26 - Lucy

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Nous venons à peine de franchir le seuil de la porte qu'une véritable furie se jette sur nous. Deb ne semble pas très apprécier notre retard. Nous avions promis de revenir pour dix-huit heures et, à en juger à sa réaction excessive, nous devons avoir une bonne demi-heure de retard, voire plus.

— Bon sang, vous étiez passé où tous les deux ? Ne me dites pas que la séance de ciné a duré aussi longtemps !

Pour confirmer mes doutes, j'attrape le bras de Logan et retrousse sa manche afin de lire l'heure sur sa montre. C'est bien ce que je disais, nous sommes vraiment à la bourre. Il est dix-neuf heures.

— Alors ? s'impatiente ma meilleure amie.

— Ça ne te regarde pas, p'tite sœur !

Il n'y a rien de méchant dans son ton, il n'a seulement pas envie lui dire comment nous avons tué le reste du temps et je le comprends. Moi non plus d'ailleurs.

Pourtant, quand elle pose ses yeux sur moi, je sais qu'elle va me cuisiner. Je vais devoir baratiner un peu, pour qu'elle ne s'attarde pas trop sur le sujet. Pour le moment, je refuse de partager avec qui que ce soit ce que je vis avec son frère.

Bon, d'accord, on a rien fait de mal. Après le moment un peu glauque qu'on a partagé à notre arrivée ici, on a discuté de tout et de rien. Il m'a parlé du dernier match et de son jeu pourri. Je n'ai pas pu retenir mon rire quand il m'en a expliqué la raison. Comment a-t-il pu croire que Killian m'embrassait, alors que nous étions en train de parier sur l'équipe gagnante ? Vu le brouhaha, mon frère de cœur avait été obligé de se pencher sur moi pour m'entendre lui dire que je misais tout sur les Falcons. Malgré ce que Logan m'a fait subir, s'il y a bien une chose sur laquelle je n'ai jamais douté, c'est son jeu. Il a l'étoffe d'un futur champion. Un jour, il évoluera en NFL, j'en suis persuadé.

Quand je le lui ai avoué, quelque chose a changé dans son regard. Il s'est planté devant moi, l'air très sérieux, et m'a déclaré qu'il ferait tout pour passer pro. J'ai cru qu'il voulait ajouter quelque chose, mais il s'est contenté de poser ses lèvres sur ma joue.

Puis, il s'est mis à me raconter des anecdotes sur ce qui se passe sur le terrain ou dans les vestiaires. La plupart était hilarante. Je suis persuadée qu'il a fait exprès de choisir celles-ci pour me faire oublier le moment de malaise précédent.

Ça n'empêche pas que je m'en veux encore d'avoir réagi de la sorte en sentant son membre dur sous moi. Je n'aurais pas dû, mais les paroles de ma mère se sont insinuées dans ma tête sans que je puisse les retenir.

C'est toi qui le cherche, Lucy ! Un homme ne réagit comme ça que si une femme le provoque. Alors, cesse de l'allumer et tu verras que tout se passera bien.

Des mots qui sont devenus miens, à force de les entendre. Si elle le disait, elle qui a tant d'expériences avec la gente masculine, ça ne pouvait qu'être vrai.

J'ai vraiment eu la trouille d'avoir provoqué Logan et qu'il m'en veuille après. Comme ce salopard, qui savait exactement comment me faire sentir fautive de son état si je n'obtempérais pas. Comme au réveillon, l'an dernier. Ma mère n'était pas là, partie je-ne-sais-où.

Mon pire cauchemar vient me percuter alors que je ne suis même pas couchée.

— Lucy ?

J'entends la voix de Deb, cependant, je suis trop loin pour revenir au temps présent. Je suis avec Lui, avec cette ordure qui me force à continuer. Je suis dans cette tenue qu'il a choisi pour moi. Je suis à genoux devant lui, les larmes aux yeux. Je ne veux pas ! Mon estomac se tord. Je peine à respirer. Pitié, non !

Des mains se posent sur mes épaules, une voix douce et chaude m'appelle. Attirée par cette chaleur, je lève la tête. Des yeux bleus me font face et s'inquiètent pour moi.

— Je ne te laisserai pas tomber, Lu.

Ses lèvres sur mon front finissent par me sortir du gouffre dans lequel j'ai plongé. D'autres images se superposent à celles de ce cauchemar. Moi dans les bras de Logan juste avant d'entrer dans le chalet.

Pour le remercier de cette journée, je l'ai pris dans mes bras alors qu'il ne s'y attendait pas. Puis, poussée par une impulsion soudaine, j'ai déposé un bisou à la commissure de ses lèvres. Il a souri, avant d'embrasser mon front avec une infinie douceur, qui m'a fait vibrer de la tête aux pieds. Parfois, souvent même, je rêve qu'il me roule une pelle comme l'autre nuit dans sa chambre. Plus les jours passent, plus nous retrouvons notre complicité et plus j'ai envie de lui accorder ma confiance.

— Tu penses à quoi ? me questionne-t-il. Si tout a l'heure, tu semblais en plein cauchemar, là, je mettrais ma main a couper que tu penses à un beau mec.

Prise en flagrant délit, un incendie prend feu sur mes joues. Ses doigts viennent se poser sous mon menton, afin de pouvoir relever mes yeux vers les siens. Ce que je découvre dans son regard me promet tellement de choses. J'ai envie d'y croire. Vraiment.

— Bon et si, au lieu de draguer ma meilleure amie, t'allais te changer, grogne Deb.

Notre bulle n'explose pas pour autant. Il sourit, je rougis. Je souris et ses yeux s'illuminent encore plus. Mon coeur palpite de le voir si beau et je ne peux m'empêcher de poser ma main à l'emplacement du sien, pour sentir sous mes doigts l'effet que j'ai sur lui.

— Les parents ne vont pas tarder à débarquer. Alors soit vous allez vous enfermer dans une chambre, pour faire votre affaire et basta, soit vous vous décollez un peu pour aller vous préparer. Et si mon avis vous intéresse, je préfère la deuxième option, parce que là, vous voir comme ça, c'est carrément dégoûtant.

Logan éclate de rire en entendant sa sœur rouspéter. Amusée également, j'en fais autant, jusqu'à ce qu'il pose une bise sur ma joue, puis disparaisse dans sa chambre.

Deb m'entraîne aussitôt dans la sienne en me tirant par la main. Une robe en velours rouge et à l'encolure carré m'attend sur le lit. Deb l'a achetée juste avant notre départ spécialement pour le soir du réveillon.

— Je te laisse deux minutes pour l'enfiler. Ensuite, pendant que tu me raconteras ce qu'il y a entre mon idiot de frère et toi, je ferai de toi la reine de la soirée.

Voilà, je l'avais bien dit ! La connaissant, elle va insister jusqu'à ce que je craque. Je vais devoir être forte, très même, pour ne pas lui dévoiler quoi que ce soit.

Alors que je m'habille, mes pensées s'envolent vers le beau brun qui a un drôle d'effet sur mon cœur. Quand Deb entre dans ma chambre, un sourire béat est accroché sur mes lèvres.

— Wouah, ça a dû être chaud bouillant entre vous pour sourire comme ça.

— N'importe quoi ! m'offusqué-je.

— Mais, bien sûr ! Bon, raconte, il embrasse bien ? Il t'a montré le loup ?

Sérieusement ? Comment peut-elle me poser ce genre de questions sur lui ?

— C'est ton frère, Deb !

Elle hausse les épaules, comme si elle se fichait royalement de cette information.

— Et alors ? Dites-moi au moins si vous êtes en couple !

Celle-là est facile.

— Non.

— Comment ça, non ?

— C'est juste non. C'est clair ?

— Mais, t'en as envie ?

Mais, mince, elle va me soûler encore longtemps avec ses questions ? Épuisée d'avance, je pars m'asseoir sur le tabouret.

— Tu voulais me faire jolie, non ?

Elle opine du chef, puis va chercher de quoi me coiffer. Pour ce soir, elle décide de laisser mes cheveux bouclés descendre naturellement dans mon dos.

Avant de me maquiller, elle tente de revenir à la charge.

— Tu ne m'as toujours pas répondu. T'aimerais ou pas ?

— Deb !

— T'es pas cool. Je t'ai toujours tout dit, moi !

Là-dessus, je ne peux pas la contredire.

— Je pense que tu connais déjà la réponse.

— Alors, qu'est-ce que vous attendez tous les deux ?

Je hausse les épaules, je n'en sais rien. D'un coté, j'en meurs d'envie, mais de l'autre, je ne me sens pas prête. Le pire, c'est que j'alterne toute la journée entre ses deux phases.

— J'ai la trouille, lancé-je à Deb alors qu'elle passe du fard sur mes paupières. J'ai peur d'être encore blessée.

— Si tu n'essaies pas, tu n'en sauras jamais. Dis-toi juste que s'il cherche à te faire du mal, tes meilleurs amis prendront plaisir à lui botter le cul. Et moi, la première, même si c'est mon frère.

Je ris et encore plus lorsque je me rends compte qu'elle est vraiment sérieuse. Je l'imagine déjà en train de passer un savon à Logan. Je ne suis pas certaine qu'elle puisse le mettre à terre, mais avec elle, on ne sait jamais.

— Allez, viens, mes parents doivent nous attendre.

Quand nous débarquons dans le salon, le reste de la famille nous attend effectivement, un verre à la main. Tous trois se sont mis sur leur trente-et-un. Logan a enfilé une chemise assortie à ma robe ainsi qu'un jeans noir. Jamais, je ne l'ai vu si classe.

Alors que je le contemple, il me fixe avec une telle intensité que j'en défaille. Le sourire en coin qu'il me lance le rend encore plus sexy. Il fait vraiment chaud d'un coup.

— Deb ? l'appelle-t-il.

Il lui fait signe d'approcher. Je vois clairement qu'elle n'en a aucune envie, mais elle y va tout de même.

Sans me quitter des yeux, il chuchote quelque chose à l'oreille de sa soeur. Elle relève la tête vers lui, visiblement perplexe. Il se penche à nouveau vers elle, avant qu'elle vienne me rejoindre.

— Je n'ai rien capté, mais il veut que tu saches que c'est juste parce qu'il te trouve super sexy.

Pas très sûre de comprendre, je reporte mes yeux dans sa direction. Les siens sont rivés vers sa braguette qu'une jolie bosse déforme. Son message devient alors très clair. J'ai fait naître en lui une érection, sans même le toucher. Juste parce qu'il me trouve sexy ce soir. Pourtant, je n'ai pas demandé à l'être, vu que c'est Deb qui a choisi ma robe et a fini de me préparer. Rien n'est de ma faute. Je lui plais et c'est donc normal.

Le rire de Deb se répercute à mes oreilles. En me tournant vers elle, je saisis qu'elle a capté les propos de son frère. Moment de gêne très intense. Mécontente qu'elle puisse se foutre de lui, je lui donne un petit coup sur le bras. Ce n'est pas pour autant qu'elle cesse, bien au contraire. À présent, elle se marre tellement qu'elle en pleure

— Deb, un problème ? lui demande son père.

Elle reprend aussitôt son sérieux, essuie ses larmes et secoue la tête.

— Non, je pensais juste à un truc.

— Tu pourrais partager pour qu'on puisse en rire aussi, non ?

Logan la foudroie du regard. À mon avis, pour le coup, il vaudrait mieux qu'elle tienne sa langue si elle ne veut pas se retrouver enterrée sous la neige en pleine nuit. Il en est bien capable.

— C'est sans importance, finit-elle par déclarer.

Leurs parents hochent la tête en même temps pour clore le sujet, avant de nous inviter à passer à table. Je m'installe à côté de ma meilleure amie, mais face à mon futur petit-ami. Parce que, oui, après ce que m'a dit Deb dans la chambre, après ce qu'il m'a prouvé toute la journée, j'ai envie de lui donner une chance. Ce soir, lorsque tout le monde sera couché, j'irai le retrouver en douce dans sa chambre. Mes joues prennent feu en pensant à la manière indécente dont j'ai envie de l'embrasser.

— Je n'y suis pour rien, entends-je Logan se défendre.

Je réalise alors que tous les regards passent de lui à moi. Est-ce que le reste de la famille se doute de ce qu'il y a entre nous ? Oups ! Je vais vraiment devoir faire attention à mes réactions pour cesser de me faire cramer.

— Va vraiment falloir que toi et lui, vous franchissiez une étape, parce que là, ça commence vraiment à devenir très gênant, me souffle Deb.

Mes joues doivent être aussi rouges que la chemise de Logan tant elle me brûle. Gênée, je tends la main vers la corbeille à pain, histoire de fixer mon attention sur autre chose que le beau gosse qui me trouble vraiment trop.

Fait exprès ou non, il choisit le même moment pour en attraper un aussi. Ma peau s'électrise à l'instant où la sienne entre en contact avec mon épiderme. La chaleur qui se propage dans mon corps est si intense qu'elle me consume sur place.

— Bon, je vais chercher les entrées. Lucy, tu veux bien venir m'aider ? me propose madame Baldwin.

Je tourne la tête vers elle. À son doux sourire, je comprends qu'elle me tend une perche pour me sortir de cette situation et je l'en remercie mentalement.

— Volontiers.

Quand nous revenons chargées des plateaux de fruits de mer, l'ambiance a changé. Les trois autres Baldwin discutent tout en riant. C'est agréable de les voir ainsi, si bien que je ne peux empêcher un sourire de naître sur mes lèvres. Depuis quand n'ai-je pas connu ce genre de choses lors d'un réveillon ? Des images furtives, d'une époque révolue depuis longtemps, me traversent la tête. Je me souviens d'un feu de cheminée, de moi assise sur les genoux de mon père, d'une vieille dame qui doit sûrement être ma grand-mère. Puis, c'est tout. C'est bien trop loin pour que je me rappelle d'autres choses.

Le reste du repas se déroule de la même manière. Ils me racontent des anecdotes qui ont le don de me faire rire. Dès que personne ne prête attention à nous, Logan et moi flirtons en attrapant du sel, du poivre ou n'importe quoi en même temps. Ou à travers ce jeu de regard qu'il a mis en place et qui me laisse pantoise, complètement sous son charme.

— Et toi, Lucy ? m'interroge Deb. T'as bien une anecdote à nous raconter.

N'importe qui pourrait trouver quelque chose de drôle à raconter, sauf moi. Noël n'existe plus depuis longtemps à mes yeux. Ce n'est qu'une fête commerciale comme me l'a si souvent répété ma mère. La magie qui illumine tous les yeux des enfants ce jour-là a déserté mon regard après le départ de mon père. Plus de sapins. Plus de cadeaux. Plus de réveillons… jusqu'à l'an dernier.

— Non !

Mon ton un peu trop sec entraîne un silence assourdissant. Tous les regards convergent vers moi, mais c'est celui de Logan qui capte mon attention. Il s'interroge sans comprendre. Je ne lui en ai jamais parlé, même lorsque nous étions les meilleurs amis du monde. Je le laissais me raconter les siens en les vivant par procuration. C'était ma façon à moi de garder un peu de cette magie.

— Tu ne fêtes pas Noël ? me demande-t-il.

Je secoue la tête. J'aimerais qu'ils changent de sujet, qu'ils parlent encore d'eux. Sinon à un moment ce que je tente de contenir va m'exploser à la tête comme une cocotte-minute trop montée en pression.

— Tu ne m'en as jamais rien dit ! Pourquoi ?

Il me reproche à nouveau mon silence et ça me fait mal.

— Parce que toi et Deb, vous étiez si heureux que je ne voulais pas vous ennuyer avec mes problèmes.

Il se lève d'un bond, balance sa serviette sur la table et part se réfugier sur le canapé.

— T'aurais dû nous en parler, me reproche à son tour Deb, avant d'aller rejoindre son frère.

Les voir tous les deux en colère contre moi me blesse. Je voudrais qu'ils me pardonnent de les avoir protégés de ce lourd secret. Je ne peux même pas leur en parler à présent, parce que si je le fais, ils sauront tout.

— Logan et Deb ont raison, tu aurais dû leur en parler. Nous t'aurions pris avec nous. Un enfant se doit de connaître cette magie, dit madame Baldwin.

Les larmes affluent dans mes yeux. Elles brûlent tout sur leur passage, détruisent les barrières que je me suis forgée pour ne plus revenir en arrière. Pour ne plus revenir au réveillon précédent.

— Depuis le départ de mon père, ma mère n'a plus fêter un seul Noël. Elle disait que c'était une belle connerie pour berner les gosses qui suppliaient leurs parents de leur offrir des cadeaux par le biais du Père Noël.

Les mots m'échappent sans que je puisse les retenir. Je leur raconte comment elle m'a obligé à ne plus croire à ce vieux bonhomme en rouge alors que tous mes amis s'extasiaient encore devant lui.

— Je n'ai plus jamais réveillonner jusqu'à l'an dernier. Ma mère bossait, mais lui voulait de ce repas. Je… J'ai…

Les souvenirs de ce soir-là me submergent. Je me noie sous leur intensité. Mes larmes se déversent sur mes joues sans que je puisse les retenir. Morte de honte, je me lève dans la précipitation pour aller me réfugier dans la chambre.

La porte est à peine refermée qu'elle s'ouvre à nouveau. Sans me demander mon avis, Logan me blottit contre lui. Je ne veux pas le voir. Pas maintenant. Il ne doit pas connaître la suite. Je veux qu'il garde son innocence. S'il l'apprend, ça risque de le briser encore plus fort que le samedi où j'ai débarqué chez lui. Je me débats, lui hurle de me laisser.

— Tu m'as demandé dans ton cauchemar de t'aider, alors ne compte pas sur moi pour te laisser tomber.

Je lui crie ma rage, mon désespoir, mais il se contente de raffermir son étreinte.

— Qu'est-ce qu'il t'a fait ce soir-là ?

Je secoue la tête contre son torse, refusant de mettre des mots sur cette horreur. Refusant de parler de cet enfer. De mon enfer.

— Je veux savoir ! Je ne pourrais jamais t'aider si tu ne me dis rien !

A ces mots, les derniers remparts s'effondrent et les mots quittent ma bouche sans aucun filtre.

La tenue de mère Noël qu'il m'avait achetée pour l'occasion. Le repas en tête à tête, alors que ma mère trainait je ne sais où. Les coups parce que je refusais de me mettre à genoux. Je lui révèle tout dans les moindres détails.

Son corps se tend alors qu'il m'écoute, puis, il s'éloigne de moi, les poings serrés.

— Putain, il t'a violé, Lu ! tonne-t-il.

Je secoue la tête. Il a tort. Un viol, ce n'est pas ça !

— Tu veux peut-être que je t'en rappelle la définition ? Un viol, c'est toute pénétration non consentie ! Peu importe, l'endroit ! Ce connard t'a violé en te forçant à le sucer. Putain merde, fous-toi ça dans le crâne, Lu !

Je m'écroule au sol à genoux, tuée par les mots qui ont quitté sa bouche. Lui agrippe ses cheveux à pleine poignée, comme s'il voulait s'en arracher la moitié. Tout ça le met dans une colère noire.

— Est-ce que Deb sait ? Est-ce que ton chien de garde sait ? Si tu me dis que l'un des deux étaient au courant, j'te jure que je les bute !

Mes mots l'ont rendu fou, je le vois tourner en rond comme un lion en cage, prêt à tout saccager.

— Personne ne savait, réponds-je avant que ma voix s'étrangle dans un sanglot.

— Pourquoi ? Pourquoi tu n'en as jamais parlé, Lu ? T'aurais dû, putain ! Mon père t'aurait protégé, le tien serait venu te sortir de tout ça !

— Parce que j'avais honte… Parce que je ne voulais pas inquiéter ta sœur... Parce que si j'en avais parlé à Killian, il l'aurait tué... Et surtout parce que tu es le seul à qui j'aurais pu me confier, mais tu n'étais plus là !

Un lourd silence tombe sur la pièce tandis qu'il encaisse ma réponse. Il semble avoir perdu son souffle, comme si mon poing venait de le frapper violemment en plein estomac. Son regard cherche le mien alors que ses pleurs se déversent sur ses joues. Il s'effondre à genoux devant moi, attrape mon visage entre ses deux grandes pour me forcer à relever la tête. Et ses lèvres s'abattent sur les miennes avant même que je réalise ce qu'il se passe. Son baiser est urgent. Vital même.

Je goûte à ses perles salées, il avale les miennes. Je m'accroche à sa chemise comme un naufragé, il me maintient à bon port en enroulant un bras autour de ma taille. Il aspire mes douleurs et me transmet sa force. C'est si puissant que je m'y perds. Que je m'y noie. J'en oublie combien j'ai mal. Combien je l'ai blessé.

Mais, je n'en ai pas assez. J'en veux plus. Beaucoup plus. Alors, j'ose glisser ma langue dans sa bouche, qui vient s'enrouler autour de la sienne de la plus sensuelle des manières. Il entraîne tout mon corps vers le sol et se place au-dessus de moi. Il continue à dévorer ma bouche comme si son appétit était insatiable. Son érection appuie sur mon ventre, mais à cet instant, je n'ai plus peur. Je sais qu'il ne me veut aucun mal.

— Les pa… Oups, désolée, entends-je Deb prononcer.

L'intrusion de sa soeur nous fait sourire, bouche contre bouche. Dès qu'elle repart, il pose son front sur le mien.

— Pardon, s'excuse-t-il.

J'arque un sourcil, pas très certaine de comprendre pour quelles raisons il s'excuse.

— De ne pas avoir été là quand tu as eu le plus besoin de moi.

— Maintenant, tu l'es.

— Ouais et je ne te quitterai plus.

Le soleil vient de percer derrière tous les nuages gris amoncelés depuis plus d'un an. Je veux croire en lui. En nous. Je veux effacer ce passé plein de douleur avec lui à mes côtés. Alors pour lui montrer la décision que je viens de prendre, je l'embrasse à nouveau. Ce baiser est bien plus doux, bien plus tendre, mais pas moins intense.

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