Chapitre 15 :

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Une semaine était passée, et rien d’intéressant ne s’était produit. Cassandra ne reparlait plus à Kilian et Iris. Si Kilian essayait d’engager la discussion avec son ancienne amie, Iris, était trop vexée pour le faire. Elle préférait garder sa fierté, elle attendait toujours des excuses de la part de la jeune fille. Les cours étaient d’un ennui mortel pour Iris, la cantine tantôt bonne, tantôt dégoûtante et les livres concernant la guerre ne donnaient rien d’intéressant. Les adultes étaient détestables. Les professeurs aimaient bien embêter Iris en lui demandant de corriger tous les exercices au tableau. Pour cela, ils l’isolaient toute seule à une table, lui donnaient d’autres exercices, et à la fin, elle devait corriger des exercices qu’elle n’avait pas faits sous l’œil moqueur du professeur et des autres élèves. Comme plusieurs cours étaient passés, la surdouée, qui avait compris ne prit même pas la peine de faire les exercices. Mais elle aimait voir le visage contrarié d’un professeur qui n’arrivait pas à trouver de fautes alors qu’elle les faisait devant tout le monde.

Iris en avait marre, et comptait le faire savoir très bientôt à quelqu’un. Les autres surdoués subissaient cela aussi. Leurs retrouvailles à chaque fin de journée leur faisaient du bien, discuter et partager leur journée était bénéfique pour eux. Cela les aidait à mieux supporter. Mais pas pour Iris. Depuis son altercation avec le fils du conseiller Baptiste, Iris ne l’avait pas revu et c’était tant mieux. La jeune fille épluchait des livres chaque jour. Il n’y avait toujours aucune nouvelle de l’association, à croire qu’il n’y avait en fait aucun infiltré. Iris s’obstinait à penser le contraire, elle ne voulait pas se savoir sans protection, même si l’infiltré ne pouvait pas faire grand-chose. Mais elle se sentait plus en sécurité en sachant des gens de leur côté ici. Depuis sa discussion, elle n’avait pas revu M. Past. Le surveillant s’était habitué à surveiller beaucoup plus de gamins qu’il en avait l’habitude. Mais il continuait à surveiller discrètement les surdoués sans qu’ils s'en rendent compte.

Ce matin-là, Iris n’était vraiment pas d’humeur. Ils ne trouvaient rien : aucun infiltré et aucun indice sur les origines de la guerre. Cela avait beau ne faire que sept jours, cela la désespérait. Avec tout ce qu’elle accumulait depuis son arrivée dans le désert, elle avait envie de hurler à tout le monde qu’ils étaient de pauvres imbéciles dépourvus de la moindre once d’intelligence. Et tout le mystère sur les vraies raisons de leur venue ne sortait pas de sa tête. Elle ne pouvait pas arriver à la conclusion qu’ils étaient vraiment là pour se sauver des bombes. Pour les autres, peut-être, mais pas pour les surdoués. Il y avait d’autres raisons concernant sa venue et celle de sa bande.

Quand elle fut habillée, elle se dirigea machinalement vers la porte. Ses camarades de chambre étaient encore endormies, pas question de les réveiller. Si elles arrivaient en retard à leur cours, ce n’était pas son problème, tant pis pour elles. Puisqu'elles la détestaient, pourquoi leur rendrait-elle un service ? Chaque matin et chaque soir elle supportait leurs messes basses. Messes basses qui parlaient de garçons, des privilégiés qu’elles convoitaient, des surdoués et surtout d’elle, leur camarade de chambre. Elle supportait aussi leurs moqueries. Sans parler des coups bas qu’elles pouvaient faire comme remplacer du dentifrice par du savon, ou ne pas lui laisser de l’eau chaude. Que des coups puérils qui montraient leurs degrés de maturité et de réflexion qui frôlaient le zéro. À chaque fois, la surdouée avait envie de leur envoyer un coup de poing dans leur figure. Ce n’était que des pestes idiotes. Elles perdraient peut-être des neurones, mais ce n’était pas une grande perte pour elles.

Alors que la surdouée s’apprêtait à ouvrir la porte, Iris remarqua deux enveloppes qui avaient sûrement dû être glissées sous la porte. La jeune fille les ramassa et s’enferma dans les toilettes. Dans la première, il n’y avait rien. Cela surpris Iris. L'autre contenait, deux papiers et un stylo. Un papier vierge, il n’y avait rien. Ils voulaient sûrement qu’elle réponde. Et un papier avec une écriture familière.

Une autre lettre de Marin ! Il y avait donc bien un ou plusieurs infiltrés dans le bâtiment. Iris en fut soulagée.


Iris,

J’espère que tu vas bien. J’ai appris pour la destruction de ton bâtiment. Amanda est revenue il y a peu et nous a tout raconté. Tu as eu de la chance pauvre idiote… Tu aurais pu mourir, fais attention ! Pour ta gouverne aussi, Amanda va bien, ne t’inquiète pas. Elle nous a dit pour le compte rendu. Notre armée a lancé ses premières attaques officielles qui ont été de vraies réussites. Nos alliés en sont ravis et ont félicité nos conseillers. Le chef voudrait étudier de plus près les origines de la guerre. Ce n’est pas évident, mais nous allons tout de même essayer. J’ai appris que vous, les surdoués, aviez été déplacés dans le bâtiment de Kilian et Cassandra. J’en suis ravi pour toi, et je sais aussi que tu ne lâches pas les surdoués. Cela ne m’étonne pas, c’est tout toi. Je dois quand même t’avouer… Que récemment des attaques mortelles ont frappé notre peuple. Je pensais important de t’en informer. Ne t’inquiète, ce n’est pas dans notre région, tes parents vont très bien. Ta voisine se porte comme un charme d’ailleurs. Les attaques ont plutôt frappé les grands marchés des riches et les quartiers d’affaires. Donc, des riches. Mais ce n’est pas plus réjouissant. Nous devons déplorer plus d’une centaine de morts dans les deux attaques voir même un peu plus. Soit plus de deux cents morts. C’est vraiment affreux.

La Siar a lancé ses attaques. Son dictateur en est très fier. Les conseillers disent que nous devons nous relever le plus vite et le mieux possible. Ils ne disent que des sottises et sont plus idiots les uns que les autres. Comment cela se passe-t-il pour toi dans le nouveau bâtiment ? Tu es sans doute heureuse de revoir Kilian et Cassandra. Comment vont-ils ? Je n’ai pas eu trop de temps pour écrire cette lettre et je m’en excuse. Avec la deuxième enveloppe, le deuxième papier et le stylo tu peux me répondre. Tu dois même. Je ne sais pas quand je pourrai te répondre… Je ne sais pas si je pourrais te répondre. Mais j’aimerais vraiment que tu m’envoies une lettre. Je veux savoir comment vous allez. Tu vas te dire, « mais il me prend pour qui ? À qui je la donne la lettre ? ». Laisse-la dans ta chambre, elle sera prise pendant la journée.

Marin.


Iris regarda sa montre elle avait largement le temps. Elle s’était réveillée normalement alors qu’elle commençait tard et qu’elle devait manger au deuxième service du petit déjeuner. Quelle idiote elle était ! Cela faisait plaisir de recevoir une lettre de Marin. C’était un contact avec l’extérieur, et elle était contente qu’Amanda soit rentrée saine et sauve. La surdouée abaissa la cuvette des toilettes, posa la feuille vierge. Elle ramena de son sac un crayon à papier et une règle, pour tracer des traits afin d’écrire droit. Puis elle commença à écrire sa lettre.


Marin,

Je suis ravie que tu m’aies écrit. On écume les livres de la bibliothèque en quête d’indice sur l’origine de la guerre. Pour l’instant, nous ne trouvons rien. Kilian et moi sommes fâchés avec Cassandra. Elle ne veut plus rien entendre, on ne peut rien faire. C’est assez difficile pour nous les surdoués, les autres élèves et les professeurs sont loin, très loin d’être sympa. Ils sont horribles. On réfléchit à la feuille mais on se demandait comment c’était possible. Pourquoi auraient-ils détruit notre bâtiment ? Pourquoi voudraient-ils nous tuer ? Je ne comprends pas. J’espère que vous serez plus éclairés que nous. Et… Ce serait sympa si vous pouviez enquêter sur les origines de la guerre. Cette guerre doit cesser, et comme par hasard, il n’y a dans aucun livre d'informations sur le début de la guerre. Rien. Nous devons faire quelque chose pour l’empêcher de continuer.

Iris.


La jeune fille ne savait pas quoi mettre de plus. Elle garda le stylo dans la poche de sa chemise et mit sa lettre dans l’enveloppe, elle rajouta le papier de compte rendu et posa l’enveloppe sous son oreiller. Une chose de faite, mais elle était loin d’avoir fini tout ce qu’elle devait faire. Pendant le petit déjeuner, la jeune fille s’empressa d'informer ses amis de la réception de la lettre.

J’espère que le ou les infiltrés vont se manifester. Mais ils ont beau être là, moi, je ne me sens toujours pas en sécurité, déclara Samuel avant de croquer dans son toast.

Iris tapait des doigts sur la table tout en remuant sa cuillère dans son chocolat. Kilian n’arrivait toujours pas, et cela la stressait un peu. D’après Liam et Charles, il avait été convoqué par le directeur de l’établissement. Ce qui ne présageait rien de bon. Le meilleur ami d’Iris ne se pointa pas de tout le repas. Un élève de la classe d’Iris la prévint que les cours avaient été annulés parce que le professeur était malade. La plupart des élèves restèrent donc dans leur chambre. La jeune fille resta dans la bibliothèque. Elle avait hésité entre attendre dans sa chambre la personne qui apporterait la lettre, essayer de trouver le bureau du directeur pour attendre Kilian et la bibliothèque. Sauf qu’Iris avait choisi d’avancer sur ses recherches qui allaient sûrement rester incomplète. Aucun livre ne parlait des origines de la guerre. Juste les endroits les plus marquants, les batailles les plus marquantes ainsi que les personnes politiques les plus marquantes. Certains ouvrages parlaient des armes, leur fabrication, certaines vieilles méthodes de combat expliquées avec le plan d’emplacement et de déplacement des soldats.

La jeune fille avait un peu mis de côté son enquête sur les raisons de leur venue. Comment pouvait-elle trouver ces réponses-là dans un endroit aussi vaste et peuplé ? L’association s’en occupait déjà. En fait… Ce qu’elle faisait ne mènerait à rien et n’était que perte de temps. Elle s'obstinait à croire qu’elle allait trouver les origines de la guerre, mais elle savait très bien que ses livres ne mèneraient à rien. Elle devait interroger, fouiller, chercher avec plus d’outils et se rendre sur les lieux. Bien sûr, cela était beaucoup plus difficile que cela de passer d’un territoire à un autre. Même si les cinq peuples parlaient tous la même langue, ils ne toléraient aucun étranger sur leur territoire. Les frontières étaient fermées, ils ne pouvaient logiquement pas passer. Il devait y avoir des passages illégaux, ou des minis compagnies illégales, mais il valait mieux, bien se renseigner. Et de toute façon, elle ne pouvait faire cela qu’à l’âge de dix-huit ans. Iris allait rester coincée ici pendant un moment. Impossible d’avancer. Mais elle voulait encore essayer.

Agacée, la jeune fille referma brusquement l’ouvrage intitulé « souvenirs des débuts de la guerre » qui ne lui offrait, qu'une culture, certainement incollable sur la guerre, chose, qu’à force de lire, elle savait déjà, mais aucune information sur les origines n’y était retranscrite. Y avait-il une raison valable pour que personne ne connaisse les origines de cette guerre sordide ? Iris le pensait de plus en plus. La jeune fille sortit son petit carnet et marqua ses avancements. C’est-à-dire, rien du tout. Une personne s’assit sur la table, juste à côté d’elle, mais la surdouée s’efforça à ne pas lever la tête.

Alors comme cela, on s’intéresse à la guerre petite surdouée ? Cela ne m’étonne pas. Les surdoués s’intéressent à vraiment beaucoup de choses. Je trouve cela tellement absurde…

Iris reconnut sa voix. C’était le fils du conseiller Baptiste. Elle serra les poings et se força à ne pas perdre son sang-froid. Rien qu'entendre sa voix l’énervait, mais elle devait savoir se contrôler. Elle ne voulait pas finir au bureau du directeur comme Kilian.

Qu’est-ce que tu fais là ?

Pas cours.

Et qu’est-ce que tu me veux ?

Devenir ton pire cauchemar, affirme-t-il d'une voix sévère. Tu m’as défiée l’autre jour. Sache que l’on ne me défie pas de la sorte. Encore moins une fille surdouée qui n’a même pas un de ses parents conseiller ou membre haut placé du gouvernement. Je te préviens que tu vas vite de rendre compte du résultat quand on me manque de respect.

Iris se força à rire. Un rire glacial dépourvut d’émotion qui prit d’étonnement son adversaire. Il écarquilla les yeux de surprise.

Tu crois franchement que tes menaces vont me faire un effet ? Et tu crois vraiment que tu mérites plus de respect que quelqu’un d’autre ? On est égaux, tu n’as pas à être plus respecté que les autres, répliqua la jeune fille. Toi… Tu n’as jamais galéré, tu ne t’es jamais senti mal, à part ou trop différent. Tu n’as pas connu de soucis financiers. Tu es né avec une cuillère en or dans la bouche et le respect déjà gagné grâce à ton père. Tu ne sais pas ce que c’est d’avoir eu des parents aimants, mais jamais présents, que tout le monde te regarde, je ne saurais comment décrire. Mais tu n’as jamais eu à te sentir mal, ou différent face aux autres. Tu te crois malin, tu fais le beau. Mais tu es dépourvu d’intelligence comme beaucoup de notre génération.

Iris se leva et jeta le livre dans les bras du jeune homme tout en le fusillant du regard.

Oh ! Et avant que j’oublie. Comment t’appelles-tu ?

Ethan.

Iris ne rajouta rien et s’en alla sans lui adresser un regard de plus. C’était tout ce qu’il méritait, rien. La jeune fille décida de rentrer un moment dans sa chambre quand elle fut interpellée par Cassandra.

Hey ! Tu n’aurais pas vu Kilian ?

Apparemment il est dans le bureau du proviseur.

Il a dû sortir depuis un moment puisque Greg y est maintenant.

Cassandra se mordilla la lèvre, se rendant compte immédiatement qu’elle en avait trop dit. Et Iris le remarqua tout aussi rapidement mais ne lui posa aucune question. Elle partit. Cassandra n’avait pour l’instant plus rien à voir avec elle. Pourquoi lui faire la discussion ? Et pourquoi semblait-elle inquiète à cause des entrevues des deux garçons ? Iris tirerait cela au clair avec Kilian. Cassandra l’observa sans bouger. Quand elle ouvrit la porte de sa chambre, elle vit Kilian assis sur son lit, le regard dans le vide et recula d’un bond.

Mais qu’est-ce qu’il t’est arrivé ! s’écria Iris.

La jeune fille porta la main à sa bouche tout en rentrant dans sa chambre. Elle ne prit pas la peine de fermer la porte et encadra le visage de Kilian de ses mains. Son ami avait un coquart à l’œil droit, et son nez était salement amoché et avait dû saigner.

Tu n’as pas encore tout vu, souffla-t-il comme s'il était habitué.

Il releva ses manches et son pantalon pour, laisser apparaître ses jambes et ses bras couverts de bleus. Iris retint un cri. Et fit le rapprochement. Cela avait nécessairement un rapport avec Greg. Ils avaient dû se battre. Mais pourquoi ? Ce n’était pas dans les habitudes de Kilian.

Tu t’es battu…

On m’a battu plutôt.

C’est pour cela que tu étais chez le directeur ? questionna Iris en fouillant dans sa valise.

Non.

La jeune fille ressortit le nécessaire pour désinfecter, cela ne servait pas à grand-chose, mais elle préférait appliquer quelque chose sur l’œil au beurre noir de son ami.

Il va falloir que tu ailles à l’infirmerie. Raconte-moi ce qui s’est passé.

Au début… Je me demandais comment ouvrir les yeux à Cassandra. Puis j’ai vu Greg donner un sachet à quelqu’un dans un couloir. Je l’ai pris en photo. L’autre lui donnait de l’argent. J’ai compris qu’il faisait un trafic, alors je l’ai dénoncé. Et quand je suis sorti, il avait été convoqué à son tour et il attendait. C’est là qu’il m’a frappé.

Cassandra n’ouvrira pas les yeux pour l’instant. En te voyant aussi amoché, peut-être, mais j’en doute encore un peu. Mais comment des substances illégales ont-elles pues arriver ici.

Iris ferma la porte et s’assit au côté de son ami.

Tu ne lui pardonnes toujours pas, n’est-ce pas ?

Ses mots m’ont blessée. J’en ai vu de toutes les couleurs quand j’étais plus jeune. Pas question de revoir ça.

Kilian soupira et chercha le regard de son amie. Regard qu’il trouvait immédiatement, qu’elle le voulût ou non.

Elle a dit cela sur le coup de la colère. Tu sais très bien que Cassandra est facilement influençable et ne ferait pas de mal à une mouche. Sur le coup elle a voulu te blesser, mais je suis certain qu’elle regrette.

Le mal est déjà fait…

Iris se leva et jeta un coup d’œil à l’enveloppe, elle avait disparu. La jeune fille en parla à Kilian qui ne le savait pas encore. Elle ne lui raconta pas son entrevue avec Ethan. C’était sans importance, elle lui dit juste qu’elle n’avait encore une fois rien trouvé.

Il faut que l’on se fixe un objectif que l’on soit plutôt certain d’atteindre. Trouver les raisons de la guerre est une cause perdue. On n’a pas assez de matériel. On ne peut rien exploiter. C’est comme si quelqu’un avait proclamé que personne ne devait savoir les raisons de cette guerre. C’est étrange quand même ! On dirait qu’elles sont volontairement oubliées. Cela me fait tellement mal, je te jure ! Cette guerre doit se terminer ! s'énerva l'adolescente.

Tu sais quoi Iris ? Arrête un peu de vouloir sauver le monde et d’essayer de tout comprendre ! Tu sais tout autant que moi que même si tu avais les réponses, tu ne pourrais rien faire car aucun adulte ne nous prend au sérieux, tenta Kilian sur le même ton. Nous sommes des adolescents, nous ne sommes que des enfants pour eux. Crois-moi, je déteste cette guerre moi aussi. Sauf qu’il faut se rendre à l’évidence quand les choses sont comme cela : on ne peut rien faire pour que cette fichue guerre se termine. Elle se terminera le jour où les gouverneurs de notre monde voudront que ce cercle vicieux s’arrête. Il est très difficile de sortir d’un cercle vicieux. C’est extrêmement difficile, même si tu ouvres les yeux. Les conseillers ont fait cette erreur. Ils en sont conscients, mais par dignité envers leur fonction, carrière politique et image ils n’assumeront pas.

Ce n’est pas de la dignité cela. Et puis, on sait tous que les conseillers ont des sales affaires dans lesquelles ils ont trempé mais qu’ils cachent. On le sait tous et personne ne les ennuie avec cela, les journalistes sont censés nous dire la vérité, et ils nous répètent les bobards de ces gouverneurs incapables comme tous les autres gouverneurs d’État. Je pense bien que cela doit être dur, mais ce n’est pas en disant de belles paroles aux gens que tout cela va s’arranger, il faut les réaliser et tenir jusqu’au bout. Les dirigeants des cinq clans sont juste des incapables.

Kilian soupira en guise de réponse. Il était habitué au discours d’Iris et était d’accord avec elle mais il savait très bien qu’ils ne pouvaient pas parler de cela ici. Encore moins avec Ethan dans l’établissement. S’il le savait, le garçon irait tout cafter. C’était certain. Il le prendrait mal, et c’était logique, son père faisait partie des conseillers. Iris fit les cent pas puis s’arrêta en face de Kilian.

Si l’on ne peut rien savoir sur la guerre, alors il faut découvrir pourquoi on est ici. Ce n’est pas une raison banale, et je ne comprends pas pourquoi les conseillers auraient ordonné de détruire mon bâtiment, celui des surdoués. C’est étrange. Il y a trop de mystère qui nous entoure, et cela me dérange. Je n’aime pas être entouré par l’inconnu. J’ai besoin de savoir.

Eh bien il va falloir que tu attendes un peu. Tout ne va pas se faire en claquant des doigts et tu le sais très bien, déclara Kilian.

Iris s’avachit sur son lit pendant que Kilian se releva.

Tu ne veux pas venir avec moi. J’ai oublié ma montre dans le bureau du directeur.

Iris soupira et se releva. La jeune fille suivit son meilleur ami qui savait où était le bureau du proviseur. Après être monté au dernier étage du bâtiment, le garçon se dirigea vers la porte tout au fond. Des voix parlaient à l’intérieur de la salle, et tout cela intriguait Iris qui empêcha Kilian de toquer à la porte.

Qu’est-ce que tu fais ? demanda-t-il.

Moins fort ! chuchota-t-elle en se collant délicatement à la porte.

La jeune fille essayait d’écouter la conversation entre deux adultes plutôt haut placés. La surdouée plaça sa deuxième main sur la bouche de son ami, exaspéré. Elle ne pouvait donc jamais s’empêcher d’espionner les adultes. Ce n’était pas une très bonne manière pour obtenir des informations. Ils pouvaient se faire prendre à tout moment, mais Iris s’en fichait un peu. Les punitions ne devaient pas être aussi terribles. Ils devaient juste ne pas parler. Au début, Iris n’arrivait même pas à entendre des bribes de conversations, mais des mots. Conseillers. Bâtiments. Destruction. La surdouée comprit qu’elle devait continuer à écouter la conversation coûte que coûte. Cela allait lui donner des informations qui étaient susceptibles de faire avancer son enquête. Les voix haussèrent d’un ton, ce qui permit à la jeune fille de suivre sans problème leur discussion.

Les conseillers pensent que leur idée était parfaitement bonne contrairement à ce que vous pensiez, déclara un homme.

Sauf que mes surveillants ont déjà mieux à faire que de suivre et observer méticuleusement des surdoués perdus au milieu de gens qui n’ont pas les mêmes capacités qu'eux ! Ils ne sont même pas assez nombreux ! J’ai eu la chance d’avoir un élève qui est, certes, pas l’élève le plus sage puisqu’il a reçu plus d’une vingtaine de punitions, mais il a eu l’intelligence d’esprit de nous prévenir qu’un trafic de drogue circulait dans l’établissement. Le principal coupable était présent dans mon bureau avant vous, et maintenant, je dois trouver les adultes qui ont permis ce trafic en important ces drogues ici, s’énerva le proviseur.

Iris sentait qu’elle allait bien aimer le proviseur. Ce dernier ne traitait pas les surdoués comme des anomalies ou des extraterrestres mais comme des êtres humains comme tout le monde mais avec des compétences intellectuelles plus poussées. C’était la vérité, et Iris était contente de l’entendre sortir de la bouche d’un adulte.

Vous savez que pour le bien des futures générations, nous devons comprendre ce qui cloche. Les statistiques et les résultats des expériences ne trompent pas, nous devons faire plus d’expériences. Et ils veulent aussi surveiller de plus près les premiers de chaque classe.

Est-ce vraiment utile ? C’est la vie. C’est comme cela. Et puis, si je ne m’abuse, les conseillers essayent de recruter le plus de soldats possible. Les soldats n’ont pas besoin d’être super-intelligent pour combattre.

Oui, mais dans l’armée, nous avons aussi besoin d’une bande d’intelligent pour notre système secret.

Votre système secret ?

Je ne suis pas autorisé à vous en dire plus.

Bon… Qui comptez-vous me rajouter dans les bâtiments ?

Des surveillants très discrets, allant dans la masse, se faisant passer pour des élèves afin d’observer le comportement des surdoués, et même de sympathiser avec eux si possible.

Cela va être difficile pour les plus jeunes.

On fera ce que l’on pourra. Cela pourrait aussi être un professeur, on y a songé. Comme j’entends vos plaintes sur le fait que vous n’ayez pas assez de surveillants, j’en ferai une requête aux conseillers. Des médecins spécialisés ainsi que des scientifiques débarqueront, nous ferons plus de tests sur les surdoués, des prises de sang, des analyses. Comme on n’a pas les matériaux appropriés, les surdoués seront amenés à se déplacer dans un autre bâtiment construit exprès pour leurs examens et leurs expériences.

Bien… C’est tout ?

Oui.

Iris se décolla de la porte tout en laissant sa main partir de la bouche de Kilian qui la fixait comme pour essayer de connaître ce que la jeune fille avait entendu. La surdouée se retourna vers son meilleur ami, un sourire aux lèvres, et les larmes qui lui montaient aux yeux. Bien sûr elle n’allait pas pleurer, même de joie. C’était hors de question pour elle. Mais la jeune fille était inquiète. Elle ne comprenait pas cette histoire de statistiques et de générations, sauf qu’elle était certaine d’une chose : les surdoués allaient servir pour un projet militaire. Et tout cela était bien assez étrange. En quoi les surdoués pouvaient-ils servir pour la guerre ? Et pourquoi les conseillers étaient-ils si fiers de leur plan qu’ils le tenaient secret ? Que manigançaient-ils ? La jeune fille allait devoir tirer des conclusions des deux débuts de raisons. Ou plutôt approfondir la piste, trouver en quoi consistait le projet militaire, et comprendre ce que cachaient les statistiques à sa génération. S’agissait-il de comparaisons de statistiques ? Sûrement. Mais pourquoi comparer ? Que cherchaient-ils ?

Kilian. C’est… Tellement inespéré. Je te raconterai tout quand on sera dans ma chambre, et tu comprendras à quel point on a fait un bond énorme dans nos recherches sur les établissements !

Le jeune homme ne semblait pas vraiment très convaincu, mais il haussa les épaules en grognant, feignant d’être indifférent à l’annonce de son amie. Iris n’y prêta pas grande attention et laissa son ami toquer à la porte. Plus de quinze secondes passèrent avant que le proviseur leur ordonna d’entrer. Le proviseur était un homme d’une quarantaine d’années, peut-être moins, une barbe de quelques jours et un regard sévère, cela intimida Iris d’entrée de jeu qui marmonna une salutation maladroite aux deux hommes tous en faisant un pas sur le côté de sorte d’être à moitié cachée par Kilian.

L’autre homme était bien plus impressionnant. Il était très grand, rasé de très près que ce soit cheveux et barbe. Il était très musclé et son regard se faisait dur. Iris et Kilian faillirent sursauter en voyant de multiples cicatrices sur le visage et les bras. Deux marquèrent Iris : une qui descendait du bas de son front jusqu’au-dessous de son œil droit, pourtant, celui-ci n’avait pas l’air d’être endommagé. La deuxième était épaisse et lui barrait la joue gauche. La joue droite, elle, était recouverte de petites cicatrices. Cela devait sûrement être un militaire. Il sourit aux deux amis. Un sourire mauvais et malicieux comme pour leur dire qu’il était ravi d’avoir fait cet effet-là sur eux, comme si c’était voulu de sa part. Et la surdouée n’en doutait pas.

Oh ! Mademoiselle Smarta, heureux de vous rencontrer, annonça calmement le proviseur.

Moi de même, Monsieur le proviseur.

Iris regarda le proviseur mais sentit le regard du militaire sur elle. C’était une surdouée, il l’observait. C’était normal.

Voici M. Klimb qui est un militaire, chef de régiment. Il était ici pour mon compte rendu. On faisait cela par lettre, mais les conseillers préfèrent envoyer des messagers dignes de confiance maintenant.

C’était peut-être vrai, mais il n’était pas là que pour cela. Iris le savait, elle les avait entendus. Le militaire ne parla pas, se contentant d’observer et d’attendre que les choses se déroulent.

Oh… Monsieur Mallow, vous avez oublié votre montre tout à l’heure. C’est sans doute pour cela que vous êtes ici et votre amie vous accompagne.

Le garçon hocha la tête. Le proviseur lui tendit sa montre et il la prit.

Merci monsieur ! Au revoir messieurs.

Les deux adolescents ressortirent rapidement et s’éloignèrent à la même vitesse.

Alors ? Qu’as-tu entendu ? demanda Kilian en mettant sa montre à son poignet.

La prochaine fois que tu vas chez le proviseur, continue ta manie d’enlever tout le temps ta montre. Cela peut s’avérer extrêmement cool pour avancer dans notre enquête, affirma Iris.

Qu’as-tu entendu ? répéta le garçon.

La jeune fille lui attrapa le bras et l’entraîna avec elle, Kilian ne chercha même pas à résister.

Viens ! On va réunir tout le monde !

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