Lèvius - 1.1

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Les voix résonnaient avec intensité dans l’assemblée impériale, elles se trouvaient portées par le dôme qui finissait cette pièce gigantesque. Lèvius assit confortablement dans son siège ouvragé avait les sens agressés par les discussions qui prenaient place. Par ces échanges agressifs que l’on pouvait qualifier aisément d’enfantins malgré l’importance des représentants de la noblesse qui les formulaient. Lèvius se frottait la tempe, luttant contre la migraine qui n’attendait qu’une faiblesse de sa part pour s’inviter à cette séance déjà bien assez compliquée comme ca.

Le Baron Devràn était entouré par les parlementaires des maisons loyales à la sienne. La pièce bondée qui occupait la fonction d’assemblée de la cité-nation adoptait une forme circulaire. Recouvert depuis son sol d’une construction travaillée laissant un puissant et tenace parfum de conifère planer dans l'air.

La structure boisée accueillait une pléthore de factions. Sur les centaines de tables qui leur faisaient face, des documents tels que des papiers de votes ou notes griffonnées envahissaient chaque surface de manière anarchique.

Pas moins de trois cents nobles impériaux se livraient bataille. Ces familles étaient celles qui se partageaient le pouvoir dans la cité nation. Leurs représentants, pour la plupart bien grisonnants, revêtaient le doux sobriquet de « sang bleu ». Un surnom née parmit le petit peuple de l’Empire.

Au moment ou deux parlementaires ne faisaient que surenchérir en noms d’oiseaux pour appuyer leurs dires douteux, Lèvius leva le regard vers le dôme où se portaient toutes les voix. De cet endroit venait le peu de lumière qui éclairait ce lieu d’affrontement.

Les épaisses vitres qui y prenaient place alternaient dans leurs teintes pour proposer de véritables fresques plus hypnotisantes les unes que les autres. Chaque carreau racontait les hauts faits des principales familles de l’assemblée. Des histoires remontant aux prémices d’Aldius et du monde connu.

Entre ces sources de lumière venaient de nombreuses bannières aux couleurs des maisonnées. Elles pendaient ci et là entre les différents lustres de la pièce. Sur une bannière un imposant ours se voyait éclairé, puis un cerf ou encore une salamandre. Ces animaux disparus, figure de l’héritage des ancêtres de la ville, toisaient silencieusement leurs maîtres d’en dessous. Qui eux, bien audibles, se livraient à leurs joutes verbales.

Le centre de la salle accueillait de nombreux greffiers attroupés autour d’une table. Il attendaient tels des limiers de chasse la moindre phrase importante de la rencontre journalière. Saisissant à la volée les mots qu’ils arrivaient à prendre dans les semblants de discours ponctués d’insultes afin de les inscrire à leurs registres. L’un deux, qui avait reposé sa plume d’encre, s’était tourné vers une partie dégagée des sièges où se trouvait le trône impérial vide secondé par celui du héraut qui lui, bien présent, frappait vigoureusement le meuble face à lui de son marteau pour faire revenir l’ordre.

La large table des greffiers était couverte de nombreuses piles de livres et documents. Les reliures des différents œuvres et registres composaient des totems aux couleurs ternes. Elles se dressaient dangereusement entre ces travailleurs appliqués. Les fonctionnaires, bien assis sur de petits tabourets, remplissaient leurs pages de leurs stylos sous le regard attentif du responsable du groupe qui opérait d’incessants aller et retour pour prendre les papiers que ses subalternes lui tendaient.

L’assemblée impériale mobilisait les éminents représentants de chaque maisonnée. Parmi la multitude d’entre elles, six s'extirpaient du lot et s’élevaient en factions non officiels de la cité nation. Certaines jouaient cavalier seul, ne se préoccupant que de leurs intérêts tandis que d’autres, formaient des alliances pour se disputer le pouvoir.

Parmi cette foule de nobles, de dignitaires et augustes citoyens. Un homme ressortait de la mêlée en adoptant le silence. Il se tenait juste en dessous de la tribune impériale occupée par le héraut et ses acolytes. Il était assis sur les places des invités. Lèvius le connaissait bien, il s’agissait du gouverneur des colonies septentrionales. Les dernières possessions fidèles du nord coupées de l’Union par une interminable ligne de front.

Il était d’un âge avancé. Habillé de l’uniforme chamarré des gradés de l’armée, il avait un visage aux traits tirés, fatigué par le travail important et prenant qu’il couvrait. Sa barbe comme en adéquation avec le personnage présentait une forme élaborée avec une éclaircie sur le menton et le cou. Son buste quant à lui était empli de nombreuses médailles et décorations qui rivalisaient en taille ou beauté.

— SILENCE ! tonna la voix d’un des acolytes du héraut impérial qui tentait d’assagir la foule présente.

Voyant le peu de résultats de son homme, l'agent du pouvoir, drapé dans ses riches habits bleus et or, prit les choses en main.

MES SEIGNEURS, MES SEIGNEURS DE L’ORDRE DANS LA SALLE ! DE L’ORDRE, JE VOUS PRIE !

À force de frapper son marteau sur les accoudoirs de son siège, il allait bien finir par le briser.

Les parlementaires qui avaient associé à leurs injures des jets de boules de papier regardaient d’un œil querelleur le héraut, grappillant par l’occasion quelques minutes d’affrontement supplémentaires.

Lèvius souriait. C’était bien à cause de ce manque d’ordre que l’empereur Ovidius n’aimait guère ces assemblées de nobles agités. Cela faisait de nombreuses années qu’il évitait soigneusement ce genre de session .

Le héraut, toujours impassible aux insultes qui fusaient, attendait le bon moment pour rappeler au calme.

Quand les bruits cessèrent peu à peu et que les parlementaires s'asseyaient à nouveau à leurs places, le silence revint et le héraut reprit la parole en se levant.

MES SEIGNEURS, comme vous le savez nous sommes aujourd’hui réunis pour adopter une décision concernant un élargissement de la conscription dans la ville basse ( il descendait à présent les marches menant au centre de la salle). La situation est grave. Nous avons perdu une nouvelle colonie à l’est et l’Union a entamé différents assauts au nord ( il s'accorda une pause dans son discours, son regard lourd balayait la noble assemblée). Si nous ne réagissons pas vite, nous risquons de nous retrouver dos aux murs avec une pénurie de ressources clefs et les rebelles à nos portes.

Cela fait presque quatre-vingts ans que ces affrontements futiles se déroulent, pourquoi aurions-nous peur de sujets déloyaux qui n’y connaissent rien à la guerre, fit l’un des parlementaires qui avait bondi hors de son siège.

Fumiers, lâches, lancèrent certains tandis que d’autres applaudirent les mots énoncés.

Lèvius, calme comme à son habitude, attendait à l’affût le bon moment pour entrer à son tour dans la danse. Le noble qui avait avancé ces faits n’était pas dans le faux. Si l’Union perdurait, c’était uniquement imputable à leurs prédécesseurs qui n’avaient pas pris la menace au sérieux et avaient laissé les choses dégêner à un point critique. À présent, le simple soulèvement colonial qui avait embrasé tout le nord s’était mû en un état autonome et belliqueux. Une alliance des dominions ayant juré la perte de la cité nation.

La guerre avec cette dernière demandait une dîme bien chère en ressources et vies humaines. Lèvius le savait bien. Après tout, c’était un de ses fils qui allait partir au front. Les choses étaient personnelles pour lui.

L’orateur précédent avait peut-être raison sur certains points, mais plus encore, les disparitions de colonie à l’est venaient souffler sur un brasier déjà à vif et c’est cela qui préoccupait le Baron. La cité-nation était un organisme bien unique. Une entité demandant toujours plus de ressources alors qu’au contraire, les dominions en fournissaient souvent moins. La situation revêtait une tournure à la foi dangereuse et ironique.

Tandis que le parlementaire qui avait parlé se rasseyait, Lèvius fit le contraire pour prendre la parole.

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