Chapitre 2

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La bande profita de sa première journée de vacances, du début jusqu’à la fin. Ils avaient rapidement mis les autres clans et la rumeur de côté. Ils étaient restés toute la matinée à leur QG où ils avaient déjeuné. La mère d’Iris lui avait préparé un sandwich au beurre, jambon et tomate. Pour la jeune fille, il n’y avait pas besoin de micro-onde. Puis ils avaient traîné dans leur ville pendant l’après-midi. En fin d’après-midi, alors qu’il commençait à se faire tard, le groupe se sépara pour rentrer. Kilian ramena Iris chez elle. Au loin, l’immeuble qu’elle habitait donnait l’impression qu'il était vieux, sale et prêt à être détruit. Mais la jeune fille remarqua surtout que la bande de Fred l’attendait. Apparemment, ils n’avaient pas aimé l’action de ce matin.

Je crois que je vais prendre l’autre côté, déclara Iris en reculant un peu.

Kilian mit sa main sur l’épaule de son amie.

Ne te fatigue pas à faire cela, je m’en occupe. J’ai envie de les embêter un peu, aujourd’hui, lui murmura-t-il à l’oreille.

Sa voix grave et rauque par moments ne laissait aucun doute : il était déterminé à faire ce qu’il avait déclaré. Iris lui lança un regard pour essayer de l'en dissuader. Elle connaissait bien le groupe, et il ne faisait pas dans la finesse. Kilian ne ferait pas le poids contre eux tous. Le garçon fit la sourde oreille et la poussa à avancer en ricanant.

À te voilà… On va te faire ta fête, tu vas payer pour nous avoir berné ! s’exclama un gros à la carrure imposante.

La fête ? Désolé les gars, mais ce n’est pas encore mon anniversaire.

Sérieusement les gars ? Vous n’avez pas honte d’être aussi lâche… S’attaquer aux plus faibles que vous en troupeau en plus. Quelle honte ! J’ai honte pour vous tellement que c’est stupide et lâche, déclara Kilian en se plaçant devant Iris comme pour la protéger d’un quelconque danger.

Pas besoin de me faire le bouclier non plus, je ne suis pas si fragile que cela, lui murmura-t-elle à l’oreille.

Ses joues s’empourprèrent, mais il ne se laissa pas distraire. Il garda à l’œil la bande de garçons. Les garçons semblaient d’ailleurs s’énerver. Ils avaient les poings serrés, et regardaient Kilian avec colère.

Bah alors ? On ne répond plus ? Quand il faut tabasser quelqu’un, vous êtes là, mais pour vous servir de votre cerveau pour parler intelligemment ou faire une action utile, vous n’êtes plus du tout là. D’ailleurs, j’y pense… Comment cela se fait-il que vous soyez dans ma classe ? Avec les notes que vous avez, je ne comprends pas que vous n’ayez déjà pas retriplé, continua Kilian.

Il les énervait pour les défier. C’était son but. Et cela marchait.

Tous sur lui ! s’écria Fred.

Kilian se retourna rapidement pour faire un clin d’œil à Iris, et il partit en courant comme une fusée. Le groupe se lança à sa poursuite pour l’attraper. Iris les regarda au loin en croisant les doigts pour que son meilleur ami ne se fasse pas frapper par cette bande d’idiots. Puis elle rentra dans l’immeuble. Elle ouvrit la boîte aux lettres, des pubs et deux lettres s’y trouvaient. L’une des lettres avait une enveloppe bleue. Ce n’était pas habituel, mais la jeune fille allait laisser ses parents l'ouvrir, puis elle monta rapidement les escaliers. Mme. Keys, sa vielle voisine un peu barjo cherchait ses clés avec ses quatre sacs de courses en plus de son sac à main, pas très évident.

Madame Keys ! Je vais vous aider !

Essayez si vous voulez mon enfant, mais mes clés sont introuvables.

Pourtant, Iris les trouva rapidement et s’empressa d’ouvrir la porte de l’appartement à sa voisine.

Je devrais changer mes verres de lunettes…

La jeune fille réprima un rire et prit deux des sacs de la vieille dame pour la soulager. Elle les déposa dans sa cuisine.

Que veux-tu ? Chocolat ? Thé ? demanda sa voisine.

Oh ! Ne vous tracassez pas avec cela, mes parents doivent m’attendre, j’ai dû dépasser mon record pour rentrer à la maison.

Ce n’est pas grave voyons ! Tu leur diras que tu as aidé ta vieille voisine toute rouillée à remonter ses courses. Chocolats ou thé ? Assieds-toi !

Plutôt jus d’orange.

Je m’en doutais bien ! s’esclaffa la vieille dame.

Sous ses airs de vieille dame embêtante, Mme. Keys était très gentille. Elle avait été la grand-mère qu’Iris n’avait jamais eue. Elle la gardait souvent quand elle était petite. La vieille dame lui déposa sur la table un verre de jus d’orange avant de s’asseoir.

Tu as passé l’après-midi avec tes amis.

Oui, il y avait encore le groupe de Fred. Ils sont lourds. Ils m’ont alpaguée ce matin. Ils voulaient mon déjeuner, j’ai réussi à m’en sortir toute seule. Mais ils m’attendaient pour rentrer. Ils ont fini par poursuivre Kilian qui les provoquait exprès pour que je puisse passer. J’espère qu’il va bien, j’ai essayé de l’en dissuader, mais il a continué, raconta Iris.

Ah Kilian ! C’est un brave garçon. Un bon garçon. Il mérite mieux que ce qu’il a comme famille. Garde-le précieusement, tu as la chance de l’avoir !

La vieille dame lui avait pris le bras pendant qu’elle parlait. Iris hocha la tête. Mme. Keys connaissait bien la famille de Kilian même s’il n’habitait pas ici, il venait souvent chez elle, c’était son ancienne nounou. Kilian n’avait pas une famille très facile. Il ne grandissait pas dans le pire des milieux, pourtant, il ne dévoilait pratiquement rien de sa famille. Dans le groupe, personne ne connaissait son histoire. Même pas Iris, mais elle savait que ce n’était pas facile pour lui car ses parents n’étaient pas souvent présents, sauf qu’elle ne savait pas exactement ce qu’il y avait de plus. Ils étaient quand même les meilleurs amis, et pas pour rien !

Fred a pris le mauvais côté depuis bien longtemps. C’était un garçon bien avant… Je pensais qu’il allait se rendre compte de sa bêtise, mais au contraire, il a totalement changé. J’irais voir ses parents, enfin sa mère, on ne peut plus le laisser avec cette bande d’attardés. Et j’irais voir la copropriété. Il y en a marre que ce groupe fasse la loi, ce n’est même pas leur immeuble. Nous devons remettre cela en ordre.

Mme. Keys avait parfaitement raison. Sauf que l’adolescent savait bien que c’était bien plus compliqué que cela. La bande n’en aurait rien à faire. La vieille dame lâcha le bras d’Iris. Elle paraissait soucieuse, et la surdouée l’avait très bien remarquée.

Quelque chose vous tracasse ? demanda-t-elle.

Oh ! C’est une chose sans importance ! affirma-t-elle en faisant un geste de la main pour chasser une pensée invisible.

Dites quand même, cela ne coûte rien, insista la jeune fille.

Je pensais à la rumeur.

Donc, elle aussi connaissait la rumeur… La télévision en avait parlé, c’était sûr. Iris et Kilian ne regardaient pas la télévision, c’était sûrement pour cela qu’ils n’avaient pas connaissance de la rumeur. Iris était tout de même surprise, la vieille dame n’était pas du genre à s’inquiéter pour une rumeur.

Je croyais que vous ne croyiez pas les rumeurs.

Oui, c’est vrai, admit-elle. Mais c’est différent. Tout laisse penser que ce n’est pas une simple rumeur mais peut-être la réalité.

Pourquoi ?

Tu ne regardes donc jamais la télévision ! Déjà parce que cela fait des années qu’on ne parlait plus de la guerre des clans chez nous, donc ce n’est pas normal. Aussi parce que l’on a changé de conseillers depuis quelques années et que ces derniers sont à une réunion très importante entre eux. Les conseillers font rarement des réunions importantes et médiatisées. La dernière fois que cela c’est produit, c’était il y a plus de cinquante ans ! Et s’ils en venaient vraiment à rentrer à nouveau dans la guerre, ce serait une véritable catastrophe.

Notre peuple a déjà fait cette guerre ? s’étonna Iris.

Bien sûr, très peu de personnes le savent, car cela c’est perdu au fil des années. Pourquoi nous appelons-nous le clan oublié ? Car à un moment, nos merveilleux conseillers de l’époque ont décidé de se retirer de la guerre, et c’était une très bonne initiative. Mais bon… Cela c’était, il y a quelques siècles déjà. Même les écoles ne vous enseignent pas cela, quelle honte !

Iris finit par rentrer chez elle. Ses parents étaient déjà là. Ils étaient, comme à leur habitude, affalés devant la télévision, mais ils étaient inquiets. Ils avaient eu la bonne idée de mettre la chaîne d’informations en continu. Pour se détendre, ce n’est pas vraiment la meilleure chaîne. Mais ses parents semblaient vraiment soucieux en voyant l'écran. Elle s’assit entre eux pour pouvoir regarder les nouvelles. La présentatrice parlait, le visage pratiquement neutre, mais la surdouée réussissait à interpréter une nuance de peur sur son visage. Avec le temps, elle se félicitait de réussir à déceler toutes émotions et sentiments chez une personne, même si certains détails lui échappaient encore.

Pour tous les téléspectateurs nous rejoignant, voici une édition spéciale. Leur décision a été tranchée, laissant tout le monde sous le choc. Après des siècles sans activités mondiales, les conseillers ont décidé de réintégrer notre clan. Qui dit réintégration mondiale, dit aussi réintégration dans les conflits et les guerres. Et depuis déjà quelques années, les quatre clans se livrent une guerre sans merci où tous les coups sont permis, entre trahison et alliance, tout est difficile. Nous ne savons pas encore qui seront nos alliés, mais les citoyens craignent le pire. Tout le monde recevra une enveloppe bleue, envoyée par les conseillers, seuls les adultes sont autorisés à la lire.

C’était donc cela cette étrange enveloppe bleue. Iris avait maintenant envie de savoir ce qu’elle contenait, même si elle devait mentir à ses parents. Après l’annonce de la journaliste, des images de guerres, macabres et effrayantes passèrent. Si c’était cela que devait devenir leur espace… Iris était certaine que les autres étaient dans un état encore bien pire. Mais qu’est-ce qui leur passait par la tête ? Ne voyaient-ils pas ce qu’ils faisaient ? Comment n'arrivaient-ils pas à se rendre compte de l’étendue des dégâts ? Et pourquoi tout le monde laissait faire cela sans objecter ! Iris n’arrivait pas à comprendre cela.

Iris, n’aurais-tu pas vu dans le courrier une de ces enveloppes bleues dont parle la journaliste ? demanda sa mère.

Non, mentit la jeune fille en se levant.

Ce n’est pas grave chérie, elle arrivera bientôt, déclara son père à l’égard de sa femme.

Pour Iris, cette mystérieuse lettre ne prédisait rien de bon, bien au contraire. Elle alla dans la cuisine où elle avait posé la pile de courrier. Elle extirpa la lettre bleue du tas et la cacha sous son t-shirt. Elle partit précipitamment dans sa chambre. Lorsqu’elle s’apprêta à ouvrir la lettre, sa mère l’appela pour manger. Cela énerva un peu Iris. La jeune fille prit soin de cacher l’enveloppe sous son oreiller et partit dans la cuisine. Le repas fut très silencieux. La communication n’était pas le fort de la famille. La tension était palpable. Ses parents n’étaient pas très heureux de voir leur clan revenir dans la mondialisation. Cela entraînera plein de choses. Et ce seront pour la plupart, de mauvaise chose.

Après le repas, Iris, sachant qu’elle ne les verrait pas avant de dormir puisqu’ils se couchèrent plus tôt, leur souhaita une bonne nuit avant de revenir dans sa chambre. Quand elle fut sûre que la porte était bien fermée à clé, elle prit l’enveloppe bleue, l’ouvrit et déplia la lettre. Son téléphone vibra au même moment. Elle pouvait encore attendre un peu. C’était un message de Kilian, il allait bien, il avait vu les informations, et il lui demandait le contenu de la lettre. Kilian et Iris se connaissaient tellement bien qu’il savait ce qu’elle allait faire. Iris se lança donc dans la lecture.


Cher Parents,

Vous recevrez cette lettre le jour même ou un jour après l’annonce de la décision des conseillers. Cette décision a été longuement réfléchie. Mais les nouvelles venues nous ont éclairées. Nous comprenons votre peur. Nous comprenons vos doutes et peut-être votre colère, mais ce n’est que le début. La guerre va bientôt commencer. Dheas et Kuyinto sont des alliés potentiels. L’idée d’imaginer la guerre vous fait sûrement peur. Nous ne pouvons laisser rien au hasard, il y aura sûrement des pertes considérables.

C’est pour cela, que pour le bien de notre peuple et de l’humanité. Tous les adolescents et enfants non majeurs seront dans l’obligation de quitter le peuple.

Où iront-ils ?

Nous avons fait construire des bâtiments pour vos chers enfants dans le désert. Personne ne pourra les trouver. Ils seront protégés de toutes attaques. Des adultes spécialisés les prendront en charge, leurs scolarités seront poursuivies sauf pour les cas particuliers (ce qui voudrait surtout dire une parenthèse si l’enfant en question avait commencé les hautes études). Ils seront logés, nourris et tout sera mis en place pour s’en occuper. Vous êtes sûrement réticents, vous ne voulez sûrement pas voir vos enfants partir. Mais nous sommes certains que vous ne voulez pas qu’ils meurent.

Toute personne ne voulant pas livrer son enfant sera punie pour non-respect de l’autorité.

Une lettre vous sera envoyée pour vous prévenir où et quand vous devrez emmener vos enfants, les raisons de notre entrée en guerre y seront aussi expliquées.

Vos chers conseillers.


Iris ne s’attendait pas à cela. La jeune fille resta abasourdie et sonnée. Les conseillers étaient vraiment idiots, au lieu d’investir dans des choses utiles et futées, ils jetaient l’argent du peuple par les fenêtres. Dans un mois, sa vie allait être un pur cauchemar.

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