Larmes de sang

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Ce n'est que deux ans plus tard que j'ai enfin réussi à m'évader de prison. Mes parents allaient être contents, ils allaient sauter de joie en fêtant mon retour ! J'avais vraiment hâte de les retrouver, et je ne leur en tenais plus rigueur pour ce qu'ils m'avaient fait. Je voulais bien leur pardonner cette petite erreur, car après tout, sous l'effet de la panique, on ne comprend pas la conséquence de nos actes.

Mon seul but maintenant était de les retrouver, en marchant, puis en courant ! Eux me comprendraient peut-être ? Il était alors 19 h 52 quand je cassai le carreau de ma chambre à l'aide d'une branche morte, et que je m'introduisai à l'intérieur.

J'entrebâillai alors la porte, en regardant par l'embrasure: personne dans le corridor...

Je comptais bien leur faire la surprise de mon retour. J'avançai à pas de loups, et me dirigeai vers la cuisine, en suivant la bonne odeur qui en émanait. La porte était entrouverte, et je me glissai derrière, guettant le moindre bruit...

Je sentais, par-delà l'odeur d'un bon gigot, l'odeur du cigare de marque que mon père achetait si souvent. Aucun doute, c'est lui qui préparait le repas, et ça allait être un festin ! J'en avais l'eau à la bouche !

Alors d'un coup, j'ouvris en grand la porte, la faisant claquer bruyamment pour attirer l'attention:

" SURPRISE ! m'exclamais-je alors, je suis de retour ! "

Après quelque secondes de silence à glacer le sang, mon père se retourna vers moi, tout tremblant, avec une expression de dégoût imprimée profondément sur le visage. Il avait un pistolet dans la main droite, et lentement, très lentement, il le pointa vers moi, sa bouche se déformant dans un rictus de peur et de haine extrêmes.

C'était sûrement à cause de mon vêtement de prisonnier, oui, c'est ça, il ne m'avait pas reconnu ! Il pensait que quelqu'un de mal intentionné s'était introduit chez lui par effraction ! C'est ce que j'ai d'abord cru comprendre, alors je m'écriais:

" Papa, c'est moi ! Ton fils ! Je ne vous en veux plus à maman et à toi, ce n'est pas grave, je sais que vous agissiez sous l'effet de la peur ! Allez, papa, s'il te plaît, si tu pouvais éviter de pointer une arme sur moi... "

Encore un silence... Celui-là plus long encore que le précédent. Plus effrayant... La main de mon père, toujours autour de la poignée du pistolet, tremblait encore un peu, puis d'un geste brusque, se raffermit. C'est là que je le vis, dans ses yeux, il n'aurait aucun remords, oui, il n'aurait aucun remords... Son doigt, au-dessus de la gâchette, commença à s'agiter fébrilement, puis, sans prévenir, un coup partit, en plein cœur...

J'avais tué mon père. Alors je me mis à hurler, de rage et de désespoir, de honte... Oui, ma main avait bougée toute seule, et une seconde plus tard, son arme s'était retrouvée dans ma main, et il s'était écroulé sur le parquet, sans vie...

Le bruit de la détonation avait alarmé ma mère, qui le visage en sueur apparut à l'entrée de la cuisine, horrifiée. Elle regarda mon père, étendu sur le sol, le pistolet, encore fumant, à côté de son cadavre, puis moi... Et là, son expression changea: son visage commença à se déformer, son nez à se retrousser, ses yeux exorbités, ruisselant de colère, à s'ouvrir encore un peu plus, sa bouche, à se renverser totalement, et ses dents menaçantes, à encore plus sortir. De l'écume sortait de sa bouche, et ses nerfs, ressortis à la surface de sa peau, jaillissaient, et me donnaient l'impression d'être face à un énorme chien ayant attrapé la rage. Elle se jeta sur moi, les mains autour de ma gorge, en s’égosillant:

" Espèce de sale petit monstre ! Tu es un horrible monstre, un tueur, un bourreau, un imbécile qui joue avec les vies, je ne veux plus te voir ! Meurs, meurs ! Meurs, et jamais plus ne viens m'importuner ! Je vais mettre fin à ta misérable existence, te tuer, te tuer, te tuer !!!!!!! Meurs, sale crevure, sale chien, ignoble petit monstre, sale petit con ! Meurs, et laisse-moi en paix, meurs !!! "

Ses mains se serraient de plus en plus, je commençais à suffoquer. Je la voyais enfin sous son vrai jour, ma mère ne m'avait jamais aimé, jamais... Une larme perla le long de ma joue, et mes mains, montèrent lentement, très lentement vers son cou... Je le lui tordis d'un coup sec, dans un bruit violent. Ses mains se desserrèrent peu à peu, puis retombèrent le long de ses bras, le long de son corps...

J'essuyais la sueur sur mon front, et les larmes sur mes joues, je n'avais aucun remords, oui, aucun... Le seul qui pouvait me comprendre c'était mon pinceau. J'allais le chercher dans ma chambre, et prenant en même temps mon trépied, je découvrais une nouvelle toile, qu je m'empressais de remplir de peinture. Chaque trait m'arrachait un cri du cœur, mais je continuais, encore et encore, sans m'arrêter... Quand j'eus fini, je me relevais. Je savais quel serait le titre de celui-ci: " Larmes de sang..."

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