avec l'aide de mon empreinte et le lui redonne.

— Tu devrais écrire ce que tu veux me dire.

Un doux sourire sur sa sublime bouche, elle accepte d'un signe de tête.

À plus d'une reprise, j'aperçois de l'énervement dans son regard alors qu'elle pianote sur mon clavier. À un moment, elle fait même mine de balancer mon téléphone tant elle semble gaver. Je change de position pour pouvoir passer mon bras autour de ses épaules. En voyant la suite de lettres incompréhensibles qu'elle a tapées, je me mets à me marrer. Je ne suis pas sorti de l'auberge. C'est indéchiffrable.

— Prends ton temps, bébé. Je te promets que personne ne te fera du mal, tant que je serai là.

Je pose un baiser sur sa tempe pour l'en convaincre.

Au bout de plusieurs secondes, le mot " mère " apparaît sur mon écran. Encore une fois, je me fous à cogiter rapidement pour tenter d'éclaircir son message. À force de me creuser la cervelle, je finis par résoudre l'équation.

— Tu crois qu'ils veulent appeler ta mère ?

Elle hoche frénétiquement la tête pour acquiescer, avant d'écrire le mot "dit" sur mon smartphone.

— Ce n'est pas ta mère, mais la mienne qu'ils vont appeler, mademoiselle Baldwin !

Devant son étonnement, j'éclate de rire. Outrée par mon comportement, elle me donne un petit coup dans l'estomac et je ne peux pas m'empêcher de me marrer encore plus. Putain, c'est trop bon de la retrouver !

*********************

Hello !

Je voulais juste vous informer que mes prochains chapitres arriveront un peu moins vite. Non, seulement, je reprends le travail demain après une semaine d'arrêt, mais en plus je suis malade, donc j'ai un peu plus de mal.

En tout cas, je tenais à remercier tous ceux qui lisent, votent et me laissent des commentaires. Ça me fait plaisir de voir que cette histoire fonctionne toujours.

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